Les conditions du travail des enfants et des filles mineures employés dans l'industrie ont été déterminées par la loi du 2 novembre 1892.
Ainsi que nous l'avons indiqué à l'article Apprentis (Instruction primaire des), les enfants ne peuvent être employés par les patrons ni admis dans les usines, manufactures, mines, minières et carrières, chantiers, ateliers et leurs dépendances, de quelque nature que ce soit, publics ou privés, laïques ou religieux, même lorsque ces établissements ont un caractère d'enseignement professionnel ou de bienfaisance, avant l'âge de treize ans révolus. Exception est faite pour les enfants munis du certificat d'études primaires, qui peuvent être employés à partir de douze ans.
La Commission supérieure du travail dans l'industrie ayant constaté qu'en dépit de ces prescriptions, un assez grand nombre d'enfants au-dessous de treize ans étaient employés dans les établissements industriels, avait signale l'intérêt qu'il y aurait à faire afficher dans les écoles publiques un commentaire de la loi du 2 novembre 1892.
A la suite d'une entente intervenue entre les ministères du commerce et de l'instruction publique, une circulaire en date du 22 octobre 1901 prescrivit cet affichage, et l'insertion du commentaire dans les Bulletins départementaux de l'enseignement primaire. Voici le texte de ce document :
« TRAVAIL DES ENFANTS DANS L'INDUSTRIE.
« Commentaire de la loi du 2 novembre 1892 à l'usage des écoles.
« La loi du 2 novembre 1892 est d'une très grande importance pour les enfants qui se destinent à travailler dans les établissements industriels.
« C'est cette loi qui a fixé :
« Les conditions d'âge que doivent remplir les jeunes ouvriers et ouvrières pour pouvoir travailler dans l'industrie ;
« La durée du travail qu'ils ne doivent pas dépasser ;
« Les repos auxquels ils ont droit ;
« Enfin, les conditions d'hygiène et de sécurité dans lesquelles doit s'effectuer leur travail.
« Age d'admission. — Les enfants ne peuvent, aux termes de la loi sur le travail industriel, être occupés avant l'âge de treize ans dans les manufactures, chantiers ou ateliers. D'autre part, ils sont tenus, en vertu de la loi sur l'instruction primaire, de fréquenter l'école jusqu'à ce même âge de treize ans. Ils ne doivent pas, avant cet âge, quitter l'école pour l'usine, puisque deux lois le leur interdisent.
« Les auteurs de ces lois ont pensé qu'avant l'âge de treize ans, l'enfant n'était pas encore assez robuste pour résister aux fatigues du travail industriel, et qu'un surmenage prématuré pourrait arrêter son développement physique. Ils ont également estimé qu'il devait compléter son instruction avant d'entrer à l'usine, pour ne pas rester toute sa vie un ouvrier sans valeur, incapable d'améliorer sa situation et de défendre ses droits.
« Cependant, si l'enfant a obtenu, avant l'âge de treize ans, le certificat d'études primaires qui le dispense de fréquenter l'école, il lui est permis d'entrer à l'usine, pourvu qu'il ait atteint l'âge de douze ans. Mais c'est à cette condition, qu'après avoir été examiné par un médecin, il ait été reconnu assez robuste pour supporter le travail.
« Tout enfant employé dans un établissement industriel doit être muni d'un livret portant la date de sa naissance, et délivré par le maire de son domicile. Cette formalité est obligatoire, tant que l'enfant n'a pas atteint sa dix-huitième année.
« Durée du travail. — La République a manifesté encore l'intérêt qu'elle porte à la santé des jeunes ouvriers et ouvrières en interdisant de les astreindre chaque jour à un travail trop prolongé.
« Actuellement, un enfant ne peut travailler dans l'industrie plus de dix heures et demie par jour ; cette durée sera même réduite à dix heures le 30 mars 1906.
« Repos. — La journée de travail de l'enfant doit être coupée par un ou plusieurs repos, pendant lesquels tout travail est interdit. La durée totale de ces repos ne peut être inférieure à une heure. Pour garantir aux enfants ce repos nécessaire, la loi prescrit d'afficher dans l'atelier les heures auxquelles commence et finit chaque période de repos.
« Repos hebdomadaire. — La loi défend de faire travailler l'enfant plus de six jours par semaine. Une affiche apposée dans l'atelier indique le jour choisi pour le repos hebdomadaire, pendant lequel toute besogne est interdite. Il en est de même pendant les jours de fêtes légales, tels que le 14 juillet.
« Travail de nuit. — Il est interdit de faire travailler les enfants entre neuf heures du soir et cinq heures du matin. La loi a voulu ainsi les soustraire au travail de nuit, dont les effets sont si funestes à leur santé.
« Néanmoins, il existe quelques industries où le travail de nuit des enfants a été considéré comme ne pouvant être complètement interdit, à cause de certaines nécessités de fabrication. Mais ce travail a été fout au moins très strictement règlementé.
« Hygiène et sécurité. — Pour sauvegarder la santé et la sécurité de l'enfant, la loi a édicté un certain nombre d'obligations : les principales sont de tenir dans un état de constante propreté les établissements affectés au travail, leurs dépendances, réfectoires, dortoirs, de les éclairer et de les aérer convenablement. En outre, dans tous les établissements, les appareils pouvant causer des accidents, tels que courroies, roues, engrenages, etc., doivent être séparés des ouvriers, de manière à ce qu'on ne puisse en approcher que pour les besoins du service.
« La loi a également défendu d'employer les enfants à certains travaux dangereux et trop fatigants.
« Il est interdit notamment d'employer les jeunes ouvriers au graissage, au nettoyage et à la réparation des mécanismes en marche.
« On ne peut employer les filles au-dessous de seize ans au travail des machines mues par des pédales.
« Enfin, il est interdit aux jeunes ouvriers et ouvrières travaillant dans l'industrie de porter des fardeaux d'un poids supérieur aux suivants :
« Garçons de moins de 14 ans 10 kilogr.
« Garçons de 14 à 18 ans 15 —
« Filles au-dessous de 16 ans 5 —
« Filles de 16 à 18 ans 10 —
« Inspection du travail. — Pour assurer l'exécution de toutes ces mesures de protection, la loi a institué des inspecteurs du travail, qui ont pour mission de dresser des procès-verbaux à rencontre des personnes qui emploieraient les enfants dans des conditions contraires à la loi.
« Les noms et adresses des inspecteurs doivent être affichés dans les ateliers, et rien n'est plus facile que de les avertir lorsque, la loi n'étant pas observée, la santé des jeunes ouvriers pourrait être compromise. »