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Japon

[Nota. Pour la transcription des noms japonais en caractères européens, nous suivons le système adopté parles publications japonaises officielles: dans ce système, les cinq voyelles a, e, i, o, u ont la même valeur qu'en italien (u doit donc se prononcer ou) ; les consonnes sont représentées par les consonnes anglaises, auxquelles le lecteur doit donner la prononciation qu'elles ont en anglais.]

Historique. — L'empire du Japon se compose des cinq grandes îles de Honto (ou Nippon), de Sikoku, de Kiusiu, de Yezo ou Hokkaïdo, de Formose, et de quelques autres plus petites. Sa population est d'environ 48 millions d'habitants. Les annales japonaises font remonter la fondation de l'empire au milieu du septième siècle avant l'ère chrétienne. Vers le troisième siècle de l'ère chrétienne, des lettrés chinois apportèrent officiellement au Japon les arts et les sciences de jour pays, avec les doctrines de Confucius. La religion japonaise était le sintoïsme, ancien culte du pays, qui est resté longtemps la religion dominante. Plus tard, le bouddhisme, apporté de la Corée en 552, gagna de nombreux adeptes. Vers le douzième siècle, l'autorité militaire fut remise par l'empereur ou Tenno (le terme de mikado, généralement employé en Europe pour désigner l'empereur, n'est plus usité aujourd'hui au Japon) à un généralissime désigné par le titre de shogun. Au commencement du dix-septième siècle, les fonctions de shogun échurent à un membre de la famille Tokugawa, nommé Iyeyasu, qui réussit à rendre cette dignité héréditaire dans sa famille. A partir de ce moment, tout le pouvoir exécutif fut concentré entre les mains du shogun, et le Tenno n'exerça plus qu'une suprématie nominale. Les nobles, qui précédemment étaient presque entièrement indépendants sur leurs terres, furent réduits à l'obéissance par le shogun, dont ils devinrent les vassaux sous le nom de daïmios. Le shogun établit sa résidence à Yedo. tandis que le Tenno était relégué dans l'ancienne capitale, Kiôto. Cette période de féodalité militaire a duré deux siècles et demi ; elle s'est terminée, il y a environ quarante années, par une révolution qui a mis fin au shogunat : le dernier shogun, Yoshinobu Tokugawa, fut contraint de résigner ses pouvoirs ; le Tenno redevint souverain effectif (1868), et en 1869 il abandonna Kiôto pour s'installer à Yedo : le nom de cette dernière ville a été changé à cette occasion en celui de Tôkiô, qui signifie « capitale orientale ». Cette restauration est devenue le point de départ d'une série de réformes qui ont modifié profondément les anciennes institutions du Japon, et ont rapproché l'organisation administrative de l'empire de celle des Etats européens.

Nous essaierons de donner un aperçu de l'histoire de l'éducation au Japon, en résumant d'abord les principaux faits de la période antérieure à la restauration de 1868, et en indiquant ensuite ce qui a été accompli depuis cette restauration. Nos renseignements, pour la première période, sont empruntés à une publication officielle faite en anglais par le ministère japonais de l'instruction publique, intitulée An outline history of Japanese éducation, literature and arts, Tôkiô, 1877 ; pour la période contemporaine, nous avons consulté, outre ce document, les rapports annuels de ce même ministère, publiés également en anglais.

L'éducation au Japon avant les événements de 1868. — C'est vers l'an 270 de l'ère chrétienne, sous le règne du Tenno Ojin, qu'un lettré chinois, venu de Corée, apporta au Japon l'écriture chinoise. Auparavant, peu de Japonais connaissaient l'art d'écrire. Au système idéographique des Chinois, on ajouta un alphabet syllabiqué de quarante-huit caractères ; cet alphabet, connu sous le nom d'i-ro-ha, n'est employé que dans les ouvrages d'un style simple et populaire ; dans les compositions littéraires proprement dites on se sert de l'écriture chinoise soit pure, soit modifiée. On sait que dans le système chinois chaque caractère représente un mot entier ; l'étude de l'écriture se confond donc avec celle de la langue et du vocabulaire même : il faut apprendre autant de signes qu'on apprend de mots. Le bagage d'un élève de l’école primaire japonaise se compose d'environ deux mille caractères.

Une université impériale fut établie à Kiôto en 701, sous le règne du Tenno Mommu, qui créa en outre d'autres écoles dans chaque province, et promulgua en 702 des règlements relatifs à l'éducation.

Le personnel de l'université de Kiôto, à cette époque, se composait d'un surintendant, d'un adjoint, d un professeur de l'université, de deux professeurs adjoints, de deux professeurs de prononciation des caractères chinois, de deux professeurs d'écriture (avec quatre cents élèves), et d'un professeur de mathématiques (avec trente élèves).

Les écoles de province avaient un seul professeur, et le nombre des élèves y variait de vingt à cinquante, selon l'importance de la province.

A l'université impériale se rattachaient une école spéciale de médecine, une école spéciale d'astrologie, et une école spéciale de musique.

L'école de médecine comprenait un surintendant, un adjoint, un professeur de médecine (avec quarante élèves), un professeur d'acuponcture (avec vingt élèves), un professeur de l'art du barbier (avec dix élèves), et un professeur du traitement des maladies des femmes ; des médecins et des barbiers pratiquants étaient en outre attachés à l'institution.

L'école d'astrologie comprenait un surintendant, un adjoint, un professeur d'astrologie et de divination, un professeur de science du calendrier, un professeur d'astronomie (chacun avec dix élèves) ; il y avait aussi deux professeurs de chronométrie.

L'école de musique comprenait un surintendant, un adjoint, quatre professeurs de chant, trente chanteurs, cent élèves de l'art du chant et cent élèves de l'art de la danse.

Il y avait en outre, dans chaque province, un médecin chargé d'instruire des élèves dont le nombre était proportionnel à celui des élèves de l'école provinciale.

Les fonctions de professeur et de professeur adjoint à l'université impériale ne devaient être confiées qu'à des personnes dont la science et la conduite les rendaient dignes de cet honneur. Les professeurs des écoles provinciales devaient être choisis parmi les habitants de la province ; et, s'il ne s'y rencontrait pas de personnes dûment qualifiées pour cet office, la province devait s'adresser au ministère des cérémonies, qui désignait un candidat capable.

Les étudiants de l'université étaient choisis parmi les enfants des familles des cinq premières classes de la hiérarchie sociale japonaise ; mais, dans des circonstances exceptionnelles, l'admission était accordée à des enfants d'un rang inférieur, jusqu'à la huitième classe inclusivement. Les élèves des écoles de province étaient choisis parmi les enfants des gouverneurs de district qui montraient des dispositions pour l'étude. L'âge d'admission était fixé entre treize et seize ans. La durée des études à l'université était de neuf ans : ceux des élèves qui, à l'expiration de ce terme, n'étaient pas admis à entrer dans l'administration impériale, étaient renvoyés à leurs familles. Les élèves apprenaient en premier lieu la prononciation des caractères chinois ; c'était seulement lorsqu'ils la connaissaient parfaitement qu'on leur enseignait la signification de ces caractères. Les livres classiques étudiés étaient en première ligne le Kôkio, ou Livre du devoir filial, et le Rongo, ou Philosophie de Confucius ; à ces deux livres principaux venaient s'enjoindre un certain nombre d'autres, qui variaient suivant la spécialité à laquelle l'élève se consacrait. Pour être admis à entrer dans l'administration, il fallait avoir lu plus de deux livres classiques ; les élèves des écoles de province qui désiraient lire plus de deux livres étaient transférés à l'université.

C'était le ministère des cérémonies qui faisait subir aux étudiants de l'université l'examen final. Les candidats étaient partages en six catégories : premièrement, ceux qui avaient montré de grands talents ; secondement, ceux qui avaient étudié au moins deux classiques chinois ; troisièmement, ceux qui avaient étudié la science politique et lu les deux livres Jiga (lexique chinois) et Monzen (chrestomathie chinoise) ; quatrièmement, les étudiants en jurisprudence ; cinquièmement, les étudiants en calligraphie ; sixièmement, les étudiants en mathématiques. Les épreuves des candidats de la première catégorie consistaient en deux compositions sur des questions politiques ; ceux de la seconde catégorie devaient expliquer des morceaux extraits des divers classiques chinois ; ceux de la troisième avaient à traiter deux questions de science politique, et à lire des morceaux extraits des plus célèbres classiques chinois ; ceux de la quatrième devaient expliquer des morceaux tirés des livres chinois sur la législation et des classiques ; ceux de la cinquième subissaient des épreuves écrites dans lesquelles on s'attachait exclusivement à la facilité et à l'élégance de la main, et non au style des caractères ; enfin ceux de la sixième avaient à expliquer des théorèmes tirés des ouvrages mathématiques chinois. Ceux des candidats qui obtenaient, à la suite de l'examen, le premier ou le second degré, étaient seuls admis dans l'administration.

II y avait des examens particuliers pour les classes d'astronomie, d'astrologie, de médecine et d'acuponcture.

Les trois siècles qui suivirent la création de l'université impériale sont regardés comme l'époque la plus florissante des lettres japonaises ; mais à partir de l'an 1000 environ, les écoles commencèrent à décliner, et, durant la longue période de guerres qui suivit, l'instruction publique tut négligée.

Le fondateur de la dynastie des shoguns, Iyeyasu Tokugawa, fut à la fois le réorganisateur politique du pays, livré avant lui à l'anarchie, et le restaurateur des études. Pour remplacer l'ancienne université impériale qui avait cessé d'exister, il établit à Yedo, sous le nom de Collège de Confucius, une grande école qui réunit trois mille étudiants. Plusieurs des principaux daïmios créèrent aussi des écoles dans leurs provinces. Ces diverses écoles, toutefois, n'admettaient au nombre de leurs élèves que des jeunes gens appartenant à la classe des samuraïs ou nobles. Les marchands, les agriculteurs ou les artisans qui désiraient donner de l'instruction à leurs enfants devaient les confier aux soins d'instituteurs privés ; mais quoique le gouvernement ne fît rien pour l'instruction du peuple, le nombre des Japonais de la classe inférieure qui apprenaient à lire et à écrire les formes les plus simples de la langue, ainsi qu'à compter au moyen de l'abaque, était assez considérable. Les femmes, quel que fût leur rang, n'étaient pas admises aux écoles publiques ; elles ne recevaient qu'une éducation limitée, n'apprenaient à lire que les livres écrits en style vulgaire, et n'étudiaient pas les classiques chinois. Il y eut cependant quelques exceptions à la règle, et la littérature japonaise compte un certain nombre de femmes auteurs qui se sont distinguées par leur érudition ou leur talent poétique.

L'éducation pendant la période du shogunat resta à peu de chose près ce qu'elle avait été aux époques antérieures. L'influence des Européens fut presque nulle durant tout le dix-septième et le dix-huitième siècle. Les Portugais avaient été les premiers à entrer en relations avec le Japon ; mais le gouvernement prit ombrage des intrigues qu'ils avaient nouées avec quelques daïmios, et un édit de 1639 les expulsa de l'empire. Les Hollandais leur succédèrent : ils obtinrent, en 1641, l'autorisation de s'établir à Nagasaki ; mais le Japon resta fermé à tous les autres Européens. Les Hollandais eux-mêmes furent tenus à l'écart ; une fois par an seulement, un ambassadeur de Nagasaki était admis en présence du shogun ; toute relation suivie entre les Japonais et les étrangers restait interdite ; les interprètes eux-mêmes devaient s'instruire dans l'usage de la langue hollandaise par la seule conversation, et défense leur était faite d'apprendre à lire cette langue. Au milieu du dix-huitième siècle, le shogun Yoshimune, qui s'intéressait fort aux questions d astronomie, se procura quelques livres hollandais, et, désireux d'en connaître le contenu, ordonna au directeur de sa bibliothèque, Bunzô Awoki, d'étudier ce langage. A cet effet, Awoki assista plusieurs années de suite à l'audience annuelle accordée à l'envoyé hollandais, et, avec l'aide des interprètes, il parvint à acquérir la connaissance de l'alphabet. Ayant obtenu ensuite l'autorisation de se rendre à Nagasaki, il y séjourna plusieurs années, et recueillit environ cinq cents mots hollandais ; il publia le résultat de ses études dans un abécédaire et dans un vocabulaire. Après lui, le médecin Riôtaku Maino s'adonna aussi à l'étude du hollandais. A la même époque, un autre médecin, Gempaku Sugita, aidé de quelques amis, entreprit de traduire du hollandais un traité d'anatomie : on croirait, au récit que nous font de cette hardie tentative les écrivains japonais, voir Champollion aux prises avec les hiéroglyphes égyptiens. Sugita, nous disent-ils, s'étant procuré un ouvrage hollandais sur l'anatomie, était désireux de pouvoir comparer pratiquement les doctrines contenues dans ce livre avec les anciennes croyances japonaises sur cette matière. Par une coïncidence fortuite, il" arriva qu'en ce temps-là le gouvernement ordonna de faire l'autopsie d'un criminel qui avait été exécuté, et Sugita, ayant été chargé de cette opération de concert avec Maino, trouva que les dessins du livre hollandais correspondaient exactement à la conformation réelle des organes humains. Il constata ainsi que les anciennes croyances étaient erronées. En conséquence, il souhaita vivement que l'ouvrage étranger fût traduit, persuadé que le contenu en serait utile à la science médicale. Il ne voulut pas avoir recours aux interprètes, et s'associa seulement quelques amis. Mais Sugita ne savait comment s'y prendre, car il n'avait aucune connaissance de la langue hollandaise. Il commença par l'étude de l'alphabet hollandais, puis se familiarisa avec un certain nombre de mots. Alors il aborda la traduction proprement dite ; mais parfois la traduction d'un seul mot occupait plus d'une journée, et souvent il fallut plusieurs jours pour pénétrer le sens d'une seule phrase. Devant de si grandes difficultés, les collaborateurs de Sugita déclarèrent que l'accomplissement d'une pareille tâche était impossible ; mais Sugita répondit: « Cette oeuvre n'est pas supérieure aux forces humaines, mais il y faut l'appui du ciel ». Des jours furent fixés pour le travail en commun, et six lettrés se constituèrent en société à cet effet. Sans relâche, ces hommes conférèrent et travaillèrent ensemble année après année ; la traduction avança graduellement, et peu à peu, sans aucune aide étrangère, ils acquirent la connaissance des particularités de la langue hollandaise, de façon que chaque année ils découvraient et corrigeaient quelque erreur commise dans le travail de l'année précédente. En continuant de la sorte durant quatre ans, ils achevèrent enfin la traduction, après l’avoir écrite et remaniée onze fois. L'ouvrage fut intitulé : « Nouveau livre d'anatomie analytique ». Il fut imprimé et publié, et un exemplaire en fut présenté au gouvernement et aux principaux nobles de Kiôto. C'est ainsi que le peuple japonais apprit qu'il était possible de traduire les livres hollandais : et il apprit en même temps la vérité sur l'anatomie du corps humain : et ce double résultat fut dû à l'énergie et à la persévérance de Sugita.

D'autres savants japonais continuèrent à étudier et à traduire des livres hollandais, en sorte que pendant la première moitié du dix-neuvième siècle des idées nouvelles sur la médecine, les sciences naturelles, la géographie se répandirent dans l'empire. A partir de 1854, des traités de commerce furent conclus par le shogun avec les Américains, les Russes, les Anglais, les Français, etc., et les sciences européennes pénétrèrent de plus en plus au Japon. Une école où la médecine était enseignée selon les principes de l'Occident fut établie à Yedo, ainsi qu'une école pour l'étude des langues étrangères ; en 1860, le gouvernement envoya une ambassade aux Etats-Unis, et l'année suivante plusieurs jeunes Japonais allèrent en Europe pour y faire leurs études.

C'est alors qu'éclata la guerre civile qui amena le renversement du shogunat. Plusieurs daïmios, accusant le gouvernement de pactiser avec les étrangers, se révoltèrent ; mais le dénouement de la lutte fut tout autre qu'on n'eût pu s'y attendre. Le pouvoir du shogun fut renversé par les insurgés et l'autorité du Tenno rétablie (1868) : mais le Tenno lui-même se mil alors à la tête du parti des novateurs ; les daïmios se Virent enlever leurs anciennes prérogatives, et sur les ruines de l'ancienne féodalité s'établit un gouvernement à l'européenne. L'empire fut divisé en circonscriptions administratives appelées fu et ken. Les pu ou cités, au nombre de trois, furent formés par les trois villes de Tôkiô, de Kiôto, et d'Osaka ; les ken ou départements, au nombre de 35, comprirent le reste du territoire, à l'exception du gouvernement colonial de Yezo. La gestion des affaires fut confiée, sous l'autorité du Tenno, chef suprême du gouvernement, à neuf ministères : affaires étrangères, intérieur, finances, guerre, marine, instruction publique, travaux publics, justice, et maison impériale ; un nouveau système monétaire, fondé sur la base décimale, fut créé (l'unité monétaire est le yen, qui correspond actuellement au demi-dollar américain, et qui est divisé en cent sen). Le Tenno, comme il a été dit, transporta sa résidence à Yedo, qui prit le nom nouveau de Tôkiô ; et une ère nouvelle, qui date de 1868, fut instituée sous le nom de Meiji, qui signifie « gouverner clairement ».

L'éducation au Japon depuis la restauration de 1868. — Immédiatement après la restauration de l'autorité impériale, le gouvernement confia la direction de tout ce qui concernait l'instruction publique à un Conseil d'éducation, qui resta en fonction durant quatre ans, de 1868 à 1871 : la présidence de ce conseil fut donnée à Yêdô Yamanouchi, prince de Tosa. L'école des langues étrangères et l'école de médecine, fondées durant les dernières années du shogunat et qui avaient été fermées pendant la guerre civile, furent rouvertes et adoptées par le gouvernement ; l'ancien Collège de Confucius fut rouvert également, et il fut question de reconstituer l'ancienne université impériale : toutefois ce projet ne reçut pas d'exécution. Divers règlements relatifs à l'enseignement élémentaire, secondaire et supérieur furent publiés. Mais cette première organisation n'eut qu'une existence provisoire, et en 1871 le gouvernement, sentant le besoin d'imprimer une impulsion plus vigoureuse à l'éducation nationale, remplaça le Conseil d'éducation par un ministère de l'instruction publique (en japonais Mîmibusho).

Le premier ministre de l'instruction publique du Japon fut Takatô Oki. Ses premières créations furent le collège de jeunes filles, la bibliothèque publique et l'école normale de Tôkiô. En 1872, il publia un code scolaire général, dont les principales dispositions étaient les suivantes : L'empire, à l'exception de l'île de Yezo, qui forme un gouvernement colonial distinct, est divisé en un certain nombre de districts d'académie (originairement huit ; sept depuis 1873) ; chacun d'eux doit posséder une ou plusieurs écoles supérieures ou spéciales ; ces districts sont divisés à leur tour en districts d'école secondaire, dont chacun doit posséder une de ces écoles ; les districts d'école secondaire, enfin, sont subdivisés en districts d'école élémentaire. La durée des études à l'école élémentaire est de huit ans ; l'école comprend deux divisions, l'inférieure, pour les élèves de six à neuf ans, et la supérieure pour les élèves de dix à treize ans. L'école secondaire fait suite à l'école primaire ; elle comprend aussi deux divisions, et le cours d'études y dure six ans. Des dispositions spéciales, qui ont été modifiées depuis à diverses reprises, organisent l'enseignement supérieur et spécial, ainsi que les études des jeunes Japonais à l'étranger. La même année, l'ancien calendrier lunaire japonais fut aboli et remplacé par le calendrier grégorien.

Une ambassade japonaise avait été envoyée en Amérique et en Europe à la fin de 1871 sous la conduite de Udaijin Iwakura ; le ministère de l'instruction publique y était représenté par son principal secrétaire, Fujimaro Tanaka ; l'ambassade parcourut les principaux pays d'Europe et visita l'Exposition universelle de Vienne. A son retour, le délégué du Mombusho publia les observations qu'il avait recueillies sur l'organisation de l'instruction publique à l'étranger. Bientôt après, il fut élevé au rang de vice-ministre, ot, Takatô Oki ayant été appelé à d'autres fonctions, ce fut Fujimaro Tanaka qui devint le chef effectif du département de l'instruction publique, vers le milieu de 1873.

A ce moment, un certain nombre des élèves de l'école des langues étrangères de Tôkiô se trouvant assez avancés dans leurs études pour pouvoir suivre avec avantage des cours professés clans les langues européennes, le gouvernement créa à leur usage une institution qui reçut le nom de Kaisei Gakko ; l'inauguration solennelle de cette école fut faite par le Tenno en personne. L'enseignement y fut d'abord donné en trois langues, anglais, français et allemand ; mais comme ce système offrait des inconvénients pour la marche régulière des études, il fallut y renoncer, et depuis 1875 l'enseignement n'est plus donné qu'en anglais.

Ce fut également en 1873 que commença la publication du bulletin officiel du ministère de l'instruction publique, paraissant deux fois par mois, et que fut institué un bureau d'inspection, composé de trois surintendants et de trois inspecteurs.

Le code scolaire de 1872 prévoyait la création, dans chacun des grands districts (celui de Tôkiô non compris), d'une ou de plusieurs écoles supérieures. Il existait, depuis l'époque du shogunat, une école de langues étrangères à Nagasaki, et il en avait été établi une autre à Osaka en 1869. En 1873, deux écoles normales furent créées à Osaka et à Miyagi. L'année suivante, le ministère en établit quatre autres à Aichi, Hiroshima, Nagasaki, et Niigata ; il fonda également quatre nouvelles écoles de langues étrangères, à Aichi, à Hiroshima, à Niigata, et à Miyagi. De cette façon, chacun des districts académiques (Tôkiô non compris) se trouva pourvu d'une école de langues étrangères et d'une école normale. En outre, une école normale de jeunes filles fut créée à Tôkiô : l'impératrice contribua pour une somme de 5000 yen, prise sur sa cassette parti, culière, a la construction du bâtiment, qui fut inauguré en 1875.

L'ensemble du système scolaire était désormais achevé. Il comprenait trois catégories d'établissements : 1° les écoles établies aux frais du gouvernement et entretenues par le budget du ministère de l'instruction' publique, telles que le Kaisei Gakko et l'école de médecine à Tôkiô, les écoles de langues étrangères et les écoles normales dans chaque district académique ; 2° les écoles établies et entretenues aux frais de la population, mais recevant une subvention annuelle du ministère ; ces écoles relèvent des administrations locales, mais sont visitées et inspectées par des représentants du ministère ; 3° les écoles privées, fondées et entretenues par des particuliers, qui ont à obtenir à cet effet une autorisation de l'administration locale et à lui faire connaître leur programme et leur règlement.

Le chef du ministère, Fujimaro Tanaka, put alors (1875) présenter au Tenno, pour la première fois, un rapport sur la marche générale de l'instruction publique. Ce premier rapport indique la situation scolaire pour l'année 1873 (6° année de Meiji, en style japonais).

Pendant les années suivantes, les institutions scolaires japonaises continuèrent à se développer, malgré les résistances du parti opposé aux innovations, qui, à plusieurs reprises, suscita des insurrections locales. Le nombre des jeunes Japonais que le gouvernement envoyait achever leurs études aux Etats-Unis ou en Europe alla croissant ; les journaux, dont les premiers avaient été fondés en 1867, se multiplièrent, répandant partout les idées nouvelles. En 1876, lors de l'Exposition universelle de Philadelphie, le gouvernement envoya aux Etats Unis une mission à la tête de laquelle fut placé Fujimaro Tanaka ; c'est à cette occasion que fut rédigée la notice historique à laquelle nous avons emprunté nos renseignements : elle était destinée à faire connaître au monde civilisé les importantes réformes opérées depuis neuf années dans le système japonais d'instruction publique. En 1877, cette notice fut réimprimée en vue de l'Exposition universelle de Paris (1878) ; le Japon se lit représenter à cette nouvelle exposition par un des hauts fonctionnaires du ministère de l'instruction publique, Riuichi Kuki, qui, à son retour de cette mission, fut élevé aux fonctions de vice-ministre.

Le code scolaire de 1872 était très systématique et conçu sur une grande échelle. Mais il avait deux grands défauts, savoir: 1° il était trop général et trop uniforme ; 2° l'éducation organisée par ce code était trop dispendieuse pour la situation financière du pays. En 1879, le gouvernement modifia ces dispositions et donna beaucoup de liberté d'action aux communes. Les résultats ne répondant pas à ce qu'on' avait attendu de ce nouvel arrangement, on poussa l'année suivante à la fréquentation des écoles primaires, et on publia le programme d'ensemble de l'enseignement qui devait y être donné. Décidé à développer l’instruction générale, le gouvernement était parvenu à compléter à peu près le service de l'instruction primaire entre 1883 et 1884, lorsque, la crise financière l'obligeant à réduire ses dépenses, les dispositions prises par le ministère de l'instruction publique durent encore être modifiées.

Après la crise politique de 1886. le gouvernement publia de nouvelles instructions remaniant profondément le régime en vigueur. L'empereur promulgua des rescrits sur les écoles primaires, sur les écoles secondaires, sur les écoles normales, sur l'université impériale. L'enseignement primaire fut divisé en deux degrés, degré ordinaire et degré supérieur, chacun correspondant à une durée de quatre années de cours et avec un programme élaboré par le ministère de l'instruction publique. Le rescrit divise les écoles secondaires aussi en deux catégories, écoles secondaires ordinaires et écoles secondaires supérieures ; le gouvernement fonda, conformément à ces règles, des écoles secondaires en diverses localités, fixa les programmes et le niveau des études pour les écoles départementales. Les écoles normales sont aussi divisées en deux catégories : les écoles normales ordinaires et l'école normale supérieure ; celle-ci, dépendant du ministère de l'instruction publique, est établie à Tokio ; on y forme les professeurs et les directeurs d'écoles normales ordinaires et d'écoles secondaires ordinaires ; celles-là (une par département) préparent les directeurs et instituteurs d'écoles primaires ; l'ordonnance a fixé en outre le programme des études et leur niveau, les conditions de recrutement des élèves, et leur affectation à la sortie de l'école. L'organisation scolaire du Japon fut presque achevée dès 1886. L'idée principale de cette révision, accomplie par le ministre Mori, est restée en vigueur jusqu'à ce jour, quoique de nombreux changements de détail aient été effectués.

L'année 1890 est très importante dans l'histoire de l'éducation au Japon: cette année-là le principe directeur de l'instruction morale fut définitivement établi par le Rescrit impérial pédagogique du 30 octobre 1890. En voici le texte :

« Nos ancêtres ont donné à l'Etat de larges fondations et ont implanté profondément les vertus ; et nos sujets, par l'unanimité de leur grande loyauté et de leur affection filiale, les ont à travers lès âges déployées en perfection. Telle est l'essence de notre nationalité, et telle est aussi la source de l'éducation nationale.

« Vous, nos sujets bien-aimés, soyez des fils dévoués, des frères affectueux, des maris et des femmes aimants, et des amis fidèles ; conduisez-vous avec modestie, soyez bons pour tous ; développez vos facultés intellectuelles en apprenant les sciences et les métiers ; parfaites votre force morale. Et puis, travaillez pour l'intérêt public, dévouez-vous aux affaires publiques ; respectez la constitution nationale, obéissez aux lois du pays, et, en cas de nécessité, de tout coeur sacrifiez-vous au bien public et offrez votre plein soutien à Notre Dynastie Impériale, éternelle comme l'univers. Alors vous ne serez pas seulement nos loyaux sujets, mais vous serez aussi capables de manifester la tradition de vos ancêtres.

« Tel est le testament à nous laissé par nos ancêtres, qui doit être observé aussi bien par leurs descendants et sujets. Ces principes sont parfaits pour tous les siècles et d'une application universelle. C'est notre désir de les porter dans notre coeur en commun avec vous, nos sujets, afin que nous puissions à jamais posséder ces vertus. »

La morale nationale élaborée par l'âme japonaise était plus sociale qu'individuelle ; elle vantait le dévouement, l'altruisme, l'abnégation. Or, depuis la Restauration de 1868, l'individualisme européen avait modifié cette morale, et le nouveau Japon était le monde de l'individualisme : les idées démocratiques y avaient pénétré, et les mots de Liberté, d'Egalité et de Fraternité étaient la devise du mouvement politique depuis 1880. Mais le principe de l'instruction morale, dans les écoles, n'avait pas subi beaucoup de changement. En 1881, le ministre de l'instruction publique Kotei Fukuoka adopta le confucisme comme idéal moral, et le mouvement de réaction contre l'individualisme se fit alors vivement sentir. En 1885, Arinori Mori, qui était un homme de beaucoup d'énergie, devint ministre de l'instruction publique et adopta les idées allemandes sur l'éducation, ce qui provoqua de nouveau les discussions sur l'idée morale dans les écoles. Le Rescrit impérial pédagogique y a mis un terme.

En 1890 parut aussi une nouvelle ordonnance sur l'enseignement primaire. Le cours ordinaire de cette école devint obligatoire pour tous les enfants. En 1893, le ministère élabora un règlement destiné à servir de modèle pour les écoles complémentaires professionnelles, dont il encouragea la fondation. En 1899, l'ordonnance impériale sur les écoles secondaires ordinaires fut modifiée. Cette même année, l'éducation des jeunes filles et l'éducation professionnelle furent réorganisées et encouragées. En 1900, l'ordonnance impériale sur les écoles primaires fut encore une fois modifiée ; l'éducation, d'obligatoire qu'elle était, devint libre. En 1903, les écoles spéciales furent organisées. En 1907, l'éducation obligatoire fut rétablie, et sa durée portée à six ans ; précédemment elle durait seulement quatre ans.

Organisation actuelle de l'instruction publique. — A. MINISTERE DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE. — Le ministère de l'instruction publique a la direction générale de l'enseignement et des beaux-arts. Etabli en juillet 1871, il a, depuis sa fondation, subi un grand nombre de réorganisations. Nous donnons ci-dessous un aperçu général de ses cadres et de ses services, tels qu'ils sont aujourd'hui réglementairement constitués :

1. Le ministre de l'instruction publique, assisté d'un vice-ministre, a la direction des affaires concernant l'enseignement et les beaux-arts ;

2. Le cabinet du ministre comprend les services suivants : correspondance secrète ; correspondance générale : trésorerie ; bibliothèque ; beaux-arts ;

3. L'effectif des référendaires spéciaux du ministère est de trois, ainsi que celui des secrétaires spéciaux ;

4. Le ministère comprend trois divisions : enseignement supérieur, enseignement ordinaire, et enseignement professionnel ;

5. Les inspecteurs spéciaux de l'enseignement, au nombre de cinq, sont attachés pour leur service aux trois divisions ci-dessus ;

6. Les inspecteurs des publications, au nombre de deux, sont chargés de l'inspection des livres et atlas employés dans les écoles ;

7. Les auteurs officiels des livres, au nombre de cinq, sont chargés d'écrire les livres pour les écoles primaires ;

8. Les experts spéciaux, au nombre de trois, sont chargés du service d'architecture. Ils ont sous leurs ordres huit autres experts ;

9. Le service du ministère est complété par soixante commis.

En 1905, le personnel du ministère comprenait l'effectif suivant :

Ministre………………….………………… 1

Vice-ministre…………………….………… 1

Chefs de division………………...………… 3

Référendaires…………….………………… 2

Secrétaire particulier………………..……… 1

Secrétaires…………………………..……… 2

Experts spéciaux…………………………… 3

Inspecteurs de l'enseignement………...…… 4

Inspecteurs des publications…………….… 2

Auteurs officiels des livres………………… 5

Commis…………………………………..… 58

B. CONSEIL SUPERIEUR DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE. — Pour veiller sur l'organisation du service de l'instruction publique, représenter l'opinion publique et en transmettre les voeux au ministère, on a institué un Conseil supérieur, formé en 1896. Il discute, sur la proposition du ministre, les questions se rapportant aux points ci-dessous énumérés :

1. Fondation ou suppression des universités, des écoles dépendant du ministère, des bibliothèques ;

2. Programme général d'instruction dans les écoles dépendant du ministère, et les autres écoles, publiques ou privées ; programmes, cours, organisation et direction de ces écoles ;

3. Fréquentation des écoles primaires par les enfants d'âge scolaire ; rétribution scolaire dans ces écoles ;

4. Surveillance de l'enseignement ;

5. Livres et atlas pour les écoles ;

6. Position des professeurs des diverses écoles ;

7. Questions diverses que le ministre juge à propos de présenter aux délibérations.

Le Conseil supérieur peut présenter ses vues à l'un quelconque des ministères sur toute question intéressant l'instruction publique. Les membres du Conseil sont :

1. Les directeurs de l'école des nobles, de l'école des filles nobles, le directeur général du Musée impérial ;

2. Le chef du bureau des affaires locales au ministère de l'intérieur ;

3. Un délégué du ministère de la guerre et un délégué du ministère de la marine, choisis parmi les officiers spécialement chargés de l'instruction ;

4. Les chefs de division du ministère, deux des inspecteurs de l'enseignement ;

5. Les chefs des bureaux d'agriculture, de commerce et d'industrie du ministère de l'agriculture et du commerce ; .

6. Les recteurs des universités impériales, les doyens des facultés des universités ;

7. Les directeurs des écoles normales supérieures et de l'école normale supérieure des filles ; les directeurs des écoles supérieures de commerce ; un des directeurs des écoles industrielles supérieures ; un des directeurs des écoles supérieures ; un des directeurs des écoles spéciales de médecine ; les directeurs de l'école de langues étrangères à Tôkiô, de l'école des beaux-arts, du conservatoire de musique ;

8. Le directeur de la Bibliothèque impériale ;

9. Le principal de l'école secondaire dépendant de l'école normale supérieure, et celui de l'école supérieure des filles dépendant de l'école normale supérieure des filles ;

10. Le directeur de l'école de marine marchande ;

11. Deux des inspecteurs locaux ;

12. Deux des directeurs d'écoles normales ;

13. Deux des directeurs d'écoles publiques d'enseignement secondaire ;

14. Un des directeurs d'écoles publiques supérieures de filles ;

15. Trois des directeurs d'écoles publiques d'enseignement technique ;

16. Quatre des directeurs d'écoles privées ;

17. Le président de l'Académie impériale ;

18. Sept personnes, au plus, choisies parmi les plus compétentes et les plus expérimentées en matière d'éducation.

Le ministre peut, s'il le juge nécessaire, adjoindre au Conseil quelques membres à titre provisoire. Les membres du Conseil qui ne sont pas membres de droit sont nommés en conseil de cabinet, sur la proposition du ministre de l'instruction publique. Le président et le vice-président du Conseil sont nommés par l'empereur sur la proposition du ministre. Le mandat des membres autres que ceux de droit expire au bout de trois ans.

C. ENSEIGNEMENT PRIMAIRE. — 1. Ecoles maternelles. — La première école maternelle fut créée en 1876, comme annexe de l'école normale des filles de Tôkiô. Depuis, il en a été fondé dans tout le Japon, soit comme annexes aux écoles normales, soit comme écoles indépendantes. Le cours a une durée de trois ans. Le programme des écoles maternelles comprend: jeux variés, chants et récitation. Il y avait 313 écoles maternelles, avec 28633 enfants, en 1904.

2. Ecoles primaires. — Les écoles primaires sont fondées dans le but de donner aux enfants une éducation morale et patriotique, de leur enseigner les connaissances générales qui doivent leur être le plus utiles dans la vie, et de veiller soigneusement à leur développement physique. Les études sont divisées en deux cours : cours élémentaire et cours supérieur. Le cours élémentaire a une durée de six ans ; le cours supérieur, de deux ou trois ans. Le programme des écoles primaires élémentaires comprend : la morale, la langue japonaise, le calcul et l'arithmétique, l'histoire japonaise, la géographie, l'histoire naturel le, le dessin, le chant, la gymnastique ; on peut y ajouter les travaux manuels. Le programme des écoles primaires supérieures comprend : la morale, la langue japonaise, l'arithmétique, l'histoire, la géographie, l'histoire naturelle, le dessin, le chant, la gymnastique ; pour les filles, on y ajoute la couture. On peut ajouter à ce programme une ou plusieurs des études suivantes : géométrie élémentaire, langues étrangères, agriculture, commerce, travaux manuels. Dans les écoles supérieures on pourra, suivant les localités, faire un ou plusieurs cours spéciaux d'agriculture, de commerce, ou d'arts et métiers ; on pourra aussi instituer des cours supplémentaires dans les écoles supérieures ou élémentaires. En 1904, le nombre des enfants d'âge scolaire était de 6 685 422. Sur ce nombre, 6 392 336 fréquentaient une école, et 293 086 ne recevaient pas d'instruction, c'est-à-dire que 95, 62 % des enfants d'âge scolaire au Japon sont dans les écoles.

Dans chaque arrondissement il y a un inspecteur de l'enseignement, que le préfet nomme ou révoque. Cet inspecteur d'arrondissement reçoit le même traitement que les fonctionnaires de la sous-préfecture soldés par le département.

3. Ecoles d'aveugles et de sourds-muets. — Avant la Restauration, on ne s'occupait pas au Japon de l'instruction des aveugles : l'acuponcture, le massage et la musique étaient les seuls arts dont la pratique pût leur fournir des moyens d'existence. Les sourds-muets n'avaient comme ressources qu'un ou deux métiers. C'est en 1879 que des personnes charitables fondèrent à Tôkiô une école pour les aveugles et les sourds-muets, école qui peu de temps après fut soutenue par le département, puis subventionnée par le ministère de la maison de l'empereur, ce qui lui permit de s'agrandir. Depuis, il en a été fondé dans plusieurs départements. En 1904, il y avait 25 écoles publiques ou privées de ce genre, avec 585 sourds-muets et 855 aveugles.

D. — ENSEIGNEMENT SECONDAIRE. — 1. Ecoles secondaires de garçons. — Les écoles secondaires sont fondées dans le but de donner aux garçons une instruction générale supérieure. Les élèves doivent, pour être admis, être âgés de douze ans accomplis et avoir achevé l'école primaire élémentaire, ou posséder une instruction équivalente. Le programme comprend : morale, japonais, chinois classique, langues étrangères, histoire, géographie, mathématiques, histoire naturelle, physique, chimie, législation et économie politique, dessin, chant, gymnastique. La durée des études est de cinq années. Il y avait, en 1904, 2 écoles secondaires officielles, 226 écoles secondaires publiques, et 43 écoles secondaires privées. Le nombre des élèves était de 104963.

2. — Ecoles supérieures de filles. — Le but de l'école supérieure de filles est d'achever l'instruction générale des jeunes filles. Tout arrondissement, toute ville ou commune ou union scolaire peut fonder des écoles supérieures de filles suivant les circonstances locales, mais à la condition de ne pas arrêter le développement de l'organisation de son enseignement primaire. La durée des études est ordinairement de quatre ans ; cette durée peut toutefois être augmentée ou diminuée d'une année suivant les circonstances locales. On peut instituer dans ces écoles des cours complémentaires d'une durée égale ou inférieure à deux années. Les jeunes filles doivent, pour entrer à ces écoles, être âgées de douze ans au moins, et avoir achevé l'école primaire élémentaire ou posséder une instruction équivalente. On peut établir dans ces écoles des cours spéciaux d arts ou de professions utiles aux femmes ; ces cours sont facultatifs. On peut aussi établir au bénéfice des élèves sortant de ces écoles certains cours spéciaux pour les jeunes filles qui désireraient les suivre. Le programme comprend : morale, langue japonaise, langues étrangères, histoire, géographie, arithmétique, sciences, économie domestique, couture, dessin, musique, gymnastique, pédagogie, travaux manuels. Il y avait en 1904 une école supérieure officielle de filles avec 344 élèves, 88 écoles supérieures publiques de filles avec 23 521 élèves, et 11 écoles supérieures privées de filles avec 2980 élèves.

E. — ENSEIGNEMENT SUPERIEUR. — 1. Universités. — Il y a trois universités impériales, l'une à Tôkiô, une autre à Kiôto, la troisième à Sapporo (dans l'île de Hokkaido). L'université de Tôkiô a été créée lors de la réunion, qui eut lieu en 1877, de l'école Kaisei à l'école de médecine de Tôkiô. Celle de Kiôto a été créée en 1897 ; celle de Sapporo en 1907. Les universités impériales sont fondées dans le but d'enseigner et d'étudier à fond les sciences et les arts les plus importants pour l'Etat. Les universités comprennent une école des hautes études et des facultés. Dans la première, on se livre à une étude approfondie des sciences et des arts ; dans les secondes, on en enseigne la théorie et l'application. Les élèves ayant passé avec succès l'examen de fin d'études reçoivent un diplôme. Les recteurs des universités dirigent l'enseignement dans toute ses branches, et sont responsables de l'ordre intérieur. Les universités ont un Conseil composé des doyens de toutes les facultés et d'un professeur de chaque faculté. Le Conseil est réuni par le recteur de l'université et présidé par lui.

L'université impériale de Tôkiô comprend une école des hautes études, ainsi que les facultés de droit, de médecine, de génie civil, des lettres, des sciences, et d'agriculture. La faculté de droit est divisée en deux sections : droit, sciences politiques. La faculté de médecine est également divisée en deux sections : médecine, pharmacie ; elle possède aussi un cours d'hygiène publique. La faculté de génie civil se compose de neuf sections : construction, machines, architecture navale, armes, électricité, architecture, chimie appliquée, poudres, mines et métallurgie. La faculté des lettres se compose de trois sections : philosophie, histoire, philologie. La faculté des sciences comprend sept sections : mathématiques, astronomie, physique, chimie, zoologie, botanique, géologie. La faculté d'agriculture comprend quatre sections : agriculture, chimie agricole, sylviculture, médecine vétérinaire. L'université de Kiôto possède les facultés de droit, de médecine, des lettres, des sciences, du génie civil. L'université de Sapporo n'a jusqu'à présent que la faculté d'agriculture.

Le rapport indique, pour le nombre des élèves dans l'université impériale de Tôkiô, les chiffres suivants en 1904 : dans l'école des hautes études, 698 étudiants : dans la faculté de droit 1457 étudiants ; dans la faculté de médecine, 495 étudiants ; dans la faculté de génie civil, 541 étudiants ; dans la faculté des lettres, 469 étudiants ; dans la faculté des sciences, 111 étudiants ; dans la faculté d'agriculture, 197 étudiants ; au total 3968 étudiants ; il y a 121 professeurs, 68 chargés de cours, 73 maîtres de conférences ; 16 étrangers enseignent comme professeurs. Dans l'université impériale de Kiôto, il y a 67 professeurs, 28 chargés de cours, 36 maîtres de conférences, 1396 étudiants.

2. Ecoles supérieures. — Les écoles supérieures s'appelaient d'abord écoles secondaires supérieures. La loi de 1886 sur les écoles secondaires a maintenu la division du Japon en circonscriptions d'enseignement ou académies, dans chacune desquelles existe une école de l'Etat où l'on donne l'instruction nécessaire aux jeunes gens désirant, à leur sortie, embrasser une profession ou entrer à l'université.

On enseigne dans ces écoles, en plus des matières générales, le droit, la médecine, le génie civil, les lettres, les sciences, l'agriculture et le commerce. En vertu de la loi de 1894, toutes ces écoles durent prendre le nom d'écoles supérieures ; elles donnent, depuis lors, surtout l'enseignement préparant à l'entrée dans les universités impériales. Une école supérieure a trois sections, savoir : la première pour le droit et les Lettres, la deuxième pour le génie civil et les sciences, la troisième pour la médecine. Ces sections sont les cours préparatoires pour les facultés correspondantes. La durée des études est de trois ans. Le programme de l'examen d'entrée correspond au niveau de l'examen de sortie des écoles secondaires.

Il y a 7 écoles supérieures, avec 4690 élèves.

F. — ENSEIGNEMENT SPECIAL. — 1. Conservatoire de musique. — Le Conservatoire est destiné à former des professeurs et des artistes. Les classes sont divisées en classes préparatoires et classes régulières, celles-ci divisées elles-mêmes en cours normal et cours ordinaire. La durée du cours normal est de trois ans ; celle du cours ordinaire aussi de trois ans. A la suite du cours ordinaire vient un cours complémentaire d'une durée de deux ans. Le Conservatoire a 493 élèves.

2. Ecole des beaux-arts. — L'école est destinée à l'enseignement de la peinture, du dessin, de la sculpture, et des industries d'art. On y doit former des artistes et des professeurs de dessin. La durée des études est de quatre années pour chaque art. Il y a aussi un cours préparatoire de la durée d'une année. Outre l'école des beaux-arts de Tôkiô, il existe à Kiôto une école d'art ; d'autre part les artistes reçoivent des élèves dans leurs ateliers privés ; un certain nombre d'écoles primaires, d'écoles secondaires, d'écoles supérieures de filles, ou autres, ont des cours de dessin ou d'art.

3. Ecole de langues étrangères. — Il n'existe maintenant qu'une seule école de langues étrangères. On peut y apprendre les langues européennes et asiatiques. La durée des études est de trois années. En 1904, il y avait 36 Japonais et 11 étrangers comme professeurs, avec 992 élèves.

4. Ecoles spéciales.Il y a 5 écoles spéciales de médecine d'Etat avec 2396 élèves, 3 écoles spéciales publiques de médecine avec 1392 élèves, 2 écoles spéciales privées de médecine avec 627 élèves, 10 écoles spéciales privées de droit avec 15 741 élèves, 11 écoles spéciales privées de lettres avec 1782 élèves, 16 écoles spéciales privées de religion avec 1032 élèves.

G. — ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL. — Toutes les écoles où l'on donne l'enseignement professionnel ont été fondées depuis la Restauration. L'école de génie civil et de commerce fut organisée par le ministère de l'instruction publique ; l'école agronomique et fores tière par celui de l'agriculture et du commerce ; l'école d'agriculture de Sapporo par le ministère de l'intérieur. Ces écoles ont été dans la suite rattachées directement au ministère de l'instruction publique. L'école de génie civil et l'école agronomique et forestière ont formé deux des facultés de l'université de Tôkiô : cette nouvelle organisation a réalisé un pro grès considérable. L'école d'agriculture de Sapporo a été transformée en université (1907). En dehors de ces écoles, il existe un grand nombre d'écoles professionnelles. Si l'on range ces écoles professionnelles dans l'ordre de leur importance, on a, au degré inférieur, les écoles complémentaires professionnelles et les écoles d'apprentis ; les écoles de génie civil, d'agriculture, de commerce et de marine marchande occu pent le degré supérieur. Il y a à présent 10 écoles professionnelles supérieures d'Etat, 2887 écoles professionnelles inférieures publiques, 132 écoles professionnelles inférieures privées.

H. — ECOLES NORMALES. — 1. Ecoles normales primaires. — Les cours professés aux écoles normales d'instituteurs traitent des matières suivantes : morale, pédagogie, langue japonaise, langue chinoise classique, histoire, géographie, mathématiques, physique, chimie, histoire naturelle, écriture, dessin, musique et gymnastique. Dans les écoles normales d'institutrices, il y a des cours de morale, pédagogie, langue japonaise, langue chinoise classique, histoire, géographie, mathématiques, sciences, économie domestique, écriture, dessin, musique et gymnastique. La durée des études est de quatre ans, tant pour les instituteurs que pour les institutrices. Les principes de l'enseignement sont les suivants : Une intelligence exercée, une vertu ornée, sont les qualités maîtresses de tout instituteur et de toute institutrice ; les instituteurs et les institutrices doivent donner l'exemple du respect envers l'empereur et de l'amour du pays ; il faut donc faire en sorte que les élèves de l'école saisissent clairement les grandes obligations du dévouement au souverain et de la piété filiale, et on doit leur inspirer des sentiments du plus pur patriotisme. Le nombre des écoles normales primaires était en 1904 de 66, avec 907 professeurs et 16 378 élèves.

2. Ecoles normales supérieures. — Le but des écoles normales supérieures est de former des directeurs et des professeurs pour les écoles normales et les écoles secondaires.

Il y a deux écoles normales supérieures de garçons et une école normale supérieure de filles. Les cours des écoles normales supérieures de garçons comprennent cinq sections : cours de japonais et de chinois ; cours d'anglais ; cours de géographie et d'histoire ; cours de mathématiques, de physique et de chimie ; cours d'histoire naturelle. La durée des études est de trois années ; il y a aussi un cours préparatoire de la durée d'une année. Les élèves de troisième année pratiquent l'enseignement à l'école annexe Les deux écoles normales supérieures de garçons ont ensemble 118 professeurs et 835 élèves-maîtres.

L'école normale supérieure des filles est partagée en trois sections : lettres, sciences, et arts. La durée des études est de quatre ans. Les élèves de quatrième année font, comme exercice pratique, des cours aux enfants de l'école annexe et des écoles maternelles. Cette école a 44 professeurs et 361 élèves-maîtresses.

K. Yoshida