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Salle de classe

 La salle de classe est la partie de l'école réservée aux exercices scolaires. A proprement parler, on peut dire qu'elle est l'école même. C'est là en effet que les enfants commencent à vivre de la vie intellectuelle et morale, qu'ils puisent leurs premières connaissances, qu'ils reçoivent leurs premières impressions, qu'ils prennent ces habitudes d'ordre, de respect, de travail réfléchi, auxquelles l'école est particulièrement chargée de les former. C'est là aussi qu'ils séjournent le plus longtemps, forcément astreints à un silence, à une immobilité, à des attitudes, à une contention d'esprit qui sont peu d'accord avec leur nature et qui, si l'on n'y prenait garde, compromettraient, bien loin de le favoriser, leur développement physique. A tous ces titres, la salle de classe mérite d'attirer l'attention des pédagogues ; du reste, on s'est préoccupé de bonne heure des conditions qu'elle doit remplir. Nous lisons dans l'Instruction méthodique pour l'école paroissiale, publiée en 1685 par I. D. B., prêtre, qui résume toutes les traditions du temps sur la tenue des écoles, les prescriptions suivantes :

« La chambre ou salle où se fera l'école doit être grande et spacieuse, à proportion des enfants que l'on y doit recevoir, comme par exemple il faut une chambre de vingt-six pieds en longueur, dix-sept à dix-huit pieds de largeur, et douze de hauteur pour cent enfants, de peur que les chaleurs ne causent quelque puanteur, et ensuite une maladie, et pour le maître et pour les enfants, notamment dans Paris, où l'air est fort grossier ; et ainsi sur cette mesure on peut régler le reste à proportion. Elle doit être bien percée de fenêtres à vitres, ou au moins à châssis à papier bien clairs. Et s'il était possible qu'elle lut percée des trois côtés, et même de quatre, ce serait le mieux, car en été que le temps est chaud, on ne peut avoir trop d'air pour évaporer toutes les mauvaises odeurs des enfants. Il y aura dans l'école une cheminée large et spacieuse de douze pieds au moins, et s'il se peut faire sans jambages, afin que plusieurs se puissent chauffer à la fois également ; les uns après les autres, étant assis sur un banc fait en demi-cercle qui puisse tenir dix ou douze écoliers ; un pied pour chacun suffit : ce banc doit être de la hauteur de quatorze pouces, pour la commodité des plus petits. »

Après être restée longtemps stationnaire, la question des salles de classe fut reprise à l'apparition des écoles mutuelles, quand il fallut trouver pour l'installation de ces écoles des « localités » convenables. On donna le moins de place possible aux maigres et grêles corps de menuiserie qui formaient les tables et les bancs. Mais on dut en réserver à l'extrémité de la salle, pour l'immense estrade dont plus d'un type a survécu longtemps, et, sur le pourtour, pour l'établissement des cercles ainsi que pour la circulation. L'idéal fut un vaste parallélogramme de dimensions variant suivant le nombre des élèves. L'exposition du levant était recommandée. Dans une salle d'une vingtaine de mètres de longueur, le plafond devait être élevé de cinq ou six mètres « pour qu'elle pût contenir la masse d'air nécessaire à la respiration des élèves ». Les croisées, situées sur les deux plus grands côtés parallèles, devaient être grandes, percées à deux mètres du sol : « par ce moyen les élèves n'étaient jamais distraits par ce qui se passait au dehors, et l'on pouvait facilement suspendre le long des murs tous les objets propres à l'enseignement ». Les croisées à bascule étaient préférées comme étant d'un maniement plus facile et comme permettant de renouveler l'air sans craindre ni la pluie ni la neige. On tolérait que le jour vînt d'en haut, bien qu'on reconnût que si les tables étaient alors bien éclairées, la chaleur devenait intolérable en été et que l'hiver la neige causait de l'obscurité. Le plancher devait être formé d'une couche de salpêtre, ou de carreaux de brique, ou de planches, ces dernières étant préférables, attendu qu'elles étaient plus saines, qu'elles ne donnaient point de poussière et n'exigeaient jamais de réparations. Seulement, il fallait avoir soin, pour éviter le bruit, de remplir de mâchefer l'intervalle qui existait entre les lambourdes. La porte de la classe devait être située près de l'estrade du maître, afin qu'il pût, sans se déplacer, faire observer l'ordre à l'entrée et à la sortie des élèves, et encore pour que les parents n'eussent pas à traverser toute la salle pour arriver à lui. Pour un effectif de 174 élèves, on se contentait d'une surface ayant 56 mètres de pourtour, 18 mètres de longueur et 10 mètres de largeur. C'était, comme on voit, à peu près un mètre carré attribué à chaque enfant (à, Londres, cet espace était réduit à 76 décimètres). Aux tables, on réservait 43 centimètres à chaque élève dans les grandes classes, et 39 dans les petites.

Dans les écoles simultanées, pour savoir ce qu'une classe pouvait contenir d'élèves, on calculait combien la surface totale comprenait de fois 60 décimètres carrés. Ainsi, une salle de 8 mètres de longueur sur 6 de largeur pouvait recevoir 80 enfants. On pensait qu'un élève était assis commodément et n'était point gêné s'il occupait aux tables une largeur de 40 centimètres, et que c'était même assez de 35 pour les élèves des premiers bancs.

Ces données sur les conditions que devaient présenter les salles de classe ne remontent pas au delà de la Restauration ou du gouvernement de Juillet. Encore ne les trouve-t-on que dans les manuels du temps (manuels de MM. Sarazin, Lamotte et Lorain, Péclet, Bouillon, etc.). Elles résultaient d'études et d'observations privées ; elles n'avaient rien d'officiel ni d'obligatoire pour les communes et les architectes. L'ordonnance de 1816 est muette sur les maisons d'école. La loi de 1833 dispose seulement qu'il sera fourni à tout instituteur communal « un local convenablement disposé, tant pour lui servir d'habitation que pour recevoir les élèves ». La loi de 1850 reste à peu près dans les mêmes termes : « Toute commune doit fournir à l'instituteur un local convenable, tant pour son habitation que pour la tenue de l'école ».Mais que fallait-il entendre par ce local convenable pour la tenue de l'école, c'est-à-dire par une salle de classe convenable ? Les instructions postérieures demeurent à cet égard dans le vague et dans les généralités:

« Le préfet devra interdire tout local d'école qui ne conviendra pas à l'usage auquel il est destiné. Ainsi les enfants ne seront plus exposés à demeurer entassés dans des pièces basses, humides, mal aérées et dans lesquelles les inspecteurs constatent trop souvent, avec douleur, l'absence presque totale d'air vital. » (M. de Parieu, Instruction du 24 décembre 1850.) — « Le Conseil académique s'assurera que la situation et les dispositions du local sont satisfaisantes tant au point de vue de la surveillance et du bon ordre que sous le rapport hygiénique. » (M. de Crouseilhes, Instruction du 4 juin 1851.) — « Les rapports les plus autorisés me représentent les écoles comme étant dans le plus fâcheux état : ici, l'air manque au point de compromettre la santé des élèves et des maîtres. La loi sur l'enseignement impose à l'autorité municipale l'obligation de fournir à l'instituteur une salle de classe suffisamment spacieuse. » (H. Fortoul, Instruction du 31 octobre 1854.)

En 1858, les instructions deviennent un peu plus précises : « La salle de classe sera construite sur cave, planchéiée, bien éclairée, accessible aux rayons du soleil, et telle surtout que la disposition des fenêtres, garnies chacune d'un vasistas, permette de renouveler l'air facilement. Les dimensions de la classe devront être proportionnées à la population scolaire. Cette population se détermine en prenant le nombre des enfants de sept à treize ans dans les communes où il y a des salles d'asile, et de cinq à treize ans dans toutes les autres. L'aire de la classe doit présenter une surface de 1 mètre carré [par élève] et une hauteur de 4m, 30 dans les maisons qui ne seront pas construites à neuf. Dans les écoles mixtes, il faut veiller à ce que la classe soit divisée par une cloison en deux parties, l'une pour les garçons, l'autre pour les filles. » (Rouland, Circulaire du 30 juillet 1858, rédigée, croyons-nous, par M. E. Rendu.)

Mais ce n'est que de nos jours que la question des salles de classe, en même temps que celle des maisons d'école, a été étudiée à fond Une commission d'hommes spéciaux (architectes, hygiénistes, inspecteurs primaires, etc.) fut nommée à cet effet et élabora les règlements du 18 juin 1880 et du 28 juillet 1882. Le premier dut être rapporté, parce qu'il exigeait plus que les communes et l'Etat ne peuvent généralement faire. Le second est resté en vigueur pendant quatre ans et demi. Il a été remplacé par les deux instructions spéciales concernant la construction, le mobilier et le matériel d'enseignement des écoles maternelles publiques et des écoles primaires élémentaires publiques, du 18 janvier 1887. On trouvera le texte de ces Instructions à l'article Maison d'école, pages 1184-1187.

Pour ce qui concerne l'éclairage, le chauffage, l'aérage des classes, voir les articles Eclairage, Chauffage, Ventilation. Voir aussi Maison d'école, Matériel d'enseignement, et Mobilier scolaire.