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Tasse (Le)

On trouve, au tome VII des oeuvres complètes du Tasse (pages 365-400), édition de Venise, 1737, un traité en forme de dialogue intitulé Il Padré di famiglia, « Le Père de famille », adressé à Scipion Gonzague. Le poète de la Jérusalem délivrée a donc droit de figurer parmi les auteurs qui ont écrit sur l'éducation, à côté de ses contemporains Montaigne, Marnix de Sainte-Aldegonde, Scévole de Sainte-Marthe, etc.

« Il Padre. di famiglia, dit F. Guizot, traite de l'éducation d'un père de famille plutôt que de celle de ses enfants. Un gentilhomme des environs de Verceil, chez lequel l'auteur s'est arrêté en passant dans les Etats du duc de Savoie, l'a reçu avec une hospitalité franche et amicale. Le Tasse a été frappé de l'ordre et de l'abondance simples d'une maison qui ne présente pas les apparences de la richesse. L'air de dignité du maître a excité son respect. La mère de famille, craignant de gêner l'étranger, n'a paru au repas que sur l'invitation de son mari ; elle s'est retirée ; ses deux fils, âgés l'un de dix-huit ans, l'autre de seize, après l'avoir reconduite dans son appartement, sont venus rejoindre leur père ; et lorsque, sur la demande de l'étranger, ils ont reçu l'ordre ou la permission de s'asseoir, le père commence à entretenir son hôte des devoirs du père de famille et des instructions qu'il a reçues lui-même de son père, quand, peu d'années avant de mourir, ce sage vieillard lui a remis, comme à l'aîné de ses fils, le gouvernement de sa maison. » Le dialogue ainsi engagé entre le Tasse et le gentilhomme son hôte, les deux interlocuteurs parlent successivement du mariage, des devoirs du père de famille envers son épouse, ses enfants, ses domestiques, de la façon dont le père doit gouverner sa maison, des devoirs des deux époux l'un envers l'autre.

Les préceptes que donne le Tasse relativement à l'éducation des enfants n'ont rien de bien original : ce sont les lieux communs de la pédagogie, exposés dans un langage élégant et noble. La mère doit allaiter elle-même ses enfants, à moins de maladie : « car celle qui refuse de nourrir ses enfants me paraît, en quelque façon, refuser d'être mère ; d'autant plus que, dans le premier âge, si tendre et si délicat, l'enfant, d'habitude, suce avec le lait les habitudes de sa nourrice ». On doit éviter d'amollir les enfants, sans toutefois tomber dans l'excès contraire ; il faut tenir un juste milieu entre la « férocité lacédémonienne » et la « mollesse phrygienne ». On les élèvera dans la crainte de Dieu, dans l'obéissance à leurs parents ; on les formera avec un soin égal aux exercices du corps et à ceux de l'esprit, de manière à les rendre « bons citoyens de leur ville, bons serviteurs de leur prince, qu'il les emploie aux négociations, aux lettres ou à la guerre ».