bannière

g

Ginguene

 Pierre-Louis Ginguené, né à Rennes en 1748, vint de bonne heure à Paris, où il fut d'abord précepteur ; il se fit ensuite une certaine réputation comme homme de lettres, et obtint en 1778 un emploi dans l'administration des finances. Il adopta en 1789 les principes de la Révolution, mais la modération de son caractère le tint éloigné des partis extrêmes. Il collabora à partir de 1791 à la Feuille villageoise, fondée par Cerutti, et la rédigea seul de 1793 à 1795. Sous la Teneur, il fut emprisonné quelque temps comme suspect, et ne recouvra la liberté qu'au 9 thermidor. Lorsque Garat devint commissaire de l'instruction publique, Ginguené fut nommé l'un de ses deux adjoints (26 fructidor an II) ; l'autre était Clément de Ris. Ce fut Ginguené qui demeura chargé de la plus grande partie du travail, Garat n'ayant pas trouvé le loisir de s'occuper de ses fonctions, et les attributions de Clément de Ris étant bornées à la comptabilité. A la suite d'un dissentiment avec Garat, Clément donna sa démission en pluviôse an III ; et lorsque Garat se relira à son tour en thermidor, ce fut Ginguené qui le remplaça comme commissaire et qui resta seul chargé de la direction des bureaux de l'instruction publique.

Lorsqu'en brumaire an IV le système des commissions exécutives fut abandonné et que les ministères furent rétablis, le service de l'instruction publique fut rattaché au ministère de l'intérieur ; il en forma la cinquième division, dont Ginguené devint le directeur. Il occupa ce poste pendant deux ans, et y déploya un zèle digne d'éloges ; mais ses efforts ne purent produire que de médiocres résultats, parce que la loi du 3 brumaire an IV avait placé l'administration de l'instruction publique entre les mains des communes et des départements, et n'avait laissé presque aucune place à l'intervention du pouvoir gouvernemental ; d'ailleurs, la détresse financière du Directoire ne lui eût pas permis de travailler efficacement à faire prospérer les écoles. Vers la fin de 1797, Ginguené fut envoyé comme ambassadeur à Turin ; il n'y resta que sept mois, et à son retour à Paris il devint membre du Conseil d'instruction publique. Il occupa en même temps la chaire de belles-lettres dans une des écoles centrales de Paris. Dès l'an IV, il avait été nommé membre de l'Institut, classe des sciences morales et politiques. Il était en outre le rédacteur en chef de la célèbre revue la Décade, qu'il avait contribué à fonder en floréal an II ; « il l'a enrichie d'une multitude d'articles de littérature et de philosophie, qui l'ont placé au rang des meilleurs critiques de son temps » (MICHAUD jeune, article Ginguené dans la Biographie Michaud). La Décade changea de titre en 1804, et prit le nom de Revue philosophique, littéraire et politique ; elle fut supprimée par le gouvernement impérial en 1807. Après le 18 brumaire, Ginguené était devenu membre du Tribunat ; mais, mal vu de Bonaparte, il fut éliminé de ce corps en 1802, en même temps que Daunou, Chénier et les autres représentants du parti des « idéologues ». Rentré dans la vie privée, il fit de 1803 à 1806, à l'Athénée, un cours de littérature italienne : ce fut l'origine de son grand ouvrage, l'Histoire littéraire de l'Italie, qui parut en 9 volumes de 1811 à 1819. Ginguené ne vécut pas assez pour voir la publication des derniers volumes de cette oeuvre considérable, qui est restée son principal titre littéraire : il mourut à Paris le 16 novembre 1815.