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Italie

Pour ce qui concerne l'histoire de l'éducation en Italie dans l'antiquité, nous renvoyons au mot Romains. Dans le présent article, nous n'avons à parler que de l'Italie au moyen âge et dans les temps modernes.

I. Résumé historique. — LE MOYEN AGE. — Dans les dernières années de la puissance latine, l'école en Italie déclina, elle aussi ; puis lorsque l'empire romain tomba par l'invasion des barbares, et qu'un monde nouveau, mystique dans ses croyances, naïf dans sa foi, surgit de ses débris, la double action du christianisme et des barbares donna le coup de grâce à l'ancienne culture païenne. Mais quoique les contemporains de l'invasion nous décrivent en toute sincérité les ruines qu'elle fit et les ténèbres dans lesquelles elle sembla ensevelir le monde, tous les historiens sont cependant d'accord dans l'affirmation que l'école ne s'éteignit pas avec l'empire, et que la politique réparatrice de Théodoric eut la gloire de sauver les études comme de restaurer les villes. Au temps de Cassiodore, le trésor public avait à sa charge des chaires de grammairiens, de rhéteurs, de jurisconsultes entourés et applaudis de la jeunesse romaine. Mais après la sanglante décadence qui marqua la fin de la domination des Goths, lorsque Rome, prise et reprise, eut souffert les horreurs de quatre assauts et qu'à la fin apparurent les Lombards « comme le fer tiré de sa gaine pour faucher ce qui restait du genre humain » (selon l'expression d'un contemporain), alors, et aussi dans le désordre des siècles suivants, tout enseignement se tut et toute science périt. En 680, les pères du concile de Latran avouèrent que « aucun d'eux ne pouvait se vanter d'exceller dans l'éloquence profane, car la fureur de nombre de peuples avait désolé ces provinces ; et les serviteurs de Dieu, réduits à vivre du travail de leurs mains, passaient des journées pleines d'angoisse » Le pape Agathon déclarait que « la science complète des Ecritures ne se trouvait pas à Rome ».

Les guerres des Lombards contre les Grecs, les incursions des Sarrasins, l'établissement de la domination franque, les luttes des successeurs de Charlemagne remplirent le reste de cette période, durant laquelle la nuit se fait toujours plus profonde. Pas d'écoles, sinon auprès des cathédrales et dans l'intérieur des cloîtres ; ces écoles, d'un caractère exclusivement ecclésiastique, ne sont destinées qu'au recrutement du clergé. Mais les prêtres eux-mêmes restent presque toujours plongés dans une crasse ignorance, et il est rare d'en rencontrer qui sachent lire l'Evangile. Un édit du roi Lothaire, en 823, nous fait connaître les villes d'Italie où les élèves désireux d'apprendre la grammaire trouveront des maîtres : ce sont Pavie, Ivrée, Turin, Crémone, Florence, Fermo, Vérone et Cividale.

A partir du dixième siècle, un peu de lumière commence à percer les ténèbres. Sous l'influence des Arabes, dont les écoles d'Espagne étaient si florissantes, les études sont peu à peu remises en honneur dans l'Europe chrétienne, et particulièrement en Italie. Des écoles de droit se fondent à Rome, à Pavie, à Ravenne ; on n'y enseignait d'abord que le droit canon, mais, après que les Pisans eurent retrouvé les Pandectes à Amalfi en 1135, le droit romain eut à son tour ses docteurs, et de nombreux élèves se pressèrent aux écoles de Bologne, de Padoue, de Modène, de Parme, de Plaisance, de Mantoue, de Pise, de Gênes, de Naples. L'empereur Frédéric II protégea les légistes ; il encouragea aussi l'étude de la médecine, et, lorsqu'il fonda l'université de Naples en 1224, il y institua une chaire d'anatomie. Les cités italiennes, fières de leurs libertés municipales, riches par leur commerce et leur industrie, ne se contentèrent pas de leur prospérité matérielle ; elles voulurent y joindre la culture des lettres, des arts et des sciences, et rivalisèrent entre elles sur ce terrain comme sur celui des conquêtes politiques et commerciales.

Avec le Dante (1265-1321) se termine le moyen âge en Italie. Le grand poète florentin a résumé dans sa Divine Comédie les croyances de son époque, en même temps que, dépassant l'horizon de ses contemporains par la puissance de son génie, il entrevoit déjà l'aube de la Renaissance.

LA RENAISSANCE. — C'est d'Italie que partit le grand mouvement d'émancipation intellectuelle qu'on a appelé la Renaissance. Dès le milieu du quatorzième siècle, Pétrarque et Boccace donnent une vive impulsion à l'étude de l'antiquité.

L'Italie posséda au quinzième siècle un grand éducateur, le célèbre Victorin de Feltre, qui, appelé à Mantoue en 1425 par le marquis François de Gonzague, y fonda l'école modèle connue sous le nom de Maison joyeuse. Il n'a pas laissé d'écrits ; mais son exemple exerça sur ses contemporains une influence féconde. Il sera parlé de son oeuvre avec détails dans l'article spécial qui lui est consacré.

Nous n'avons pas à faire ici l'histoire des lettres et des arts en Italie au quinzième et au seizième siècles ; n'ayant à parler que des écoles et de la littérature pédagogique, nous mentionnerons seulement ceux des écrivains italiens qui ont traité de l'art d'instruire la jeunesse. Parmi ceux-ci, les plus connus, au quinzième siècle, sont Pier Paolo Vergerio, Filelfo (Philelphe), Leon Battista Alberti, Enea Silvio Piccolomini (Pie II) ; enfin Maffeo Vegio, auteur d'un Traité sur l'éducation, et Antonio de Ferraris, dit le Galateo, dont l'ouvrage intitulé l'Education des Italiens est rempli de sentiments élevés et patriotiques. Ces deux ouvrages sont écrits en latin. Au siècle suivant, on trouve le livre du cardinal Sadolet, De liberis recte instituendis ; celui du cardinal Alexandre Piccolomini, Dell' Istituzione morale, libri XII ; les dialogues italiens de Sperone Speroni sur divers sujets d'éducation et son discours sur l'allaitement maternel ; l'ouvrage de Francesco Tommasi intitulé : Il reggimento del padre di famiglia ; et enfin le célèbre dialogue du Tasse, Il padre di famiglia, où le grand poète expose à Scipion de Gonzague ses vues sur l'éducation.

LA REACTION CATHOLIQUE. LES JESUITES. LES ECOLES DU PEUPLE. — Le seizième siècle s'acheva tristement pour l'Italie. Après avoir servi longuement de champ de bataille aux souverains qui s'en disputaient la possession, elle tomba définitivement sous la domination étrangère. En même temps, l'Eglise, qui s'était vue menacée dans son unité, faisait un effort suprême pour raffermir sa puissance et pour étouffer l'esprit nouveau. Elle appelait à son secours l'inquisition, réorganisée à Rome sous le pontificat de Paul III, et les Jésuites, auxquels furent confiés les collèges de la plupart des villes d'Italie. Ce régime de compression des intelligences et des consciences ne tarda pas à stériliser le génie italien. Le grand Galilée, si cruellement persécuté par le Saint-Office, pour avoir démontré le mouvement de la terre, fut le dernier représentant de la Renaissance.

En même temps que l'Eglise confiait aux Jésuites l'éducation des enfants des classes aisées, elle s'occupait aussi d'ouvrir des écoles pour les pauvres. Saint Charles Borromée, archevêque de Milan, créa les premières écoles du dimanche ; un peu plus tard, Calasanz fonda les écoles pies et l'institut des Piaristes. D'autres congrégations du même genre se fondèrent successivement ; mais leurs efforts pour tirer le peuple de l'ignorance ne produisirent que de minimes résultats, et les masses restèrent presque partout plongées dans l'ignorance et la superstition.

LE DIX-HUITIEME SIECLE. — Le dix-septième siècle n'offre en Italie que le triste spectacle d'une décadence toujours plus profonde. Mais avec le dix-huitième siècle la domination des Jésuites va finir. Le satirique Parini flagelle la corruption et la sottise de son temps ; dans son Ode à l'éducation, il place dans la bouche du centaure Chiron des préceptes remplis d'élévation et de sagesse. Gaspare Gozzi, le moraliste vénitien, publie divers ouvrages sur la réforme des études et sur les écoles qu'il faudrait substituer à celles des Jésuites. Des philosophes et des jurisconsultes, Genovesi, Vico, Beccaria, Filangieri, traitent avec hardiesse les questions de législation et d'économie sociale ; ils démontrent que le devoir d'un bon gouvernement est de combattre l'ignorance. Grâce à leurs écrits, une opinion publique commence à renaître en Italie, et les princes se montrent disposés à écouter les hommes éclairés qui leur proposent des réformes. La Toscane et la Lombardie, sous le gouvernement du duc Léopold et de Joseph II, virent s'accomplir des progrès réels : Léopold s'occupa sérieusement de l'instruction populaire ; Joseph fît participer la Lombardie aux réformes scolaires dont l'Autriche avait été dotée par l'initiative de Felbiger: Milan vit s'ouvrir une école normale, dont la direction fut confiée au Père Soave ; c'est à cet éducateur distingué que sont dus les premiers livres élémentaires que l'Italie ait possédés.

Avec la Révolution française une ère nouvelle allait commencer.

LA DOMINATION FRANÇAISE. — Nous ne redirons pas ici les péripéties des longues guerres qui aboutirent au renversement successif des trônes de tous les anciens souverains italiens, ni des tentatives faites à la fin du dix-huitième siècle pour organiser en républiques le Milanais, la Ligurie, les Etats romains et napolitains. Rappelons seulement que, six ans après la proclamation de Napoléon comme empereur, toute Italie péninsulaire reconnaissait la domination française. Le Piémont, la Ligurie, Parme, la Toscane, une partie des anciens Etats de l'Eglise avec Rome, étaient directement annexés à l'empire napoléonien ; la Lombardie, la Vénétie, Modène, la Romagne, les Marches, formaient le royaume d'Italie, où Eugène de Beauharnais remplissait les fonctions de vice-roi ; le royaume de Naples, gouverné d'abord par Joseph Bonaparte, était échu ensuite à Murat.

Dans les parties de l'Italie qui avaient été transformées en départements de l'empire français, l'instruction publique fut organisée conformément au décret impérial de 1808.

Le régime français dota l'Italie de créations utiles et balaya la plupart des anciens abus. Mais il ne pouvait devenir pour ce pays le point de départ d'une régénération complète, parce qu'au lieu de s'appuyer uniquement sur la raison et la justice, il avait ses racines dans le militarisme et l'esprit de conquête. Aussi lorsque s'écroula la fortune de Napoléon, presque tout ce que celui-ci avait fondé disparut avec lui.

L'ITALIE DE 1814 A LA LOI DE 1859. — La Restauration de 1814 s'efforça de remettre partout les choses sur l'ancien pied ; l'empereur François Ier déclara aux Lombards qu'il voulait « des sujets obéissants, et non des citoyens éclairés » ; l'Italie tout entière subit de nouveau la domination hypocrite des prêtres ou le joug brutal des princes absolus.

Cependant au bout de peu d'années, les souverains se virent obligés de tenir compte dans une certaine mesure des aspirations du parti libéral, et durent faire quelques concessions.

La Toscane jouissait d'un régime plus libéral que les autres parties de l'Italie : un groupe d'hommes généreux entreprit d'y travailler au relèvement des classes populaires par l'éducation ; c'étaient Lambruschini, Enrico Mayer, Thouar, Tommaseo, Franceschi ; ils préconisèrent le système d'enseignement mutuel, réorganisèrent et multiplièrent les salles d'asile, créèrent des écoles du dimanche. Une publication périodique, la Guida dell'educatore, leur servit d'organe. En Lombardie, des pédagogues distingués, Sacchi, Gherardini, Cherubini, écrivirent des livres classiques, qui remplacèrent les manuels du Père Soave, et jetèrent les fondements de la méthodologie scolaire. Aporti, qui avait ouvert à Crémone, dès 1827, une salle d'asile modèle, et qui publia en 1833 son Manuel (Manuale degli asili infantili), se vit encouragé par le gouvernement autrichien. Le Piémont, sortant enfin de sa torpeur, appela Aporti, qui ouvrit à Turin, en 1844, un cours de pédagogie et de méthode. La même année, un disciple du Père Girard, Vitale Rosi, publiait son Manuel de l'école préparatoire, introduction à un cours d'études élémentaires, qui exerça une heureuse influence.

L'année 1848 fit naître dans toute l'Italie d'enthousiastes espérances de liberté politique et d'émancipation du joug étranger, que ruinèrent les désastres de 1849. Mais le Piémont, après avoir vu sa force militaire anéantie à Novare, comprit enfin que c'était par l'éducation populaire qu'il fallait travailler à l'oeuvre de la régénération et de l'unité nationale. Déjà un ministère de l'instruction publique avait été créé par le décret du 30 novembre 1847, et la loi du 4 octobre 1848 avait imposé à chaque commune l'obligation d'avoir une école. La Société d'instruction et d'éducation se fonda en 1849 à Turin, sous les auspices de Gioberti, de Rayneri, de Berti ; elle créa un journal dans lequel furent étudiées toutes les questions intéressant l'éducation. « Sous sa puissante impulsion, les institutions du passé, les méthodes vieillies et routinières, rajeunirent et prirent une vie nouvelle : des écoles primaires et des salles d'asile se fondèrent ; les écoles de filles et les écoles normales furent créées ; l'enseignement technique et professionnel, inconnu jusqu'alors en Italie, trouva un accueil empressé, comme étant celui qui répondait aux besoins de l'époque ; des internats secondaires, dont on espérait plus qu'ils n'ont tenu, furent fondés dans les principales villes ; l'université vit se créer des chaires nouvelles, et les facultés reçurent une direction plus scientifique. » (E. Celesia.)

Ce mouvement en faveur de l'instruction publique aboutit dix ans plus tard, après la guerre qui affranchit la Lombardie de la domination de l'Autriche, à la loi du 13 novembre 1859, rédigée par le ministre Casati et qui porte son nom. Cette loi, faite d'abord pour le Piémont, et étendue successivement à l'Italie entière, est restée jusqu'à présent la loi organique de l'instruction publique en Italie.

DE LA LOI DE 1859 A NOS JOURS. — La loi du 13 novembre 1859 contient, en résumé, les dispositions suivantes : l'instruction publique comprend l'enseignement supérieur, l'enseignement secondaire classique, l'enseignement technique, et l'enseignement primaire. L'enseignement supérieur est donné dans les universités (università). L'enseignement secondaire comprend deux degrés : celui du degré inférieur est donné dans les gymnases (ginnasi), celui du degré supérieur dans les lycées (licei). Il y a en outre des internats secondaires nationaux et communaux, sous le nom de convitti nazionali et de convitti comunali, et des collèges classiques municipaux. L'enseignement technique comprend deux degrés : celui du degré inférieur se donne dans les écoles techniques (scuole tecniche), celui du degré supérieur dans les instituts techniques (istituti tecnici) ; il y a en outre des écoles techniques municipales. L'enseignement primaire ou élémentaire a aussi deux degrés ; le programme du degré inférieur comprend, comme matières obligatoires : l'enseignement religieux, la lecture, l'écriture, l'arithmétique élémentaire, la langue italienne, des notions élémentaires du système métrique ; le programme du degré supérieur comprend, outre le développement des matières du degré inférieur, les règles de la composition, la calligraphie, la tenue des livres, la géographie élémentaire, l'exposé des faits les plus saillants de l'histoire nationale, les notions des sciences physiques et naturelles applicables aux usages les plus ordinaires de la vie ; à ces matières sont ajoutés, dans les écoles supérieures de garçons, les premiers éléments de la géométrie et le dessin linéaire ; dans celles de filles, les travaux à l'aiguille. Le cours inférieur et le cours supérieur durent chacun deux ans ; ils se composent l'un et l'autre de deux classes distinctes. Nul ne peut être inscrit au cours inférieur en qualité d'élève régulier s'il n'a atteint l'âge de six ans. L'instruction élémentaire est donnée gratuitement dans toutes les communes. Celles ci y pourvoient en proportion de leurs ressources, et selon les besoins de leurs habitants. Dans chaque commune, il doit y avoir au moins une école où sera donnée aux jeunes garçons l'instruction élémentaire du degré inférieur, et une autre de même degré pour les jeunes filles: d'autres écoles devront également être ouvertes, au moins pendant une partie de l'année, dans les fractions de communes dont les habitants ne peuvent pas, à cause de la distance, profiter de l'école communale, et où il y aura plus de cinquante enfants. Deux communes peuvent, dans certains cas, être autorisées à n'avoir qu'une seule école. La fréquentation de l'école primaire du degré inférieur est obligatoire. Il doit être établi des écoles élémentaires du degré supérieur, de garçons et de filles, dans toutes les communes de plus de 4000 habitants. Pour enseigner dans une école élémentaire publique, il faut être porteur d'un brevet de capacité. Le traitement des instituteurs est à la charge des communes. Il est établi un certain nombre d'écoles normales pour former des instituteurs et des institutrices : ces écoles sont entretenues par l'Etat.

Obligation. — Le 22 juin 1868, le Sénat italien, « considérant que la loi du 13 novembre 1859 a déclaré l'instruction élémentaire obligatoire, mais sans spécifier de sanction relative à cette obligation, et que l'instruction primaire gratuite et obligatoire a produit dans plusieurs pays d'excellents effets, » invita le gouvernement à ouvrir une enquête sur la situation de l'enseignement primaire en Italie. Cette enquête aboutit à la présentation, par le ministre Correnti, d'un projet de loi (17 avril 1872) qui ne fut pas discuté, le ministre ayant été renversé peu après. M. Scialoja présenta l'année suivante (28 janvier 1873) un autre projet qui instituait la sanction de l'obligation sous la forme d'une amende ; mais ce projet, par une singulière contradiction, rétablissait la rétribution scolaire, afin, disait l'exposé des motifs, de pouvoir améliorer les traitements du personnel enseignant.

Le projet de M. Scialoja ne fut pas adopté, non plus que celui de son successeur M. Bonghi (du 26 février 1875). Enfin M. Coppino, qui remplaça M. Bonghi, eut plus de succès : son projet, présenté à la Chambre des députés, le 16 décembre 18/6, est devenu la loi du 15 juillet 1877 sur l'obligation.

Voici les dispositions essentielles de la loi du 15 juillet 1877, concernant l'obligation et les sanctions pénales y relatives :

« ARTICLE PREMIER. — Les enfants de l'un et de l'autre sexe qui ont atteint l'âge de six ans révolus, et à l'instruction desquels les parents ou ceux qui les remplacent ne pourvoient pas soit au moyen des écoles privées, aux termes des articles 355 et 356 de la loi du 13 novembre 1859, soit au moyen de l'enseignement domestique, doivent être envoyés à l'école élémentaire de la commune.

« L'instruction privée se constate devant l'autorité municipale, par la présentation au syndic du registre de l'école, et l'instruction domestique par la déclaration des parents ou de leurs remplaçants, indiquant les moyens d'enseignement employés.

« L'obligation de pourvoir à l'instruction des enfants trouvés, des orphelins et des autres enfants sans famille accueillis dans les établissements de bienfaisance, incombe aux directeurs de ces établissements ; et lorsque ces enfants sont confiés aux mains de particuliers, l'obligation est transférée au chef de la famille qui reçoit l'enfant.

« ART. 2. — L'obligation mentionnée à l'article 1er reste limitée au cours élémentaire inférieur, qui dure dans la règle jusqu'à la neuvième année, et comprend les premières notions des devoirs de l'homme et du citoyen, la lecture, la calligraphie, les rudiments de la langue italienne, de l'arithmétique et du système métrique ; elle peut cesser plus tôt si l'enfant subit avec succès, sur les matières énumérées ci-dessus, un examen qui aura lieu soit à l'école, soit devant le délégué scolaire, en présence des parents ou d'autres représentants de la famille. Si l'élève échoue, l'obligation est prolongée jusqu'à la fin de la dixième année.

« ART. 3. — Les parents ou leurs remplaçants, s'ils n'obéissent pas spontanément aux prescriptions de la loi, seront convoqués par le syndic (maire) et engagés à s'y conformer. S'ils ne comparaissent pas au bureau municipal, ou ne justifient pas l'absence de leurs enfants, ou ne les envoient pas à l'école publique dans le délai d'une semaine après l'avertissement, ils seront punis de l'amende établie par l'article 4.

« ART. 6. — Durant les vacances, les élèves seront tenus de fréquenter l'école du dimanche là où cette école existe.

« Après avoir achevé le cours élémentaire inférieur, les élèves devront fréquenter pendant un an l'école du soir dans les communes où cette école sera établie.

« ART. 8. — Les dispositions pénales édictées par la présente loi sont applicables dans tous les chefs-lieux de communes, et dans les fractions de commune où existe une école communale et où la population est agglomérée ou habite dans un rayon qui ne dépasse pas deux kilomètres. »

Une loi du 7 juillet 1878 rendit la gymnastique éducative obligatoire dans les écoles, et marqua ainsi un nouveau progrès dans l'éducation scolaire élémentaire. En effet, affirmer la nécessité pour l'éducation physique de marcher du même pas que l'éducation intellectuelle et morale était certes orienter l'école vers les sages principes d'une éducation rationnelle.

Une loi du 16 décembre 1878, duc au ministre De Sanctis, a organisé une caisse de retraites (Monte dette pensioni) en faveur des instituteurs et des institutrices. Le Monte delle pensioni a aujourd'hui un fonds d'environ 140 millions de francs, et c'est une des institutions qui font le plus d'honneur à l'Italie.

Le 16 février 1888 fut publié le Règlement unique pour l'instruction élémentaire ; et, par un décret royal du 25 novembre de la même année, on apporta des modifications radicales aux programmes didactiques. Les Instructions qui précédaient les nouveaux programmes recommandaient d'une façon spéciale à l'instituteur « de se rappeler que l'école doit poursuivre trois buts : donner de la vigueur au corps, de la pénétration à l'intelligence, de la rectitude à l’esprit, et de diriger, dans la mesure du possible, ses efforts en toutes choses de façon à les obtenir». Ces Instructions, dues à la plume du regretté Aristide Ga-belli, résumaient admirablement toute la conception de la pédagogie moderne. Mais les programmes ne correspondaient nullement aux Instructions, ils étaient excessifs quant à la matière, et défectueux quant à la méthode, et ils laissèrent subsister un vif désir d'une nouvelle réforme.

Celle-ci vint enfin en 1894, par le décret royal du 29 novembre ; elle s'inspira de la formule du ministre Baccelli : « Enseigner au peuple le nécessaire, soigner son éducation le plus possible ».

Le décret royal du 9 octobre 1895, afin d'unir dans un texte unique toutes les dispositions législatives et réglementaires sur l'organisation des écoles élémentaires et sur les conditions du corps enseignant, publia un Règlement général, qui est resté en vigueur jusqu'à la publication du nouveau règlement du 6 février 1908, que les lois récentes ont rendu nécessaire.

Le 8 juillet 1904 fut publiée une loi contenant des « dispositions pour l'école et les maîtres élémentaires », par lesquelles on cherchait principalement à compléter et à rendre plus efficaces les lois de 1859 et de 1877. Cette loi, due au ministre Orlando, marqua dans l'ordre des écoles primaires un progrès très notable. C'est, en effet, à cette loi qu'on doit :

1° L'extension de l'obligation de l'instruction jusqu'à l'âge de douze ans, la où des écoles élémentaires supérieures existent ; celles-ci, dont la fréquentation, dans de nombreuses communes, était facultative, sont ainsi devenues d'une fréquentation obligatoire ; le concours de l'Etat leur est assuré, à raison de 150 francs par classe, et la commune a la faculté d'imposer une contribution scolaire, sous réserve de l'approbation du Conseil scolaire provincial ;

2° La faculté pour les communes d'inscrire à leur budget un crédit pour secourir les enfants appartenant aux familles pauvres, soit par des repas scolaires, soit par la distribution de vêtements, de livres et d'autres choses nécessaires pour l'instruction, même si les communes dépassent la limite légale de la surtaxe ;

3° L'institution de l'examen de maturité (esame di maturità), à la suite duquel tout enfant peut être admis, au sortir de la quatrième classe élémentaire, à entrer dans une école secondaire. De cette façon, l'examen d'admission à la première classe des écoles secondaires est aboli ;

4° L'institution d une sixième classe dans toutes les communes où les cours élémentaires pour garçons et pour filles sont complets, avec le programme suivant: italien, notions d'histoire civile d'Italie au dix-neuvième siècle, en relation avec les faits économiques ; notions des institutions civiles de l'Etat et de morale civile ; géographie générale et économique, en particulier de l'Italie ; arithmétique et notions de géométrie ; notions d'économie domestique et de comptabilité pratique ; notions de sciences physiques et naturelles et d'hygiène ; calligraphie et dessin. Dans les classes de filles on ajoutera les travaux à l'aiguille. En outre, et quand les besoins locaux l'exigeront, on instituera l'enseignement spécial du chant, du travail manuel et de l'agriculture.

Le cours primaire se termine avec la sixième classe. On obtiendra le certificat d'études de ce cours après six années d'étude, en subissant l'examen correspondant et en payant les droits de diplôme (5 francs) ;

5° L'institution de 3000 nouvelles écoles du soir et écoles dominicales pour adultes, qui s'ouvriront, en plus de celles qui existent déjà, dans les communes où la quantité moyenne des illettrés est la plus grande. On inscrira au budget de l'instruction publique la somme de 500000 francs pour rétribuer le corps enseignant.

A ce propos, le ministre de l'instruction publique, M. Rava, dans la séance du 5 juillet 1909, a fait à la Chambre les déclarations suivantes :

« Les cours du soir établis par la loi de 1904 sont au nombre de 3000 et ceux de la loi de 1906 pour le Midi (voir pages 878 et 880) au nombre de 2320, au total 5320 ; ils fonctionnent tous, et sont fréquentés par 200 000 élèves. Et il ne s'agit pas d'inscriptions tout simplement, car le nombre des élèves qui ont fréquente les cours et passé leurs examens dépasse 100 000.

« Il y a encore les cours du soir pour les adultes, de l'ancien type : l'envie de s'instruire se manifeste aussi par l'assiduité des ouvriers aux leçons des Universités populaires, dont tout le monde ressent les effets bienfaisants. »

En outre, la loi de 1904 établit de plus rigoureuses sanctions pour les cas de contravention à l'instruction obligatoire, et elle améliora sensiblement la condition juridique et financière du corps enseignant.

Ce qui distingue particulièrement cette loi, c'est d'avoir établi la séparation, réclamée depuis longtemps, entre l'école populaire, n'ayant d'autre but qu'elle-même, et l'école élémentaire, qui prépare aux études secondaires.

Laïcité. — Il faut parler ici du principe de la laïcité de l'école, qui a fait à plusieurs reprises, en Italie, l'objet de vives controverses. L'école primaire italienne n'est laïque ni par le caractère du personnel enseignant, ni par celui du programme d'études. En effet, les instituteurs et institutrices ecclésiastiques sont admis au même titre que les laïques à enseigner dans les écoles tant publiques que privées ; et la loi de 1859 place la religion au nombre des matières obligatoires d'enseignement de l'école communale (art. 315).

Cependant, dix-huit ans plus tard, la loi du 15 juillet 1877 sembla abolir cet enseignement par prétérition : en effet, en énumérant en son article 2 les matières formant le programme de l'enseignement élémentaire inférieur (voir p. 875), elle a omis la religion, et a introduit un enseignement nouveau, celui des devoirs de l'homme et du citoyen, que la loi de 1859 ne connaissait pas.

S'autorisant du silence de la loi de 1877, plusieurs villes ont rayé du programme de leurs écoles primaires l'enseignement religieux, et le gouvernement a laissé faire. Fait non moins caractéristique : les programmes de 1867 avaient inscrit au tableau d'emploi du temps des écoles normales deux leçons de religion par semaine ; lorsque M. De Sanctis publia les nouveaux programmes du 30 septembre 1880, il supprima ces leçons de religion, et les remplaça par l'enseignement « des droits et des devoirs ».

La tendance, depuis 1877, s'était donc accentuée dans le sens de la laïcité de l'enseignement, et, si la loi du 15 juillet 1877 eût existé seule, on aurait pu dire que cette laïcité était un fait accompli. Mais, par une bizarre inconséquence, on n'avait pas touché à l'article 315 de la loi de 1859 ; et même, lorsque fut publié un nouveau règlement général pour l'instruction primaire, à la date du 9 octobre 1895, on y plaça un article qui, selon le décret du ministère de l'instruction publique en date du 20 août 1906, « interprète et harmonise l'article 315 de la loi Casati et l'article 2 de la loi du 15 juillet 1877 ».

Le règlement le plus récent, celui du 6 février 1908, a tenté de concilier les différentes tendances par l'article suivant (article 3) :

« Les communes ont le devoir de pourvoir à l'instruction religieuse des élèves dont les parents la demandent, aux jours et heures établis par le Conseil scolaire provincial, au moyen des instituteurs des classes, pourvu qu'ils soient estimés aptes à cette charge et qu'ils l'acceptent, ou au moyen d'autres personnes dont l'habileté soit reconnue par le Conseil scolaire.

« Si la majorité des conseillers de la commune refusait d'organiser l'enseignement religieux, celui-ci pourra être donné, aux frais des pères de famille qui l'ont demandé, par une personne pourvue du brevet d'instituteur primaire et approuvée par le Conseil scolaire provincial. Dans ce cas, on pourra disposer, pour cet enseignement, des édifices scolaires, aux jours et heures qui seront établis par le Conseil scolaire provincial. »

La question est cependant plus controversée que jamais, et il sera nécessaire de la résoudre au plus tôt par une disposition législative qui tienne compte de l'esprit du temps et des tendances de plus en plus marquées en faveur de la laïcisation absolue des écoles.

Etat actuel. — AUTORITES SCOLAIRES. — L'organisation scolaire du royaume d'Italie est toujours celle qui fut instituée par la loi du 13 novembre 1859. Le Conseil supérieur de l'instruction publique, qui, aux termes de cette loi, se composait de 21 membres tous nommés par le roi, a été toutefois augmenté en nombre et rendu en partie électif par la loi Baccelli (12 février 1881). Une loi récente (1906) y a ajoute une section pour les écoles moyennes, composée de 8 membres, dont 4 sont nommés par le ministre et 4 par les professeurs des écoles secondaires.

L'administration scolaire provinciale est confiée à un Conseil scolaire. Les Conseils scolaires provinciaux, les provéditeurs, les inspecteurs d'arrondissement ont gardé les attributions que leur ont données le décret dû 22 septembre 1877, le règlement du 3 novembre suivant et le règlement du 19 avril 1906.

Au chef-lieu de chacune de 69 provinces du royaume siège un Conseil scolaire, composé du préfet, président, du provéditeur, vice-président, et de dix conseillers, dont quatre sont des délégués de la province, deux dès délégués de la commune chef-lieu ; deux autres, un médecin et un comptable, sont nommés par le ministre ; les deux derniers sont le directeur (préside) du lycée-gymnase et le directeur ou la directrice de l'école normale. Un règlement récent (19 avril 1906) dispose que le plus ancien inspecteur primaire du chef-lieu prendra part avec voix consultative aux réunions du Conseil provincial. Ce Conseil, auquel appartient la surveillance de tout ce qui regarde l'instruction primaire et normale, l'instruction classique, et l'instruction technique, se réunit une fois par mois : il veille à l'exécution des lois et règlements, approuve les budgets des écoles publiques, sanctionne la nomination des insti tuteurs, donne son préavis sur la répartition des subsides aux communes et aux maîtres, surveille l'enseignement privé, etc.

Le provéditeur est spécialement chargé de ce qui concerne les lycées, les gymnases, les écoles techniques et les écoles normales. Il est nommé par le roi.

Les inspecteurs d'arrondissement visitent les écoles primaires deux fois par an. Le décret du 21 avril 1881 a institué un certificat d'aptitude aux fonctions d'inspecteur d'arrondissement ; ne sont admis à passer l'examen qui confère ce titre que les instituteurs qui ont enseigné pendant huit ans dans les écoles publiques, qui ont obtenu le diplôme de directeur didactique, et qui ont subi avec succès les examens à la fin des deux ans du cours de l'école pédagogique instituée dans les universités principales du royaume.

Selon une loi approuvée au mois de juillet 1908, le personnel des provéditeurs devra se composer de 69 provéditeurs, un pour chaque province du royaume, divisés en classes avec des appointements de 5000, 6000, 7000 et 8000 francs. Par l'effet de la « loi pour le Midi », dont il sera parlé plus loin, les inspecteurs primaires ont été augmentés jusqu'au nombre de 283 ; ils sont divisés en quatre classes avec des appointements de 2500, 3000, 3500 et 4000 francs. Chaque inspecteur a droit au remboursement des frais de voyage et à 8 ou 10 francs d'indemnité de séjour pendant les inspections.

SALLES D'ASILE. — A la fin de l'année scolaire 1901-1902 (la dernière dans laquelle a eu lieu un recensement officiel en Italie), on avait ouvert dans 2176 communes du royaume sur 8274 (c'est le nombre qui existait le 30 juin 1902) des salles d'asile proprement dites ou d'autres instituts pour la première instruction et pour l'éducation de l'enfance.

Les salles d'asile sont fondées et entretenues volontairement par les communes, aucune loi ne les rendant obligatoires, ou par des associations privées, et même par de simples particuliers. Le total des asiles tant publics que particuliers a été, en 1901-1902, de 3314 (dans beaucoup de communes il y en avait plus d'un) ; ils ont reçu 355 594 enfants (181 681 garçons et 173913 filles). Quant à leur caractère juridique, ces 3314 salles d'asile se divisaient en 1489 constituées par des oeuvres pieuses ou érigées en corps moral (corpo morale), et 1825 non érigées en corps moral. De ces dernières, 430 étaient entretenues par des communes, 193 par d'autres personnes juridiques, 1202 par des associations privées ou des particuliers.

Pour ce qui concerne la méthode d'éducation suivie dans les salles d'asile, on employait dans 61 d'entre elles la méthode de Froebel, dans 64 la méthode d'Aporti, et dans 2615 une méthode mixte. Cette dernière méthode, qui n'est pas bien définie, ni bien délimitée quant à son programme et son développement, était suivie dans la presque totalité des salles d'asile privées, c'est-à-dire dans 1045 sur 1202.

Les élèves sont pour la plus grande partie reçus gratuitement dans les salles d'asile ; quelques-uns, qui appartiennent à des familles aisées, paient une rétribution mensuelle. Les salles d'asile entièrement gratuites étaient au nombre de 1138, dont 802 publiques ; celles dans lesquelles payaient uniquement les enfants de familles aisées étaient au nombre de 1515, dont 1048 publiques ; celles enfin dans lesquelles tous les élèves payaient une rétribution mensuelle étaient au nombre de 661, dont 262 publiques.

Les ressources pour l'entretien des salles d'asile sont fournies par le corps qui les a fondées, ou bien proviennent de subsides permanents ou éventuels de ce corps même, ou de l'Etat, ou des citoyens, ainsi que des rétributions des élèves payants. En 1901-1902, les recettes des salles d'asile ont été de 7 618 239 fr., dont 2 889 386 fr. provenant de rentes patrimoniales, 1 532 000 fr. des communes, 814 000 fr. de la rétribution des élèves payants, 340 fr. des cotisations annuelles des membres fondateurs, et le reste des subsides de l'Etat, des provinces, etc. Les dépenses ont été d'environ 7 millions de francs. INSTRUCTION ELEMENTAIRE. — En 1901-1902, sur 8274 communes existant à la fin de cette année scolaire, l'instruction était obligatoire dans 8257.

Ecoles élémentaires du jour (scuole elementari diurne). — Les écoles élémentaires du jour, tant privées que publiques, étaient au nombre de 61 777, dirigées par 65 739 instituteurs ou institutrices. Elles ont reçu 2 733 349 élèves (1 434 844 garçons et 1 298 505 filles), dont 2 497 078 dans le cours inférieur (1 296 114 garçons et 1200964 filles) et 236 271 dans le cours supérieur (138730 garçons et 97541 filles).

Ecoles publiques. — Les écoles diurnes publiques étaient au nombre de 50640 régulières, c'est-à-dire obligatoires, et de 2 619 irrégulières, c'est-à-dire facultatives. Ces dernières n'ont pas les caractères des écoles élémentaires véritables, car elles sont en général dirigées par des personnes dépourvues de titres légaux pour renseignement et rétribuées par des rémunérations inférieures aux traitements légaux les plus bas ; elles ne durent pas toute l'année et on ne les ouvre pas tous les ans, et en outre l'enseignement n'y a pas toujours lieu avec les programmes prescrits.

Les écoles publiques pour l'enseignement du degré inférieur étaient au nombre de 47040 (y compris les irrégulières), dirigées par 46 190 instituteurs ou institutrices effectifs et 2043 suppléants et aides ; celles du degré supérieur étaient au nombre de 6219. distribuées sur 1839 communes et dirigées par 5960 instituteurs ou institutrices effectifs et 281 suppléants et aides.

Ecoles privées. — Les écoles diurnes privées étaient au nombre de 3757, avec 8518 salles d'école.

L'enseignement y était donné par 9306 personnes (2008 hommes et 7298 femmes).

De ces instituteurs et institutrices, 4427 (48 0/0) appartenaient au clergé séculier ou à des congrégations religieuses, et 4879 (52 0/0) étaient des laïques.

Dans la plus grande partie des écoles privées, exactement dans 2151, l'enseignement était payant ; dans 567 il y avait des classes gratuites et des classes payantes ; enfin dans les autres, c'est-à-dire dans 1036, l'enseignement était entièrement gratuit.

Les élèves inscrits dans ces écoles étaient au nombre de 184 766 (59 291 garçons et 125 475 filles), 141 505 dans le cours inférieur et 43 261 dans le cours supérieur.

Examens. — Le règlement du 9 octobre 1895 pour l'instruction élémentaire a prescrit, pour les écoles diurnes, — outre les examens semestriels, les examens d'admission et de promotion, — des examens de proscioglimento dall obbligo (c'est-à-dire de dispense de l'obligation) à la fin de la troisième classe, et des examens de licence du cours supérieur, à la fin de la cinquième classe. Les résultats des examens de l'année 1901-1902 ont été les suivants :

Pour les examens de proscioglimento dall obbligo se sont présentés : garçons, 169 374 (dispensés, 127 275) ; filles, 134281 (dispensées 101021).

Pour les examens de licence de la cinquième classe élémentaire se sont présentés : garçons, 24 788 (licenciés, 19111) ; filles, 14808 (licenciées, 11 909).

Il y a donc eu, dans les examens de proscioglimento dall' obbligo, une proportion de 71, 57 0/0 de garçons approuvés et de 75, 23 0/0 de filles approuvées, ce qui donne une moyenne de 73, 190/0 ; dans les examens de licence de la cinquième classe élémentaire, la proportion a été la suivante : garçons approuvés, 77, 10 0/0 ; filles approuvées, 80, 42 0/0 ; moyenne, 78, 34 0/0.

Le règlement du 13 octobre 1904 sur les examens, substitué à celui du 9 octobre 1895, a apporté diverses innovations ; les plus importantes sont celles qui ont rapport à l'examen de maturité, institué par la loi Orlando du 8 juillet 1904. L'article 141 de ce règlement dit : « L'examen de maturité sera subi par les élèves de la quatrième classe élémentaire ou par des candidats provenant d'une école privée ou paternelle, quand ils ont accompli leur dixième année ou quand ils doivent l'accomplir avant le 31 décembre de Tannée en cours et qu'ils veulent continuer leurs études dans les écoles moyennes. L'examen de licenza elementare (du certificat d'études primaires) a lieu à la fin de la sixième classe élémentaire pour ceux qui ont douze ans accomplis ou quand ils doivent accomplir cet âge avant le 31 décembre de l'année en cours. »

Ecoles du soir, écoles du dimanche, et cours d'automne (scuole serali, scuole festive, corsi autunnali). — La loi du 15 juillet 1877 sur l'instruction obligatoire prescrit, comme nous l'avons vu, que pendant les vacances les élèves des écoles élémentaires doivent fréquenter les écoles du dimanche, là où elles existent, et qu'après avoir terminé le cours élémentaire inférieur obligatoire les élèves devront encore fréquenter les écoles du soir, ou les écoles du dimanche, pendant un an, dans les communes où celles-ci ont été instituées, à moins qu'ils ne continuent leurs études dans le cours supérieur. Ces écoles, qui ont reçu le nom de scuole serali o festive di complemento, ont pour but de continuer et d'étendre l'instruction reçue dans le cours inférieur.

Les écoles du soir et celles du dimanche, pour les adultes qui n'avaient pas fréquenté auparavant l'école élémentaire, existaient avant la loi du 15 juillet 1877. Aucune loi n'a déclaré obligatoire pour les communes l'institution des écoles du soir et de celles du dimanche, soit de complément, soit pour adultes. Cependant l'Etat et les communes subventionnèrent annuellement, par des sommes inscrites à leur budget, l'institution d'écoles du soir et d'écoles du dimanche, tant de complément que pour les adultes. Beaucoup de communes les entretiennent à leurs frais, dans les locaux même des écoles du jour, et en confient la direction aux instituteurs de celles-ci ; d'autres fournissent les locaux et leur ameublement aux instituteurs des écoles communales ou à des associations privées et à des instituteurs particuliers.

Des examens ont lieu dans les écoles du soir et du dimanche pour constater les progrès accomplis ; on suit, tant pour l'inscription que pour les examens, les mêmes règles que pour les écoles de jour.

Pendant l'année scolaire 1901-1902, des écoles du soir ont fonctionné dans 1576 communes, au nombre de 567 écoles de complément et de 1009 écoles pour adultes, Des écoles du dimanche ont fonctionné dans 558 communes, avec le caractère d'écoles complémentaires dans 321 et d'écoles pour adultes dans 237. Enfin les communes dans lesquelles elles sont restées ouvertes pendant les vacances, comme écoles dites d'automne, ont été au nombre de 376. En tout il y a eu 5404 écoles du soir, du dimanche et d'automne, dirigées par 5687 instituteurs ; elles ont reçu un total de 178311 élèves, dont 134 526 garçons et 43 785 filles.

En 1871-1872, l'Italie avait 9809 écoles du soir et 4743 écoles du dimanche, avec plus de 16000 instituteurs et plus de 450000 élèves ; les écoles ont diminué en nombre d'année en année, parce qu'elles ne donnaient en général que de faibles résultats. Comme on n'a jamais fait aucune loi pour rendre obligatoire l'institution de véritables écoles complémentaires, qui auraient remplacé les anciennes écoles du soir et du dimanche pour adultes, ces dernières aussi finirent par disparaître, faute de moyens, et pour d'autres raisons.

En même temps on diminua graduellement, au budget de l'Etat, les subventions destinées à favoriser l'institution de cette catégorie d'écoles: les communes, de leur côté, n'étant pas obligées par la loi à les entretenir, réduisirent ou supprimèrent cette dépense, et laissèrent se fermer les écoles du soir et du dimanche qu'elles entretenaient auparavant.

La loi Orlando, instituant 3000 écoles du soir et du dimanche, et la loi du 15 juillet 1906, dite loi « pour le Midi » (per il Mezzogiorno), qui en a institué encore 2302 dans les provinces où le nombre des illettrés est le plus grand, ont rendu de la vigueur à ce moyen puissant d'instruction populaire. Dans l'année scolaire 1908-1909, les cours du soir et du dimanche autoririsés par le ministère ont atteint le nombre de 5810.

Personnel enseignant. — Le personnel enseignant comprenait, en 1901-1902, 57331 membres, savoir: 576 directeurs et directrices, déchargés de classes, 52150 instituteurs et institutrices effectifs, y compris 2590 des écoles irrégulières ; 2324 aides et suppléants ou suppléantes ; 322 instituteurs et institutrices de matières spéciales ; 1959 stagiaires.

Il y avait 1, 66 instituteurs et institutrices pour 1000 habitants (1, 47 pour le cours inférieur, 0, 19 pour le cours supérieur). Le Piémont (2, 68), la Ligurie (2, 13) et la Lombardie (2, 06) dépassent la moyenne du royaume.

En exceptant les directeurs et directrices, et les instituteurs et institutrices s'occupant de matières spéciales, il y avait, sur 100 instituteurs et institutrices, 95 laïques et 5 personnes appartenant au clergé ou à des congrégations religieuses ; et sur 100 de ces dernières, il y avait 46 hommes et 54 femmes.

Le rapport du nombre, des écoles à la population était de 1, 63 pour 1000 habitants ; le rapport du nombre des élèves était de 77, 93 inscrits pour 1000 habitants. Tant pour le nombre des écoles que pour le nombre des inscriptions, c'est en Piémont qu'on trouve la proportion la plus élevée ; viennent ensuite la Lombardie, la Vénétie, la Ligurie.

Institutions de prévoyance. Caisses d'épargne scolaires. Mutualité scolaire. — Les caisses d'épargne scolaires, tant recommandées par le ministre Quintino Sella dès 1878, trouvèrent assez de faveur dans beaucoup de communes d'importance diverse. En 1905 on y a ajouté les mutualités scolaires, à l'exemple des Petites Cavé françaises. Ces mutualités ont commencé à pénétrer dans la province d'Ancône à la suite de la mission d'étude accomplie en France en 1903 par M. A. Stoppolini. Elles ont été recommandées aux éducateurs de la péninsule, le 28 mai 1904, par M. Orlando, ministre de l'instruction publique, dans un discours prononcé à la Chambre des députés. Puis elles ont été instituées d'une façon officielle dans les écoles élémentaires du royaume par une circulaire de M. Rava, en date du 1er février 1909. Le député Valeri a présenté au Parlement un projet de loi pour régulariser dans tout le royaume les mutualités scolaires, et on a l'espoir qu'elles se constitueront dans toutes les parties de l'Italie lorsque la loi, qui a été accueillie à la Chambre avec la plus grande faveur, aura obtenu l'approbation du Parlement.

Condition juridique et économique des instituteurs et institutrices. — On s'est occupé de la condition économique des instituteurs et institutrices, quoique d'une façon insuffisante, par les lois de 1859, 1886, 1893, 1903 et 1904. Nous nous bornerons à reproduire ici le tableau des traitements en 1859 et en 1904:

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Tableau des traitements légaux minima des instituteurs et institutrices annexé à la loi du 8 juillet 1904.

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Comme on le voit, d'un maximum de 1200 fr. en 1859, nous sommes montés en 1904 à un maximum de 1500 fr., et d'un minimum de 333 fr. à un minimum de 750 francs. Gela est évidemment encore trop peu, surtout si l'on prend en considération le traitement que les instituteurs reçoivent dans d'autres pays ainsi que le progrès économique continuel de l'Italie, et il sera nécessaire que d'ici peu le minimum des traitements soit porté à 1200 fr. et le maximum au moins à 2000 francs.

Cette nécessité apparaît d'une manière si manifeste, que les administrations des premières villes de l'Italie y ont déjà pourvu pour leur propre compte. En effet, les traitements des instituteurs de Rome vont d'un minimum de 2000 fr. à un maximum de 3100 fr. : ceux des instituteurs de Naples, de 1500 à 2200 fr. ; ceux des instituteurs de Milan, de 1850 à 2900 fr. (outre les augmentations de 150 fr. à des périodes déterminées). Les villes de Turin, Gènes, Venise, Florence, Palerme accordent à peu près les mêmes traitements à leurs instituteurs.

Une autre question à résoudre est celle des indemnités de résidence, qui devraient être établies dans toutes les communes du royaume, à l'exemple de la France. Pour le moment, on n'accorde qu'un maximum de 100 fr. d'indemnité par an, sur le budget de l'Etat, aux instituteurs visés par la loi sur le Mezzogiorno, quand ils se trouvent dans des résidences « incommodes ».

Quant à la condition juridique, les instituteurs sont nommés à la suite d'un concours public, pour trois ans d'épreuve, après lesquels leur nomination est confirmée à vie, sans qu'ils puissent être révoqués autrement que pour inaptitude didactique, par suite de maladie, ou pour de graves raisons de moralité constatées par un procès disciplinaire par devant le Conseil scolaire de la province. Ces garanties rendent les révocations très rares.

Les instituteurs ne peuvent être transférés d'une école à une autre sans leur consentement.

Préparation des instituteurs et des institutrices. Ecoles normales. — Ce sont les écoles normales qui s'occupent de la préparation des instituteurs et des institutrices ; elles sont à la charge de l'Etat, et ont été réorganisées par la loi du 12 juillet 1896.

Le cours des écoles normales pour garçons et pour filles dure trois ans ; mais, pour y être admis, il faut avoir obtenu la licence de l'école technique ou la promotion de la 3° classe du cours inférieur du gymnase : on obtient ce titre par trois années d'études après les écoles élémentaires. Une école complémentaire de la durée de trois ans est attachée, à titre d'école préparatoire, aux écoles normales pour filles : l'élève qui obtient la licence de cette école est admise sans examen à la première classe de l'école normale.

Selon les programmes établis par le ministère de l'instruction publique, on enseigne dans les écoles normales: la pédagogie, la morale, la langue et la littérature italiennes, l'histoire, la géographie, des éléments de mathématiques, de tenue des livres, d'économie domestique, des éléments de physique, de chimie et d'histoire naturelle, d'hygiène et d'agronomie, le dessin et la calligraphie, le chant choral, la gymnastique. Dans les écoles normales de filles, on enseigne en outre les travaux de femmes.

Toute école normale de filles a comme annexe une école enfantine et une école élémentaire complète ; une école élémentaire complète est attachée à toute école normale de garçons.

Les élèves des écoles normales qui subissent avec succès les examens pour la licence, à là fin du troisième cours, sont déclarés propres à l'enseignement-, ils peuvent se présenter immédiatement aux concours et être chargés d'enseigner dans les écoles élémentaires.

Dans l'année scolaire 1908-1909, le nombre des élèves des écoles normales — y compris les écoles complémentaires (préparatoires) et le cours froebelien — a été le suivant :

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On admet également aux examens de la licence des écoles normales de garçons et de filles des candidats qui n'ont pas fréquenté ces écoles, à la condition qu'ils présentent un certificat constatant qu'ils ont subi avec succès, trois ans auparavant, l'examen de la licence de l'école technique ou de l'école complémentaire, ou l'examen de promotion de la troisième classe à la quatrième classe du gymnase. Mais, pour obtenir le brevet d'enseignement, ces candidats doivent faire un apprentissage de deux ans dans une école désignée par le provéditeur.

Dans les universités du royaume ayant la faculté de philosophie et de lettres, ainsi qu'à l'Institut supérieur de Florence et à l'Académie littéraire et scientifique de Milan, un cours de perfectionnement a été institué pour les instituteurs, sous le nom de Scuola pedagogica (école pédagogique). Les instituteurs qui, après avoir fréquenté ce cours pendant deux ans, passent les examens prescrits, peuvent obtenir un certificat qui équivaut au diplôme de directeur didactique, titre nécessaire à l'admission aux examens pour l’inspectorat scolaire d'arrondissement. Pendant l'année scolaire 1906-1907, le nombre des instituteurs inscrits aux écoles pédagogiques a été le suivant: Catane 233, Pise 122, Padoue 130, Bologne 475, Florence 227, Palerme 325, Gênes 419, Naples 691, Home 502, Turin 228, Messine 161, Pavie 250.

Pour les licenciées des écoles normales de filles, outre la Scuola pedagogica, on a institué les écoles supérieures féminines de magistère (Istituti superiori femminili di magistero) de Florence et de Rome. Les jeunes filles qui les fréquentent régulièrement pendant quatre ans de cours, et qui passent ensuite les examens avec succès, peuvent obtenir un diplôme pour l'enseignement de la pédagogie, des lettres italiennes, de l'histoire et de la géographie dans les écoles normales.

Directeurs et professeurs d'écoles normales. — Les professeurs (de l'un et de l'autre sexe) des écoles normales sont nommés au concours ; ce concours a lieu sur titres, ou aussi par un examen auquel peuvent prendre part les élèves ayant fait des études universitaires et ceux qui sont munis d'un diplôme spécial pour renseignement auquel ils aspirent. Les membres du corps enseignant des écoles normales sont placés sur le même rang que les professeurs de lycée et d'institut technique ; leurs traitements sont de 2500 fr. à 5400 francs.

Les directeurs et les directrices des écoles normales sont nommés par le ministre selon l'art. 13 de la loi du 17 mai 1906, qui règle la carrière des professeurs des écoles secondaires.

Instruction obligatoire et analphabétisme. — La loi du 15 juillet 1877 sur l'obligation de l'instruction élémentaire n'atteignit pas le but que le législateur s'était proposé, et cela pour beaucoup de raisons, surtout parce que l'exécution en avait été confiée aux autorités locales. Aussi, malgré la loi, les progrès dans la lutte contre l'analphabétisme ne se sont-ils pas accentués ; l'amélioration dans la diffusion de l'instruction primaire a continué à se faire à raison de moins d'un pour cent par an, de 1882 à 1901, comme cela avait eu lieu dans les dix années précédentes, de 1872 à 1882. En effet, si en 1872 les illettrés formaient une proportion de 68, 77 %, cette proportion ne descendit en 1882 qu'à 61, 94, et en 1901 à 48, 49 ; ce qui fait, en trente ans. une diminution de 20 % sur le nombre total des illettrés. Il importe de répéter ici que le nombre des écoles et le nombre des élèves inscrits, par rapport à la population, varie immensément en Italie d'une région à l'autre ; on peut même affirmer que l'Italie est divisée en deux parties, quant à la culture intellectuelle: l'Italie septentrionale et l'Italie méridionale ; dans la première, l'instruction populaire est à son plus haut degré, dans la dernière (qui comprend aussi l'Italie insulaire) à son plus bas ; il y a, entre ces deux extrêmes, un terme moyen représenté par l'Italie centrale, dans laquelle l'instruction, tout en n'étant pas florissante, est assez satisfaisante. En considérant l'Italie ainsi divisée, on obtient pour l'analphabétisme les chiffres suivants : Italie septentrionale 19, 02 % ; Italie centrale 38, 75 % ; Italie méridionale 52, 38 % ; Italie insulaire, 55, 18 %.

Le tableau suivant indique, pour quelques-unes des 69 provinces, la proportion des époux qui n'ont pu signer leur acte de mariage :

Conjoints ne sachant ni lire ni écrire

(Moyenne par province) :

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Il est intéressant de noter que, dans cette statistique, Rome occupe la 31e place parmi les 69 provinces du royaume, et Naples la 38e ! Cette constatation humiliante a fait dire à M. Sonnino, l'un des hommes d'Etat qui ont le plus d'autorité en Italie:

« L'Italie a malheureusement manqué jusqu'ici d'une façon déplorable au premier de ses devoirs, celui de donner les premiers éléments de l'instruction aux masses pauvres de ses provinces les plus malheureuses. Il est temps de prendre une résolution énergique afin de débarrasser une moitié de notre royaume de cette honte dont elle est marquée, d'occuper le premier rang dans l'Europe chrétienne en ce qui concerne l'analphabétisme. Des considérations de prudence et d'humanité le conseillent désormais. » La loi sur les provinces méridionales. — M. Sonnino ne démentit pas comme ministre ce qu'il avait proclamé comme deputé, car lorsqu'au mois de mars 1906 il fut appelé à la direction du gouvernement de l'Italie, il voulut que l'on présentât une loi destinée essentiellement à améliorer les conditions de l'instruction dans le Midi de l'Italie. Le ministère Sonnino étant tombé, c'est le ministère Giolitti qui mena à bonne fin cette loi : promulguée le 15 juillet 1906, elle a pris le nom de Provveaimenti per le provincie meridionali, per la Sicilia e per la Sardegna. Cette loi, qu'on appelle aussi la loi pour le Midi, fut ensuite étendue, en ce qui concerne l'instruction, aux Marches, à l'Ombrie et au Latium (excepté la ville de Rome) ; elle marque une étape notable dans cette voie qui conduira a la prise de possession complète de l'école primaire par l'Etat. En effet, l'art. 64 de cette loi porte : « A partir du 1er octobre 1906, on instituera dans les fractions ou bourgades dans lesquelles le nombre des enfants obligés à l'instruction atteindra le chiffre de 40, aux frais de l'Etat, une école élémentaire inférieure de troisième classe rurale. Si dans lesdites fractions il existait une école élémentaire facultative maintenue par la commune, celle-ci sera qualifiée de troisième classe rurale, et l'Etat supportera la dépense provenant de l'augmentation de traitement rendue nécessaire par cette classification. » En outre, par l'effet de cette même loi, l'Etat contribue à la dépense nécessaire pour le dédoublement des classes trop nombreuses ; il assigne une indemnité de 50 à 100 fr. par an aux instituteurs d'écoles situées dans des lieux incommodes ; il prend à sa charge la dépense nécessaire pour deux mille écoles du soir et du dimanche, outre celles qui ont été instituées par la loi Orlando du 8 juillet 1904 ; et il crée cinquante nouveaux inspecteurs pour rendre la surveillance du gouvernement plus efficace sur les écoles du Midi de l'Italie. Le ministre de l'instruction publique a confié par une circulaire spéciale à ces inspecteurs, sous la direction immédiate des provéditeurs et des Conseils scolaires provinciaux, la charge d'exercer sur les communes une forte pression administrative pour l'application des dispositions de la loi du 15 juillet 1906, en ce qui se rapporte aux écoles élémentaires. Par cette circulaire, les 135 inspecteurs des provinces méridionales et centrales devront faire le plus rapidement possible une enquête particulière, commune par commune, pour constater de façon détaillée les besoins et les défauts de l'organisation des écoles ; inviter les administrations communales à se conformer aux lois, et, dans les cas où la loi les y autorise, pourvoir à compléter les services, là où ils sont reconnus insuffisants, ainsi qu'à améliorer dans la mesure du possible les conditions des écoles existantes, là où elles en ont besoin.

Vu les conditions actuelles des écoles dans les provinces méridionales et centrales, « il s'impose nécessairement, dit la circulaire, une double tâche à l'administration : celle d'examiner localement, avec exactitude, quel est l'état actuel des écoles dans chaque commune, en prenant note des lacunes et des défauts, et celle, plus positive, l'état de fait une fois connu, et dès qu'on aura constaté l'étendue et la valeur du besoin, de suggérer et de provoquer les mesures nécessaires, de les imposer dans tous les cas où la loi donne à l'autorité la faculté de le faire, et de porter graduellement l'état des écoles à cette extension et cette consistance d'installation que les lois précédentes et celle de 1906 exigent. »

On a tracé aux inspecteurs, pour l'exécution de ce travail, un plan complet indiquant les recherches à faire et les mesures à prendre. Il consiste en huit questionnaires qui correspondent chacun à une fraction des services scolaires confiés aux administrations communales, et sont relatifs, savoir : à l'exécution de l'obligation de fréquenter l'école ; à la fréquentation scolaire ; à la création de nouvelles écoles en application de la loi pour le Midi ; aux écoles du soir et du dimanche ; aux salles d'asile ; aux locaux et au matériel didactique des écoles élémentaires ; à la classification des « résidences incommodes » pour le paiement de l'indemnité de résidence à accorder aux instituteurs élémentaires selon la loi sur le Midi ; et enfin à l'institution des cours didactiques, pour lesquels la loi sur le Midi établit un large concours de l'Etat dans la dépense.

Chaque questionnaire est suivi d'instructions détaillées pour l'oeuvre positive demandée aux inspecteurs, et on y précise les idées techniques desquelles devront s'inspirer les dispositions à adopter dans chaque cas.

Le ministre recommande enfin aux inspecteurs de mettre le plus grand zèle possible dans l'exécution de cette tâche, et il invite les provéditeurs à signaler les inspecteurs qui auront donné une preuve spéciale de zélé dans l'exécution de leur mandat.

On espère que, grâce à l'effort concordant des provéditeurs, des inspecteurs et des communes, on réussira finalement à gagner la bataille contre l'analphabétisme.

Il faut encore ajouter qu'afin de favoriser la fréquentation scolaire par la création de repas scolaires, la distribution d'accessoires, de livres et d autres choses nécessaires à l'instruction, la loi elle-même a fixé une première somme de 1300000 fr., qui sera augmentée chaque année selon les besoins par la loi de finances.

On inscrira également au budget, afin de concourir à la création et à l'entretien de salles d'asile, une première somme de 1450000 francs, qui sera progressivement augmentée.

Cette loi peut être considérée à juste titre comme une des plus bienfaisantes que le Parlement italien ait votées ; mais elle est bien loin encore de correspondre aux nécessités des écoles en Italie. En effet, dans les pays les plus avancés, la dépense pour l'école populaire en Europe est d'environ 6 à 12 francs par habitant et par an. En Italie, elle est d'environ 2 fr. 70.

« Ces chiffres, dit M. Maggiorino Ferraris, nous montrent le douloureux héritage du passé ; l'Italie nouvelle n'a pas de devoir plus immédiat ni de mission plus sacrée que celui de donner au peuple l'instruction nécessaire à un pays civilisé. Le passé est notre honte, l'avenir sera notre rédemption ! »

Afin de préparer cet avenir, plusieurs députés de toutes les parties de la Chambre se sont réunis sous le nom de Amici dell' Alfabeto (les Amis de l'alphabet), et ils ont arrêté un programme scolaire représentant le minimum des réformes qu'ils défendront tout de suite au Parlement. Les points essentiels de ce programme sont :

1° Une vigilance plus directe de la part de l'Etat sur l'instruction primaire ;

2° L'augmentation des inspecteurs du gouvernement jusqu'au nombre de 1000. Il y en a aujourd'hui 283, y compris les 50 inspecteurs de création récente pour les écoles du Midi ;

3° L'organisation de l'école populaire selon l'ordre suivant :

a) Ecole du soir facultative pour tous les citoyens, obligatoire pour les hommes de la seizième à la vingt-quatrième année, s'ils n'ont pas terminé la troisième classe élémentaire ;

b) Ecole élémentaire du jour, obligatoire, de six classes ;

c) Ecole du dimanche, facultative, spécialement pour les jeunes filles ;

d) Salle d'asile obligatoire dans toutes les communes ;

e) Ecole complémentaire et professionnelle, facultative.

4° La construction d'édifices spéciaux pour les salles d'asile et les écoles élémentaires dans un délai de cinq ans au moyen d'emprunts de faveur contractés par l'Etat ;

5° L'inscription au budget du ministère de l'instruction publique d'une somme s'accroissant annuellement de cinq millions jusqu'à ce que chaque commune du royaume dispose d'une somme de 5 francs par habitant et par an pour l'école populaire ;

6° L'augmentation du traitement des instituteurs, de sorte que le minimum soit élevé dans toutes les communes du royaume & 1000 fr. en 1909 ; à 1100 fr. six ans plus tard, et à 1200 fr. neuf ans plus tard. Le traitement minimum pour les instituteurs, dans les écoles des communes de plus de 4000 habitants, sera élevé à 1350 francs. L'indemnité pour l'enseignement dans les écoles du soir sera de 250 fr. par an dans les communes de moins de 10 000 habitants, de 400 fr. par an dans les communes ayant une population supérieure. Pour l'école du dimanche, l'indemnité sera de 250 fr. par an ; 7° L'institution, dans chaque province, de Musées pédagogiques et de bibliothèques populaires. Un Musée pédagogique national sera ouvert à Rome ;

8° L'obligation de la part des Conseils scolaires provinciaux d'envoyer un commissaire spécial dans toutes les communes qui n'appliqueront pas avec rigueur la loi sur l'instruction obligatoire ;

9° L'institution d'un patronat scolaire dans chaque commune par l'administration communale ;

10° La création de l'école régimentaire obligatoire aux frais du ministère de la guerre.

Nous avons cru utile de signaler ce programme, car on y voit clairement quels sont les défauts de l'école populaire en Italie, et quelles conditions devront remplir les écoles de demain.

Edifices scolaires. — Malgré les recommandations du gouvernement et les soins des communes, les locaux scolaires, sauf quelques exceptions notables, laissaient immensément à désirer, surtout dans l'Italie centrale et dans l'Italie méridionale, spécialement dans les premières années de la renaissance politique de l'Italie. La loi sur l'instruction obligatoire ayant été promulguée, le manque et la pauvreté des locaux apparurent plus déplorables encore ; c'est pourquoi le gouvernement s'empressa de présenter un projet de loi qui fut approuvé par le Parlement. En vertu de cette loi, promulguée le 18 juillet 1878, et qui fut ensuite améliorée par celles de 1888 et de 1900, les communes purent être autorisées à contracter des emprunts de faveur à la Caisse des dépôts et emprunts, pour la construction, l'agrandissement et la restauration des édifices pour l'usage des écoles élémentaires.

« Sans doute — comme on le lit dans une publication sur les nouveaux types de constructions scolaires — cette loi, et celles de 1888 et de 1900, qui prorogèrent les dispositions contenues dans la première et en étendirent le bénéfice aux bâtiments destinés aux salles d'asile, contribuèrent notablement, et bien plus que les subsides que le ministère de l'instruction publique concède annuellement pour le même but, à améliorer les conditions des locaux scolaires, et un bon nombre d'écoles passèrent, par suite de ces lois, des anciennes masures où elles avaient été condamnées à vivre par la longue ignorance, la pauvreté et la paresse, à des locaux plus convenables et qui correspondaient mieux aux exigences modernes de la pédagogie et de l'hygiène. »

Mais beaucoup d'écoles restèrent et restent encore dans des locaux bien peu dignes de leur noble office. Heureusement la loi sur les provinces méridionales a pourvu à ce que les communes pussent construire de nouveaux bâtiments scolaires à des conditions encore plus avantageuses que celles des dispositions précédentes, car, par cette loi, la Caisse des dépôts et emprunts est autorisée à fournir des fonds pour la construction de ces édifices à l'intérêt minimum de 1 pour 100 aux communes de moins de 5000 habitants et de 1 1/2 pour 100 aux communes ayant une population plus élevée. Il faut ajouter que l'Etat contribuera à la construction pour le tiers de la dépense. L'espoir n'est donc pas vain que bientôt on verra s'élever dans tous les coins de l'Italie la casa della scuola, la maison de l'école, comme on le voit déjà en Suisse, en Allemagne, en France, et dans beaucoup d'endroits de l'Italie septentrionale.

ENSEIGNEMENT SECONDAIRE PUBLIC. — L'enseignement secondaire technique se donne dans les écoles techniques (scuole tecniche) et dans les instituts techniques (istituti tecnici).

Les écoles techniques ont trois classes. Les branches d'enseignement sont : l'italien, le français, l'histoire, la géographie, les mathématiques, le dessin, la calligraphie, et, dans la classe complémentaire, des notions de sciences physiques et naturelles et d'hygiène, la comptabilité, l'instruction civique.

Les instituts techniques relevaient, de 1861 à 1877, du ministère de l'agriculture et du commerce ; ils n'ont été rattachés à celui de l'instruction publique qu'en 1878. L'enseignement y est réparti en sections : section administrative et commerciale, section agronomique, section physico-mathématique. Le cours d'études est de trois ans dans les trois premières sections, de quatre dans la quatrième. Dans quelques villes maritimes il y a aussi une section nautique.

L'enseignement secondaire classique se donne dans les gymnases (ginnasi) et dans les lycées (licei).

Les gymnases ont cinq classes ; les branches d'enseignement sont : l'italien, le latin, le grec, l'histoire ancienne, la géographie, l'arithmétique et le français.

Les lycées, qui font suite aux gymnases, ont trois classes ; les branches d'enseignement sont : la littérature italienne, le latin, le grec, l'histoire ancienne, la géographie, la philosophie, les mathématiques, la physique et l'histoire naturelle. Les filles sont également admises à fréquenter les gymnases et les lycées, et il existe en outre pour elles des internats et des écoles supérieures municipales.

Les internats de jeunes filles (dont beaucoup reçoivent aussi des élèves externes) sont, les uns, des collèges appartenant à l'Etat, les autres d'anciennes fondations sur lesquelles le gouvernement exerce un droit de tutelle, comme les conservatori créés en Toscane par Léopold Ier, les autres enfin des institutions privées.

Un certain nombre de villes ont établi à leurs frais des écoles supérieures de jeunes filles (scuole femminiti superiori), qui sont des externats. C'est la ville de Milan qui a pris l'initiative de cette création en 1861, et son exemple a été suivi par les municipalités de Turin, Asti, Gênes, Venise, Parme, Bologne, Florence, Rome, etc. Le programme de ces écoles, dont le cours d'études a une durée de trois à quatre ans, comprend en général la morale, la langue et la littérature italiennes, la géographie, l'histoire générale et nationale, la langue et la littérature françaises, l'hygiène et les sciences naturelles, l'arithmétique et la comptabilité domestiques, le dessin, la calligraphie, la gymnastique, les travaux à l'aiguille.

Le ministre Bianchi avait nommé une commission pour la réforme de l'instruction secondaire ; cette commission a terminé ses études et présenté, en 1909, au ministre, M. Rava, des propositions comprenant :

La réforme des programmes et des méthodes ;

La transformation de la section physico-mathématique de l'institut technique en lycée scientifique ;

La constitution d'un nouveau type de lycée classique et d'un nouveau type de lycée réformé ;

La constitution d'une école préparatoire de trois ans sans latin, ou bien d'un gymnase qui servira de base aux trois nouveaux types de lycées ;

La réorganisation de l'école technique et des écoles moyennes professionnelles.

Les uns parmi les écoles techniques, instituts techniques, gymnases, et lycées, sont des établissements de l'Etat, les autres sont des établissements assimilés à ceux de l'Etat. Dans l'année scolaire 1908-1909, le nombre des élèves de ces deux catégories d'établissements a été le suivant :

Ecoles techniques royales, 52 640 ; écoles techniques assimilées. 18192 ; total 70832, dont 14 673 jeunes filles ;

Instituts nautiques royaux, 2057 ; institut nautique assimilé, 28 ;

Instituts techniques royaux, 16615 ; instituts techniques assimilés, 3910 ;

Gymnases royaux, 20 110 ; gymnases assimilés, 7916 ;

Lycées royaux, 12 300 ; lycées assimilés, 2120.

ENSEIGNEMENT SECONDAIRE PRIVE. — Il n'existe pas encore en Italie de statistique précise de l'enseignement secondaire privé. Il nous est tout au plus permis de faire quelques déductions indirectes sur une partie des écoles privées, c'est-à-dire sur les écoles classiques. En 1896, il a été constaté qu'environ 34 000 jeunes gens fréquentaient des lycées et des gymnases particuliers, et ceci en face d'environ un même nombre fréquentant les écoles classiques publiques. Il résulte aussi d'une autre statistique, relative à la même année, que, sur 708 gymnases, il y en avait 442 de privés, et que sur 303 lycées il y en avait 187 de privés. Ce qui équivaut à dire que l'école classique moyenne se trouvait en grande partie soustraite à la dépendance directe de l'Etat et dans les mains du clergé. Aujourd'hui, nous le répétons, les choses ne doivent pas avoir beaucoup changé, et c'est regrettable, car de cette façon l'Etat en Italie abdique la plus délicate de ses fonctions. Il faut qu'on remédie à ceci d'urgence ; et le moyen, c'est la création d'un inspectorat du gouvernement pour la surveillance des instituts ecclésiastiques et privés qui se soustraient aujourd'hui presque en entier à tout contrôle. Il faut espérer que la loi du 27 juin 1909, qui a institué cet inspectorat, apportera un remède efficace à cet état de choses.

ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET SPECIAL. — L'enseignement supérieur est donné dans les universités et dans les instituts supérieurs. Les universités sont au nombre de 21, savoir 17 universités de l'Etat et 4 universités libres. Les instituts supérieurs, scientifiques ou littéraires, sont au nombre de 9.

Parmi les universités du royaume, celle qui réunit le plus grand nombre d'étudiants est l'université de Naples : elle a compté en 1909-1910, seulement pour la faculté de droit, 2324 étudiants, pendant que dans tout le reste du royaume (y compris les universités libres de Camerino, Ferrare, Pérouse et Urbin) les étudiants de la même faculté arrivaient à un total de 7300. Les universités de Cagliari, Ferrare, Pérouso et Sienne ont le moindre nombre d'élèves.

L'université de Naples offre également le plus fort contingent pour la médecine et la chirurgie : 1443 étudiants. Les universités de Rome, Palerme et Turin suivent immédiatement après ; puis viennent Bologne, Padoue et Gênes.

Les chaires de physique, de chimie et de sciences naturelles sont les moins fréquentées. Les aspirants au diplôme d'ingénieur sont en nombre supérieur à ceux qui aspirent au diplôme de mathématiques ; cependant la différence est minime dans son total, pendant qu'elle est assez saillante d'une université à une autre.

Les étudiants en pharmacie sont également rares ; c'est l'université de Turin qui en a le plus grand nombre : 130 ; leur nombre total est de 2600.

Turin a également un chiffre assez élevé pour les étudiants de philosophie et de lettres : 152. C'est cependant Naples et Rome qui donnent le contingent le plus fort, la première 307, la deuxième 226. Viennent ensuite Bologne 115, Padoue 80, Pise 70, et ainsi de suite.

C'est donc l'Italie méridionale qui fournit le plus grand nombre de professionisti (médecins, avocats, notaires, etc.) ; dans l'Italie septentrionale, les instituts qui préparent aux carrières commerciales sont plus fréquentés, et l'afluence vers les emplois publics est en diminution.

Le total des étudiants des universités du royaume est de 25000, sans en compter 1500 qui fréquentent quelques instituts supérieurs tels que celui de Florence, l'Académie scientifico-littéraire de Milan, l'Ecole d'application de Rome, l'Ecole supérieure navale de Gênes, l'Ecole supérieure polytechnique de Milan, etc. Les Ecoles universitaires annexées aux lycées d'Aquila, de Bari et de Catanzaro ont 263 élèves, et les Instituts supérieurs de magistère de Rome et de Florence 293. Soit en tout 26096 étudiants, ce qui représente une légère diminution sur les années précédentes.

Les traitements des professeurs des universités vont d'un minimum de 7000 francs à un maximum de 10 000 francs.

Instituts et enseignements divers. Ecoles commerciales. — L'école commerciale italienne, dans ses formes diverses, n'est pas une imitation servile d'instituts étrangers, mais bien l'effet de l'évolution lente et sûre des instituts d'éducation ordonnés par la loi Casati de 1859.

C'est ainsi que l'école moyenne de commerce est une dérivation naturelle de la section de comptabilité et de commerce de l'institut technique. Cette section était devenue une véritable école pour la préparation des comptables réclamés par les besoins des bureaux publics et privés. L'école moyenne de commerce laisse par contre à d'autres instituts le soin de former des fonctionnaires comptables (ragionieri), et elle se voue entièrement à la tâche de préparer des commerçants experts et probes, pour les rendre capables de tenter utilement des entreprises commerciales à l'intérieur et à l'étranger.

L'Université commerciale Luigi Bocconi, à Milan, est un institut qui fait honneur à cette ville. C'est le sénateur Ferdinand Bocconi qui le fonda en mémoire de son fils Luigi, tué dans la malheureuse journée d'Adoua. Ce n'est pas une école commerciale de caractère professionnel, comme il en existe d'autres en Italie, mais bien un institut de caractère scientifique, qui atteint un développement et un degré vraiment universitaires. Elle possède un conseil de direction, et 32 professeurs de compétence reconnue y .enseignent. Le cours universitaire y dure quatre ans. On y admet, comme dans les universités de l'Etat, les élèves venant des lycées et des instituts techniques. Les élèves qui subissent avec succès leurs examens à la fin de la quatrième année reçoivent un diplôme spécial qui a ta même valeur que ceux des universités de l'Etat. L'université commerciale est érigée en corps moral et jouit d'une dotation d'un million constituée par le fondateur. Le total des élèves inscrits a été de 1638 en 1905-1906.

Ecoles italiennes à l'étranger. — L'Italie est le pays qui contribue dans la plus grande mesure à l'émigration mondiale. En trente ans, de 1876 à 1905, 8 065 073 citoyens ont quitté le royaume, 3888571 pour l'émigration temporaire, et le reste, 4176502, pour l'émigration permanente ou transocéanique. A l'heure actuelle, il y a environ 3 500000 Italiens établis à l'étranger d'une façon plus ou moins stable.

Dans la République Argentine, il y a actuellement environ un million d'Italiens (la seule ville de Buenos Aires en compte 250 000), et dans la république de l'Uruguay 100 000.

Les Italiens disséminés dans les divers Etats du Brésil sont au nombre de plus d'un million, dont 800000 se trouvent dans l'état de Sào Paulo.

L'émigration italienne a également pris la première place aux Etats-Unis par le nombre des immigrants, qui dans ces dernières années a atteint le chiffre de 800000.

Les écoles italiennes à l'étranger, tant celles qui appartiennent au gouvernement que celles qui en reçoivent des subsides, dirigent généralement leurs efforts vers l'éducation commerciale.

Voici la liste des écoles du gouvernement ayant un caractère nettement commercial et qui donnent les résultats les plus notables :

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Les origines des écoles italiennes à l'étranger sont antiques et nobles, car elles remontent aux communautés italiennes qui, dès le moyen âge, se formèrent à l'étranger et qui crurent en nombre et en importance, spécialement sur les rives de la Méditerranée. Après que l'Italie eut reconquis son indépendance, les écoles italiennes à l'étranger firent leur apparition dans les budgets de l'Etat, en 1869, avec une dépense de 40000 francs divisée entre le ministère des affaires étrangères et celui de l'instruction publique. En 1883, la dépense annuelle sous forme de subsides fut élevée à 300000 francs, et elle augmenta continuellement, spécialement sous les ministères Crispi de 1887 et de 1891, jusqu'à atteindre la somme de 1 575 000 francs. Cette somme fut réduite, pour des raisons d'économie, à un moment où le budget de l'Etat se trouvait en de mauvaises conditions, à 900000 francs par le ministère di Rudini qui succéda au ministère Crispi.

Les écoles italiennes à l'étranger peuvent être divisées en trois grands groupes, selon leur origine et leur disposition administrative : les écoles royales, les écoles coloniales laïques et religieuses, et les écoles étrangères dans lesquelles on enseigne l'italien comme élément de culture et comme instrument commercial.

Les écoles coloniales royales sont divisées selon le tableau suivant :

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Les écoles coloniales laïques et religieuses recevant des subsides du gouvernement italien forment 406 groupes, dispersés dans toutes les parties du monde, et divisés en écoles de garçons, écoles de filles, écoles mixtes, écoles du soir, et salles d'asile. Elles ont un total de 37395 élèves.

Les écoles étrangères et confessionnelles qui ne reçoivent pas de subsides et dans lesquelles on enseigne la langue italienne sont, elles aussi, dispersées dans les cinq parties du monde ; elles ont un total de 76230 élèves.

Pour le moment, la dépense pour les écoles italiennes à l'étranger est à la charge du ministère des affaires étrangères, duquel dépend l'inspecteur de ces écoles. Les chiffres donnés ci-dessus sont empruntés à un rapport (1906) rédigé par l'inspecteur actuel, le professeur Scalabrini.

BUDGET DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE. — Voici, pour terminer, le résumé du budget du ministère italien de l'instruction publique pour l'année 1882 et pour l'année 1909-1910 :

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Il faut ajouter encore à ce total 80 millions environ à la chargé des budgets communaux pour l'instruction publique.

Comme on le voit, le budget de l'instruction publique en Italie, de 27 millions qu'il était en 1887, est monté à plus de 90 millions en 1910, c'est-à-dire qu'en vingt-sept ans il a presque triplé, sans compter les 80 millions qui sont à la charge des communes pour les écoles publiques. Il y a dans ces chiffres un progrès qui n'est pas négligeable ; mais on, doit constater en même temps que sur 33 millions d'habitants. l'Italie en compte 18 millions qui ne savent ni lire ni écrire. Si de ce chiffre on retranche les enfants au-dessous de six ans, il reste encore 13 millions d'illettrés. Beaucoup d Italiens — depuis que l'Italie existe comme nation — s'alarment et se lamentent de l'ignorance de leurs concitoyens. M. Maggiorino Ferrans, que nous avons déjà cité, a fait de cette ignorance l'objet d'une campagne dans la revue la Nuova Antologia. Avant lui, des nommes de progrès avaient, au Parlement et au ministère, projeté la réforme de l'instruction primaire ; mais ils se sont heurtés longtemps à la misère du budget, et ensuite et surtout à l'indifférence et à l'hostilité des classes cultivées. On connaît le raisonnement des gens qui ne voudraient pas mettre l'instruction à la portée du peuple — gens nombreux en Italie comme ailleurs. Ils disent : « Voyez ce charretier qui passe debout sur son tombereau ; il chante en faisant claquer son fouet ; il sent la beauté de son métier de plein air et de force, et il donne cette impression de plus en plus rare de l'homme heureux qui montre sa joie. Apprenez-lui à lire, et il lira des journaux qui lui enseigneront à croire qu'il est malheureux ; l'envie, cause éternelle de chagrin, assombrira sa vie ; il n'aimera plus son travail, il ne chantera plus ! » Sans doute l'instruction ne donne pas le bonheur : mais l'ignorance ne le confère pas non plus. Les paysans de la Calabre et de la Sicile sont-ils plus joyeux que ceux du Piémont? Hélas ! leurs chants sont tristes, et ils émigrent par milliers loin d'une terre qui leur est ingrate. Leur ignorance les rend moins aptes à la lutte toujours plus rude pour l'existence ; elle les rend aussi plus crédules vis-à-vis de ceux qui savent exploiter leurs instincts. On l'a vu lors des émeutes qui ensanglantèrent la Sicile il y a quatorze ans. Autrefois, les planteurs de l'Amérique avaient promulgué pour leurs nègres la loi de l'ignorance obligatoire. Nous n'en sommes plus là. L'être humain est appelé à réaliser un certain idéal moral par le triomphe de la volonté libre sur l'instinct. C'est une vérité banale désormais ; et nous espérons que tous les hommes cultivés, qui ne manquent pas en Italie, se donneront pour tâche de développer l'esprit de la jeunesse en l'éclairant de façon à faire naître ou à fortifier le sentiment de la responsabilité.

Bibliographie : A. GABELLI, L'istruzione in Italia. — Dott. Bruto AMANTE, NUOVO Manuale di Legislazione e di Giurisprudenza. Censimento ufficiale per l'anno scolastico 1901-1902. — Stalistica dell' istruzione primaria per l'anno scotastico 1901-1902. — Annuario dette scuole, italiane al estera per l'anno 1908. — Dott. Amerigo NAMIAS, Trattato di Legislazione scolastica comparata, Torino, 1908. — Francesco CORRIDORE, L'istruzione in Italia, dal 1871 in poi, Torino, 1908. — G. LOMBROSO, Sulle cause e sui ri-medi dell' analfabetismo. In Riforma Sociale, 15 marzo 1899. — MAGGIORINO FERRARIS, Il problema della scuola popolare in Italia. In Nuova Antologia, 16 maggio 1904. — Luigi RAVA, ministro della pubblica istruzione, Discorso pro-nunziato alla Camera dei Deputatinella tornata del 5 luglio 1909.

Aurelio Stoppoloni