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Géorama

 On appelle georama une représentation en relief, à une échelle plus ou moins grande, d'une partie ou de l'ensemble de la terre. Il ne faut toutefois pas confondre le géorama avec la carte en relief : la carte en relief est une véritable carte, sur laquelle on peut étudier sérieusement la topographie d'un pays, tandis que le géorama, qui vise généralement à reproduire au naturel l'aspect physique du sol, des cultures, des forêts, des rivières, des lieux habités, etc., relève de la fantaisie plus que de la science.

On en pourra juger par la description suivante d'un géorama construit par un instituteur italien ; nous la reproduisons à titre de curiosité :

« Mon géorama consiste dans une table carrée de 2 mètres 13 centimètres, au milieu de laquelle s'élève une chaîne de montagnes affectant diverses formes de manière à donner à l'élève l'idée de la cime, des versants et des accidents divers du terrain. Deux de ces montagnes contiennent un vase de zinc, muni d'un robinet ; une autre montagne contient également un vase de zinc de forme conique, percé vers le haut et qui communique avec un tube qui se dirige vers le sommet des monts. Dans la partie antérieure de la chaîne et autour des replis que forment les monts, le terrain s'incline et devient plaine jusqu'à ce qu'il atteigne un bassin de zinc. Sur l'arrière-plan, on observe une colline, un chalet et un palais de 78 centimètres carrés, à deux étages.

« Les robinets de zinc placés sur les monts font courir l'eau dont ils sont remplis par deux canaux, aussi de zinc, d'inégale grandeur, représentant l'un un ruisseau, l'autre une rivière, lesquels, après avoir décrit plusieurs circuits sur la plaine, vont se jeter dans le bassin qui figure la mer, et dont les bords sont découpés de manière à représenter un port, une baie, un cap, avec une île et une presqu'île. Ce bassin contient un bateau mécanique, un petit vapeur et un bâtiment à voiles. Le long du littoral sont dispersées un certain nombre de demeures isolées ou réunies, et tout près du port on voit une côte couverte de petites maisons en bois, rangées de manière à offrir à la vue de larges rues et places de pierres de taille.

« De la ville partent deux voies de communication, l'une carrossable, l'autre ferrée. La première est parcourue par diverses sortes de véhicules, depuis le tombereau jusqu'à la diligence et à l'opulente berline. On y voit aussi des pierres milliaires.

« La seconde nous offre l'aspect d'un convoi en marche sur les rails, avec les maisonnettes des garde-voie et les poteaux télégraphiques. La voie ferrée traverse la plaine, passe sur un pont de fer jeté sur la rivière, parvient jusqu'à la chaîne de montagnes, s'introduit dans une galerie pratiquée en tunnel, en sort tout à coup du côté opposé, s'arrête à une station intermédiaire, traverse un viaduc, et arrive à un village placé sur l'arrière-plan de l'appareil. Le vase conique de zinc, placé sur la montagne, contient une composition chimique qui, en faisant explosion, imite le mieux possible l'éruption volcanique, laquelle se fait jour par le cratère, en traversant le tube indiqué plus haut.

« Le palais est construit de façon que lorsque, après avoir désigné aux enfants toutes les parties de l'édifice, on en a enlevé les murs, on se trouve en présence d'un palais de cristal laissant voir toutes les chambres de l'intérieur avec tous les meubles correspondants. Attenant au palais est un jardin entouré d'un mur. Sur toute la surface de l'appareil, le regard s'arrête sur des ceps de vigne, des habitations, des animaux de divers genres, etc. On découvre bientôt un autre vase de zinc, représentant un lac. Au-dessus du lac se trouve une cloche de cristal avec un nouveau vase de zinc, contenant un réfrigérateur. A l'aide d'une lampe à esprit de vin qui se place près du lac, ou obtient une lente évaporation qui imite parfaitement les nuages lorsque, parvenues à la surface du vase supérieur et le trouvant gelé par réfrigération, les vapeurs se dissolvent en gouttes d'eau qui, retombant par leur propre poids dans le lac, produisent une sorte de pluie artificielle. »

En dépit des éloges qu'un journal pédagogique a décernés à cette bizarre invention, nous doutons fort qu'un éducateur sérieux consente jamais à employer un appareil semblable dans son enseignement.

Quelques amateurs d'horticulture se sont amusés à représenter dans leur jardin les continents et les océans au moyen de carreaux et de plate-bandes plus ou moins fantastiquement découpés, hérissés de fiches en bois peint marquant la position des villes, et rayés de petites haies de buis figurant des chaînes de montagnes. Nous avons visité une de ces prétendues représentations de la terre, et nous en avons remporté l'impression qu'on éprouve devant une plaisanterie de mauvais goût.

Tous ces procédés artificiels vont à l'encontre du but que doit se proposer un bon enseignement de la géographie, et n'ont rien de commun avec la méthode intuitive et la leçon de choses. Voulez-vous familiariser l'enfant avec les premières notions géographiques? conduisez-le dans la campagne, et dites-lui d'ouvrir les yeux : le véritable géorama, c'est tout ce qui l'entoure.