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Restaut

 Pierre Restaut, grammairien français, est né a Beauvais en 1696 ou 1694, et mort à Paris en 1764. Son père, marchand drapier, lui fit faire ses classes au collège de Beauvais, et, comme il le destinait à l'état ecclésiastique, il l'envoya à Paris pour continuer ses études au séminaire Saint-Sulpice. Ne se sentant pas de vocation pour les ordres, Restaut quitta le séminaire et entra au collège Louis-le-Grand, alors dirigé par les Jésuites. Plus tard il se livra à l'étude du droit et fut reçu avocat au conseil du roi en 1740. Mais c'est comme pédagogue qu'il est resté célèbre.

Rollin ayant exprimé, dans son Traité des Etudes, le désir du public d'avoir une grammaire française abrégée, Restaut composa et publia en 1730 ses Principes généraux et raisonnes de la grammaire française (avec des Observations sur l'orthographe, les accents, la ponctuation et la prononciation et un abrégé des règles de la versification française). Cet ouvrage, réimprimé neuf fois du vivant de l'auteur, ne l'a pas été depuis 1817.

Le succès de cette grammaire doit être attribué à la méthode que l'auteur a employée et qu'il explique lui-même dans sa préface :

« Tout le monde, dit-il, convient que l'on n'avance dans quelque science que ce puisse être, qu'autant qu'on en a étudié et approfondi les véritables principes, ce qui me donne lieu d'assurer que la méthode la plus courte et en même temps la plus solide d'apprendre une langue est de s'y préparer par une connaissance exacte et raisonnée de ces principes généraux et particuliers, en les appliquant à la langue que l'on sait déjà par habitude. »

Restaut a admis pour les noms français les mêmes cas que pour les noms latins. Cela a paru au moins inutile, puisqu'il constate lui-même (chap. VI, page 58) que « les différentes terminaisons qu'il peut y avoir dans les noms français ne sont que pour distinguer le pluriel d'avec le singulier, le masculin d'avec le féminin, et qu'il n'y en a point pour marquer les différents rapports avec les autres mots comme en latin et en grec » ; mais il appelle cas, en français, ce qui répond aux cas des Grecs et des Latins, sans doute parce que, ainsi qu'il le dit dans sa Préface, il s'est proposé de travailler « pour ceux qui n'ont jamais appris notre langue par règles, et surtout pour ceux qui se destinent à étudier la langue latine ».

On a reproché à Restaut de n'avoir pas séparé la syntaxe de la partie élémentaire, ce qui en rend l'étude un peu difficile pour les commençants, et de s'être laissé entraîner à des définitions métaphysiques peu claires pour la jeunesse à laquelle elles étaient destinées.

Restaut ne compte que neuf parties du discours ; il supprime l'adjectif, ou plutôt le réunit au nom ; il y a pour lui le nom substantif, qui « exprime un objet déterminé, considéré simplement en lui-même, et sans aucune attention à ses qualités », et le nom adjectif, qui «exprime un objet vague considéré comme revêtu de quelque qualité ».

Le chapitre de la prononciation est plus étendu dans la grammaire de Restaut que dans la plupart de celles dont on se sert aujourd'hui dans les écoles ; il faut l'attribuer à ce que, à l'époque où elle a été écrite, « les gens de lettres et un petit nombre de personnes, dit l'auteur, avaient seuls étudié la langue française par principes, et que si, parmi ceux qui fréquentaient la cour et les gens de lettres, il se trouvait quelques personnes parlant plus correctement que les autres, ce n'était jamais que par habitude ou imitation ». Parmi les nombreuses règles de prononciation données par Restaut, plusieurs ne répondent plus à l'usage actuel : ainsi il conseille de dire « note maison », pour notre maison ; « ste femme », pour cette femme ; « i mangent », pour ils mangent ; « il faut convenu de tout », pour il faut convenir de tout.

On a en outre de ce grammairien un Abrégé de la grammaire française, qui a eu plus de succès encore que sa grammaire (1732) ; et La vraie méthode pour enseigner à lire (1759), dont Restaut fit usage pour sa fille, qui apprit à lire en quatre mois, et qui fut aussi employée pour les enfants de France (Voir deux lettres de l'abbé Berthelot à ce sujet dans l'Année littéraire, 1759, tome III, page 239). Restaut a revu et considérablement augmenté la 4e édition de l'Orthographe française en forme de dictionnaire de Charles Le Roi, prote à Poitiers (1764), et a fourni des Additions au dictionnaire de Trévoux.