Freud ne fait référence à l'éducation que lors des remaniements de sa théorie psychanalytique. L'altération substantielle du modèle pulsionnel (1920) permet de penser le caractère irréductible du malaise dans la civilisation, réfutant ainsi toute illusion d'harmonie socio-spirituelle, fruit de mesures " éducatives ". Dans le futur d'une illusion, après avoir abandonné toute idée de prophylaxie des névroses, Freud table sur une éducation pour la réalité, capable d'éviter que l'homme soit un éternel enfant et, donc, aux antipodes de toute prétention pédagogique religieuse. Dans sa Sixième Conférence, il oppose de nouveau à l'éducation religieuse de son époque une éducation issue de l'" application " de la psychanalyse. Il ajoute que celle-ci doit transformer l'enfant en un " homme sain et efficace ". De là à conclure, de forme syllogistique, que les idées freudiennes se réduisent à promouvoir une éducation pour la réalité apte à faire d'un enfant un homme sain et efficace, il n'y a qu'un pas, qui ne se franchit toutefois pas si facilement. 1) Nous montrerons que l'éducation pour la réalité est une éducation "à sec" - c'est-à-dire, libre d'illusions au service du refoulement aussi bien que de la forclusion du désir ; 2) Nous observerons que le flou de cette expression freudienne - le manque de paramètres qui la définisse de manière positive ou pédagogique - se doit à ce que l'effet en cause est justement le désir ; 3) Nous soutiendrons que la possibilité du désir, en tant qu'effet éducatif contraire à toute prophylaxie psychopédagogique, est solidaire du type d'engagement subjectif de l'adulte dans l'acte éducatif ; 4) Nous proposerons que cet engagement éducatif relève de la position de l'adulte face à la castration. 5) Nous conclurons que l'éducation pour la réalité est possible et proportionnelle à la renonce des adultes aux illusions psychopédagogiques.