Analyser le travail des professeurs de collège à partir des « traces écrites » réalisées en classe

Auteur(s) :
PHILIPPOT, THIERRY (Université Reims Champagne Ardenne IUFM)
NICLOT, DANIEL (Université Reims Champagne Ardenne IUFM)
PROMONET, AURORE (Université Reims Champagne Ardenne IUFM)

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Mots clés :

didactique des disciplines
trace écrite
travail enseignant
didactique professionnelle
Atelier(s) :

2C
Thèmes :

Axe 1 : Le travail enseignant au quotidien
Public : collège
Démarche : enquête, étude qualitative

Résumé :

Aujourd’hui de multiples prescriptions pèsent sur le travail quotidien des enseignants. Ces derniers doivent donc répondre à des exigences toujours plus nombreuses. Ainsi, dans le cadre collectif de la classe, ils doivent développer les apprentissages des élèves et leur autonomie, individualiser leur enseignement et prendre en compte les aptitudes et la diversité culturelle des publics. Ils doivent aussi se former tout au long de leur vie, savoir innover, maîtriser les technologies de l’information et de la communication
Dans ce contexte, la communication proposée présentera les premiers résultats d’une recherche en cours dont l’objectif est de comprendre la nature du travail des enseignants disciplinaires (français, SVT, histoire-géographie) de collège à partir de l’analyse de « traces écrites » réalisées en classe. Ces « traces écrites » multiformes qui subsistent dans les cahiers (ou classeurs) des élèves, sont réalisées à différents moments de la séance à l’initiative de l’enseignant.
Dans des disciplines comme le français, les S.V.T et l’histoire-géographie, la réalisation de la trace écrite à une grande importance, pour les enseignants de collège, aussi bien par le temps consacré à sa réalisation que par les fonctions qui lui sont attribuées (symbolique et sociale, d’apprentissage, élément permettant le contrôle social …). Au regard de cette importance, on peut considérer que la conception et l’élaboration en classe de la « trace écrite », renvoient à une « situation dynamique et complexe », à « un moment de classe » (Vinatier, 2009, p. 28) que l’enseignant doit maîtriser. La « trace écrite », peut constituer une « classe de situations » (Mayen, 2008) qui suscite chez ce dernier la genèse de concepts pragmatiques (Pastré, Mayen & Vergnaud G, 2006).

Pour des enseignants « ordinaires », de français, de S.V.T et d’histoire-géographie, nous essayions de comprendre, comment se combinent dans l’activité professionnelle des enseignants du secondaire les référents épistémologiques et didactiques, le rapport au savoir et l’activité des élèves mais aussi les dimensions épistémiques et pragmatiques. Pour cette « classe de situations », nous cherchons à identifier les concepts pragmatiques que construisent des enseignants dans différentes disciplines.

Notre hypothèse est que du fait de sa nature scripturale, la « trace écrite » est une mémoire et que son analyse permettrait d’appréhender l’activité enseignante. D’une part, en accédant aux multiples fonctions et destinataires pour lesquels elle a été élaborée. D’autre part, par la mise en évidence des tensions qui se nouent, des compromis auxquels les enseignants doivent se résoudre pour que leur activité soit « acceptable » à leurs yeux et aussi à ceux des autres : élèves, collègues, parents, et Institution. Ainsi le recueil et l’analyse de traces écrite pourrait constituer une « entrée » pertinente pour comprendre l’activité professionnelle a posteriori et constituer une alternative à l’analyse in situ.

A partir d’un cadre de référence qui mobilise les apports des didactiques des trois disciplines, de la didactique professionnelle et de la clinique de l’activité, nous analysons un corpus constituer, des dernières générations de programmes en français, en SVT et en histoire-géographie ; d’un recueil des conceptions qu’ont des enseignants (123 enseignants) de la trace écrite et d’un recueil de 35 « traces écrites » dans les trois disciplines. Pour analyser les trois corpus des grilles ont été élaborées en relation avec nos cadres de référence. Nous procédons à une double analyse de contenu : une analyse globale, qui vise à dégager ce qui est commun et spécifique aux trois disciplines, puis une analyse à l’intérieur de chaque champ disciplinaire.
Les premiers résultats de ces analyses font apparaître une présence très variable des prescriptions relatives à la « trace écrite » à la fois d’une génération de programme à l’autre et aussi d’une discipline à l’autre. On peut également ajouter le caractère souvent très général de ces dernières. De telles prescriptions renvoient à la nature « discrétionnaire » (Pastré, 2007, p. 87) du travail enseignant. Alors que les enseignants accordent à la « trace écrite » une grande importance, notamment parce qu’elle doit permettre aux élèves de mémoriser la « leçon » et qu’ils disent consacrer beaucoup de temps à sa réalisation, on peut penser que c’est par l’expérience professionnelle, par les échanges entre pairs, voire dans les préconisations des corps d’inspection qu’ils trouvent les ressources pour maîtriser cette « classe de situations ». On constate par ailleurs que la majorité des propos tenus par les enseignants sur la « trace écrite » se situe sur le plan pragmatique, la dimension épistémique étant de fait très peu présente.

Eléments bibliographiques :
Mayen, P. (2008). Intégrer les savoirs à l’action. Dans Perrenoud, P., Altet, M., Lessard, C.& Paquay, L., (dir.) Conflits de savoirs en formation des enseignants. Entre savoirs issus de la recherche et savoirs issus de l’expérience. Bruxelles : De Boeck, pp. 43-58.
Pastré, P. (2007). Quelques réflexions sur l’organisation de l’activité enseignante. Recherche et Formation, N° 56, pp.81-93
Pastré, P., Mayen P., Vergnaud G ; (2006). La didactique professionnelle. Revue Française de Pédagogie, 154, 145-198.
Vinatier, I. (2009). Pour une didactique professionnelle de l’enseignement. Presses Universitaires de Rennes.