Sur la question de l'apprentissage, à la suite de Vygotsky et Wallon, les chercheurs mettent actuellement l'accent sur l'impossibilité de séparer cognitif et affectif. Ils prennent ainsi position contre l'attitude théorique cherchant à isoler les facultés cognitives et à décrire des processus cognitifs sans prendre en compte la totalité du sujet, sa corporéité, ses émotions, ses passions.
  À partir de cette perspective, notre réflexion porte sur les capacités que l'école vise à développer chez l'élève et à partir desquelles il est évalué dans le système scolaire.
  Le travail de J-P Vernant nous rappelle qu'à côté de la raison qui démontre et argumente, il existe ce qu'il nomme la "métis" (la ruse) ensemble d'habiletés que le sujet met en œuvre dans les différentes circonstances de sa vie. Du point de vue de l'apprentissage en milieu scolaire, la diversité des types de raison rend problématique le seul enseignement de modèles, de schémas dans la mesure où les conditions de leurs mises en œuvre par le sujet n'est pas suffisamment prise en compte et dans la mesure où ils sont trop monologiques.
  Notre travail est mené à partir d'un corpus constitué de productions langagières orales et écrites recueillies à l'école élémentaire et concerne des situations contraintes : reformulation de consignes (sciences et techniques) en CP, re-formulation de récit. Nous croisons une analyse de type linguistique et une approche didactique à partir du concept bakhtinien de reprise-modification et du concept d'activité élaboré par Léontiev. Nous montrons que dans ces différents cas, l'élève utilise des habilités qui ne relèvent pas du directement enseignable ou modélisable. Pour autant, elles sont indissociables de la raison privilégiée par l'école et la modifient. Dans ces conditions, aider un enfant un milieu scolaire c'est travailler dans la ZPD dans laquelle sont liés intellect et affect, c'est également travailler les différentes formes de raison, les différentes habiletés déployées par le sujet apprenant.