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Primaires (écoles)

 Le nom d'écoles primaires, en France, apparaît pour la première fois dans les plans d'éducation nationale présentés par Talleyrand à la Constituante et par Condorcet à la Législative ; il reçut sa consécration légale par un vote de la Convention, du 12 décembre 1792, l'article 1er du projet du Comité d'instruction publique ayant été décrété ce jour-là en ces termes : « Les écoles primaires formeront le premier degré d'instruction. On y enseignera les connaissances rigoureusement nécessaires à tous les citoyens. Les personnes chargées de l'enseignement dans ces écoles s'appelleront instituteurs. »

Le plan présenté par Romme à la Convention le 1er octobre 1793 au nom de la Commission nationale remplaçait le terme d'écoles primaires par celui de premières écoles de l?enfance ; c'est le nom de premières écoles qui est employé dans les décrets de brumaire an II. Dans le plan de Bouquier, devenu le décret du 29 frimaire an II, on emploie le terme d'écoles du premier degré d'instruction ; mais l'expression d' « écoles primaires » était restée dans l'usage courant, car, le jour même où le décret Bouquier fut volé, un décret spécial, rendu à la suite d'une proposition individuelle, ordonna que le décret « sur l'organisation des écoles primaires » serait promulgué sans délai ; et le 8 germinal suivant, Bouquier fut invité par le Comité d'instruction publique à rédiger une instruction « sur les écoles primaires ». Le décret du 27 brumaire an III consacra définitivement l'expression d écoles primaires, qui depuis ce moment est restée dans la loi.

Destutt de Tracy, dans ses Observations sur l'instruction publique (an IX, 1801), a critiqué les mots d'école primaire, comme dérivant d'une conception fausse de ce que doit être l'enseignement public. Dans toute société civilisée, dit-il, il y a nécessairement deux classes d'hommes : « l'une est la classe ouvrière, la seconde est celle que j'appellerai la classe savante ». Pour les enfants destinés à faire partie de la classe ouvrière, « il faut qu'une éducation sommaire, mais complète en son genre, soit donnée en peu d'années ». Le cours d'études des enfants de la classe ouvrière doit être un abrégé de celui des autres écoles ; c'est une erreur de croire que ce cours d'études, « complet en son genre », puisse être le premier degré d une instruction générale. « Dans tout Etat bien administré, il doit y avoir deux systèmes complets d'instruction, qui n'ont rien de commun l'un avec l'autre. » L'erreur qui consiste à voir, dans les écoles destinées aux enfants de la classe ouvrière, un vestibule qui conduit à des écoles plus élevées, une préparation à des études ultérieures, ? cette erreur, continue Destutt de Tracy, «a pénétré même dans de très bons esprits. Peut-être cela vient-il de ce nom d'écoles primaires, qui semble indiquer un premier degré ; car les mots ont une bien grande influence sur les idées ; c'est pourquoi je serais d'avis de changer cette détermination. » (Voir Destutt de Tracy.)

L'idée du comte de Tracy n'a pas prévalu en France, mais elle a été de tout temps, en Allemagne, celle qui a présidé à l'organisation de l'instruction publique. Il n'y a pas, dans les pays germaniques, des écoles primaires, mais des « écoles pour le peuple » (Volksschulen).