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Sulzer

 Jean-Georges Sulzer, né à Winterthour (Suisse) en 1720, occupe une place distinguée dans la littérature allemande du dix-huitième siècle. Après avoir étudié la théologie à Zurich, il fut précepteur pendant un an et demi dans une maison particulière, puis vicaire à Maschvvanden. En 1743, il se rendit à Magdebourg, pour y remplir de nouveau l'emploi de précepteur, et en 1747 fut nommé professeur de mathématiques au gymnase de Joachimsthal à Berlin, dont il devint plus tard le recteur. C'est à Berlin qu'il passa la seconde moitié de sa vie, jusqu'à sa mort arrivée en 1779 ; Frédéric Il le nomma membre de l'Académie des sciences, et professeur de philosophie à l'Académie de la noblesse. Le remarquable traité d'esthétique qu'il publia en 1772 sous le titre de Théorie générale des beaux-arts (Allegemeine Théorie der schönen Künste) lui valut une juste célébrité, et plaça son nom à côté de ceux de Lessing et de Winckelmann.

Mais Sulzer appartient aussi à la pédagogie. Il est le premier qui ait formulé en langue allemande une théorie de l'éducation inspirée par la philosophie du dix-huitième siècle. Il se montre, sur ce terrain, le disciple de Locke et le précurseur de Rousseau. Il n'avait encore que vingt-cinq ans lorsqu'il fit paraître le livre où sa doctrine pédagogique est exposée: ce livre, intitulé Essai de quelques idées raisonnables sur l'éducation et l'instruction des enfants (Versuch einiger vernünftiger Gedanken von der Auferziehung und Unterweisung der Kinder), fut publié à Magdebourg en 1745 ; une seconde édition parut en 1748. L'ouvrage est divisé en deux parties. Dans la première, l'auteur ? après avoir défini en ces termes le but de l'éducation . < faire des enfants des hommes raisonnables, vertueux et moraux » ? traite de l'éducation de l'intelligence ; il passe en revue les divers ordres de connaissances, et indique la méthode à suivre pour l'enseignement de chacune d'elles. La seconde partie est consacrée à l'éducation de la volonté ; l'auteur admet que chez l'enfant les bonnes inclinations l'emportent en général sur les mauvaises ; « un enfant qui serait élevé par la seule nature et que les hommes n'auraient pas gâté serait déjà passablement bon » ; c'est à une éducation raisonnable de fortifier les dispositions naturelles vers le bien, et de corriger les défauts que l'enfant peut apporter en naissant. Après avoir parlé des récompenses et des punitions, Sulzer suit l'éducation morale de l'enfant dans les phases successives de son développement, de un à trois ans, de quatre à six ans, de sept à dix ans, de onze à quatorze ans, et enfin au delà de quinze ans. Ou trouve une analyse détaillée de ce livre au tome Ier de la Geschichte der schweizerischen Volksschule, article Sulzer ; nous y renvoyons ceux de nos lecteurs qui désireraient de plus amples détails sur son contenu ; l'auteur de l'article, le professeur zuricois Otto Hunziker, termine son appréciation de l'ouvrage de Sulzer par cette remarque : « On ne sait vraiment ce qui doit le plus étonner : qu'un semblable traité d'éducation ait pu être écrit avant l'apparition de l'Emile ; ou qu'un livre pareil soit l'oeuvre d'un jeune homme de vingt-cinq ans ; ou encore que de tous les historiens de la pédagogie, à commencer par Niemeyer, pas un seul n'ait paru se douter de l'existence de cet ouvrage ».