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Napoléon III

Louis-Napoléon Bonaparte (1808-1873), fils de la reine Hortense, gouverna la France de décembre 1848 à septembre 1870, d'abord avec le titre de président de la République, puis, à partir du 2 décembre 1852 (jour anniversaire du coup d'Etat exécuté par lui l'année précédente), avec celui d'empereur.

Dès son entrée en fonctions comme président, Louis-Napoléon choisit comme ministre de l'instruction publique M. de Falloux (20 décembre 1848). Le 31 octobre 1849, ayant formé un cabinet plus « bonapartiste », il y donna le portefeuille de l'instruction publique à M. de Parieu, qui fit voter la loi du 11 janvier 1850, dirigée contre les instituteurs (Voir Parieu), puis la grande loi organique du 15 mars 1850, qui avait été préparée par M. de Falloux (Voir Falloux). Les deux ministres qui succédèrent à M. de Parieu : Ch. Giraud (24 janvier 1851-10 avril 1851), M. de Crouseilhes (10 avril 1851-26 octobre 1851), puis de nouveau Ch. Giraud (26 octobre 1851-2 décembre 1851), ne firent rien d'important. Au lendemain du coup d'Etat, le président plaça à la tête de l'instruction publique un homme aussi dépourvu de scrupules que l'étaient ses complices. M. de Morny (fils de la reine Hortense comme le prince-président), Rouher et Saint-Arnaud : Fortoul, qui fut ministre du 3 décembre 1851 au 1er juillet 1856. Le décret-loi du 9 mars 1852 délit en partie l'oeuvre de la loi de 1850, qui, par la création du Conseil supérieur, avait ruiné l'organisation de l'ancienne Université ; ce décret, tout en laissant subsister ce Conseil, le plaça entièrement entre les mains du prince-président, qui eut le droit d'en nommer les membres. La loi du 14 juin 1854 fut une autre atteinte à la loi de 1850: en remplaçant les académies départementales par seize grandes circonscriptions académiques, elle affaiblissait l'autorité de l'Eglise sur les écoles, mais au profit de l'arbitraire d'un gouvernement despotique. Fortoul fut « un politique qui eut en vue, à travers tout, moins les intérêts de l'Eglise que la reprise par l'Etat de son action prépondérante. On accepte l'Eglise comme alliée, mais on se défend comme on peut d'être son sujet. » Victor Duruy a cité ce passage d'une lettre confidentielle de Fortoul au préfet du Jura (19 juin 1852) : « Au nom du ciel, souvenez-vous de ceci, c'est que la loi du 15 mars 1850 a été faite par les légitimistes et pour eux. Elle a donné à la France des Conseils académiques qui ne sont que des comités électoraux légitimistes. » Pour ce qui concerne l'action funeste de Fortoul sur l'enseignement secondaire, voir l'article Fortoul.

Lorsque le ministre du 3 décembre fut mort subitement aux eaux d'Ems, son portefeuille, après un court intérim fait par le maréchal Vaillant, fut confié (13 août 1856-23 juin 1863) à un avocat normand qui, depuis 1853, était procureur général à Paris, Gustave Rouland. Celui-ci ne fut pas, comme son prédécesseur, un simple agent de répression : il y eut une détente. Néanmoins, l'Eglise restait toute-puissante : « Les cardinaux et les évêques. faisaient et défaisaient les préfets ; quant aux instituteurs laïques, contraints de servir plusieurs maîtres à la fois, ils ne pesaient rien ». Rouland, toutefois, montra aux pauvres maîtres d'école quelque sollicitude ; il fit augmenter un peu — bien peu — leurs traitements, et ouvrit une enquête, en 1861, sur « les besoins de l'instruction primaire dans une commune rurale ». On trouvera à l'article Rouland un exposé détaillé des actes et des idées de ce ministre, écrit par un témoin.

Le 23 juin 1863, un remaniement ministériel fit échoir, de façon imprévue, le portefeuille de l'instruction publique aux mains d'un universitaire. Victor Duruy voulut sincèrement travailler à l'instruction du peuple, à la condition qu'elle fût donnée dans un esprit impérialiste. Dès le 11 juillet 1863, le nouveau ministre écrivait aux préfets : « Notre grande oeuvre est en ce moment l'instruction du peuple » ; et dix-huit mois plus tard, dans son discours d'ouverture de la session législative de 1865, Napoléon III disait : « Dans un pays de suffrage universel, tout citoyen doit savoir lire et écrire». On s'attendait, en conséquence, à la présentation d'une loi rendant l'enseignement primaire gratuit et obligatoire : cette attente fut déçue. «Dans le rapport présenté à l'empereur le 6 mars 1865, le ministre avait montré la nécessité de rendre l'enseignement primaire obligatoire, et il avait plaidé la cause de la gratuité absolue. Dans le discours qu'il prononça au Corps législatif pour la défense de la loi, il n'abandonna ni l'une ni l'autre de ces deux idées, mais il dut, pour obtenir le vote de sa loi [celle du 10 avril 1867], sacrifier aux craintes de la majorité et à la résistance de ses collègues une partie de ce programme. L'empereur penchait davantage vers la gratuité absolue, le ministre tenait beaucoup à l'obligation : le Parlement n'accorda ni l'une ni l'autre. Du moins, les deux mots avaient été mis dans un document officiel qui eut beaucoup de retentissement, et ils avaient encore été jetés du haut de la tribune dans la circulation des esprits. » (Victor Duruy.) Les réformes tentées, et en partie réalisées, par Duruy ont été racontées dans l'article qui lui est consacré : Voir Duruy ; voir aussi France (pages 665-668).

Lorsque, en 1869, sous la pression des événements, Napoléon III se résolut à se séparer de ses serviteurs les plus dévoués et à former un ministère « responsable » pris dans les rangs du tiers-parti, Duruy fut remplacé par Bourbeau (17 juillet 1869) ; puis vint, six mois plus tard, le ministère Emile Ollivier (ou de l'Empire « libéral »), dans lequel l'instruction publique fut confiée d'abord à Segris (2 janvier 1870), puis à Maurice Richard (14 avril 1870) et à Brame (13 mai 1870). Quand Emile Ollivier fut tombé après les premières défaites des généraux de l'empire, le général Cousin-Montauban forma le dernier ministère du régime (9 août), et Jules Brame y dirigea l'instruction publique jusqu'au 4 septembre,

James Guillaume