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Noël

Jean-François Noël, polygraphe et administrateur français, n'est guère connu de la plupart de ceux qui s'occupent d'éducation que comme l'auteur, putatif ou réel, de nombreux ouvrages classiques, dictionnaires, chrestomathies, grammaires, etc. ; on ne se douterait pas, à le juger sur ses ouvrages, que cet inspecteur de l'Université impériale et royale avait fait, durant la première moitié de sa vie accidentée, tout autre chose que des livres d'école. Né à Saint-Germain-en-Laye vers 1755, Noël, après de bonnes études à Paris, reçut la tonsure, et devint professeur au collège Louis-le-Grand. Il se fit connaître d'abord par des poésies et des pièces d'éloquence qui obtinrent des prix académiques. En 1791, l'abbé Noël, devenu zélé partisan de la Révolution, quitta l'habit ecclésiastique et le professorat, et obtint un poste dans les bureaux du ministère des affaires étrangères ; il fut ensuite chargé de diverses missions diplomatiques à Londres (1792), à la Haye (1793) et à Venise (1794). Dans l'intervalle de ses missions, il s'occupait de journalisme, et publia divers ouvrages, tels qu'une Lettre sur l'antiquité du bonnet rouge, et un Nouveau Siècle de Louis XIV, recueil de chansons licencieuses et de poésies satiriques de l'époque du grand roi. Le 3 ventôse an III (21 février 1795), sur la proposition du Comité d'instruction publique, il fut nommé par la Convention membre de la Commission exécutive de l'instruction publique en remplacement de Clément de Ris. « Le citoyen Noël, disait de lui le Journal de Perlet, est connu par des titres littéraires, diplomatiques, et par un dévouement absolu à la Révolution depuis 1789 ; il a aussi été honoré de la haine et des outrages de Saint-Just et de ses amis. » Au mois de thermidor suivant, Noël retourna à la Haye en qualité de ministre plénipotentiaire : il y resta deux ans. Revenu à Paris, il rentra dans l'administration de l'instruction publique. En l'an VII, il publia, en collaboration avec Planche, un Dictionnaire de la fable, qui a eu plusieurs éditions ; et, s'il faut en croire Quérard, il se serait fait vers la même époque l'éditeur de diverses publications latines d'un caractère moins innocent. Après le 18 brumaire, il fut successivement commissaire de police à Lyon et préfet du Haut-Rhin. En l'an X enfin, il fut choisi par le premier consul comme l'un des trois inspecteurs généraux des études créés par la loi du 11 floréal an X (1er mai 1802) : de ce moment date pour lui une nouvelle carrière. Lors de la création de l'Université, il fut maintenu dans les fonctions d'inspecteur général de l'instruction publique, qu'il conserva sous tous les régimes, jusqu'à sa mort, arrivée en 1841.

Parmi les livres classiques parus sous son nom à partir de 1802, les plus connus sont : les Leçons françaises de littérature et de morale (1804), en collaboration avec Delaplace ; le Dictionnaire historique des personnages de l'antiquité (1806) ; un Dictionnaire latin-français et un Dictionnaire français-latin (1807) ; une refonte du Gradus ad Parnassurn (1808) ; un Manuel de rhétorique (1810), avec Delaplace: un Abrégé de la grammaire française (1826) avec Chapsal, petit manuel dont la vogue a été immense et qui a eu d'innombrables éditions ; des Leçons d'analyse grammaticale et des Leçons d'analyse logique (1827), avec Chapsal ; un Dictionnaire des origines, inventions et découvertes (1827), avec Carpentier ; des Leçons de philosophie et de morale (1833). « C'est un triste et singulier privilège de certaines célébrités, dit la Biographie Michaud à l'article Noël, d'être empruntées, trop souvent même payées, pour tromper le public et lui faire croire que tel ou tel ouvrage a été composé ou revu par des écrivains qui n'ont fait que prêter ou vendre leur nom à des éditeurs aussi peu délicats qu'eux-mêmes. » Il paraît que la fameuse grammaire publiée sous le nom de Noël et Chapsal était l'oeuvre de Chapsal seul, et que Noël reçut une somme considérable en échange de l'autorisation qu'il donna de mettre son nom sur la couverture de l'ouvrage.

En 1810 et 1811, Noël avait été chargé avec Georges Cuvier d'une mission en Hollande et dans la Basse-Allemagne, à l'effet d'y inspecter les établissements d'instruction publique ; les deux Rapports contenant le compte-rendu de cette mission portent le nom de Noël et celui de Cuvier ; mais la rédaction en a été faite par Cuvier seul (Voir Cuvier).

James Guillaume