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Fellenberg

 Philippe-Emmanuel de Fellenberg, né à Berne le 15 juin 1771, appartenait à une famille patricienne. Son père avait été bailli pendant Quelques années dans l'Argovie, alors pays sujet de Berne, et s'était lié avec Pestalozzi, qui habitait à cette époque Neuhof. Le jeune Fellenberg fit ses études à Berne d'abord, puis en Allemagne ; il voyagea ensuite pendant quelques années, occupé surtout à des observations concernant l'agronomie, devenue sa science préférée, puis il rentra dans sa patrie et s'y maria (1796). En 1798, il prit une part active à la lutte que soutinrent les Bernois contre les armées du Directoire, et, proscrit par le commissaire français Mengaud, il s'enfuit en Allemagne ; mais il fut amnistié quelques mois plus tard, et se rallia au nouveau régime. En 1799, il acheta un vaste domaine qu'il appela Hofwyl ; il voulait y appliquer les principes de la science agronomique et essayer en même temps de transformer par l’éducation les travailleurs de la terre. Il avait conçu un plan de réforme sociale fondée sur l'agriculture, et il méditait de créer à Hofwyl trois instituts, l'un pour l'éducation des enfants pauvres, un autre destiné aux jeunes gens de la classe aisée, et un troisième où seraient élevés les enfants de la noblesse. Pestalozzi venait (1804) de transférer son établissement d'éducation de Burgdorf à Munchenbuchsee, tout près de Hofwyl ; un arrangement fut conclu par lequel Fellenberg devenait directeur de l'établissement de Münchenbuchsee, réuni à celui de Hofwyl ; mais les vues de l'aristocrate Fellenberg étaient trop différentes de celles du démocrate Pestalozzi pour qu'une entente durable fût possible entre ces deux hommes ; ils se brouillèrent bientôt, et Pestalozzi transporta son établissement à Yverdon. Fellenberg poursuivit la réalisation de son plan particulier. Grâce au dévouement d'un jeune instituteur, Wehrli, l'école de pauvres, qui, dans les premières années, n'avait pas donné des résultats satisfaisants, prit un développement qui répondait aux vues du fondateur. En 1809 s'ouvrit à Hofwyl un institut agronomique pour l'éducation des jeunes gens destinés à prendre plus tard la direction d'une exploitation rurale. En même temps s'ouvrait aussi une école d'éducation scientifique pour les classes supérieures, dont les fils du fondateur furent les premiers élèves, et où l'on vit ; bientôt accourir de toute l'Europe les héritiers des princes et des grands seigneurs. Fellenberg salua avec joie, en 1814, la restauration de la monarchie des Bourbons en France et celle de la domination du patriciat en Suisse : ce fut l'époque de la plus grande vogue de son établissement ; il recevait à sa table les souverains de la Sainte-Alliance et leur exposait ses plans de régénération sociale. Il avait trouvé, disait-il, le moyen d'assurer la prospérité des Etats et la stabilité de l'ordre public : le problème à résoudre était essentiellement du domaine de l'éducation ; l'école, telle que Fellenberg la concevait, devait se proposer pour but de rendre chaque classe de la société apte à ce qu'elle doit être dans la position où elle se trouve, et chaque individu propre à remplir la place que la Providence lui a assignée par sa naissance.

En 1817, il y eut de la part de Fellenberg une nouvelle tentative de main-mise sur l'établissement de Pestalozzi ; cette fois, la tentative aboutit à une brouille définitive, et Fellenberg, irrité, se vengea en publiant contre Pestalozzi un pamphlet calomnieux (Einige Worte über Pestalozzi, 1818).

Le fondateur de Hofwyl, lorsqu'il fut arrivé à la fin de sa carrière, désira assurer l'avenir de son établissement après sa mort, et il offrit, en conséquence, au canton de Berne de le lui céder à titre d'institut national. Mais le Grand-Conseil bernois qui, après les événements de 1830, était imbu de l'esprit démocratique, refusa la proposition (1838). Fellenberg mourut six ans plus tard, à l'âge de soixante-quatorze ans, le 21 novembre 1844. — Voir Wehrli.