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Mongols

 Les habitants du haut plateau central de l'Asie, désignés sous le nom générique de Mongols, appartiennent à la famille dite mongolique ou tartan-mongole, l'une des branches de la race jaune. On sait le rôle qu'ils jouèrent au treizième siècle, et comment, sous la conduite de chefs aventureux qui groupèrent sous leur commandement non seulement toutes les tribus de la Mongolie, mais encore de nombreux peuples voisins, ils se jetèrent sur la Chine, l'Asie occidentale et l'Europe, que leur invasion terrifia. | L'empire fondé par Gengis-Khan et ses successeurs fut éphémère, et plus tard, convertis à une forme inférieure de la religion bouddhiste, le lamaïsme, les Mongols non seulement cessèrent d'être un danger pour leurs voisins, mais finirent par devenir sujets de l'Empire chinois.

« La langue des Mongols, dit Elisée Reclus, qui se rattache à celles des nations ouralo-altaïques, et qui ressemble aux idiomes turcs par un grand nombre de racines communes, se divise en dialectes assez différents les uns des autres : les Khalkhas, les Bouriates, les Eleutes ne peuvent pas tous se comprendre mutuellement. D'ailleurs, des mots d'origine diverse se mêlent à ces dialectes ; des termes mandchous, chinois, tibétains et turcs ont corrompu le pur langage mongol dans le voisinage des frontières. Depuis vingt et un siècles, le mongol a son écriture, car à cette époque déjà il emprunta les caractères idéographiques des Chinois ; mais il n'eut d'alphabet original que vers le commencement du dixième siècle. Ces lettres furent remplacées au douzième siècle par une autre écriture, employée pour la traduction des ouvrages classiques de la Chine ; malheureusement tous ces livres se sont perdus. C'est une écriture nationale, inventée en 1269 par un lama, qui finit par prévaloir : ce sont ces lettres qui ont servi pour toute la littérature mongole actuelle, consistant en recueils de lois et d'ordonnances, en dictionnaires, en calendriers, et surtout en ouvrages religieux. Pour écrire, les Mongols se servent d'un pinceau qu'ils promènent sur des tablettes de bois peintes en noir et saupoudrées de sable ou de cendre. Les livres liturgiques sont écrits en tibétain, langue qui est devenue sacrée pour les Mongols lors de leur conversion au bouddhisme. »

Le pontife bouddhiste de la Mongolie est le « taranath-lama », qui réside à Ourga. « Les prêtres sont les véritables maîtres de la contrée, et les seuls qui, sans avoir besoin de travailler, soient assurés de jouir des aises de la vie : aussi le nombre des Mongols qui échappent aux chances de la misère ou qui s'émancipent de l'esclavage en entrant dans les ordres dépasse-t-il de beaucoup la proportion des prêtres que l'on voit dans tous les autres pays du monde, et même au Tibet. On dit qu'un tiers de la population se compose de lamas ou « hommes blancs », c'est-à-dire rasés. ; dans plusieurs districts, la plupart des parents destinent tous leurs enfants à revêtir les vêtements jaunes et rouges des lamas et n'en gardent qu'un seul dans la foule des « hommes noirs » ou chevelus qui perpétuent la race et paissent les troupeaux. En aucun pays, les formes extérieures de la religion ne sont plus observées. Si peuplés qu'ils soient, les couvents de la Mongolie ne renferment pas tout le personnel religieux de la contrée: un grand nombre de lamas résident dans leurs propres familles ; d'autres errent à l'aventure ; des magiciens indépendants de la religion officielle ont aussi maintenu leur prestige dans la plupart des tribus. Comme au Tibet, des femmes, et surtout des veuves, se vouent aussi à la vie contemplative. »

Les Mongols ne vivent guère que de l'élève des troupeaux. Tous les hommes (les lamas exceptés, bien entendu), de dix-huit à soixante ans, font partie de la cavalerie impériale, et doivent être prêts à partir au premier signal. Les chefs de tribus, qui sont pensionnés par le gouvernement de Pékin, se réunissent toutes les années en assemblée générale : mais les décisions de celle assemblée sont soumises à la ratification du gouverneur chinois.

La ville d'Ourga, résidence du grand-lama mongol, comprend un quartier réservé au commerce, et une enceinte qui est la cité religieuse ; celle-ci, dit Reclus, « est un labyrinthe de cours et de ruelles, où dix mille lamas, peut-être davantage, ont planté leurs tentes et bâti leurs masures d'argile, dominées par les coupoles dorées des temples ; une sorte d'université, comprenant des facultés de médecine, de théologie et d'astrologie, se trouve aussi dans l'enceinte ». On se figurera aisément ce que peut être l'enseignement d'une université mongole, en songeant que la caste sacerdotale des lamas, qui constitue la classe lettrée, borne sa science à l'étude de la langue tibétaine ; encore est-il très peu de lamas qui arrivent à connaître cette langue : la plupart d'entre eux lisent le texte des livres saints sans savoir la signification des mots qu'ils prononcent, et « ont pour ces ouvrages d'autant plus de vénération qu'ils n en comprennent pas le sens ».