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Grosselin

Augustin Grosselin naquit à Sedan (Ardennes), le 14 mai 1800. Il commença ses études au lycée de Liège. Quand, à la suite des événements de 1814, cette ville cessa de faire partie de la France, il alla terminer son éducation au lycée de Douai. En 1820, il vint à Paris pour faire son droit. Reçu avocat, il fut d'abord le secrétaire du baron Charles Dupin.

En 1828, il s'associa avec quelques jeunes sténographes pour recueillir et publier les cours professés à la Sorbonne et au Collège de France par les professeurs Etienne Geoffroy Saint-Hilaire, Pouillet, Gay-Lussac, Guizot, Cousin et Villemain. Cette publication eut un grand succès. Grosselin fut, à la même époque, attaché au Moniteur comme sténographe, pour le compte-rendu des séances de la Chambre des députés. Il devint bientôt sténographe-réviseur, et il conserva cette position jusqu'au coup d'Etat du 2 décembre 1851.

Marié et père de famille, Grosselin s'occupait beaucoup de l'éducation de ses enfants : il trouvait là comme un champ pratique pour l'essai de ses méthodes. D'un esprit inventif, il avait imaginé divers procédés destinés à faciliter l'enseignement de la lecture, à aider l'élude de l'histoire et de la chronologie. En 1836, il publia un système de langue universelle fort ingénieux : mais il est dans la destinée d'une langue universelle de n'être jamais sue que par celui qui l'invente.

En 1848, Grosselin se rallia aux principes de liberté proclamés par la révolution de Février. Voulant contribuer à ramener le calme dans les esprits, après Cette crise violente, il fit paraître sous forme d'affiche un journal hebdomadaire, intitulé Justice et charité, avec cette épigraphe : « La loi de charité veut que chacun se dévoue pour le bonheur de tous. La loi de justice veut que tous se dévouent pour le droit de chacun. » Ce journal n'eut que deux numéros. Dans les temps de troubles, les voix honnêtes sont vite étouffées par les clameurs des partis extrêmes.

En 1851, à la veille du coup d'Etat, Grosselin publia sous ce titre : Cherchez et vous trouverez, quelques essais de morale et de politique populaires. Il y recherche quelles sont les causes du malaise social et quels seraient les remèdes à y apporter.

Au 2 décembre, l'Assemblée nationale mit en accusation le président de la République et institua la haute cour de justice qui devait le juger. Au moment où le salle fut envahie par le général Bosquet et sa troupe, la minute de ce décret, signée du président et des secrétaires, fut confiée à Grosselin, qui la conserva pendant plusieurs mois.

Privé de ses fonctions de sténographe-reviseur, Grosselin reporta toute son activité sur les améliorations à introduire dans les méthodes d'enseignement. Devenu membre du Conseil d'administration de la Société centrale d'éducation pour les sourds-muets, il entra en relation avec les professeurs de l'Institution nationale, et se mit au courant des procédés de l'abbé de l'Epée. Mais il comprit bientôt que la langue mimique, quand on veut l'apprendre complètement, est aussi difficile que toute autre langue ; puis, c'est une sorte de langue étrangère que comprennent seuls ceux qui y sont initiés. Il chercha un moyen de parler avec les doigts, applicable à la langue maternelle, et il inventa un alphabet qu'il appela phonodactylologique. Cette méthode, exposée par Grosselin dans plusieurs conférences, laissa les auditeurs assez froids. On trouva le procédé ingénieux, mais peu pratique.

Grosselin ne se découragea pas. En 1861, il apporta à son système de parler la langue française avec la main un perfectionnement qui en fit une méthode propre à être employée aussi bien pour l'instruction des enfants doués de tous leurs sens que pour celle des enfants sourds-muets. Cette méthode, à laquelle il donna le nom de phonomimie, qui peut se traduire par « mimique du son », Grosselin en fit l'essai, d'abord dans sa famille, puis à l'asile de la rue Berthollet, et à l'asile-annexe du Cours pratique des salles d'asile. Convaincu de la bonté de la méthode phonomimique aussi bien pour l'enseignement de la lecture aux enfants doués de la parole que pour l'instruction à donner aux sourds-muets, Grosselin se dévoua à la propager. Avec l'autorisation du ministre de l'instruction publique, il la porta dans plusieurs écoles normales des départements. A l'Exposition universelle de 1867, il installa, dans un pavillon spécial, une véritable école, fréquentée par les enfants des exposants et par des enfants qu'on y amenait de la salle d'asile de la rue Berthollet. Là, pendant cinq mois, on put voir Grosselin dirigeant la classe, et démontrant aux visiteurs les divers procédés employés par lui pour l'enseignement de la lecture et pour l'éducation des sourds-muets. Le jury lui décerna une médaille d'argent.

En 1866, Grosselin avait fondé la Société pour l'enseignement simultané des sourds-muets et des entendants-parlants. Cette société, dont les débuts furent modestes, a été reconnue établissement d'utilité publique en mai 1875.

Grosselin est mort le 5 janvier 1878, dans sa soixante-dix-huitième année.