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Etats-unis

La superficie des Etats-Unis de l'Amérique du Nord est évaluée à 9 383 000 kilomètres carrés environ. Leur population est évaluée (1909) à 88 millions d'habitants. L'Union se compose, depuis 1907, de 46 Etats, de 2 Territoires, et du district fédéral de Columbia.

Résumé historique. — A parler rigoureusement, il n'existe pas, aux Etats-Unis, un système national d'éducation. Chaque Etat a établi son code particulier d'instruction publique, et pourvoit à l'administration de l'organisme scolaire qui lui appartient en propre. L'histoire de la façon en laquelle les fondations individuelles de l'époque primitive des colonies se sont développées jusqu'à devenir les organismes cohérents et complets des Etats modernes de l'Union, révèle une remarquable faculté d'adaptation aux besoins variables de la vie américaine, et une tendance constante vers l'unification et vers l'adoption d'une norme commune, tendance qui, dans une large mesure, n'a pas tenu compte des frontières des Etats.

L'histoire de l'éducation aux Etats-Unis commence avec les premiers établissements permanents des Anglais dans l'Amérique du Nord. L'aventureuse bande de colons qui s'établit à Jamestown (Virginie) en 1607 était plus préoccupée, au début, de la recherche de l'or que de plans d'organisation des écoles, ou même que des moyens de pourvoir pratiquement à la subsistance de la colonie. Les difficultés de la lutte pour l'existence durant les premières années, et les guerres contre les Indiens, dont le terrible massacre de 1622 fut le principal épisode, avaient fait ajourner les projets qui avaient pu être formés pour l'éducation. En 1624, l'Assemblée générale de la Virginie décida que tout borough (bourg) et tout hundred (groupe de cent feux) devait se charger de l'entretien et de l'éducation d'un certain nombre d'enfants indiens, dont les plus capables seraient préparés à servir de missionnaires parmi leurs compatriotes. Il est probable que, pour l'exécution de cette décision, quelques écoles furent établies. Quoi qu'il en puisse être, on a la preuve qu'une école fondée dans le comté d'Elizabeth, au moyen d'un legs fait en 1634 ou 1635, fut ouverte en 1636. D'autres écoles furent établies dans la colonie, surtout dans la seconde moitié du dix-septième siècle. L'Assemblée vota des mesures, en 1646, pour la création d'un enseignement industriel (cardage de la laine, tricotage et filage, pour les deux sexes), et les commissaires furent autorisés à choisir deux enfants de chaque comté pour recevoir cette instruction. L'Assemblée coloniale de 1660 fit de nouveaux efforts pour établir des écoles. Des fonds furent recueillis à cet effet au moyen de souscriptions privées. Il est certain, néanmoins, que les résultats de ces travaux furent peu considérables. En 1671, 1e gouverneur Berkeley s'exprimait en ces termes au sujet de l'instruction dans la colonie : « Je rends grâce à Dieu que nous n'ayons ni écoles gratuites, ni imprimerie, et j'espère que nous n'en aurons pas d'ici un siècle ; car l'instruction a apporté dans le monde la désobéissance, l'hérésie et les sectes ; l'imprimerie les a répandues, et a diffamé par des libelles le meilleur gouvernement. Dieu nous préserve de l'une et de l'autre! »

En 1633, la première école sur laquelle nous ayons des renseignements précis fut établie par les Hollandais à Nieuw Amsterdam (devenue New York en 1664) ; il existe encore aujourd'hui à New York une école qui descend en ligne directe de celle-là. Cette première école de Nieuw Amsterdam etait du degré élémentaire ; en 1659 fut établie dans cette ville une école latine. Au moment de l'occupation anglaise (1664), trente maîtres avaient enseigné dans la colonie hollandaise, pendant un temps plus ou moins long : vingt d'entre eux avaient tenu des écoles publiques, et dix des écoles privées.

Plus que toutes les autres colonies, les établissements du Massachusetts étaient composés d'hommes cultivés. Sur chaque millier d'habitants on en comptait quatre ayant pris leurs grades dans une université d'Angleterre. 11 n'y avait que cinq ans que Boston avait été fondé dans la colonie de Massachusetts Bay, lorsqu'une école latine fut ouverte, précédant de deux ans la création de Harvard College. La première des écoles d'Amérique qui ait été entretenue par une taxe directe levée sur les habitants de la localité fut établie à Dorchester (Massachusetts) en 1639. Ce fut cette municipalité, également, qui institua le premier comité d'école, le précurseur de nos boards of éducation actuels. La loi de 1642 du Massachusetts fut le premier acte législatif de la colonie concernant l'organisation de l'éducation. Elle stipula que les enfants devaient recevoir de l'instruction, — sans spécifier toutefois que celle-ci dût nécessairement être donnée dans une école publique, — et institua des inspecteurs pour veiller à ce que la loi fût exécutée. Elle organisa un enseignement industriel, pour lequel les outils et les matières premières devaient être fournis par les municipalités. Mais c'est l'enactment de 1647 qui constitue, comme l'a dit un écrivain américain, « la plus importante des lois scolaires de toute notre histoire ». Aux termes de cette ordonnance, aussitôt qu'un township compterait une population de cinquante familles, il devait y être établi un instituteur chargé d'apprendre à lire à tous les enfants qui se rendraient auprès de lui, sans distinction de classe. Une école secondaire, ou grammar school, devait être fondée dans tous les town-ships comptant cent familles. Les townships qui ne se conformeraient pas aux prescriptions de l'Act auraient à payer une amende de cinq dollars par an. Le chiffre peu élevé de cette amende était le point faible de la loi ; aussi l'amende fut-elle augmentée par la législation ultérieure. Une vingtaine d'écoles furent établies dans la colonie avant le commencement du dix-huitième siècle.

La colonie de Plymouth (Massachusetts), établie en 1620, ne réussit pas à fonder d'écoles gratuites avant 1670, date à laquelle des privilèges de pêche furent concédés en faveur de la création d'une école. Celle-ci fut ouverte en 1671, et l'année suivante fut élevée au rang d'école secondaire. Une loi de 1677 prescrivit des mesures plus générales. En 1692, la colonie de Plymouth fut réunie à celle de Massachusetts Bay, et l'ordonnance scolaire de cette dernière fut appliquée également au nouveau territoire.

Dans les colonies du Connecticut, Hartford eut sa première école en 1639, quatre ans après la fondation de la ville, et New Haven, fondée en 1639, prit aussitôt la même mesure. En 1650, les lois scolaires du Connecticut, qui s'étaient inspirées de la législation du Massachusetts, furent codifiées, et elles restèrent les mêmes pendant une période de plus de cent cinquante ans, avec de légères modifications seulement. En 1662, les colonies de Hartford et de New Haven furent réunies. En 1666, elles furent subdivisées en quatre comtés, dans chacun desquels une concession de 600 acres de terres fut faite pour l'établissement d'une grammar school. Les instituteurs furent exemptés du service militaire et du paiement des impôts.

La colonie de New Hampshire et celle du Maine firent partie du territoire du Massachusetts, la première jusqu'en 1680, la seconde jusqu'en 1820, et par conséquent eurent la même législation scolaire. Quant aux autres colonies, avant la guerre de l'Indépendance, aucune n'intervint de façon active en faveur de l'instruction, sauf en édictant quelques lois spéciales dans des cas particuliers. C'étaient les fondations religieuses et charitables qui, dans ces colonies, étaient essentiellement chargées de ce qui concernait l'instruction populaire. L'éducation des filles était négligée dans la majorité des villes.

Peu de temps après la guerre de l'Indépendance, le « Territoire du Nord-Ouest » fut organisé. Il servit à former les premiers Etats à l'ouest des monts Alleghanys. Dans l'acte officiel par lequel eut lieu l'incorporation du Territoire du Nord-Ouest, le gouvernement fédéral énonça son opinion sur l'importance de l'éducation populaire dans les termes suivants : « La religion, la morale et l'instruction étant nécessaires à un bon gouvernement et au bonheur de l'humanité, les écoles et les moyens d'éducation devront être constamment encouragés ». Le gouvernement fédéral dota les différents Etats de terres et d'argent pour l'établissement de fonds d'éducation permanents, mais il laissa à chaque Etat la libre administration de ces fonds et le gouvernement des écoles. Les terres publiques mises à la disposition des Etats pour leurs . fonds scolaires permanents se sont élevées au total de 87 500 000 acres (35 millions d'hectares). En 1836, un excédent disponible de 43 millions de dollars fut réparti entre les vingt-sept Etats alors existants. La plupart des Etats versèrent cet argent à leur fonds scolaire permanent. Dans quelques-uns, les fonds permanents ne sont employés qu'au profit des écoles élémentaires et secondaires ; dans d'autres, ils sont consacrés à l'instruction de tous degrés, y compris les universités et les écoles normales, ou bien ils sont divisés en plusieurs fonds distincts, tels que le « fonds des écoles primaires », le «fonds des universités », etc. Depuis 1862, les subventions fédérales, accordées à tous les Etats également, ont eu principalement en vue l'éducation industrielle. En 1862, chaque Etat reçut autant de fois 30 000 acres de terre qu'il avait de représentants au Sénat et au Congrès, pour rétablissement d'une ou de plusieurs institutions dont l'objet devait être d'enseigner l'agriculture, les arts mécaniques, et des connaissances du même genre. Environ 10 millions d'acres (4 millions d'hectares) ont été distribués en exécution de cette loi. L'argent qui en est provenu a été employé à la création de collèges agricoles et industriels (agricultural and mechanical colleges). Ces collèges sont soit des écoles indépendantes, soit des départements rattachés à une université d'Etat. A cette heure, chaque Etat reçoit annuellement environ 75 000 dollars du gouvernement fédéral pour l'entretien de son collège agricole et industriel et pour les sections d'expériences qui y sont jointes.

Comme exemple des subventions accordées par le gouvernement fédéral à quelques-uns des Etats de l'Ouest admis récemment dans l'Union, on peut citer le cas de l'Oklahoma, un Etat dont l'étendue est un peu plus du tiers de celle de la France. Lorsque cet Etat fut admis, 1 235 500 acres de terre et 5 millions de dollars lui furent alloués pour la dotation d'un fonds scolaire permanent des écoles élémentaires et secondaires ; en outre, 5 % du revenu des terres publiques de l'Etat, qui forment un domaine très considérable, ont été réservés pour le même but ; enfin, les différentes écoles normales de l'Etat, l'université de l'Etat, le collège agricole et industriel, l'université agricole et normale pour la population de couleur, et l'école préparatoire à l'université, ont reçu des dotations de terres formant un total d'environ 1 235 500 acres.

Etat actuel. — LE GOUVERNEMENT FEDERAL. — Le gouvernement fédéral — outre les dons de terre et d'argent énumérés ci-dessus — s'est associé à l'oeuvre de l'éducation par la création d'un Bureau national d'éducation, et par la fondation et l'entretien d'un certain nombre d'écoles qui relèvent directement de l'Union.

Le Département fédéral de l'agriculture. — La plus importante des agences d'éducation du gouvernement fédéral à Washington est le Département d'agriculture. Son action se manifeste : 1° par ses relations avec les collèges agricoles et industriels des Etats, et avec les stations d'expériences qui y sont jointes ; 2° par l'administration directe de stations d'expériences dans l'Alaska, à Hawaï, à Puerto Rico, et à Guam (îles Mariannes) ; 3° par des enquêtes, des études, et la publication de renseignements divers : les brochures qu'il distribue annuellement forment un total de plus de sept millions d'exemplaires ; 4° par des conférences et des démonstrations concernant la pratique agricole, qui, dans les Etats du Sud, sont données à la presque totalité de la population rurale ; 5° par une oeuvre analogue de propagande du service forestier du département, qui a déterminé un mouvement, de grande portée, pour la conservation des ressources nationales de toute nature ; 6° par les travaux d'autres bureaux du département, qui sont en train de révolutionner les méthodes de construire les routes, la manufacture des produits alimentaires, et tout le domaine de la culture et de l'élevage.

Le Département fédéral de l'intérieur. — Le Bureau national d'éducation, à Washington, à la tête duquel est placé le commissaire de l'éducation, est une section du ministère de l'intérieur. Il n'a pas d'écoles sous sa direction, excepté celles qui sont destinées aux indigènes de l'Alaska. Le grand service que le Bureau rend à l'éducation consiste dans la publication tant de rapports annuels que de rapports spéciaux, contenant des statistiques et des renseignements divers, et dans la formation d'une bibliothèque nationale d'éducation. Pendant quelques années, la plus grande partie du budget du Bureau d'éducation a été appliquée aux dépenses des écoles de l'Alaska, ainsi qu'à l'entretien de troupeaux de rennes dans ce Territoire, pour l'amélioration de la condition matérielle et morale des indigènes.

Le commissaire de l'éducation de l'île de Puerto Rico est placé sous l'autorité du gouvernement de cette île, et celui-ci relève du secrétaire d'Etat pour l'intérieur.

Le surintendant des écoles indiennes, qui relève du commissariat des affaires indiennes au ministère de l'intérieur, a la surveillance générale des écoles fédérales créées pour les Indiens. Beaucoup de ces écoles sont placées dans les régions désignées sous le nom de « Réserves indiennes » ; mais quelques-unes d'entre elles, comme la célèbre Ecole industrielle indienne, à Carlisle (Pensylvanie), ne sont pas en territoire réservé. Outre l'instruction scolaire proprement dite, les écoles indiennes donnent aussi à leurs élèves des connaissances industrielles. Les dépenses faites annuellement par le gouvernement fédéral pour l'éducation des Indiens sont d'environ 4 millions et demi de dollars.

Le Département du commerce et du travail. — En dehors de la publication de rapports concernant les écoles industrielles, qui forment la plus complète série de documents de ce genre, le ministère du commerce et du travail n'a pas encore pris en mains l'organisation et le développement de 1 éducation industrielle avec la vigueur qu'on peut observer dans l'action des ministères de même genre en quelques pays d'Europe, ou d'une façon comparable aux efforts accomplis par le Département de l'agriculture en ce qui concerne l'industrie agricole. Néanmoins, on constate, au Département du commerce et du travail, une tendance à encourager de façon active l'instruction professionnelle des jeunes gens qui se vouent aux industries non agricoles.

Le Département fédéral de la guerre. — Ce département a la direction de la grande école militaire de West Point, et de* plusieurs autres écoles de moindre importance. On a pu voir des preuves des résultats obtenus par le Département de la guerre en matière d'enseignement technique, par la façon heureuse dont ont été conduites les opérations du canal de Panama, et par l'exécution d'importants travaux entrepris sur des fleuves et dans des ports sous la surveillance de ce département. Tout l'organisme scolaire de l'archipel des Philippines est placé sous l'autorité du Département de la guerre.

Autres départements fédéraux possédant des écoles. — Le Département de la marine entretient l'Académie navale, à Annapolis (Maryland), et dirige plusieurs autres écoles pour l'éducation des officiers et des marins. Le Département du trésor entretient des cours d'instruction pour les cadets du service des bateaux de la douane ; le Département de la justice surveille la Reform School du district fédéral de Columbia, qui donne aux mineurs internés dans cet établissement une éducation industrielle.

LES AUTORITES SCOLAIRES DANS LES ETATS DE L'UNION. — Chacun des Etats a, pour l'ensemble de ses écoles, son organisation particulière. A la tête de l'organisation est placé soit un chef unique, soit un comité : un surintendant de l'instruction publique (State Super-intendent of public instruction), un commissaire de l'éducation (Commissioner of education), ou un Comité d'éducation (State Board of education). Il est difficile de résumer en termes généraux les attributions d'un State Board of education, qui varient considérablement d'un Etat à l'autre. Dans beaucoup d'Etats, le Board a la charge de toutes les écoles supérieures de l'Etat ; dans beaucoup d'autres, il dirige seulement quelques-unes de ces écoles supérieures ; dans certains Etats, il se borne à examiner les candidats qui se présentent pour entrer dans la carrière de l'enseignement ; ailleurs, il s'occupe principalement de recueillir et de publier des statistiques et divers autres renseignements relatifs aux écoles. Les attributions du fonctionnaire appelé Superintendent ou Commissioner of schools, qui est généralement élu par le vote populaire, varient aussi. Ici, il sera président ou secrétaire du State Board of education, ou bien sera le principal agent d'exécution de ce corps. Là, il exercera une autorité analogue à celle que possède un ministre de l'instruction publique en France ou en Prusse : c'est le cas, par exemple, pour le commissaire de l'éducation de l'Etat de New York.

Quelquefois les pouvoirs du surintendant sont très restreints. Dans tous les Etats, il est chargé de recueillir et de publier la statistique scolaire et les divers renseignements qui peuvent intéresser l'éducation. Généralement, il a la gestion du fonds scolaire de l'Etat, et en répartit les revenus entre les districts scolaires de l'Etat, habituellement sur la base du chiffre de la fréquentation scolaire. Dans beaucoup d'Etats, il doit s'occuper des examens à la suite desquels sont délivrés les brevets de capacité (State certificates) ; dans beaucoup aussi, il a la direction des teachers' institutes.

Le second degré de la hiérarchie administrative scolaire est formé par le comté (county). Quoique les comtés soient de dimensions diverses (il y en a un qui est aussi grand qu'un quart du territoire de la France, un autre n'a qu'une superficie comparable à celle du Quartier Latin à Paris), leur étendue moyenne est d'environ un quart de l'étendue moyenne d'un département français. Le surintendant de comté, ou le commissaire des écoles du comté, est ordinairement élu par le peuple, comme celui de l'Etat. Dans quelques Etats, il n'y a pas, malheureusement, entre les surintendants de comté et le surintendant d'Etat, un contact suffisant. La situation, toutefois, s'améliore à ce point de vue, et la tendance actuelle porte à une Elus grande centralisation de l'autorité dans l'Etat. Les fonctions d'un surintendant de comté sont analogues à celles d'un inspecteur primaire en France, ou d'un Bezirksinspektor en Allemagne : mais il a ordinairement plus d'écoles à visiter que l'un et l'autre de ces fonctionnaires européens. Il s'occupe des examens à la suite desquels sont délivrés les certificates (brevets) à court terme, dirige les conférences d'instituteurs et d'institutrices (teachers' institutes) à intervalles réguliers, et fait un rapport annuel au surintendant d'Etat. C'est lui qui, d'ordinaire, répartit la subvention scolaire allouée au comté. L'influence des surintendants de comté est un facteur essentiel pour l'amélioration des écoles rurales. Les écoles des agglomérations urbaines (town et city), placées sous la surveillance directe d'un fonctionnaire plus ou moins expert en matière d'éducation, le surintendant local, ne réclament pas son attention au même degré, et quelquefois il n'a pas à s'en occuper du tout.

Chaque comté est divisé en circonscriptions territoriales appelées townships, au nombre d'environ trente-six par comté ; et les townships, à leur tour, sont subdivisés en districts scolaires (school districts). Le district scolaire est, selon le cas, le territoire occupé par un village, une ville (town) ou une cité (city), constitués en municipalités, ou bien, dans les campagnes, le territoire formant l'arrondissement d'une école rurale. Il ne faut pas oublier qu'aux Etats-Unis un très grand nombre d'écoles rurales ne sont pas situées au centre d'un petit village, mais en quelque endroit complètement isolé, parfois à une distance considérable de la ferme la plus voisine. Dans les dernières années s'est manifestée une forte tendance à supprimer les nombreuses petites écoles rurales, pour les remplacer par une seule grande école par township, située en un point central. Là où ce système a été adopté, les élèves sont fréquemment amenés à l'école en voiture, aux frais du district. Cette école « consolidée » (consolidated school), comme on l'appelle, peut avoir un aussi grand nombre de classes que la high school des villes.

Les fonctionnaires scolaires des townships, dans la plupart des cas, sont surtout chargés du maniement des revenus scolaires ; ils ont aussi une mission d'inspection qu'ils remplissent avec plus ou moins de négligence. Le comité scolaire de district (district school board) a plus d'importance. A la campagne, ce comité n'a à s'occuper que de l'unique école du district, une petite école rurale ; dans une city ou dans une town, il prend le nom de board of education, et il forme la plus haute autorité délibérante pour toutes les écoles existant dans le ressort municipal. Les membres des school boards ruraux sont généralement élus par les citoyens dans une assemblée annuelle ; les membres du board of education d'une cité ou d'une ville sont tantôt élus de la même façon, tantôt nommés par le maire. Le budget local de l'école ou des écoles est soit voté par les citoyens dans leur assemblée annuelle, soit fixé par le conseil municipal (city council). La répartition de la somme votée pour les dépenses scolaires est confiée au board of education.

Le premier agent exécutif de l'organisme scolaire d'une cité, et le représentant direct du board of education, est le surintendant. Ce fonctionnaire est ordinairement nommé par le board. Il doit posséder à la fois la compétence pédagogique et les qualités administratives, et dans l'exercice de ses fonctions il possède, sur les écoles qui lui sont subordonnées, une autorité plus grande que n'importe quel fonctionnaire du même ordre dans un autre pays. Il n'existe pas de situation exactement comparable à la sienne dans les organismes scolaires des pays d'Europe : on peut dire, pour en donner une idée approximative, que si les pouvoirs du directeur de l'enseignement primaire de la Seine s'étendaient aussi aux lycées et collèges, de même qu'aux écoles normales de la Seine, les attributions de ce fonctionnaire ressembleraient assez à celles du surintendant des écoles d'une cité américaine. Le surintendant a sous son autorité tout l'enseignement primaire et secondaire public dans son ressort, ainsi que les écoles normales de la cité, s'il en existe. Il possède un droit de décision très étendu, tant en matière financière qu'en matière pédagogique. Les rapports annuels des surintendants des cités sont habituellement des documents très développés, où l'on rencontre souvent quelques-unes des meilleures contributions à la littérature pédagogique. Malgré tous leurs défauts, il n'est que juste de constater que les rapports sur l'éducation publiés aux Etats-Unis par les autorités de l'Union, des Etats et des cités, de même que les documents émanant des grandes institutions dues à des fondations privées, sont de beaucoup les plus intéressantes des publications de ce genre qu'on puisse trouver dans n'importe quel pays.

LES ETABLISSEMENTS D'INSTRUCTION DES DIVERS DEGRES. — Les principaux types des établissements d'instruction publique peuvent être classés de la manière suivante : 1° les écoles élémentaires, comprenant les jardins d'enfants, les écoles primaires proprement dites, et les grammar schools ou écoles de grammaire, qui y font suite ; 2° les high schools ou écoles supérieures (secondaires) ; 3° les écoles normales, les colleges, les groupes de colleges ou universités, les écoles technologiques.

Les écoles élémentaires. — En 1867, Mme Elizabeth Peabody visita l'Allemagne afin d'y étudier la méthode de Froebel, et l'année suivante introduisit les jardins d'enfants en Amérique. En peu d'années, un jardin d'enfants fut annexé à un grand nombre d'écoles publiques. C'est de 1870 à 1880 que le mouvement pour leur introduction fut le plus actif. Les jardins d'enfants américains sont généralement établis d'après le plan froebelien ; ils ne reçoivent pas, dans la règle, les enfants aussi jeunes que le font les écoles maternelles françaises. Il y a environ 8200 jardins d'enfants aux Etats-Unis, avec 12 500 institutrices et 360 000 élèves. Les institutrices sont formées soit dans les écoles normales de l'Etat, soit dans des établissements privés, ou dans des sections normales annexées à des collèges ou à des universités ; la majorité de ces dernières institutions ont des cours spéciaux destinés aux futures « jardinières d'enfants », avec une école pratique comprenant un jardin d'enfants modèle.

Une école élémentaire (elementary school) compte ordinairement huit degrés (grades) successifs, qui retiennent l'élève pendant huit années. Les écoles élémentaires des districts ruraux sont souvent des ungraded schools, c'est-à-dire qu'elles ne sont pas divisées en classes successives, hiérarchiquement coordonnées ; mais elles cherchent néanmoins à réaliser à peu près le même programme que les graded schools, ou écoles divisées en classes, des districts urbains. Un court séjour au jardin d'enfants précède quelquefois l'entrée à l'école élémentaire. L'école élémentaire conduit directement à l'école secondaire ou high school, et celle-ci conduit directement à l'école normale, au college ou à l'université.

La fréquentation obligatoire de l'école existe dans 36 Etats sur 46, et dans le district fédéral de Columbia. Dans ces 36 Etats, la période scolaire, qui peut s'étendre de d'âge de six ans, limite inférieure, à celui de dix-sept, limite supérieure, offre les variétés suivantes : 6-14, 6-16, 7-14, 7-15, 7-16, 8-14, 8-15, 8-16, 8-17, 9-14. C'est dans l'Orégon que la période est la plus courte (9-14) ; c'est dans la Pensylvanie qu'elle est la plus longue (6-16) ; le New Jersey offre la limite supérieure la plus élevée (8-17), mais les élèves qui ont parcouru les huit degrés de l'école élémentaire peuvent quitter l'école à quinze ans. Dans deux autres Etats, l'obligation scolaire ne s'applique qu'à certains districts.

Dix Etats n'ont pas de loi prescrivant la fréquentation obligatoire ; ce sont tous des Etats du Sud ; l'absence d'une loi sur l'obligation y est due aux difficultés créées par le problème des races ; et ces difficultés sont cause que, jusqu'à ces dernières années, ces Etats n'ont pas offert les caractères de prospérité générale que présentent les Etats du Nord. Mais leurs ressources ont commencé à se développer.

En général, les écoles américaines pratiquent la coéducation. Ce n'est guère que dans quelques cités de l'Est que l'on rencontre la séparation des sexes.

On n'exige de rétribution scolaire que des élèves étrangers au district. Dans beaucoup de cités, et dans quelques Etats entiers, les livres de classes sont fournis gratuitement aux élèves.

Malgré l'excellente organisation des écoles, les statistiques indiquent une proportion d'illettrés considérable, mais qui va en décroissant rapidement. La présence de cet élément de la population est duc à deux causes principales. La première, c'est que la loi, dans les Etats du Sud, n'oblige pas les enfants de race noire à fréquenter l'école ; la seconde, c'est que les immigrants qui viennent accroître incessamment la population des Etats-Unis apportent avec eux un large contingent d'illettrés. C'est dans les campagnes de l'Ouest que la proportion des illettrés est la moins forte ; elle est plus élevée dans les villes, en particulier dans les grandes cités de l'Est et du Centre-Ouest ; elle atteint son maximum dans la « ceinture noire » (black belt) du Sud. En 1900, la proportion des illettrés dans l'Iowa et le Nebraska— les deux Etats où il y en a le moins — était de 2, 3 % ; le Maine, celui des Etats de l'Est qui occupe le meilleur rang sur la liste, avait 5 % d'illettrés ; et la Louisiane venait au dernier rang avec 38, 5 %. Les écoles du soir dans les cités, et un plus grand zèle pour l'instruction des noirs dans le Sud, modifieront ces chiffres à court délai.

Si les écoles des cités, aux Etats-Unis, marchent de pair avec les meilleures écoles qu'on puisse trouver dans les autres pays, l'école rurale américaine n'a pas réalisé les mêmes progrès. Cela est dû principalement à la durée plus courte des études, et à l'absence d'un bon personnel d'instituteurs et d'institutrices. Les traitements payés aux teachers des écoles rurales sont bien inférieurs à ceux qu'on paie dans les villes, et l'aménagement des écoles des districts ruraux est loin de pouvoir soutenir la comparaison avec celui des écoles urbaines. Mais on s'occupe de remédier à ces points faibles. Plusieurs Etats ont récemment promulgué des lois fixant un minimum de traitement au-dessous duquel les districts ne pourront pas descendre, et établissant pour ce minimum un chiffre bien plus élevé que le chiffre moyen des traitements précédemments payés. Simultanément, la durée annuelle du temps pendant lequel l'école doit être ouverte a été accrue, de façon à se rapprocher des dix mois qui sont la durée adoptée dans les meilleurs districts urbains. L'aménagement matériel de l'école a été amélioré, et la possibilité de faire appel à un personnel enseignant mieux qualifié est facilitée par celte « consolidation », cette substitution d'une école unique à plusieurs petites écoles rurales, dont il a été parlé plus haut. Enfin, dans ces dernières années, plusieurs écoles normales ont organisé des cours spécialement destinés aux instituteurs et aux institutrices qui veulent enseigner dans les écoles rurales.

Les écoles élémentaires sont généralement divisées en deux sections : la primary school, ou la primary division (comprenant habituellement les quatre classes inférieures), et la grammar school, ou la grammar division (comprenant les quatre classes supérieures de l'école élémentaire). Les matières d'enseignement à l'école primaire, ou dans la division primaire, sont : la lecture, l'écriture, le spelling, l'anglais (avec une attention spéciale donnée à l'orthographe), la composition, l'arithmétique, les leçons de choses, l'élude de la nature, la géographie, la morale. A l'école de grammaire, ou dans la division de grammaire, le programme est élargi, et l'histoire, la physiologie (avec un enseignement spécial concernant les mauvais effets des stimulants et des narcotiques) et l'instruction civique sont ajoutées. A la campagne, les éléments de l'agriculture, et, dans les villes, le travail manuel, font généralement partie des matières d'enseignement de l'école élémentaire. Dans plusieurs Etats, l'enseignement de l'agriculture est obligatoire. Les effets physiologiques de l'alcool constituent aussi un objet d'enseignement généralement obligatoire.

C'est surtout dans l'Est que l'on rencontre les écoles élémentaires privées. Toutefois, les écoles dites paroissiales ou confessionnelles, qui forment environ la moitié des écoles élémentaires privées, existent dans toutes les parties du pays. Un peu plus des trois cinquièmes de ces écoles sont catholiques ; les autres sont protestantes, et appartiennent principalement à l'Eglise luthérienne et à l'Eglise épiscopale ; un petit nombre sont mormones (dans l'Utah).

Pour la préparation du personnel enseignant des écoles élémentaires, il existe des écoles normales, des instituts normaux, des sections pédagogiques annexées à des high schools, à des colleges et à des universités. Mais il est aussi possible à des personnes qui n'ont pas suivi les cours d'une de ces institutions d'obtenir un brevet, en passant l'examen. Toutefois, on préfère les maîtres et les maîtresses qui ont reçu une éducation professionnelle, et pour certaines positions la possession du diplôme délivré par une école normale ou un college est indispensable. La proportion des instituteurs et des institutrices possédant des connaissances pédagogiques s'accroît en conséquence d'année en année.

Les « high schools ». — Les high schools, ou écoles supérieures (secondaires), continuent l'instruction commencée à l'école élémentaire. Elles donnent une culture générale, et préparent aux écoles normales, aux universités et aux écoles technologiques. Après avoir achevé le cours d'études d'une bonne high school, qui dure quatre années, l'élève, après quatre autres années d'études dans un college ou une université, peut obtenir le grade de bachelier (ès sciences, ès arts, etc.) ; pour le grade de maître ès arts (M. A.), une année supplémentaire d'études est nécessaire.

Dans les high schools publiques, l'instruction est gratuite pour les ressortissants de la municipalité ou du district scolaire. Pour s'adapter aux besoins des différentes catégories d'élèves, les high schools ont souvent de trois à cinq cours d'études parallèles : classique, anglais, langues modernes, sciences, latin-sciences, commercial, travail manuel. Dans beaucoup de high schools, une grande latitude est laissée aux élèves pour le choix des leçons à suivre, particulièrement dans les deux dernières années du cours d'études. Les garçons et les filles reçoivent en général l'enseignement dans les mêmes classes. Au point de vue de l'aménagement matériel, les high schools sont d'ordinaire très complètement outillées ; il n'est pas rare de voir des bâtiments de high schools qui ont coûté deux millions de dollars ; plusieurs high schools affectées à l'enseignement du travail manuel sont installées dans des édifices qui ont coûté un million de dollars. Dans une ou deux high schools, le nombre des élèves va jusqu'à 3000.

Chaque ville et chaque village important possède au moins une high school. Le total de ces établissements dépasse 12 000, dont environ 1400 high schools privées. Le nombre des maîtres et maîtresses s'élève à 43 000, celui des élèves à 890 000. La première année d'études renferme 43 % des élèves ; 27 % sont dans la seconde année, 18 % dans la troisième, et 12 % dans la quatrième. Le personnel enseignant se compose de femmes pour plus de la moitié ; quant aux élèves, 57 % sont des filles, 43 % des garçons. Le personnel enseignant est nommé par le board of education ou le surintendant, ordinairement pour le terme d'un an. Toutefois, les situations permanentes deviennent plus fréquentes dans l'enseignement secondaire, et un certain nombre de cités se sont préoccupées de créer des pensions de retraite pour le personnel de cet ordre d'enseignement. Les high schools publiques sont placées sous l'autorité du surintendant local et du board of education local de la même manière que les écoles élémentaires. On réclame aujourd'hui, presque toujours, des candidats à un poste d'enseignement dans les high schools, une préparation professionnelle spéciale, outre la possession d'un diplôme délivré par un college ou une université. Des écoles normales, des collèges normaux, des sections pédagogiques d'université, se sont fait une spécialité de la préparation de maîtres et de maîtresses pour les écoles secondaires.

Des cours d'été (summer schools) d'une durée de quatre à huit semaines sont organisés par beaucoup d'écoles normales, de colleges et d'universités. Des institutions pédagogiques comme le Michigan State Normal College réunissent jusqu'à 1500 assistants dans leur summer school ; quelques universités en groupent un plus grand nombre encore. Ces cours d'été offrent habituellement une grande variété de sujets ; toutefois, quelques-uns présentent des spécialités caractéristiques : ainsi, la New York University offre des facilités spéciales dans ses summer schools (comme aussi dans ses cours d'études réguliers) pour la préparation de professeurs et de directeurs d'écoles industrielles.

Les salaires des maîtres et maîtresses de high schools varient beaucoup selon les Etats : le directeur peut recevoir de 800 à 10000 dollars ; les maîtres et maîtresses, de 400 à 3000 dollars.

Ecoles normales. — La première école normale fut établie à Lexington, dans l'Etat de Massachusetts, en 1839. Il y en a aujourd'hui 260, tant publiques que privées, avec environ 5000 professeurs, hommes et femmes, et 150 000 élèves, dont 52 000 sont dans les écoles pratiques ou écoles modèles (practice or model schools), 73 000 sont régulièrement inscrits comme élèves des cours normaux, et 25 000 sont dans les sections préparatoires, ou cours destinés à former le personnel enseignant des écoles rurales. Outre ces 150 000 élèves, il y a environ 35 000 étudiants inscrits dans les sections pédagogiques des colleges, des universités et des high schools. Quelques-unes, des écoles normales sont des établissements considérables ; il en existe une qui compte plus de 3000 élèves. Un certain nombre d'écoles normales préparent aussi les maîtres de l'enseignement secondaire ; et plusieurs des sections pédagogiques annexées à des universités, comme l'Ecole de pédagogie de la New York University, l'Ecole d'éducation de l'université de Chicago, ou les collèges normaux (teachers colleges) rattachés à d'autres universités, préparent des spécialistes pour tous les degrés de l'instruction : institutrices de jardins d'enfants, directeurs d'école normale, surintendants d'écoles, ou professeurs de pédagogie.

Les élèves des écoles normales ne se consacrent pas tous à l'éducation : dans quelques parties de l'Union, ces institutions tiennent lieu, jusqu'à un certain point, de high schools ou de colleges ; et, dans l'Etat de Pensylvanie, par exemple, elles possèdent des cours de pratique commerciale, en addition à leur section normale et à leur section classique. Dans les écoles normales des villes, il arrive habituellement que le côté classique est développé au détriment du côté pédagogique. On tire parti, pour la préparation professionnelle des futurs maîtres et maîtresses, des écoles pratiques d'application annexées aux écoles normales américaines, plus que ce n'est le cas en France. La pédagogie de chaque matière du programme est ordinairement donnée par le professeur qui est chargé de l'enseignement de cette matière. Quelquefois l'école normale n'a pas de dortoir, les Etats ne se chargeant pas de l'entretien des élèves normaliens. Toutes les écoles normales sont des établissements de coéducation ; mais la proportion des élèves masculins est minime : les hommes ne sont généralement pas employés dans les écoles élémentaires urbaines, excepté pour le poste de directeur, et ils trouvent au college une préparation qui leur permet, tout aussi bien que celle de l'école normale, de faire leur chemin dans la carrière de l'enseignement.

Les brevets de capacité (teaching certificates) sont accordés pour une durée qui varie d'un an à dix ans ; ils peuvent aussi être à vie. Les étudiants sortant d'une école normale d'Etat reçoivent généralement un brevet à vie ; mais les brevets de tous les degrés peuvent également être obtenus par l'étude indépendante, si les examens nécessaires sont passés avec succès.

Des « instituts normaux » tiennent leur session, dont la durée varie d'une semaine à six semaines, pendant les vacances d'été sur divers points du territoire de chaque Etat. Ils sont destinés à l'éducation professionnelle des instituteurs et institutrices qui ne peuvent profiter d'autres moyens de préparation pédagogique, et, en première ligne, de ceux qui ont été employés pendant l'année scolaire.

Dans ces dix dernières années, de grands progrès ont été réalisés en vue d'assurer la stabilité de la profession d'instituteur et ; d'institutrice. On réclame du personnel enseignant une préparation plus complète, en lui offrant, d'autre part, des situations plus durables qu'autrefois. En général, il n'existe pas de pensions de retraite ; mais quelques Etats ont établi des fonds de pension, notamment le New Jersey, et un certain nombre de municipalités ont pris des mesures pour pensionner le personnel enseignant de leurs écoles. Le salaire des instituteurs et institutrices, aux Etats-Unis, est minime, et, généralement, il n'est payé que pour le nombre de mois pendant lequel le maître ou la maîtresse est employé. Les salaires sont différents selon les Etats et les localités ; mais on a calculé que la moyenne, pour l'ensemble de l'Union, est d'environ 54 dollars (281 francs) par mois pour les instituteurs, et d'environ 42 dollars (218 francs) par mois pour les institutrices. Ces salaires ont toutefois une tendance à s'élever de plus en plus.

Les « colleges», les universités, les écoles technologiques. — Sur un total de plus de 850 établissements appartenant à la catégorie des colleges, des universités, des écoles technologiques, plus de 600 envoient annuellement des rapports au Bureau d'édution à Washington : en 1907, 606 rapports ont été reçus. De ces 606 établissements, 150 n'admettent que des hommes, 330 sont ouverts aux hommes et aux femmes, 126 ne reçoivent que des femmes. Aidés par de riches dotations, la grande majorité des colleges et des universités sont des institutions d'un rang élevé, tant en ce qui regarde l'aménagement matériel que la valeur intellectuelle. Le chaos des premiers jours, relativement aux programmes et à l'organisation des études, a fait place à la régularité et à un degré satisfaisant d'uniformité, et l'enseignement peut aujourd'hui rivaliser avec celui des meilleures écoles de l'Ancien Monde. Ce résultat a été obtenu, pour une large part, grâce aux associations formées entre les établissements de haut enseignement, et à l'influence heureuse de vastes subventions générales, dont le bénéfice n'est accordé qu'à celles de ces institutions dont l'enseignement atteint un niveau prescrit. Ainsi, il existe trente-neuf universités d'Etats, et dans le Centre et l'Ouest, où elles prédominent, ce sont elles qui établissent le niveau des examens d'entrée (et, par conséquent, du degré de préparation que les écoles secondaires doivent donner aux étudiants), collectivement par l'association des universités, et individuellement par leur influence dans les Etats où elles sont établies. Tout school board de ville (town) ou de cité a l'ambition d'amener sa high school, ses écoles secondaires, à un niveau suffisant pour que les élèves qui en sortent soient jugés admissibles par les autorités directrices des universités d'Etat. Dans l'Est, où ce sont les universités de fondation privée qui dominent, le même résultat a été obtenu par leur influence collective. Celles du Sud, qui ont souffert de difficultés financières à la suite de la guerre de Sécession, se sont relevées et sont en voie de progrès.

Une université est ordinairement composée d'un certain nombre de colleges distincts ; dans quelques cas, ces colleges sont même placés dans des villes différentes. Douze années de préparation sont habituellement nécessaires pour être admis dans un college : le cours d'études y dure généralement quatre ans, et conduit au grade de bachelier, ou, s'il s'agit de médecine ou d'art dentaire, au grade de docteur (M. D., D. D. S.). Si l'étudiant reste dans l'établissement, il entre alors dans ce que quelques présidents de college appellent l'« université réelle », c'est-à-dire qu'il continue un cours d'études spéciales qui le conduit, au bout d'une année, au grade de maître (licencié), ou, au bout de deux, trois ou quatre ans, au grade de docteur (en philosophie ou en sciences). Ainsi, pour obtenir eu Amérique le grade de bachelier, une période de scolarité de seize ans est nécessaire ; pour le grade de maître (licencié), une période de dix-sept ans ; et pour le grade de docteur en philosophie, une période de dix-huit à vingt et un ans.

Une douzaine environ d'universités sont fréquentées chacune par un nombre de 3000 à 5000 étudiants ; c'est l'université du Michigan, à Ann Arbor, qui tient la tête parmi les universités d'Etats, avec 5000 étudiants ; parmi les universités privées, celles de Valparaiso (Indiana), Harvard (Massachusetts) et Columbia (New York) sont les plus fréquentées. Le développement de quelques-unes de ces écoles est très rapide ; l'université du Wisconsin a récemment complété le quatuor des universités dont la dotation atteint le chiffre de 30 millions de dollars. En ces dix dernières années, il a été organisé, dans une douzaine au moins d'universités, des sections pédagogiques (teachers colleges) dont chacune possède à elle seule plus de chaires de pédagogie qu'on n'en compte dans l'ensemble des universités de toute l'Europe. Le développement de l'Ecole de pédagogie de la New York University a été le plus marqué ; mais il faut noter aussi les progrès réalisés par les sections pédagogiques des universités du Michigan, du Wisconsin, du Minnesota, du Missouri, de la Californie, de Chicago, de Syracuse, de Cornell, de Columbia, de Cincinnati, de Harvard, et de Yale. On doit mentionner aussi, comme des institutions d'Etats d'un égal mérite, le Michigan State Normal College à Ypsilanti et le New York State Normal College à Albany.

Le mouvement le plus considérable dans l'éducation américaine contemporaine est, sans contredit, celui qui se produit en faveur de l'instruction industrielle et technique des masses. Le pays tout entier s'intéresse au succès d'un semblable enseignement. Le résultat de ce mouvement a été l'organisation et la dotation d'un grand nombre d'institutions techniques du degré inférieur, tant écoles du jour qu'écoles du soir : écoles de perfectionnement industriel (industrial improvement schools), écoles de métiers (trade schools), instituts d'industrie (industrial institutes), etc. Quant aux institutions du degré supérieur, elles existent depuis longtemps : grandes écoles d'ingénieurs, écoles de technologie, collèges agricoles et industriels largement dotés par les Etats.

Statistique scolaire. — MAITRES ET ELEVES. — Il y a aux Etats-Unis plus de 260 000 écoles du degré élémentaire, tant publiques que privées, avec environ 18 500 000 élèves. Dans ces écoles, le personnel enseignant comprend environ 105 000 hommes et 375 000 Femmes. Dans les écoles secondaires seules, il y a plus d'un million d'élèves. De ceux-ci, plus de 600 000 sont inscrits dans des high schools publiques, un peu plus de 90000 fréquentent des high schools privées, et les autres se trouvent soit dans les sections d'enseignement secondaire annexées à des colleges, à des universités, ou à des écoles normales, soit dans des high schools de travail manuel, ou dans d'autres établissements secondaires. Il y a environ 140 000 étudiants des deux sexes inscrits dans les colleges et les universités. Dans les écoles professionnelles, on compte 65 000 étudiants. Dans les écoles normales, il y a environ 73 000 élèves. Le rapport du nombre des élèves des écoles élémentaires publiques à celui des élèves des écoles élémentaires privées est de 13 à 1 ; dans les écoles secondaires, on compte 4 élèves fréquentant une école publique pour 1 qui fréquente une école privée ; pour les colleges et les universités, il y a seulement 5 étudiants dans les établissements publics contre 9 dans les établissements privés ; pour les écoles professionnelles, 1 élève dans les établissements publics contre 5 élèves dans les établissements privés ; pour les écoles normales, 6 élèves dans les établissements publics contre 1 élève dans les établissements privés.

Le nombre total des élèves (écoliers et étudiants) inscrits dans tous les établissements ci-dessus énumérés est approximativement de 18 778 000. Outre ce nombre, plus d'un million d'élèves sont inscrits dans des écoles spéciales de différentes espèces : plus de 400 000 de ceux-ci suivent les classes des écoles du soir dans les villes ; 150 000 sont élèves de collèges ou instituts donnant un enseignement qui prépare aux carrières du commerce et de l'industrie ; 110 000 sont dans des jardins d'enfants d'un caractère privé ; 50 000 sont dans des écoles pour les Indiens ou les Esquimaux ; 50 000 sont dans des écoles de réforme ; et les autres sont dans des institutions spéciales de divers genres, pour les anormaux, les orphelins, etc. Le nombre total des élèves inscrits dans tous les établissements d'instruction s'élève donc à près de 20 millions. Ce nombre ne comprend pas les élèves des a écoles par correspondance » (correspondent schools), écoles qui jouent un rôle important en Amérique : I une d'entre elles, qui appartient à une société privée, a un capital entièrement versé de 6 millions de dollars, et compte plus de 600 000 étudiants par correspondance ; plusieurs collèges ou universités ont aussi des étudiants par correspondance, dont le nombre varie, selon les établissements, de 10 000 à 50000.

Les écoles du dimanche fonctionnent sous le patronage de diverses organisations ecclésiastiques. Elles ne s'occupent que d'instruction religieuse ou morale, et la séance est habituellement d'une heure, chaque dimanche. Il v a plus de 100 000 de ces écoles, et elles comptent 13 300000 élèves de tout âge.

Dépenses. — Il est dépensé annuellement, aux Etats-Unis, pour les common schools. — on désigne sous ce nom les écoles élémentaires et les high schools entretenues aux frais de la collectivité, — une somme d'environ 350 millions de dollars (1750 millions de francs). De cette somme, en 1907, 4, 8 0/0 provenaient des fonds scolaires permanents et de la rente des terres nationales ; 13, 5 %, de taxes d'Etat levées par les divers Etats de l'Union ; 67, 1 %, de taxes locales ; enfin 14, 6 % de sources diverses, y compris les amendes, etc. Ces dépenses étaient ainsi réparties : 19, 9 % pour les bâtiments, le mobilier, etc. ; 59, 6 % pour les salaires du personnel enseignant, etc. ; et 20, 5 % pour les dépenses d'autre nature. Le coût de chaque élève par jour de présence à l'école était d'environ 0$, 30 (1 fr. 50).

La dépense totale annuelle pour l'éducation sous toutes ses formes est d'environ 580 millions de dollars (2 400 millions de francs). La valeur du matériel (bâtiments, etc.) employé pour les écoles et établissements d'instruction publique de tout degré est estimée à environ 1300 millions de dollars (6500 millions de fr.).

Les libéralités en faveur de l'éducation. — Un des traits les plus intéressants du développement de l'éducation dans ces dernières années a été la constitution de fonds considérables destinés à venir en aide à telle ou telle partie de l'oeuvre éducative générale. Un comité formé sous le nom de General Education Board, particulièrement, chargé de doter divers colleges déjà existants, dispose d'une somme de 44 millions de dollars qui lui a été confiée par M. John D. Rockefeller. Le John F. Slater Fund, avec un million de dollars ; le Peabody Education Fund, avec 3 600 000 dollars ; le Russell Sage Fund, avec 10 millions de dollars: le don de M. Andrew Carnegie de 20 millions de dollars pour l'oeuvre de la Carnegie Institution, à Washington, destinée à venir en aide aux recherches scientifiques ; le Carnegie Institute, à Pittsburg, doté de 15 millions de dollars pour sa bibliothèque, ses collections d'art et ses splendides écoles techniques, doivent être cités parmi les plus importantes fondations confiées à des trustees chargés de les administrer. Le don fait par M. Carnegie de 15 millions de dollars pour établir la Carnegie Foundation for the advancement of teaching est une autre dotation princière destinée à la réalisation d'un plan des plus efficaces pour l'amélioration de l'éducation. Cette Fondation est spécialement destinée à servir des pensions à des professeurs ayant enseigné dans des colleges, des universités et des écoles de technologie aux Etats-Unis, au Canada et à Terre-Neuve. Les établissements d'Etat ont été récemment admis au nombre des bénéficiaires de la Fondation ; mais les institutions d'un caractère sectaire, celles qui exigent de leurs maîtres ou de leurs élèves une profession de foi théologique particulière, ne peuvent participer à ses avantages. Les autres conditions d'admission, pour les institutions, sont la possession d'une dotation suffisante, une organisation matérielle convenable, et un enseignement atteignant un niveau déterminé. Nulle influence n'a plus fait en Amérique pour élever le niveau des colleges et des universités que celle de la Fondation Carnegie. Outre les établissements d'Etat, qui sont successivement admis, la Fondation a déjà admis environ soixante autres institutions à bénéficier de ses avantages. Les rapports annuels et les rapports spéciaux de la Fondation Carnegie sont les documents les plus importants, dans le domaine de l'administration du haut enseignement, qui soient publiés en Amérique.

Les libéralités, destinées surtout à l'éducation, enregistrées dans la période de 1893 à 1906, s'élèvent au total approximatif d'un milliard de dollars (cinq milliards de francs). M. Carnegie a pris la tête, principalement par ses dons de bibliothèques, et M. Rockefeller l'a suivi de près : ces deux hommes ont versé en dons, dans les derniers temps, une somme totale annuelle de 60 millions de dollars en moyenne. Mme Russell Sage débourse chaque année plusieurs millions pour différentes oeuvres, en particulier pour la campagne contre la tuberculose, le mouvement en faveur des terrains de jeux (playgrounds), l'inspection médicale dans les écoles, et l'éducation industrielle.

Bibliographie. — Rapports annuels et bulletins spéciaux du commissaire de l'éducation, à Washington. — Rapports annuels des surintendants d'Etats et de cités. — Rapports annuels de la National Education Association, de la Carnegie Foundation for the advancement of teaching, de la Herbartian Society, de la Carnegie Institution, des Commissions d'éducation industrielle des Etats de Massachusetts et de New Jersey. — E. G. DEXTER, A History of Education in the United States, New York, 1904. — BOONE, R. G., Education in the United States, New York, 1889. — BROWN, E. E., The Making of our Middle Schools, New York, 1903. — Monographies sur des questions d'éducation, publiées par l'Ecole de pédagogie de la New York University, par l'Ecole d'éducation de l'université de Chicago, et par les Teachers' Colleges de diverses universités. — The Statesmen's Yearbook, édition américaine.

Albert A. Snowden