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La Rochefoucauld-Doudeauville

Ambroise-Polycarpe, duc de La Rochefoucauld-Doudeauville, cousin du duc de La Rochefoucauld-Liancourt (voir l'article qui suit), et, comme lui, l'un des hommes qui ont le mieux mérité, dans la première partie du dix-neuvième siècle, le nom de philanthropes, naquit à Paris le 3 avril 1765. Il entra de bonne heure dans la carrière militaire, et il était major en second dans un régiment de cavalerie en 1792. Il émigra alors et alla rejoindre l'armée de Condé ; mais il quitta les Autrichiens et les Prussiens sitôt qu'il se fut aperçu, comme il l'a dit lui-même, qu'ils voulaient envahir la France au lieu de la secourir, ainsi qu'ils l'avaient annoncé d'abord. Rentré en France, il vécut dans la retraite sous le Consulat et l'Empire. La Restauration l'appela à la Chambre des pairs, à la direction générale des postes, où il rendit de grands services (1822), enfin au ministère de la maison du roi (1824) ; il donna sa démission lors du licenciement de la garde nationale de Paris (avril 1827). Après la révolution de 1830, il continua à siéger à la Chambre des pairs jusqu'au procès des ministres. Il rentra alors dans la vie privée et, jusqu'à sa mort (2 juin 1841). il ne s'occupa plus que de bienfaisance.

Au point de vue de l'éducation et de l'enseignement, le duc de La Rochefoucauld-Doudeauville a été, en 1826, un des promoteurs de la création de ce qu'on appela alors la maison royale de Grignon, qui est devenue depuis une école nationale d'agriculture ; comme membre actif et influent de la Société de la morale chrétienne, il a contribué à l'établissement des écoles pour les jeunes détenus ; enfin, il a été, avec d'autres, un des premiers propagateurs de l'enseignement mutuel.

Le 3 novembre 1815, il était appelé par le comte de Chabrol, alors préfet de la Seine, à faire partie, en même temps que le duc de La Rochefoucauld-Liancourt, le comte Pastoret, le baron De Gérando, le comte de Laborde, le comte de Lasteyrie, le baron Delessert, le vicomte Mathieu de Montmorency, Carnet de la Bonnardière, Jomard, et l'abbé Gaultier, du Conseil d'instruction primaire, dont le ministre de l'intérieur, M. de Vaublanc, venait de sanctionner la création et qui siégea à l'Hôtel de ville jusqu'en 1833.

Le 7 février 1816, il fut nommé président honoraire de la Société pour l'instruction élémentaire. A Montmirail, où il résidait habituellement, il créa une école mutuelle qui, en août 1816, contenait 180 enfants, ainsi que l'atteste un rapport qu'il adressait, à cette date, à M. De Gérando.

C'est lui qui. en février 1818, fut chargé du rapport sur les conclusions duquel Laurent-Pierre de Jussieu obtint, pour son livre Simon de Nantua, le prix de mille francs institué par un anonyme qui n'était autre que La Rochefoucauld-Liancourt, et Charles Renouard une médaille d'or pour ses Eléments de morale.

Le 1er juillet 1820, il présida le jury chargé par le préfet de la Seine de juger du mérite des instituteurs qui s'étaient présentes au concours pour une place vacante de professeur à l'école normale d'enseignement mutuel, et à la suite duquel un habile maître, M. Sarazin, fut nommé, tandis que Demoyencourt, placé au second rang, obtenait la direction de l'école de la Halle-aux-Veaux.

Enfin, comme président honoraire, il fut plusieurs fois appelé à prendre la parole dans les assemblées générales de la Société pour l'instruction élémentaire, et, comme l'a rappelé Dupin aîné en 1839, la Société, qu'il eut ainsi plusieurs fois à défendre, ne pouvait être mieux défendue que « par cet homme illustre autant que modeste, dont la vertu obtint le rare bonheur, alors même qu'il était ministre, de n'être contestée par aucun parti ».

Charles Defodon