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Manuels

 Ce sont les Grecs qui, les premiers, ont donné ce nom (enchiridion) à des ouvrages portatifs contenant l'abrégé d'une science : Chacun connaît de nom le Manuel d'Epictète, où un disciple de ce philosophe a résumé sa doctrine. Il n'existe pas, à notre connaissance, parmi les nombreux traités d'éducation et les livres écrits à l'usage des maîtres et des élèves des petites écoles, avant l'époque de la Révolution, d'ouvrage portant le titre de manuel. Pendant la Révolution, le terme qu'on trouve employé (rapport de Condorcet, avril 1792 ; rapport d'Arbogast, décembre 1792 ; rapport de Grégoire, pluviôse an II) est celui de livres élémentaires. C'est seulement en l'an VII qu'on voit paraître l'expression de manuel : le ministre François de Neufchâteau annonce, à cette date, qu'il a décidé la publication, sous le titre de Manuel républicain, d'une série de volumes « qui seront d'un grand secours aux instituteurs pour l'enseignement moral et physique ». Le mot devient bientôt d'un usage courant : on rencontre, en 1803, un Essai sur l'éducation ou Manuel des instituteurs et des pères de famille, par Malvin-Cazal ; en 1808, un Manuel encyclopédique, par Dorigny ; en 1811, un Manuel des enfants, par Boudat ; en 1813, un Manuel des écoles primaires et des petites écoles, par Castéra ; en 1816, le célèbre Manuel pratique, ou Précis de la méthode d'enseignement mutuel, pour les nouvelles écoles élémentaires, par l'instituteur Nyon, qui fut placé à la tête de l’école normale destinée à former des maîtres pour les écoles mutuelles ; en 1819, un Manuel des écoles élémentaires pour les filles, par Mme Quignon ; en 1821, le Manuel théorique et pratique de la méthode d'enseignement mutuel pour les écoles régimentaires, de B. Appert ; en 1824, le Manuel des écoles élémentaires, de Sarazin, inspecteur des écoles élémentaires du département de la Seine ; en 1827, un Manuel d'enseignement pratique des sourds-muets, par Bébian ; en 1828, un Manuel élémentaire d'éducation monarchique et constitutionnelle, par Humbert ; en 1829, un Manuel de l'enfance, ou Petit Cours d'éducation physique et morale, par Duval.

Le grand mouvement en faveur du développement de l'enseignement primaire qui suivit la révolution de 1830 donna naissance à de nombreux manuels. Signalons, entre autres, le Nouveau Manuel complet des écoles primaires, par Ch. Martin ; le Manuel de l'instituteur primaire, du pasteur A. Maeder ; un Manuel d'éducation positive, du colonel Raucourt. Lorsque le ministre Guizot voulut transformer en journal officiel le Journal de l'instruction élémentaire créé en 1830 par Louis Hachette, il le baptisa (1832) Manuel général de l'instruction primaire. L'année 1833 vit paraître le Manuel des fondateurs et directeurs des premières écoles de l'enfance, connues sous le nom de salles d'asile, de Denys Cochin ; l'année 1834, le Manuel pour les écoles primaires communales de jeunes filles, de Mlle Sauvan. Quelques années plus tard, on rencontre un Manuel complet d'enseignement simultané, comprenant la méthode d'enseignement mixte (1841), par Lamotte et P. Lorain, qui peu d'années auparavant avaient publié un Manuel complet de l'enseignement mutuel. Divers ouvrages destinés à faciliter aux instituteurs et aux institutrices la préparation à l'examen du brevet de capacité virent le jour dans cette période, avec le titre de Manuel, par exemple le Manuel d'examen pour le brevet de capacité d'enseignement primaire, par Meissas, Michelot et Lamotte, le Manuel des aspirants et aspirantes aux brevets de capacité de l'instruction primaire, par E. Lefranc et L. Galais, etc.

En 1848, sur l'initiative du ministre Hippolyte Carnot, furent composés et publiés plusieurs « courts manuels » destinés aux instituteurs, pour les aider à éclairer le peuple sur les droits et les devoirs des citoyens : les plus connus sont le Manuel de l'instituteur pour les élections, de l'historien Henri Martin, et le Manuel républicain de l'homme et du citoyen, du philosophe Charles Renouvier.

Il' n'y a rien à signaler de bien intéressant en fait de manuels scolaires, pendant la période où écoles et instituteurs furent soumis au régime de la loi de 1850. Mais avec l'arrivée de Jules Ferry au ministère de l'instruction publique en 1879, on voit se produire un mouvement analogue à celui de 1830 et de 1848 ; en particulier, l'idée de faire donner par l'école primaire un enseignement moral et civique lit naître toute une littérature d'ouvrages, dont quelques-uns très remarquables, qui, désignés sous l'appellation générale de « manuels d'instruction morale et civique», donnèrent lieu pendant quelques années à de vives controverses. Un très petit nombre seulement de ces traités avaient pris le titre de Manuel (Manuel de l'instruction civique à l'usage des écoles primaires par Meyrac ; et, dans un autre esprit, Nouveau Manuel d'enseignement moral et d'enseignement civique, par l'abbé Bailleux et l'abbé Martin ; Manuel chrétien d'instruction civique, par Rondelet). Les plus connus parmi ces écrits sont Le Livre du petit citoyen, de Jules Simon (1879), les Eléments d'instruction morale et civique, de M. G. Compayré (1880), L'Instruction civique à l'école, de Paul Bert (1882).

Nous n'allongerons pas cet article en essayant de donner une bibliographie des divers ouvrages* d'enseignement ou d'éducation qui, à l'époque contemporaine, ont été publiés avec le titre de Manuels : ce détail n'offrirait pas d'intérêt pratique.