Professionnalisation et travail enseignant : comment la recherche-action collaborative peut favoriser l’interprétation partagée du sens des pratiques enseignantes

Auteur(s) :
Maria Amelia Santoro, FRANCO (Université Catholique de Santos)
Selma Garrido, PIMENTA (Université de São Paulo)

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Mots clés :

recherche-action
interprétation partagée
travail enseignant
Atelier(s) :

4B
Thèmes :

Axe 3 : Les dimensions professionnalisantes du travail enseignant
Public : formation adultes
Démarche : recherche-action

Résumé :

Professionnalisation et travail enseignant : comment la recherche-action collaborative peut favoriser l’interprétation partagée du sens des pratiques enseignantes


Tout au long de nos interventions régulières auprès du collectif des enseignants, nous nous sommes rendu compte que la construction de cultures collaboratives de recherche dans le cadre des écoles peut signifier une importante évolution en ce qui concerne les processus formatifs d’enseignants de l’Éducation Fondamentale. Nous l’avons déjà affirmé dans d’autres investigations, (XXXX, 2005 e XXXX 2008)la recherche est un instrument pédagogique qui déclenche de nouveaux rapports du sujet avec le savoir. Ce n’est pas toujours, cependant, que le sujet (le praticien) est en mesure de s’engager dans des processus de recherche, n’ayant pas fait l’expérience des pratiques qui auraient pu le former à l’exercice de l’investigation. Parce qu’elle suppose l’engagement réciproque des chercheurs et des sujets de la pratique, la recherche-action peut ambitionner d’attirer la participation de beaucoup de praticiens qui, de leur propre initiative, ne s’y mettraient pas.
Dans cette investigation nous avons réalisé l’analyse critique des différents processus de recherche-action que nous avons entrepris auprès des enseignants, dans le but de comprendre de façon partagé le sens que ces enseignants attribuent à leur travail et, dans certains cas, de collaborer aux processus collectifs de transformation de ce travail.
La grande question qui anime cet article est de savoir comment les processus collaboratifs de la recherche-action suscitent la construction de sens partagés sur le travail enseignant. Pour cela, nous exposerons ici les perspectives d’investigation qui nous guident, et qui se fondent sur quelques variations de la recherche-action tendant vers des approches collaboratives. Nous sommes convaincues que de tels processus de recherche peuvent créer de véritables communautés d’apprentissage qui sont, d’après Cunha (2010), la plus authentique expression de la recherche collaborative.
Selon Ghedin (2002), ce qu’on fait n’est pas explicable par la manière dont on le fait ; ce qu’on fait acquiert du sens face aux significations qui lui sont attribuées. «Ces significations ne sont pas latentes, mais elles émanent, en fait, des sens que nous construisons ». Parler de processus de recherche-action c’est parler d’un processus qui doit produire des transformations de sens, nous permettant de resignifier ce que nous faisons ou pensons. La transformation du sens implique la reconstruction du sujet lui-même et nous faisons encore une fois appel à Ghedin pour expliciter « la connaissance d’une chose est aussi, en même temps, une auto-connaissance ». (2002, p. 141)
Nous centrerons notre analyse sur le processus intégrateur de recherche, de réflexion et d’action, qui s’organise par l’exercice des spirales cycliques. Nous observons que l’expérience et l’exercice continuel des spirales cycliques fonctionne comme un espace où l’intégration chercheur-groupe s’approfondit petit à petit ; cet exercice fonctionne également comme un espace de temps pour que la connaissance interpersonnelle s’élargisse, en favorisant l’appréhension cognitive et émotionnelle des nouvelles situations vécues par le groupe dans son ensemble – les praticiens et les chercheurs.
Nous essayerons de montrer que les spirales cycliques fonctionnent essentiellement aussi bien comme un instrument de réflexion/évaluation des étapes du processus que comme un instrument d’auto-formation et de formation collective, mais également et surtout comme une pépinière qui mûrit et redouble les perceptions individuelles et collectives, particulièrement sous leur aspect affectif-émotionnel.
Nous soulignerons également qu’un processus de recherche-action exige du temps, parce qu’il ne se concrétise que peu à peu. Il faut du temps pour construire l’intimité ; du temps pour construire un univers cognitif plus familier ; du temps pour que des barrières et des résistances soient transformées ; du temps pour l’intelligence des nouveaux faits et des valeurs qui émergent des situations de l’exercice constant du nouveau ; du temps pour la reconsidération des rôles professionnels ; du temps pour l’élaboration des ruptures qui se émergent, du temps pour l’imprévu, du temps pour le recommencement...
La recherche-action a pour présupposé que les sujets qui y sont impliqués composent un groupe ayant des objectifs et des cibles communs, s’intéressant à un problème spécifique qui apparaît dans un contexte particulier dans lequel ils jouent des rôles différents, en tant que chercheurs universitaires et chercheurs enseignants.
Après la négociation du problème sur lequel l’investigation doit se centrer, le rôle du chercheur universitaire consiste à aider le groupe à le mettre en question, en le situant dans un contexte théorique plus large, ce qui permettra l’ampliation de la conscience des sujets concernés, dans le but de planifier les formes de transformation des actions des sujets et des pratiques institutionnelles . D’autre part la recherche collaborative a l’objectif de créer dans les écoles une culture d’analyse des pratiques qui y sont mises en oeuvre, afin de permettre que les enseignants, appuyés par les professeurs universitaires, transforment leurs actions et les pratiques institutionnelles.
Nous considérons que la recherche-action collaborative peut accroître la dimension critique du travail enseignant, dans le cadre de la perspective proposée par Vieira Pinto : « la recherche critique éduque le chercheur pour qu’il puisse voir son travail comme une partie du travail social... (Vieira Pinto : 1979, p. 315). Éduquer le professeur est, d’une certaine manière, chercher le sens social du travail qu’il exerce.
Nous constatons que les principes de la recherche-action, dans sa dimension collaborative, offrent une nouvelle perspective à la recherche en éducation. Celle-ci se révèle un puissant instrument d’inclusion culturelle, parce qu’elle permet aux enseignants de devenir des chercheurs de leur propre pratique, condition nécessaire de leur autonomie professionnelle.
Il est également fondamental de souligner que ces résultats peuvent devenir autant de paramètres pour fertiliser des propositions de transformations des politiques publiques, particulièrement en ce qui concerne les formes de gestion des systèmes d’enseignement, dans le sens de valoriser et d’appuyer des initiatives et des projets issus des écoles. Il faut créer les conditions structurelles pour que les écoles deviennent des espaces d’analyse et des projets politiques et pédagogiques, sur la base d’un objectif commun : la démocratisation effective aussi bien qualitative que quantitative de l’éducation, en vue d’une école que soit, en fait, inclusive. Inclusive sous tous les angles : culturel, social, politique, économique, scientifique et technologique.
Mots Clés : recherche-action ; travail enseignante ; interprétation partagée