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Pascal (Blaise)

Nous n'avons pas à apprécier ici Pascal comme savant, comme écrivain et comme philosophe. Nous nous limitons à parler de ce qu'il a pu faire pour l'éducation.

On sait qu'au commencement de 1655, Pascal, qui avait alors trente-deux ans, s'était retiré à Port-Royal des Champs, et qu'il y vécut plusieurs années de la vie des solitaires, avec Arnauld, Nicole, Lancelot, de Saci, etc. Y pratiqua-t-il l'enseignement, comme plusieurs d'entre eux? Rien ne l'indique, et la chose est peu probable. Il ne semble même pas qu'il ait jamais donné des soins particuliers à aucun élève, comme Le Maître, par exemple, en donna au jeune Racine. Contribua-t-il pour quelque chose à la rédaction des ouvrages d'éducation de la communauté? Il est au moins l'auteur de la nouvelle méthode de lecture qui porte le nom de Port-Royal. On le sait de source certaine par la lettre que lui écrivit sa soeur, à propos de cette méthode, à la date du 26 octobre 1655 (Voir l'article ci-après), et aussi par la lettre suivante qu'Arnauld, caché à l'hôtel des Ursins à Paris, écrivait, le 31 janvier 1656, à sa nièce Angélique de Saint-Jean, abbesse de Port-Royal : « Vous rirez de ce qui me donne occasion de vous écrire, dit Arnauld. Il y a ici un petit garçon d'environ douze ans qui ne sait pas lire ; j'ai envie d'essayer s'il le pourra apprendre par la méthode de M. Pascal. C'est pourquoi je vous prie d'achever ce que vous aviez commencé d'en mettre par écrit et de nous l'envoyer. » Assurément, cette invention n'ajoute pas grand chose à la gloire de Pascal ; elle atteste au moins ce besoin de clarté et de rigueur qui est comme le propre de son génie, et qu'il portait dans les petites choses comme dans les grandes.

On sait également que les auteurs de la Logique de Port-Royal se sont inspirés de quelques fragments composés par lui sur l'Art de persuader et l'Esprit géométrique, et qu'ils en ont inséré dans leur ouvrage les passages les plus saillants.

On sait enfin qu'il avait composé un essai d'Eléments de géométrie d'après Euclide, qu'Arnauld trouva confus, et que, Pascal ayant défié le célèbre docteur de faire mieux, celui-ci à son premier loisir tint et gagna la gageure. Pascal, quand il eut lu, en manuscrit, l'oeuvre de son concurrent, la jugea si claire et si bien ordonnée, qu'il jeta la sienne au feu.

Qu'il ait pris part à la discussion de toutes les questions qui se débattaient alors à Port-Royal, et dont l'éducation des enfants faisait le thème, on ne peut guère en douter. La réflexion suivante qu'on trouve dans ses Pensées en est comme un écho : « L'admiration gâte tout dès l'enfance. Oh! que cela est bien dit! qu'il a bien fait! qu'il est sage! etc. Les enfants de Port-Royal, auxquels on ne donne point cet aiguillon de gloire et d'envie, tombent dans la nonchalance. »

Félix Carré