bannière

h

Hygiène de la bouche

 S'inspirant de communications faites au Congrès international d'hygiène scolaire qui s'est tenu à Londres au mois d'août 1907, le ministère de l'instruction publique décida l'année suivante que dans les écoles normales des mesures seraient prises pour que les soins de la bouche fussent désormais l'objet d'une surveillance rigoureuse de la part des chefs de ces établissements. Une circulaire insistant sur l'importance de l'hygiène dentaire fut adressée aux recteurs, le 23 mars 1908, en même temps que des instructions pratiques dont ils étaient chargés d'assurer l'exécution. Nous reproduisons ici ce dernier document :

« ANNEXE A LA CIRCULAIRE DU 23 MARS 1908.

a) Organisation de deux services distincts d'inspection et de traitement dentaires.

Les services d'inspection et de traitement dentaires doivent, dans les écoles normales, constituer deux services tout à fait distincts. La dépense du service d'inspection seul sera prélevée sur les crédits du budget des écoles normales.

Ce service sera confié à un chirurgien dentiste diplômé d'une école dentaire, désigné par l'administration sur la proposition du chef de l'établissement. Les dents de tous les élèves seront examinées par ce spécialiste deux fois par an, et le résultat de l'examen sera consigné sur une fiche spéciale conforme au modèle ci-joint. Ces fiches seront conservées par les soins du chef de l'établissement. Elles permettront au service d'inspection dentaire de contrôler les soins qui auront pu être donnés à chaque élève, en dehors de l'établissement, conformément aux indications de sa fiche particulière.

Ce service, qui rendra les plus grands services, peut être organisé à peu de frais : il suffit que le dentiste qui en sera chargé ait à sa disposition les fiches dentaires, un siège, une table pour y déposer ses instruments, de l'ouate hydrophile, un verre d'eau et de l'eau bouillie. Quelques séances suffiront à sa tâche, car il ne lui faudra pas plus d'une heure pour examiner une vingtaine d'enfants et établir la fiche dentaire de chacun d'eux.

En ce qui concerne le service de traitement dentaire, il ne peut être question de l'organiser à l'intérieur de nos internats primaires ; car, d'une part, les frais d'installation seraient relativement considérables ; d'autre part, il s'agit ici d'une dépense qui incombe aux familles au même titre que les frais de maladie. Il est à remarquer, d'ailleurs, qu'il existe des cliniques ou dispensaires gratuits dans toutes les villes, telles que Paris, Lyon, Bordeaux, Lille, Nancy, où sont installées des écoles dentaires. Il sera facile aux chefs des établissements situés dans ces villes ou dans leur voisinage immédiat d'assurer, dans les conditions les plus favorables à leurs élèves, les soins des praticiens des dispensaires.

Partout ailleurs, à défaut d'un dentiste désigné par les parents, le service de traitement dentaire, organisé en dehors de l'école, sera confié à un dentiste diplômé d'une école dentaire, désigné par l'administration, sur la proposition du chef de l'établissement, c'est-à-dire dans les mêmes conditions que le chef de service de l'inspection dentaire. Mais il est entendu que les services d'inspection et de traitement resteront distincts et qu'en aucun cas ils ne seront réunis dans les mêmes mains, le premier étant appelé à contrôler le second.

Les honoraires du dentiste traitant seront réglés, pour chaque opération, d'après un tarif conventionnel, nécessairement variable suivant les localités, qui sera, préalablement à tout traitement, soumis à l'agrément des familles intéressées.

Une fiche dentaire en blanc, du modèle adopté, spéciale à chaque élève soigné, sera remise au dentiste chargé du service de traitement, lequel y inscrira avec précision, conformément aux indications imprimées sur la fiche, les renseignements concernant les dents traitées et la nature des opérations. Cette fiche, dûment remplie, sera retournée à l'école, où elle sera contrôlée par le dentiste inspecteur au moyen de la fiche établie par lui-même.

b) Soins à donner à la bouche.

En ce qui concerne les soins à donner à la bouche, les dents doivent être très attentivement nettoyées sinon après chaque repas ? ce qui serait l'idéal ? du moins deux fois par jour, le matin après le lever et surtout le soir après le souper. Il est à remarquer que les légumes et, d'une manière générale, les aliments renfermant de l'amidon ou du sucre, tels que le pain, la pomme de terre, le riz, les matières sucrées, en particulier celles qui adhèrent aux dents, sont bien plus nuisibles que la viande, non seulement parce que ces aliments se divisent en particules très fines qui s'insinuent dans les interstices ou dans les cavités dentaires, mais parce qu'ils attaquent les dents, après s'être transformés en matières acides. Or, c'est pendant la nuit que cette transformation peut s'opérer le plus à loisir et qu'elle s'exerce, par conséquent, de la manière la plus nocive. Il est donc de toute nécessité que la bouche soit nettoyée, ou tout au moins soigneusement rincée avant le coucher et qu'après le dernier nettoyage de la journée on s'abstienne de prendre aucun nouvel aliment.

Pour le nettoyage des dents, il est préférable d'employer une brosse très dure qui sera elle-même soigneusement nettoyée après chaque utilisation et conservée à l'abri de la poussière et des contacts douteux, dans un étui de verre, par exemple. Autant que possible, On se servira d'une brosse dont les soies seront allongées à l'extrémité, cette disposition permettant à la brosse d'atteindre plus sûrement la surface postérieure des dents de sagesse et les parois internes de toutes les dents.

Le brossage aura lieu dans tous les sens, sur toutes les faces, c'est-à-dire en arrière et au fond comme en avant, sans qu'on craigne de frotter vigoureusement les gencives et même de les faire saigner. Pour que le nettoyage des interstices des dents soit efficace, il importe que le brossage soit pratiqué très attentivement de bas en haut et de haut en bas, c'est-à-dire perpendiculairement aux gencives. Les particules d'aliments qui, logées entre les dents, résisteraient à l'action de la brosse, devront être enlevées au moyen d'un cure-dents en plume d'oie ou d'un fil de soie qu'on passera entre les dents.

L'eau pure bouillie, le bicarbonate de soude, la craie préparée, ou un mélange des deux à parties égales, sont particulièrement recommandés pour le nettoyage des dents. Des savonnages énergiques (au ? savon blanc) des dents et des gencives, suivis d'un rinçage à l'eau bouillie, boriquée si possible, peuvent être également employés.

Dans le cas où la bouche suppure par quelque point, en outre du brossage avec une des solutions qui viennent d'être indiquées, des bains de bouche, avec une solution antiseptique, répétés plusieurs fois par jour, s'il est nécessaire, auront un effet utile. » (Suit une formule de solution antiseptique donnée à titre d'indication.)

Une seconde circulaire portant la même date informait les inspecteurs d'académie que les prescriptions relatives à l'hygiène de la bouche, rendues obligatoires dans les écoles normales, devraient être également observées dans les internats annexés à une école primaire et à une école primaire supérieure. « S'il ne peut être question, ajoutait le ministre, de les imposer dans les établissements qui ne reçoivent que des externes, il y a intérêt à les faire connaître aux familles. C'est pour ce motif que je vous prie de les insérer dans le Bulletin départemental de l'enseignement primaire. »