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Retraite (pensions de)

 Historique. ? Le droit à pension des maîtres qui se consacrent a l'enseignement de la jeunesse avait été solennellement reconnu par le décret du 27 brumaire an III relatif à la constitution des écoles primaires, dont l'article 9 était ainsi conçu : « La nation accordera aux citoyens qui auront rendu de longs services à leur pays dans la carrière de l'enseignement une retraite qui mettra leur vieillesse à l'abri du besoin ». Ce ne fut là toutefois que la proclamation d'un principe dont l'application, du moins en ce qui concerne les instituteurs, devait demeurer suspendue pendant près de quarante ans encore.

Le décret du 17 mars 1808 portant organisation de l'Université prévit bien, il est vrai, à l'article 123, que « les fonctionnaires de l'Université, après un exercice de trente années sans interruption, pourraient être déclarés émérites et obtenir une pension de retraite qui serait déterminée, suivant les différentes fonctions, par le Conseil de l'Université » ; mais ces dispositions ne concernaient par les instituteurs, qui n'avaient pas à cette époque la qualité de fonctionnaires de l'Université.

Le ministre Guernon-Ranville eut le désir d'étendre aux instituteurs le bienfait de la retraite. On lit en effet dans l'ordonnance du 14 février 1830 concernant les moyens de fournir aux besoins de l'instruction primaire :

« ART. 14.? Notre ministre des affaires ecclésiastiques et de l'instruction publique nous proposera incessamment un règlement général pour assurer aux instituteurs primaires communaux, au moyen de retenues sur leurs traitements et des autres ressources dont on pourra disposer, des pensions de retraite lorsque l'âge ou les infirmités les mettront dans la nécessité de renoncer à leurs fonctions après les avoir exercées pendant un nombre d'années déterminé. »

La loi du 28 juin 1833 ne parla pas de pensions de retraite. Elle se borna à dire, en son article 15, qu'il serait « établi dans chaque département une caisse d'épargne et de prévoyance en faveur des instituteurs communaux ». Il s'agissait là, tout simplement, de faciliter aux instituteurs les moyens de se constituer un petit pécule pour le moment où ils cesseraient leurs fonctions ; l'article ajoutait en effet : « Cette caisse sera formée par une retenue annuelle d'un vingtième sur le traitement fixe de chaque instituteur communal. Le montant de la retenue sera placé au compte ouvert au trésor royal pour les caisses d'épargne et de prévoyance ; les intérêts de ces fonds seront capitalisés tous les six mois. Le produit total de la retenue exercée sur chaque instituteur lui sera rendu à l'époque où il se retirera, et, en cas de décès dans l'exercice de ses fonctions, à sa veuve ou à ses héritiers. »

Mentionnons ensuite les dispositions prévues par le projet de loi Salvandy sur l'instruction primaire, du 12 avril 1847, en vue d'instituer une caisse de retraites, et celles qui se trouvaient insérées à l'article 11 du projet Carnot du 30 juin 1848, pour reconnaître expressément aux instituteurs le droit « à une pension de retraite, calculée sur le traitement, dans les mêmes conditions que les autres fonctionnaires de l'instruction publique ». La loi du 15 mars 1850 sanctionna ce droit en stipulant (article 39) : « Une caisse de retraite sera substituée par un règlement d'administration publique aux caisses d'épargne des instituteurs ». Mais cette caisse ne fut jamais créée, et le système organise par la loi du 28 juin 1833 continua d'exister jusqu'à la promulgation de la loi du 9 juin 1863 sur les pensions civiles, qui institua, pour tous les fonctionnaires et employés de l'Etat, le régime de pensions de retraite en vigueur aujourd'hui.

Cette loi a supprimé, sauf quelques exceptions, les caisses spéciales de retraite qui existaient alors dans diverses administrations. L'actif de ces caisses demeura acquis à l'Etat, leur passif fut mis à sa charge (articles 1er et 2). La même loi soumet toutes les pensions à des règles uniformes, généralise le droit à la retraite, et l'étend à un grand nombre de fonctionnaires qui jusque-là en avaient été privés. La pension qu'elle accorde est une rente viagère réversible en partie, sous certaines conditions, aux veuves et aux orphelins. Elle charge le Trésor public du service des pensions à concéder à l'avenir, et, comme compensation, elle lui accorde la perception des retenues opérées sur les traitements. Ces retenues deviennent ainsi un véritable impôt frappant le traitement des fonctionnaires et inscrit au budget parmi les divers revenus publics.

L'importance de cette loi nous oblige à l'examiner en détail, ainsi que le décret du 9 novembre 1853 relatif à son exécution. Nous insisterons surtout sur les dispositions générales ou spéciales qui régissent ? avec celles de la loi du 17 août 1876 ? les retraites des fonctionnaires de l'enseignement primaire.

I. Services donnant droit à pension. ? La loi du 9 juin 1853 s'applique à tous les fonctionnaires civils de l'Etat nommés à partir du 1er janvier 1854, c'est-à-dire :

1° A tous ceux dont les services auraient été rémunérés par les caisses de retraite qu'elle a supprimées ; 2° à tous ceux qui ne versaient pas de retenues et qui obtenaient néanmoins pension sur fonds généraux, en vertu de la loi du 22 août 1790 et du décret du 13 septembre 1806, sauf pourtant certains d'entre eux à l'égard desquels l'article 32 maintient l'application des loi et décret précités ; 3° aux fonctionnaires et agents de l'Etat qui autrefois ne pouvaient pas prétendre à une pension de retraite. Lors de la préparation de la loi du 9 juin 1853, on n'a pas jugé possible d'énumérer les diverses natures de fonctions et emplois qui donneraient droit à pension. Mais on peut poser comme règle générale que les fonctionnaires ont droit à la retraite à raison de leurs services lorsqu'ils sont directement rétribués par l'Etat, et que, de plus, ils supportent sur les traitements qu'ils touchent pour ces services les retenues prescrites par l'article 3 de la loi (Voir Retenues).

Des exceptions à cette règle résultent cependant de plusieurs textes législatifs:

1° L'article 4 de la loi donne, en effet, le droit à pension et fait supporter la retenue à des catégories de fonctionnaires qui ne sont pas directement rétribués par l'Etat, notamment aux « fonctionnaires de l'enseignement rétribués en tout ou partie sur les fonds départementaux ou communaux, ou sur le prix des pensions payées par les élèves des lycées nationaux», et aux « fonctionnaires et employés qui, sans cesser d'appartenir au cadre permanent d'une administration publique et en conservant leurs droits à l'avancement hiérarchique, sont rétribués, en tout ou en partie, sur les fonds départementaux ou communaux, sur les fonds des compagnies concessionnaires, et même sur les remises et salaires payés par les particuliers » (Voir Instituteurs détachés) ;

2° Le paragraphe 2 de l'article 2 de la loi du 17 août 1876 relative à la retraite de divers fonctionnaires de l'enseignement primaire stipule que « les années passées, à partir de vingt ans, dans les écoles normales primaires seront comprises dans le compte des années de service, lors de la liquidation des pensions de retraite de ces fonctionnaires ». La même disposition a été rendue applicable aux professeurs sortis des écoles normales supérieures de Fonlenay-aux-Roses et de Saint-Cloud par l'article 48 de la loi de finances du 13 avril 1898, et aux boursiers de séjour à l'étranger désignés par le ministre de l'instruction publique dans les conditions de l'article 97 du décret organique du 18 janvier 1887 (Loi de finances du 8 avril 1910, art. 91). Toutefois le temps ainsi passé à l'étranger ne peut être compté que jusqu'à concurrence de deux années.

« Les services civils ne sont comptés que de la date du premier traitement d'activité (sauf ce qui vient d'être dit en ce qui concerne les anciens élèves des écoles normales et les boursiers à l'étranger) et à partir de l'âge de vingt ans (art. 23). »

Aucune disposition de la loi du 9 juin 1853 n'exige que le fonctionnaire civil soit Français pour lui conférer le droit à la retraite. Les étrangers qui satisfont aux conditions imposées par ladite loi peuvent donc obtenir pension comme s'ils étaient Français. Mais il y a lieu de remarquer qu'il n'en est ainsi qu'autant que les étrangers justifient de services rendus dans des emplois publics dont l'accès leur est permis. Si, au contraire, ils ont exercé des fonctions qui ne doivent être remplies que par des Français, ils ne sauraient faire valoir les années qu'ils ont passées dans cette situation irrégulière. C'est ainsi que nul étranger ne peut être directeur ou adjoint chargé de classe dans une école primaire publique. (Loi du 30 octobre 1886, art. 4.)

Services hors d'Europe. ? « Les services civils rendus hors d'Europe par les fonctionnaires et employés envoyés d'Europe par le gouvernement français sont comptés pour moitié en sus de leur durée effective. » (Loi du 9 juin 1853, art. 10.) Le même article ajoute que cette bonification ne peut réduire de plus d'un cinquième le temps de service effectif exigé pour constituer le droit à pension. Cette restriction ne s'applique pas à la liquidation, dans laquelle la bonification est toujours comprise pour sa valeur réelle. Elle n'influe que sur la constitution du droit à pension. Ainsi s'agit-il d'un instituteur dont le droit à pension est acquis après vingt-cinq ans de services (ancienneté ou invalidité) ou après quinze ans de services (infirmités)? La restriction dont il s'agit signifie que si ce maître compte des services hors d'Europe, il doit, pour obtenir pension pour ancienneté ou comme étant hors d'état de continuer à exercer son emploi, réunir au moins vingt ans de services effectifs, la bonification n'étant alors admise que pour un cinquième de vingt-cinq ans, c'est-à-dire pour cinq ans. S'il n'a pas quinze ans de services effectifs, il ne pourra réclamer une retraite qu'en justifiant d'infirmités, et la bonification ne s'ajoutera dans ce cas pour l'établissement du droit que jusqu'à concurrence de trois années (un cinquième de quinze ans).

Cet article est applicable même au fonctionnaire né hors d'Europe. La seule condition qui lui soit imposée, comme à tout fonctionnaire, c'est d'être envoyé d'Europe à l'étranger par le gouvernement. Il ne "pourrait donc pas réclamer le bénéfice de cette disposition dans le cas seulement où il serait chargé d'une fonction publique hors d'Europe sans avoir séjourné en Europe.

Au surplus, la surélévation ne doit porter que sur le temps d'activité.

La bonification coloniale est également accordée aux fonctionnaires et employés détachés régulièrement dans les pays de protectorat par application de l'article 4, paragraphe 3, de la loi du 9 juin 1853. (Loi de finances du 16 avril 1895, art. 39.)

Inactivité. ? A l'égard des agents extérieurs du département des affaires étrangères et des fonctionnaires de l'enseignement, le temps d'inactivité durant lequel ils ont été assujettis à la retenue est compté comme service effectif, mais il ne peut être admis dans la liquidation pour plus de cinq ans. (Art. 10, dernier paragraphe.)

Il résulte de ce texte que le temps d'inactivité pendant lequel le fonctionnaire a joui d'un congé avec traitement soumis à retenue est seul valable pour la retraite ; qu'il est compté pour toute sa durée exacte en vue de constituer le droit à pension, mais qu'il n'est jamais admis dans le calcul de la liquidation que pour une période n'excédant pas cinq années.

Il importe également de remarquer que tous les fonctionnaires de l'enseignement primaire n'ont pas droit à l'inactivité. Le bénéfice de l'article 10, paragraphe 4, de la loi du 9 juin 1853 et de l'article 16, paragraphe 11, du décret au 9 novembre 1853, en l'absence d'un texte spécial, n'est acquis qu'aux catégories de fonctionnaires qui pouvaient jouir avant la loi de 1853 d'un traitement d'inactivité soumis à retenue. Conformément à ce principe, confirmé par un avis du Conseil d'Etat en date du 11 décembre 1895, les inspecteurs primaires étaient, jusqu'à ces dernières années, les seuls fonctionnaires de l'enseignement primaire admis à profiter des avantages de l'inactivité. La loi de finances du 30 janvier 1907, par son article 57, y a ajouté : 1° les fonctionnaires et professeurs des écoles normales ; les fonctionnaires et professeurs des écoles primaires supérieures pourvus d'une nomination ministérielle. Quant aux instituteurs, ils ne peuvent obtenir que des congés dits de maladie, d'une durée maximum de six mois [Voir Congés). Au delà de ces six mois, ils ne peuvent rester en congé qu'à la condition de ne toucher aucun traitement.

Rappelons que c'est l'article 42 de la loi du 19 juillet 1889, modifié par la loi du 25 juillet 1893, qui a mis les fiais de suppléance des instituteurs malades à la charge de l'Etat. Auparavant, les instituteurs étaient autorisés à se faire suppléer à leurs frais. Tenant compte de cette situation, la loi de finances du 28 décembre 1895 a disposé par son article 63 que le temps durant lequel les instituteurs et institutrices ont été suppléés à leurs frais avant la promulgation de ladite loi entrera dans la liquidation de leur pension de retraite.

Services militaires. ? D'après le premier paragraphe de l'article 8, « les services dans les armées de terre et de mer concourent avec les services civils pour établir le droit à pension, et seront comptés pour leur durée effective, pourvu toutefois que la durée des services civils soit au moins de douze ans dans la partie sédentaire ou de dix ans dans la partie active. » En stipulant que les services militaires seront comptés pour leur durée effective, le législateur veut dire qu'il n'y a pas lieu de leur appliquer le bénéfice de l'accroissement pour les campagnes ou pour service fait hors d'Europe ; il indique au surplus qu'on ne doit les regarder comme terminés qu'au moment où ils cessent de droit et non de fait : par exemple, lorsqu'un militaire est mis en congé illimité ou est envoyé dans ses foyers par anticipation, ses services ne seront pas arrêtés au jour de sa mise en congé ou de son renvoi provisoire ; ils compteront jusqu'à l'époque de sa libération définitive.

Les services militaires sont admissibles à partir de l'âge de dix-huit ans dans l'armée de terre et de seize ans dans l'armée de mer, et seulement lorsqu'ils sont de nature à être acceptés par les lois des 11 et 18 avril 1831.

Il n'y a pas à distinguer, pour la constitution du droit, s'ils ont été déjà rémunérés ou non par une pension militaire. Dans les deux cas, le premier paragraphe de l'article 8 précité reçoit son application.

II. Service actif et service sédentaire. ? Il est très important d'établir une distinction entre ces deux sortes de services, car les conditions de l'admission à la retraite et les bases de la liquidation sont modifiées au profit du fonctionnaire qui a passé un certain nombre d'années dans la partie active.

La partie active comprend :

1° Les emplois et grades indiqués au tableau annexé à la loi du 9 juin 1853 sous le n° 2 (ils dépendent des services des douanes, contributions indirectes, forêts, et postes) ;

2° Les emplois de l'enseignement primaire spécifiés par la loi du 17 août 1876, complétée sur ce point par les lois des 19 juillet 1889-25 juillet 1893, les lois de finances du 13 avril 1898 (art. 51), du 30 mars 1902 (art. 47), du 22 avril 1905 (art. 51), du 17 avril 1906 (art. 54), du 31 décembre 1907 (art. 30) et du 26 décembre 1908 (art. 53) c'est-à-dire les emplois occupés par : les inspecteurs de l'enseignement primaire, les directeurs et les directrices, les professeurs, maîtres-adjoints et maîtresses-adjointes, les économes spéciaux des écoles normales primaires, les directeurs et directrices, instituteurs et institutrices des écoles primaires élémentaires et des écoles maternelles, les instituteurs des écoles annexes, les élèves des écoles normales, les suppléants départementaux (supprimés par la loi de finances du 22 avril 1905, art. 53), les directeurs, les professeurs de sciences, de lettres et de langues vivantes, les instituteurs-adjoints des écoles primaires supérieures des départements, les directeur, préfet des études et surveillants généraux du collège Chaptal, des écoles primaires supérieures et des écoles professionnelles de la ville de Paris et les maîtres de ces écoles qui exercent, soit comme instituteurs-adjoints en vertu d'une nomination préfectorale, soit comme professeurs de sciences, de lettres ou de langues vivantes en vertu d'une nomination ministérielle, à moins qu'ils ne soient en même temps attachés à un établissement d'enseignement secondaire ; les maîtres répétiteurs des écoles primaires supérieures de la ville de Paris ; les directeurs, professeurs et instituteurs des écoles nationales professionnelles ; les instituteurs et institutrices titulaires détachés dans les lycées et collèges de garçons par application du décret du 31 octobre 1892 ; les instituteurs français détachés en service spécial et autorisés à verser les retenues par décision ministérielle ; les instituteurs français régulièrement nommés dans les écoles indigènes d'Algérie.

Il convient de remarquer que la bonification de moitié accordée pour services hors d'Europe compte pour des années passées dans le service actif ou dans le service sédentaire, suivant que les services auxquels elle se rapporte appartiennent à la partie active ou à la partie sédentaire. Il en est de même du temps pendant lequel le fonctionnaire est resté en inactivité avec traitement : la durée de cette inactivité sera comptée comme passée dans la partie active aux fonctionnaires de l'enseignement primaire dont l'emploi est classé dans cette partie.

III. ? Conditions exigées pour le droit à pension. ? 1. FONCTIONNAIRES. ? Pour qu'un fonctionnaire obtienne une pension, il faut qu'il ait été admis à la retraite. C'est ce qu'exprime l'article 19 en déclarant qu'« aucune pension n'est liquidée qu'autant que le fonctionnaire aura été préalablement admis à faire valoir ses droits à la retraite par le ministre au département duquel il ressortit « Ainsi, lorsque les fonctionnaires réunissent les conditions d'âge et de service exigées par la loi et ci-après indiquées, leur droit n'est pas ouvert ; le ministre peut ne pas agréer leur demande et les conserver dans l'exercice de leur emploi aussi longtemps que l'intérêt du service le réclame ou que leurs forces le permettent. Le ministre jouit à cet égard d'un pouvoir discrétionnaire. (Avis du Conseil d'Etat du 17 janvier 1889). L'admission à la retraite des fonctionnaires ou employés peut être prononcée pour plusieurs causes, savoir :

Ancienneté d'âge et de services. ? Aux termes du paragraphe 1er de l'article 5, « le droit à la pension de retraite est acquis par ancienneté à soixante ans d'âge et après trente ans accomplis de service ».

Toutefois, des conditions moins rigoureuses sont imposées aux fonctionnaires qui ont occupé pendant un certain temps un emploi classé dans le service actif. Le paragraphe 2 déclare, en effet, qu' « il suffit de cinquante-cinq ans d'âge et de vingt-cinq ans de services pour les fonctionnaires qui ont passé quinze ans dans la partie active ».

De même, « après quinze années de services rendus hors d'Europe, la pension peut être liquidée à cinquante-cinq ans d'âge » (art. 10, § 3) sans réduction de la durée des services. Elle peut l'être à cinquante ans, si le fonctionnaire, justifiant de vingt-cinq ans de services, se trouve avoir passé quinze années au moins dans la partie active et avoir exercé des fonctions hors d'Europe pendant le même laps de temps ;

Invalidité physique ou invalidité morale. ? Aucune condition d'âge n'est requise ; la loi se borne à exiger que le fonctionnaire ait trente ans de services, ou vingt-cinq ans lorsqu'il est resté quinze ans dans la partie active. Tel est, en effet, le sens du cinquième paragraphe de l'article 5 ainsi conçu : « Est dispensé de la. condition d'âge établie aux deux premiers paragraphes du présent article le titulaire qui est reconnu par le ministre hors d'état de continuer ses fonctions » ;

A titre exceptionnel : dévouement ; accident grave. ? « Peuvent également obtenir pension, quels que soient leur âge et leur activité : 1° les fonctionnaires et employés qui auraient été mis hors d'état de continuer leur service, soit par suite d'un acte de dévouement dans un intérêt public, ou en exposant leurs jours pour sauver la vie d'un de leurs concitoyens, soit par suite de lutte ou combat soutenu dans l'exercice de leurs fonctions ; 2° ceux qu'un accident grave résultant notoirement de l'exercice de leurs fonctions met dans l'impossibilité de les continuer » (Art. 11, § 1 et 2) ;

Infirmités. Suppression d'emploi. ? « Peuvent également obtenir pension, s'ils comptent cinquante ans d'âge et vingt ans de services dans la partie sédentaire ou quarante-cinq ans d'âge et quinze ans de services dans la partie active, ceux que des infirmités graves résultant de l'exercice de leurs fonctions mettent dans l'impossibilité de continuer, ou dont l'emploi aura été supprimé » (Art. 11, § 3).

II. VEUVES ET ORPHELINS. ? La loi du 9 juin 1853 (articles 13, 15 et 16 modifiés par les lois de finances des 28 avril 1893, art. 50, et 13 avril 1898, art. 44) ouvre le droit à pension aux veuves dans les cas suivants :

1° Lorsque le fonctionnaire a déjà obtenu une pension en vertu de ladite loi ou se trouve en instance de pension par le fait de son admission à la retraite prononcée avant son décès, ou encore est mort sans avoir été admis à la retraite mais après avoir fait une demande de pension pour infirmités résultant de l'exercice de ses fonctions et a produit les certificats d'usage à l'appui de sa demande ;

2° Lorsque le mari réunit au jour de son décès vingt-cinq ans de services tant militaires que civils ;

3° Lorsque le fonctionnaire, dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions a perdu la vie dans un naufrage ou dans les cas spécifiés au paragraphe 1er de l'article 11 (actes de dévouement) soit immédiatement, soit par suite de l'évènement ;

4° Lorsque le mari a perdu la vie par un accident grave résultant de ses fonctions, ou par suite de cet accident. (Art. 14, §§ 1 et 2.)

En toute autre circonstance, la veuve est sans droit à pension.

D'ailleurs, même dans les cas prévus ci-dessus, le droit de la veuve n'existe pas d'une manière absolue ; il est subordonné aux deux conditions suivantes ;

1° Le mariage doit avoir été contracté six ans avant la cessation des fonctions du mari (art. 13, § 1), sauf dans les deux dernières hypothèses, où il suffit que le mariage ait été célébré antérieurement au fait qui a amené la mort ou la mise à la retraite du fonctionnaire (art. 14, dernier paragraphe) ;

2° Il faut qu'aucune séparation de corps n'ait été prononcée sur la demande du mari (art. 13, § 3). Toutefois la séparation de corps cessant entre les deux époux par suite de la réconciliation, la déchéance stipulée contré la femme par le paragraphe 3 de l'art. 13 tomberait devant cette réunion volontaire.

Depuis la loi du 27 juillet 1884, il faut encore que le divorce n'ait pas été prononcé entre les époux.

Lorsqu'elle contracte un second mariage, la veuve remariée continue à jouir de la pension qui lui a été concédée. Il n'en serait autrement que si elle épousait un étranger ; elle suivrait alors la condition de son mari et deviendrait elle-même étrangère, ce qui entraînerait la suspension de sa retraite, conformément à l'art. 28.

Les orphelins mineurs d'un fonctionnaire décédé ont droit, dans tous les cas déjà indiqués où la veuve peut prétendre à pension, à un secours annuel ou pension temporaire égale à celle que la mère a obtenue ou aurait pu obtenir.

Pour que cette pension leur soit accordée, il faut : 1° que leur mère soit ou décédée, ou inhabile à recueillir la pension, ou déchue de ses droits. Elle est inhabile, soit lorsque le mariage n'a pas été contracté six ans avant la cessation des fonctions du mari dans les cas où ce délai est exigé, soit lorsque la séparation de corps non suivie de réconciliation a été prononcée contre la femme ou qu'il y a eu divorce entre les époux, soit enfin lorsqu'elle a perdu la qualité de Française ; elle est déchue de ses droits lorsqu'elle a laissé passer cinq ans sans présenter sa demande de réversibilité (art. 16, § 1) ; 2° que le mariage dont les orphelins sont issus ait précédé la mise à la retraité de leur père, lorsque celui-ci est mort titulaire d'une pension. (Décret dû 9 novembre 1853, art. 34.)

S'il existe une veuve et un ou. plusieurs orphelins mineurs provenant d'un mariage antérieur du fonctionnaire, ils sont appelés à se prévaloir conjointement de leurs droits. Il en est de même dans le cas où il existe des orphelins de différents lits.

Les orphelins d'une femme fonctionnaire ont droit au même secours que ceux d'un fonctionnaire (Décision du Conseil d'Etat, 3 mars 1882).

Enfin lorsqu'un fonctionnaire a disparu de son domicile et que plus de trois ans se sont écoulés sans qu'il ait réclamé les arrérages de sa pension, sa femme ou les enfants qu'il a laissés peuvent obtenir, à titre provisoire, la liquidation des droits de réversion qui leur seraient ouverts s'il était décédé (Décret du 9 novembre 1x53, art. 45).

La loi du 22 juillet 1909, modifiant sur ce point la loi du 9 juin 1853, a disposé que les veuves et orphelins des pensionnaires civils prétendant à réversion se pourvoiront directement auprès du ministre des finances.

III. JUSTIFICATION DU DROIT A TENSION. ? A. Fonctionnaires. ? Le fonctionnaire admis à la retraite doit produire :

1° Une expédition de son acte de naissance sur papier timbré et légalisée ; la formalité du timbre n'est pas exigée pour les personnes qui sont en état d'indigence, à la condition que mention spéciale de cet état soit faite sur l'expédition:

2° Comme justification de ses services civils, un état résumant les services dans les différents établissements auxquels il a été attaché et portant les dates des nominations et de la sortie de l'établissement lorsqu'il y a eu interruption dans les services, et les arrêtés de nomination qui justifient lesdits services.

Cet état contient en outre l'indication du traitement moyen des six dernières années, ou des six meilleures années d'exercice s'il s'agit de fonctionnaires visés par la loi du 17 août 1876. Cet état est certifié exact par le supérieur du fonctionnaire.

Lorsque la destruction des archives ou le décès des fonctionnaires supérieurs empêchent de produire ces documents, cette impossibilité doit être prouvée et les services peuvent alors être constatés par acte de notoriété ;

3° Comme justification des services militaires de terre ou de mer, un certificat directement émané du ministère de la guerre ou de celui de la marine. Les actes de notoriété, congés de réforme ou actes de licenciement, ne sont pas suffisants: 4° Lorsque l'admission à la retraite a lieu avant l'accomplissement de la condition d'âge imposée par l'art. 5 (soixante ou cinquante-cinq ans), cette admission est justifiée de la manière suivante :

Si l'impossibilité d'être maintenu en activité résulte pour le fonctionnaire d'un état d'invalidité morale inappréciable pour les hommes de l'art, sa situation est constatée par un rapport des supérieurs dans l'ordre hiérarchique.

Si l'incapacité de servir a pour cause l'invalidité physique du fonctionnaire, la preuve en est faite par trois attestations délivrées : l'une par le médecin qui donne habituellement ses soins à l'intéressé ; la deuxième par un médecin désigné par l'administration et assermenté (ces deux médecins doivent toujours être deux personnes distinctes), et la troisième par le supérieur immédiat. Elles doivent déclarer expressément que le fonctionnaire est « hors d'état de continuer utilement l'exercice de son emploi ».

Dans les cas spécifiés aux paragraphes 1 et 2 de l'art. 11 de la loi du 9 juin 1853 (acte de dévouement et accident grave), l'évènement donnant ouverture au droit à pension doit être constaté par un procès-verbal en due forme, dressé sur les lieux et au moment où il est survenu. A défaut de procès-verbal, cette constatation peut s'établir par un acte de notoriété rédigé sur les déclarations des témoins de l'évènement ou des personnes qui ont été à même de connaître les faits et d'en apprécier les conséquences. Cet acte doit être corroboré par les attestations de l'autorité municipale et du supérieur immédiat du fonctionnaire. On joint aussi, dans la pratique, le certificat d'un médecin assermenté ;

5° Lorsque le fonctionnaire est admis à la retraite à raison de ses infirmités, en exécution du troisième paragraphe de l'art. 11 de la loi précitée, les infirmités et leurs causes sont justifiées par le médecin qui lui donne habituellement ses soins et par un médecin désigné par l'administration et assermenté. Ces deux certificats, qui ne peuvent pas être rédigés par le même médecin, sont appuyés d'attestations conformes de l'autorité municipale et du supérieur immédiat. Les quatre pièces dont il s'agit doivent mentionner formellement que les infirmités invoquées résultent de l'exercice des fonctions et qu'elles mettent le titulaire dans l'impossibilité de continuer ou de reprendre son service ; elles doivent en outre faire ressortir d'une manière détaillée le lien qui peut rattacher la maladie invoquée à l'accomplissement des devoirs professionnels du fonctionnaire. Ce dernier point est fort important, car la validité des certificats médicaux produits par les fonctionnaires admis à la retraite pour infirmités est très souvent contestée par le Conseil d'Etat, dont la jurisprudence est, en cette matière, particulièrement rigoureuse:

6° Si le fonctionnaire est un comptable et qu'il soit, à ce titre, comme le professeur chargé de l'économat dans les écoles normales, justiciable direct de la Cour des comptes, il est tenu de produire un certificat de la comptabilité générale des finances ou du ministère compétent constatant que la vérification provisoire de sa gestion ne révèle aucun débet à sa charge.

Si le comptable n'est pas justiciable direct de la Cour des comptes, le certificat de non débet est délivré par le comptable supérieur duquel il relève ;

7° L'intéressé doit produire une déclaration de domicile, c'est-a-dire l'indication du lieu où il désire toucher sa pension ;

8° Enfin, ampliation de l'arrêté d'admission à la retraite est jointe par le ministre au dossier du fonctionnaire. (Décret du 9 novembre 1853, articles 29, 30, 31, 33 et 35.)

B. Veuves. ? Les veuves prétendant à pension fournissent :

1° Leur acte de naissance ;

2° L'acte de décès de leur mari :

3° L'acte de célébration du mariage ;

4° Un certificat de non-séparation de corps, constatant qu'il n'y a pas eu de séparation judiciaire entre les époux, ou du moins qu'elle n'a pas été prononcée contre la veuve. Ce certificat, qui contient en outre une déclaration de non-divorce, depuis la loi du 27 juillet 1884, est délivré par le maire, par le juge de paix ou par le greffier du tribunal.

Lorsque le mariage de la veuve ne remonte pas à plus de vingt et un ans accomplis, il y a lieu de joindre, en outre, une attestation portant que le mari n'a pas laissé d'enfants mineurs d'un précédent mariage ;

5° Pour les veuves dont le mari est décédé en activité de service, toutes les pièces que celui-ci aurait été tenu de produire pour obtenir sa pension ;

6° Une déclaration de domicile. (Même décret, articles 32 et 35.)

C. Orphelins. ? Les orphelins fournissent : 1° Leur acte de naissance ;

2° L'acte de décès de leur père ;

3° L'acte de célébration du mariage de leurs père et mère ;

4° Une expédition ou un extrait de l'acte de tutelle ;

5° En cas de prédécès de la mère, un acte de décès ; en cas de séparation de corps rendant leur mère inhabile à recueillir la pension, expédition du jugement qui a prononcé la séparation, ou bien un certificat du greffier du tribunal qui a rendu le jugement ; en cas de divorce, expédition de l'acte constatant le divorce ;

6° Si le père est décédé en activité de service, toutes les pièces qu'il aurait produites pour justifier de son droit à pension. (Même décret, art. 32.)

Lorsque le mari ou le père est décédé en jouissance de pension, les veuves ou orphelins prétendant à réversion se pourvoient directement, comme nous l'avons dit plus haut, auprès du ministre des finances. C'est donc à l'administration des finances que toutes les pièces énumérées ci-dessus doivent être adressées.

De toutes ces diverses pièces, les actes de l'état-civil doivent seuls être rédigés sur papier timbré et légalisés ; la formalité du timbre n'est même pas exigée pour les personnes qui sont en état d'indigence, à la condition que mention soit faite, sur l'acte même, du motif pour lequel il a été délivré sur papier libre.

IV. Fixation de la pension. ? La quotité de la pension dépend : 1° du traitement moyen qui sert de base à la liquidation ; 2° de la durée des services admissibles et de leur caractère ; 3° enfin elle est renfermée dans des limites qui ne peuvent être modifiées en aucun cas.

1.TRAITEMENT MOYEN. ? « La pension est basée sur la moyenne des traitements et émoluments de toute nature dont l'ayant-droit a joui pendant ses six dernières années d'exercice » (Art. 6 de la loi).

Trois dérogations ont été faites à ce principe. La première est indiquée par le deuxième paragraphe de l'article 6 lui-même ; elle se rapporte aux fonctionnaires qui sont rémunérés sur d'autres fonds ?que ceux de l'Etat et particulièrement aux fonctionnaires qui sont détachés dans des établissements ressortissant à d'autres administrations que celle de l'instruction publique ou exerçant dans des écoles situées hors de France. La moyenne des traitements sur laquelle est établie la pension de retraite de ces agents ne pourra excéder celles des traitements et émoluments dont le fonctionnaire aurait joui s'il eût été directement rétribué par l'Etat. (Décret du 16 juin 1899, art. 4.)

La deuxième se trouve dans les deux premiers paragraphes de l'article 12 qui établit un mode de liquidation spécial en faveur des pensions accordées par suite d'acte de dévouement et d'accident grave: dans ces deux cas, le traitement moyen est remplacé par le dernier traitement. Mais comme cette mesure est toute dans l'intérêt du fonctionnaire, elle ne devrait pas lui être imposée si l'application de la règle générale lui était plus avantageuse.

La troisième a été établie en faveur des divers fonctionnaires de l'enseignement primaire que la loi du 17 août 1876 a classés, par son article 1er, dans le service actif (Voir ci-dessus, section II). En effet, aux termes de l'article 2 de cette loi, leur pension de retraite « sera basée sur la moyenne des traitements et émoluments de toute nature, soumis à retenues, dont l'ayant-droit aura joui pendant les six années qui auront produit le chiffre le plus élevé ».

Enfin l'article 27 du même décret établit que, dans le décompte du traitement moyen des fonctionnaires de renseignement, on ne doit pas faire entrer le temps qu'ils ont passé en congé d'inactivité avec traitement.

En conséquence, le taux des divers traitements d'inactivité dont un fonctionnaire a pu jouir n'influe en rien sur celui de sa pension. Celle-ci sera toujours liquidée d'après le traitement moyen des six dernières années d'exercice, s'il appartient à la partie sédentaire, ou des six années qui auront produit le chiffre le plus élevé s'il appartient au service actif.

2. LIQUIDATION PROPREMENT DITE. ? Services rémunérables. ? Les services qui sont admissibles pour constituer le droit à la retraite doivent aussi être compris dans la liquidation des pensions sous les mêmes conditions et suivant les mêmes règles ; il n'existe que les différences suivantes :

1° Les services civils rendus hors d'Europe figurent dans la liquidation pour moitié en sus de leur durée effective, quel que soit l'accroissement ainsi produit ; nous avons dit, au contraire, que cette bonification ne peut être admise pour la constitution du droit à la retraite que jusqu'à concurrence de la période de temps nécessaire pour ne pas réduire de plus d'un cinquième la durée de service effectif exigée pour l'ouverture du droit (Art. 10) ;

2° Tandis que le temps d'inactivité avec traitement assujetti à retenue est compté en entier comme service effectif (abstraction faite du traitement) lorsqu'il s'agit d'établir le droit à la retraite des fonctionnaires de l'enseignement, il n'est admis à ce titre, dans leur liquidation, que pour cinq ans au plus (Même article) ;

3° Lorsque les services militaires sont admis pour la constitution du droit à la retraite, ils n'entrent dans la liquidation que s'ils n'ont pas été déjà rémunérés par une pension militaire (Art. 8, § 2) ;

4° Lorsqu'un fonctionnaire comptant vingt-cinq ans de services tant militaires que civils, et titulaire en dernier lieu d'un emploi civil, décède avant d'avoir accompli six ans de services civils, la part de pension afférente aux services civils est calculée sur la moyenne des traitements perçus pour l'ensemble de ces services (Loi de finances du 13 avril 1898, art. 44, §2).

Liquidation des pensions accordées aux fonctionnaires pour cause d'ancienneté ou pour cause d'invalidité. ? Aux termes du paragraphe 1er de l'article 7 de la loi, « la pension est réglée pour chacune des années de services civils à un soixantième du traitement moyen ». Cette disposition s'applique à tout fonctionnaire qui justifie de trente années de services ou de vingt-cinq années dont quinze au moins passées dans la partie active.

« Néanmoins, pour vingt-cinq ans de services entièrement rendus dans la partie active, la pension est de la moitié du traitement moyen, avec accroissement, pour chaque année de service en sus, d'un cinquantième du traitement » (Art. 7, § 2) ; en d'autres termes, la liquidation se fait alors par cinquantième.

Ce tarif ne se rapporte qu'aux services civils. Quant aux services militaires qui sont admissibles pour une pension civile (Voir ci-dessus, section I, services donnant droit à pension), ils ne sont liquidés que s'ils n'ont pas été déjà rémunérés par une pension militaire, et leur liquidation a lieu d'après le minimum attribué au grade par les tarifs annexés aux lois des 11 et 18 avril 1831 (Art. 8, § 2).

Liquidation de pensions à titre exceptionnel. ?? L'article 12 pose les règles suivantes pour la liquidation des pensions à titre exceptionnel :

Dans le cas d'acte de dévouement, la pension est de la moitié du dernier traitement, quel que soit le nombre des années de service, à moins que le mode ordinaire de liquidation ne soit plus avantageux, auquel cas ce mode devrait être adopté.

Si la retraite est motivée par un accident grave, la pension est liquidée, suivant que l'ayant-droit appartient à la partie sédentaire ou à la partie active, à raison d'un soixantième ou d'un cinquantième du dernier traitement pour chaque année de services civils.

Dans les autres cas, notamment quand l'admission à la retraite est prononcée par suite d'infirmités ou de suppression d'emploi, la pension est également liquidée à raison d'un soixantième ou d'un cinquantième du traitement moyen pour chaque année de services civils. La liquidation par cinquantième n'est faite alors qu'autant que le fonctionnaire justifie avoir passé au moins quinze ans dans la partie active.

Il résulte ainsi de cette disposition, rapprochée du paragraphe 2 de l'article 7, que le bénéfice des cinquantièmes n'est pas donné, ainsi qu'on le pense généralement, à tous les fonctionnaires qui sont admis à la retraite comme membres du service actif, mais qu'il appartient seulement aux fonctionnaires qui ont accompli dans la partie active la durée minimum de service exigée par la loi, selon le mode d'admission à la retraite qui leur a été appliqué.

Liquidation des pensions des veuves et des orphelins. ? L'article 13 de la loi du 9 juin 1853 accorde à la veuve « le tiers de la pension que le mari avait obtenue ou à laquelle il aurait eu droit » ; cette règle est modifiée par le minimum et le maximum dont nous parlons ci-après.

La pension est exceptionnellement des deux tiers de celle que le mari avait obtenue ou aurait pu obtenir lorsqu'il a perdu la vie en accomplissant un acte de dévouement, soit immédiatement, soit par suite de cet évènement (Art. 14, § 4).

Le secours accordé aux orphelins est, d'après le paragraphe 2 de l'article 16, quel que soit le nombre des enfants, égal à la pension que la mère avait obtenue ou aurait pu obtenir. Il est partagé entre eux jusqu'à ce que le plus jeune des enfants ait atteint l'âge de vingt et un ans accomplis, la part de ceux qui décèderaient ou celle des majeurs faisant retour aux mineurs.

Ce mode de distribution doit être suivi même lorsque les orphelins sont de différents lits.

S'il existe une veuve et un ou plusieurs orphelins mineurs provenant d'un mariage antérieur du fonctionnaire, il est prélevé sur la pension de la veuve, et sauf réversibilité en sa faveur, un quart au profit de l'orphelin du premier lit s'il n'en existe qu'un en âge de minorité, et la moitié s'il en existe plusieurs (Art. 23, § 1er).

Toutes les pensions sont liquidées d'après la durée des services, en négligeant, sur le résultat final du décompte, les fractions de mois et de francs (Art. 23, § 1er

3. LIMITES DANS LESQUELLES LA FIXATION DE LA PENSION EST RENFERMEE. ? Les liquidations faites d'après les règles qui précèdent peuvent être modifiées par l'application de minimums et maximums déterminés.

La loi du 9 juin 1853 ne fixe de minimum à la liquidation que dans deux cas :

1° Au profit du fonctionnaire admis à la retraite pour cause d'accident grave ; la pension ne peut alors être inférieure au sixième du dernier traitement (Art. 12, § 2) ;

2° En faveur des veuves et des orphelins ; leur pension ne peut, en effet, être inférieure, soit à 100 francs, soit au montant de la retraite que le mari ou le père avait obtenue ou aurait pu obtenir si cette retraite n'eût pas atteint 100 francs (Articles 13, § 2, et 16, § 2).

L'article 3 de la loi du 17 août 1876 a institué un autre minimum ; il décide que la pension de retraite ne pourra être moindre de 600 francs pour un instituteur et de 500 francs pour une institutrice. Toutefois, il déclare que ce minimum ne s'applique pas aux pensions qui sont concédées à titre exceptionnel pour infirmités.

Au contraire, la loi de 1853 contient sur les maximums une disposition générale : aux termes du dernier paragraphe de l'article 7, les pensions ne peuvent excéder, en aucun cas, ni les trois quarts du traitement moyen, ni les maximums désignes au tableau annexé à la loi de 1853 sous le n° 3.

Nous ne pouvons reproduire ici ce tableau. Nous nous bornons à dire qu'en ce qui concerne les fonctionnaires de l'enseignement, le maximum des pensions est fixé aux deux tiers du traitement moyen, sans pouvoir dépasser 6000 francs.

V. Date de la jouissance de la pension. ? La jouissance de la pension commence du jour de la cessation du traitement pour le fonctionnaire ; ou du lendemain du décès pour la veuve. Celle du secours de l'orphelin part du lendemain du décès du fonctionnaire ou du décès de la veuve (Article 25, § 1er).

Toutefois, ce principe général est modifié par l'article 40 de la loi de finances du 16 avril 1895, aux termes duquel « il ne peut en aucun cas y avoir lieu au rappel de plus de trois années d'arrérages antérieurs à la date de l'insertion au Journal officiel du décret de concession ». Ainsi, quelle que soit la cause du retard apporté dans la fixation des droits d'un pensionnaire, le point de départ de sa jouissance ne peut jamais remonter au delà des trois ans ainsi décomptés.

Il faut remarquer d'ailleurs que la jouissance de la pension ne court du jour de la cessation des fonctions pour le pensionnaire que si, à cette époque, le droit à la retraite lui est réellement acquis ; autrement, elle ne pourrait être fixée à une date antérieure à celle de l'ouverture du droit. Ainsi, dans le cas où un instituteur serait mis en congé sans traitement, en attendant d'avoir l'âge requis pour obtenir sa retraite, la jouissance serait reculée jusqu'au jour où la condition d'âge serait remplie.

D'autre part, le décret du 27 mai 1897, modifiant l'article 47 du décret du 9 novembre 1853, dispose que « le fonctionnaire admis à faire valoir ses droits à la retraite pour ancienneté, par application des parti-graphes 1 et 2 de l'article 5 de la loi du 9 juin 1853, continue à exercer ses fonctions jusqu'à la date de la délivrance de son brevet de pension, à moins de décision contraire rendue sur sa demande ou motivée soit par la suppression de son emploi, soit par l'intérêt du service ». Le droit du fonctionnaire à cet égard est donc loin d'être absolu, et le ministre est juge des cas où l'intérêt du service exige le remplacement du fonctionnaire avant qu'il soit en possession de son brevet de pension.

Enfin, lorsque l'intérêt du service l'exige, le fonctionnaire peut, même après la délivrance de son brevet, être maintenu momentanément en activité.

Dans les deux cas prévus ci-dessus, la prolongation des services ne peut donner lieu à un supplément de liquidation, et la jouissance de la pension part du jour de la cessation effective du traitement. Néanmoins, le fonctionnaire est assujetti, tant qu'il reçoit son traitement, à verser les contributions prévues par la loi du 9 juin 1853 pour le service des pensions. Ces retenues ont, en effet, le caractère d'un véritable impôt.

Les dispositions de l'article 47 du décret du 9 novembre 1853, modifiées par le décret du 27 mai 1897, ne sont pas applicables aux fonctionnaires tenus de produire un certificat de non débet.

VI. Formalités auxquelles est soumise la concession des pensions de retraite. ? Le ministre au département duquel appartient le fonctionnaire prononce l'admission à la retraite, réunit les pièces justificatives du droit à la pension et prépare le projet de liquidation. Il communique ce projet au ministre des finances, qui constate, par un avis spécial, la légalité de la liquidation qui lui a été transmise et la possibilité d'en imputer le montant sur le crédit d'inscription ouvert pour l'année.

Depuis la mise en vigueur de la loi du 22 juillet 1909, les propositions de pensions civiles établies par les divers ministères sont soumises à l'examen du Conseil d'Etat par le ministre des finances, qui contresigne seul les décrets de concession.

Afin de simplifier encore ces formalités, le ministre des finances est dispensé de soumettre à l'examen du Conseil d'Etat les propositions concernant la réversion au profit des veuves et orphelins de titulaires de pensions d'ancienneté. (Loi du 22 juillet 1909, art. 2.)

Chaque décret mentionne les nom, prénoms, grade, date et lieu de naissance du pensionnaire, la nature et la durée de ses services, la date des lois, décrets et ordonnances en vertu desquels la pension a été liquidée ; la quotité du traitement qui a servi de base à la liquidation, la part de rémunération afférente aux services militaires et aux services civils, l'élévation au minimum ou la limitation au maximum, suivant les cas ; la quotité de la pension, la date d'entrée en jouissance et le domicile de la partie. Il indique, en outre, la date des avis rendus par le ministre des finances et par le Conseil d'Etat. Le décret de concession, une fois signé, est envoyé au ministre des finances, qui en poursuit auprès du garde des sceaux l'insertion au Journal officiel. Après cette insertion, les pensions sont inscrites au grand-livre de la dette publique ; le certificat d'inscription est envoyé au ministre liquidateur, lequel le transmet à chaque intéressé directement ou, comme cela se produit pour les instituteurs, par l'intermédiaire des préfets. (Loi du 9 juin 1853, art. 17: décret du 9 novembre 1853, art. 41, et loi du 22 juillet 1909, art. 1").

VII. Insaisissabilité et incessibilité des pensions. ? D'après l'article 26 de la loi de 1853, « aucune saisie ou retenue ne peut être opérée du vivant du pensionnaire que jusqu'à concurrence d'un cinquième pour débet envers l'Etat, ou pour des créances privilégiées indiquées par l'article 2101 du Code civil, et d'un tiers dans les circonstances prévues par les articles 201, 205, 206, 207 et 214 du même Code », c'est-à-dire dans le cas de pension alimentaire. Les formalités relatives à cette saisie sont l'objet d'une procédure spéciale qui est également suivie en matière d'opposition sur les traitements des fonctionnaires.

Le même article déclare d'une manière absolue que « les pensions sont incessibles ». Il faut admettre cependant que le pensionnaire peut céder ou déléguer le cinquième ou le tiers du montant de sa retraite aux créanciers auxquels ledit article reconnaît le droit de saisie jusqu'à concurrence de cette partie de la pension ; car la cession est préférable, en ce sens qu'elle évite des frais au débiteur.

VIII. Perte du droit à pension ou de la pension elle-même. ? Le fonctionnaire ne perd ses droits à pension que dans quatre cas, savoir : 1° lorsqu'il est démissionnaire, destitué ou révoqué d'emploi, même si au moment de la démission ou de la révocation il remplissait les conditions d'âge et de services pour constituer le droit à pension (Arrêt du Conseil d'Etat du 2 décembre 1887) ; 2° lorsqu'il est constitué en déficit pour détournement de deniers ou de matières, ou convaincu de malversation ; 3° lorsqu'il est convaincu de s'être démis de son emploi à prix d'argent ; 4° lorsqu'il est condamné à une peine afflictive ou infamante (Art. 27 de la loi de 1853).

Dans ces trois derniers cas, la déchéance est également prononcée par la loi quand la pension a été déjà liquidée ou inscrite. La radiation de la pension s'effectue alors par un décret rendu sur la proposition du ministre des finances, après avoir pris l'avis du ministre liquidateur et avoir consulté la section des finances du Conseil d'Etat (Décret du 9 novembre 1853, art. 43).

Toutefois, il n'y a déchéance absolue que dans deux des cas précités ; car le même article 27 rétablit les droits à la pension pour le fonctionnaire démissionnaire, révoqué ou destitué, dès qu'il est remis en activité ; et pour celui qui a encouru une condamnation afflictive ou infamante, lorsqu'il obtient sa réhabilitation. Dans cette dernière hypothèse, le rétablissement, s'il s'agit d'un fonctionnaire déjà retraité, ne peut donner lieu à aucun rappel d'arrérages antérieurs au décret portant réhabilitation, et il est opéré sur la production d'une expédition de ce décret.

IX. Suspension de la pension. ? Le paiement de la pension est suspendu lorsqu'un fonctionnaire est remis en activité dans le même service (Loi de 1853, art. 28). Pour arriver à ce résultat, avis du replacement est donné sans délai par le ministre compétent au ministre des finances (Décret du 9 novembre 1853, art. 44).

Après la cessation de ses fonctions, l'intéressé peut obtenir, s'il y a lieu, une nouvelle liquidation basée sur la généralité de ses services, ou rentrer simplement en jouissance de sa pension, à compter de la date de cette cessation, sur la présentation d'un certificat du fonctionnaire ordonnateur de ses émoluments indiquant depuis quelle époque il n'a plus touché de traitement.

Le droit à l'obtention ou à la jouissance d'une pension est encore suspendu par les circonstances qui font perdre la qualité de Français, durant la privation de cette qualité (Loi du 1853, art. 29].

Le rétablissement ou la liquidation de la pension ne donne pas lieu à un rappel d'arrérages antérieurs à l'époque à laquelle la qualité de Français a été recouvrée. Il est effectué sur la production de pièces attestant la réalité de ce fait. X. Cumul d'une pension avec un traitement, ou de plusieurs pensions. ? Les règles relatives au cumul d'une pension avec un traitement, ou de deux pensions, ont déjà fait l'objet d'un article spécial (Voir Cumul). Nous nous bornons à y renvoyer, en faisant seulement les remarques suivantes.

Le paragraphe 2 de l'article 28 de la loi de 1853 déclare qu'un fonctionnaire remis en activité dans un service différent peut cumuler sa pension et son traitement, mais seulement jusqu'à concurrence de 1500 francs. Or, le replacement dans un service différent s'entend de l'entrée dans un emploi ressortissant à un ministère autre que celui dont le pensionnaire dépendait quand il a été retraité. Chaque ministère compte comme unité, sans distinction entre ses diverses branches de services.

La prohibition de cumul ne s'étend pas aux traitements payés sur les fonds départementaux et communaux à des serviteurs de l'Etat retraités par lui et qui sont ensuite employés des départements ou des communes. Elle ne frappe pas non plus les allocations payées par le Trésor public lorsqu'elles n'ont pas le caractère de traitements.

C'est en vertu des dispositions contenues dans l'article 28, paragraphe 2, de la loi du 9 juin 1853, et par analogie, que la femme qui jouit d'une pension en qualité de veuve de fonctionnaire, et qui elle-même est fonctionnaire, ne peut cumuler sa pension et son traitement que jusqu'à concurrence de 1500 francs. Une pareille limitation aboutit, en général, à priver les veuves d'instituteurs, lorsqu'elles sont elles-mêmes institutrices, de la jouissance de leur pension jusqu'au jour où elles sont à leur tour admises à la retraite.

On peut espérer que cette jurisprudence, manifestement contraire à l'équité, sera prochainement modifiée. Un projet de loi déposé par le gouvernement à la date du 30 juin 1910 a, en effet, pour objet d'autoriser le cumul des pensions de veuves et d'orphelins avec des traitements d'activité jusqu'à concurrence de 6000 francs.

XI. Prescription des droits à la retraite. Prescription des arrérages de la pension. ? Toute demande de pension doit, à peine de déchéance ; être présentée, avec les pièces à l?appui, dans le délai de cinq ans, à partir, pour le titulaire, du jour où il aura été admis à faire valoir ses droits à la retraite, ou du jour de la cessation de ses fonctions, s'il a été autorisé à les continuer après cette admission ; pour la veuve, du jour du décès du fonctionnaire ; et, pour les orphelins, du jour du décès de leur père ou de celui de leur mère, ou encore du jour où la veuve est devenue inhabile à recueillir la pension (Loi de 1853, art. 22). Cette déchéance ne peut être interrompue que par la présentation de la demande ou des pièces exigées pour la liquidation.

Les pensions une fois concédées sont imprescriptibles. Si cependant l'article 30 les déclare rayées des livres du Trésor après trois ans de non-réclamation, cette radiation n'est pas réelle, puisque les pensions ainsi supprimées sont rétablies, sans qu'un nouveau décret de concession soit nécessaire, sur une demande formée par les ayants-droit, à laquelle sont joints le brevet de la pension et un certificat de vie, de domicile et d'identité, dressé en présence de deux témoins par le maire de la résidence, et attestant aussi que l'intéressé n'est dans aucune des situations qui entraînent la perte ou la suspension de la pension ; les arrérages non réclamés seuls sont prescrits, car le rétablissement de ces pensions ne donne lieu à aucun rappel d'arrérages antérieurs à la réclamation. (Art. 30, § 1er.)

Lorsque la retraite n'a encore été l'objet d'aucun paiement, le délai de trois ans doit être compté à partir du jour de l'insertion au Journal officiel du décret de concession.

La même déchéance est applicable aux héritiers ou ayants-cause des pensionnaires qui n'auront pas produit la justification de leurs droits dans les trois ans qui suivront la date du décès de leur auteur. (Même article, § 2.)

XII. Paiement des arrérages. ? Les pensions et secours annuels sont payés par trimestre (Loi du 9 juin 1853, art. 30). Depuis le 1er décembre 1876, les époques du paiement des arrérages sont le 1" mars, le 1er juin, le 1er septembre et le 1er décembre de chaque année (Loi du 12 août 1876, art. 13).

Les arrérages des pensions sont acquittés, à Paris, par la caisse centrale du ministère des finances, et, dans les départements, par le trésorier payeur général du domicile indiqué par le pensionnaire. Celui-ci peut même obtenir du trésorier payeur général de toucher directement chez le receveur particulier de l'arrondissement ou chez le percepteur de sa commune.

Si le pensionnaire transporte son domicile dans un autre département que celui où il s'était primitivement retiré, il doit, pour toucher sa pension à ce nouveau domicile, donner avis de ce changement au trésorier payeur général du département qui a opéré le dernier paiement.

Le paiement est fait à toute personne munie du titre de pension et d'un certificat de vie du titulaire. Ce certificat, délivré par un notaire, conformément à l'ordonnance du 6 juin 1839, contient les déclarations ordinaires relatives au cumul. Lorsqu'il s'agit du premier paiement, il faut joindre à ces deux pièces une attestation rédigée par le fonctionnaire ordonnateur du traitement du titulaire et indiquant l'époque à laquelle celui-ci a cessé de recevoir tout traitement.

Si le titulaire réside à l'étranger, il fera loucher par un tiers les arrérages échus à la caisse du trésorier payeur général qu'il aura, au préalable, désigné à l'administration. Cette tierce personne sera munie du titre de pension, ainsi que du certificat de vie, qui aura alors été délivré par l'agent diplomatique ou consulaire de France de la résidence de l'intéressé et qui stipulera que celui-ci n'a pas perdu la qualité de Français.

En cas de décès d'un pensionnaire, ses héritiers ou ayants-cause doivent, pour toucher les arrérages restés dus, faire parvenir au trésorier payeur général du domicile du défunt : 1° le certificat d'inscription de pension ou, s'il est égaré, une déclaration de perte reçue par le maire de ce domicile en présence de deux témoins ; 2° une expédition de l'acte de décès du pensionnaire ; 3° un certificat de propriété délivré, s'il y a eu inventaire, partage ou testament, par le notaire dépositaire de ces actes ou, dans le cas contraire, par le juge de paix du domicile des ayants-droit ; 4° une déclaration faite par les réclamants et constatant que le décédé ne cumulait pas la pension avec une autre pension ou avec un traitement ; cette déclaration peut être comprise dans le certificat de propriété, qui est alors signé par les ayants-cause.

Toutefois, en ce qui concerne les veuves, l'article 31 de la loi du 17 avril 1906 dispose que sont valablement payés entre leurs mains, à moins d'opposition de la part des héritiers, légataires ou créanciers, les décomptes d'arrérages restant dus au décès des titulaires de toutes pensions servies par l'Etat, les départements, les communes, etc.

Ces dispositions ne sont pas applicables aux veuves séparées de corps.

Ajoutons enfin que si le pensionnaire vient à perdre son titre, il en obtient un duplicata du ministre des finances.

XIII. ? Avances. ? Pour la première fois, en 1908, un crédit a été prévu au budget du ministère de l'instruction publique sous la rubrique « Avances remboursables aux instituteurs et institutrices admis à faire valoir leurs droits à la retraite ». Ainsi que l'exposait le rapporteur du budget à la Chambre des députés, ce crédit est « destiné à remédier à des situations douloureuses et scandaleuses dont l'opinion publique et le Parlement se sont à diverses reprises émus. L'instituteur admis à faire valoir ses droits à la retraite et remplacé dans son emploi ne reçoit plus aucun salaire, et il attend de longs mois avant de toucher les arrérages de sa modeste pension. S'il ne dispose d'aucunes ressources personnelles, il est réduit à la misère, et offre ce spectacle peu réconfortant d'un vieux et dévoué serviteur de la République obligé de faire appel à la charité de l'Etat, de la commune ou des particuliers. »

Le système des avances remboursables, établi après entente officieuse entre les administrations des finances et de l'instruction publique, fonctionne de la façon suivante :

Lorsqu'un instituteur ou une institutrice des écoles élémentaires ou maternelles a été admis par arrêté ministériel à faire valoir ses droits à une pension de retraite, une décision spéciale du ministre de l'instruction publique peut, si la situation du maître ou de la maîtresse justifie cette faveur, autoriser le versement mensuel d'un secours remboursable à titre d'avance sur les arrérages de la pension. Le montant de ce secours mensuel ne peut, en aucun cas, dépasser les deux tiers du douzième de la pension. Les avances sont mandatées mensuellement, à terme échu, par le préfet, au vu des extraits des décisions ministérielles qui ont, d'une part, admis l'intéressé à faire valoir ses droits à la retraite, et, d'autre part, autorisé le paiement. Les maîtres et maîtresses qui bénéficient de ces avances doivent souscrire l'engagement de rembourser lesdites avances par voie de précompte sur les premiers arrérages de leur pension, et cet engagement constitue, le cas échéant, le titre en vertu duquel pourrait être poursuivi le remboursement de l'avance autorisée. Ajoutons qu'aucun cumul d'avances remboursables par l'Etat et les départements ne peut avoir lieu.

XIV. ? Révision de la pension. Pourvoi. ? La révision d'une pension par une administration n'est admise que dans le cas d'erreur matérielle, comme une faute de calcul dans la liquidation. Le ministre qui a admis à la retraite le fonctionnaire intéressé recommence alors la liquidation de ses droits et la soumet à toutes les formalités ordinaires, comme s'il s'agissait d'une première liquidation. Spécialement, les instituteurs et institutrices doivent reconnaître exacts leurs états de services et les signer. Lorsqu'ils se sont conformés à celle obligation, ils sont considérés comme ne pouvant plus obtenir de révision par voie gracieuse, à moins d'erreur matérielle.

Mais les parties ont toujours la faculté de déférer au Conseil d'Etat (section du contentieux) soit la décision ministérielle portant refus de pension, soit le décret concédant une pension de retraite dont la fixation leur paraît erronée.

Le pourvoi est introduit au Conseil d'Etat, soit par une requête signée d'un avocat au Conseil d'Etat, soit par une demande directe du réclamant: le ministère d'un avocat au Conseil, d'Etat n'est pas, en effet, indispensable lorsqu'il s'agit de pourvoi en matière de pension. (Décret du 2 novembre 1864.)

Tout pourvoi doit être rédigé sur papier timbré: il est soumis, au préalable, à la formalité de l'enregistrement (46 fr. 88), et doit être accompagné d'une copie authentique de la décision attaquée. La décision qui intervient est passible d'un droit d'enregistrement semblable, dont le paiement est exigé quand elle est rendue.

Le réclamant ne peut être dispensé de ce double droit que s'il a obtenu l'assistance judiciaire du bureau établi à cet effet près le Conseil d'Etat.

Le recours au Conseil d'Etat n'est recevable que si le pourvoi a été formé dans les deux mois à partir du jour de la notification de la décision attaquée. A défaut de notification, le délai court de la remise du titre.

Ce délai est de rigueur, et le défaut de pourvoi dans les deux mois élève une fin de non-recevoir insurmontable. Il n'est nullement prolongé, en particulier, quand une demande d'assistance judiciaire a été formée. Aussi convient-il de présenter les demandes de cette nature aussi promptement que possible, afin que le bureau ait le temps d'y répondre avant l'expiration du délai réglementaire.