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Directoire

 Nous avons, aux articles Conseil des Anciens et Conseil des Cinq-Cents, donné quelques indications sur l'état de l'instruction publique en France durant la période qui s'étend de l'an IV à l'an VIII, et sur les tentatives faites au sein des pouvoirs législatifs, à cette époque, pour améliorer la loi du 3 brumaire an IV. Il nous reste a parler de l'action du Directoire lui-même, comme pouvoir exécutif chargé d'appliquer cette loi et de prendre les mesures propres à encourager et à développer l'instruction publique.

Cette action, il faut le reconnaître, ne fut pas considérable ; le Directoire était trop préoccupé des embarras que lui suscitaient la guerre, le déficit, les complots royalistes, pour pouvoir consacrer beaucoup d'attention aux questions d'éducation. D'ailleurs les écoles primaires et centrales relevaient des autorités départementales ; le Directoire n'avait guère à intervenir que pour sanctionner les règlements, émanant des administrations de département, relatifs au régime de ces écoles.

En novembre 1797, toutefois, deux mois après la journée du 18 fructidor an V qui avait rendu quelque vigueur à la République, le Directoire prit un arrêté « pour faire prospérer l'instruction publique » (27 brumaire an VI). Les dispositions en sont curieuses :

« A l'avenir tous les citoyens non mariés, et ne faisant point partie de l'armée, qui désireront obtenir du gouvernement soit une place quelconque, s'ils n'en occupent point encore, soit un avancement dans celle dont ils sont pourvus, seront tenus de joindre à leur pétition leur acte de naissance et un certificat de fréquentation de l'une des écoles centrales de la République ; ce certificat devra contenir des renseignements sur l'assiduité du candidat, sur sa conduite civique, sur sa moralité, sur les progrès qu'il a faits dans ses études.

« Les citoyens mariés qui solliciteront une place de quelque nature qu'elle soit, militaire ou autre, seront tenus, s'ils ont des enfants en âge de fréquenter les écoles nationales, de joindre également à leur pétition l'acte de naissance de ces enfants, et des certificats desdites écoles, contenant sur eux les renseignements indiqués dans l'article précédent.

« Les administrations centrales de département adresseront tous les trois mois, au ministre de l'intérieur, l'état nominatif des élèves qui fréquentent les écoles publiques, soit primaires, soit centrales, avec les noms et domicile de chacun d'eux. Le Directoire exécutif, sur le rapport qui lui sera fait, par le ministre de l'intérieur, des résultats qu'offriront les divers tableaux, prendra les mesures nécessaires pour activer l'instruction des écoles qui ne lui paraîtraient pas assez suivies. »

Il ne semble pas que cet arrêté ait jamais reçu d'exécution ; et il faut reconnaître que la confection et le dépouillement de l'état nominatif trimestriel demandé aux administrations départementales eussent offert des difficultés presque insurmontables sans présenter aucun avantage sérieux.

Peu de temps après, en février 1798, un autre arrêté, du 17 pluviôse an VI, prescrivait une surveillance spéciale à l'égard des maisons particulières d'éducation. Les écoles privées étaient tenues en général par d'anciens prêtres, ou par des personnes ayant enseigné dans les collèges supprimés par la Révolution ; ces écoles faisaient une concurrence des plus vives aux écoles nationales, et l'esprit de leur enseignement était hostile aux institutions républicaines. Aussi, dans les considérants de son arrêté, le Directoire déclare-t-il que « cette surveillance devient plus nécessaire que jamais pour arrêter le progrès des principes funestes qu'une foule d'instituteurs privés s'efforcent d'inspirer à leurs élèves, et que le gouvernement ne doit négliger aucun des moyens qui sont en son pouvoir pour faire fleurir et prospérer l'instruction républicaine ». En conséquence, l'arrêté prescrivait aux administrations municipales de canton de visiter, «au moins une fois par mois et à des époques imprévues », les pensionnats et maisons d'éducation situés dans leur ressort, à l'effet de constater :

« 1e Si les maîtres particuliers ont soin de mettre entre les mains de leurs élèves, comme base de la première instruction, les droits de l'homme, la consitution, et les livres élémentaires qui ont été adoptés par la Convention ;

« 2° Si l'on y observe les décadis ; si l'on y célèbre les fêtes républicaines, et si l'on s'y honore du nom de citoyen ;

« 3° Si l'on donne à la santé des enfants tous les soins qu'exige la faiblesse de leur âge ; si la nourriture est propre et saine ; si les moyens de discipline intérieure ne présentent rien qui tende à avilir et à dégrader le caractère ; si les exercices y sont combinés de manière à développer le plus heureusement possible les facultés physiques et morales. »

Les administrations municipales, ajoutait l'arrêté, pourront provisoirement prendre telle mesure qu'elles jugeront nécessaire pour arrêter ou prévenir les abus, même en ordonnant la suspension ou clôture des écoles, maisons d'éducation et pensionnats ; mais elles en référeront aux administrations de département, qui rendront compte au ministre de l'intérieur.

Il n'existe pas, à notre connaissance, d'autre texte imprimé indiquant une intervention spéciale du Directoire dans les questions d'instruction publique. On trouvera quelques renseignements sur l'administration de l'instruction publique à l'époque du Directoire aux articles consacrés aux quatre ministres qui détinrent successivement le portefeuille de l'intérieur durant cette période, Bénézech, François de Neufchâteau, Letourneux et Quinette.