Auto-confrontation et amorce du développement professionnel de l’enseignant débutant

Auteur(s) :
Beckers, Jacqueline (Université de Liège)
Leroy, Charlène (Université de Liège)

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Mots clés :

professionnalisation
tants
autoconfrontation
prenseignants débuéoccupations
réflexivité
Atelier(s) :

5A
Thèmes :

Axe 3 : Les dimensions professionnalisantes du travail enseignant
Public : lycée professionnel et lycée
Public : formation adultes
Démarche : enquête, étude qualitative
Démarche : étude de cas, approche clinique

Résumé :

En Communauté française de Belgique, seuls les enseignants du secondaire supérieur (élèves de 15 à 18 ans) sont formés à l’université qui leur assure une formation scientifique dans une discipline donnée et une formation professionnalisante d’enseignant leur conférant le titre d’« agrégé de l’enseignement secondaire supérieur (AESS)». Cette dernière formation comporte 30 ECTS incluant des observations et 40 h de stage en responsabilité dans des classes sous la supervision du titulaire fonctionnant comme « maître de stage ». C’est le décret du 8 février 2001 (Moniteur Belge du 22 février 2001) qui prescrit l’organisation de cette formation conduisant à l’AESS ; il met en avant comme objectifs de la formation d’amener chaque étudiant à se construire une identité professionnelle positive et à développer treize compétences professionnelles dont la treizième souligne l’importance d’être capable de « porter un regard réflexif sur sa pratique […] ».

La recherche décrite s’inscrit au sein d’un projet interuniversitaire FNRS entre les institutions de l’Université de Mons, des Facultés Notre-Dame de la Paix de Namur et l’Université de Liège en Belgique. Le projet se centre sur la détermination d'indicateurs d'efficacité et l'évaluation de dispositifs de formation permettant le développement de compétences et de l'identité professionnels auprès de futurs agrégés de l'enseignement secondaire supérieur.

Les résultats qui seront décrits portent sur des données récoltées à l’Université de Liège sur l’évolution des compétences professionnelles et l’amorce de la construction identitaire de futurs agrégés du secondaire supérieur en psychologie et sciences de l’éducation. Ceux-ci sont amenés à enseigner dans les sections « sciences humaines » de l’enseignement général mais aussi dans l’enseignement qualifiant technique et professionnel du secteur « service aux personnes » préparant à des métiers où l’interaction humaine avec des publics souvent fragiles ou fragilisés est essentielle. Les élèves de ces sections, susceptibles d’exercer un métier dont la responsabilité sociale est grande, ne s’y retrouvent pas toujours par choix de ce métier mais assez souvent par un processus de relégations successives liées à des difficultés et échecs scolaires ce qui complexifie grandement la tâche de leurs enseignants/formateurs et également de nos futurs agrégés lors des stages. C’est sur ce terrain professionnel que les futurs enseignants (FE) ont le plus de chance de trouver un emploi intéressant (nombre d’heures et responsabilité élevés dans la formation professionnalisante de ces élèves).

La préparation à un métier difficile dans les conditions peu favorables en temps et en moyens rapidement évoquée ci-dessus a incité les formateurs à articuler étroitement la formation didactique aux stages et à se centrer sur les activités telles qu’elles sont vécues par les FE.

Dans cette perspective des entretiens avec les FE en suivi de stage aident, au sein du dispositif de formation du cours de Didactique Spéciale, à identifier les contenus et démarches de formation efficientes mais également à permettre FE d’analyser leur propre activité et de développer une posture réflexive. En somme, par l’articulation de ces objectifs de recherche et de formation, ce dispositif s’inscrit dans une démarche de Didactique Professionnelle (Pastré, 2002).

Ainsi, depuis l’année académique 2009-2010, les FE sont filmés à l’occasion de chacun de leurs trois stages par un chercheur qui ne fait pas partie de l’équipe de formation et ne participe nullement à l’évaluation certificative des FE. Celui-ci les accompagne individuellement, le plus rapidement possible après la leçon filmée, dans une démarche d’autoconfrontation (Theureau, 2000) inspirée des principes de la supervision réflexive (Schön, 1988) et enrichie des apports de Vermersch (1994, 2004) et de Clot (Clot et al. 2001 ; Amigues, Faïta, & Saujat, 2004 ; Faïta et Vieira, 2003). Les résultats proposés dans cet article sont le fruit de la première année d’une recherche étalée sur trois ans. Cette première année exploratoire s’est centrée sur des préoccupations essentiellement méthodologiques tant dans une perspective de recherche que de formation. Globalement, sur la base de la littérature, un type d’entretien d’autoconfrontation qui accompagne les FE au fil de leur stage ainsi qu’un outil permettant d’analyser ces entretiens a été créé. En outre, une série d’hypothèses concernant les préoccupations des FE dans l’action ont pu être formulées. Rappelons, que l’enjeu des entretiens d’autoconfrontation n’est pas d’offrir à un futur enseignant (FE) un « diagnostic d’expert éclairé par des résultats de recherches processus-produit […] » sur ses difficultés (Beckers, 2007, p.235). Au contraire, il s’agit de l’accompagner au cours de ses premières expériences professionnelles, dans le développement d’une posture réflexive lui permettant de se créer des concepts pragmatiques ajustés à son développement. Pour cela, on l’accompagne pour tenter de « comprendre et établir une distance avec la situation vécue en cherchant à étendre le savoir à d’autres situation et en prenant aussi du recul par rapport à son fonctionnement dans la situation » (Donnay et Charlier 2006, p.62 cité par Beckers, 2007, p.127).

Dans la communication, les hypothèses suivantes seront développées :

Les occasions de réflexion en situation d’entretien d’autoconfrontation permettent au FE :
(1) d’entrer dans une démarche d’explicitation de sa pensée dans l’action
(2) de se laisser surprendre par sa propre action et de l’analyser en vue de réguler ses actions futures (l’entretien est une nouvelle expérience qui génère également des apprentissages)

(1) et (2) impliquent d’accompagner le FE. Ainsi, l’observable mis à disposition du FE sert à alimenter une réflexion partagée (entre un FE et un chercheur) visant : (a) la description de l’action, (b) la description de la pensée dans l’action, (c) la description des informations perçues grâce à la vidéo qui n’avaient pas été identifiées dans l’action (c) l’analyse de l’activité (l’action et la pensée dans l’action) ainsi mise-à-jour, et (d) la recherche d’alternatives à sa propre activité.

(3) Si (1) et (2) sont confirmées alors la méthodologie d’autoconfrontation permet au FE de mettre à jour des configurations de préoccupations qu’il éprouve dans l’action et pendant l’analyse de l’action en tant qu’enseignant débutant.

(4) Si (1) et (2) sont confirmées alors la réflexion partagée entre un FE et un chercheur ou formateur en situation d’autoconfrontation contribue au développement de concepts pragmatiques intégrés par le FE.