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Demia (Charles)

 Prêtre lyonnais originaire de Bourg, qui se consacra à l'éducation des enfants pauvres dans la seconde moitié du dix-septième siècle. Il fonda en 1666, à Lyon, la congrégation des frères de Saint-Charles, et ouvrit en 1667 une première école gratuite dans le quartier ouvrier de cette ville. Ayant adressé aux prévôts des marchands de Lyon des Re montrances pour l'établissement d'écoles chrétiennes pour l'instruction du pauvre peuple (1668), il obtint que le consulat accordât (1670) à la nouvelle oeuvre une subvention annuelle de deux cents livres, « pour être employée à l'établissement et entretien d'une école publique, pour instruire les pauvres aux principes de la religion chrétienne et même à lire et à écrire ».

Dans les années suivantes, Démia, aidé de quelques personnes charitables, ouvrit de nouvelles écoles gratuites, si bien qu'à la fin de 1672 on en comptait cinq. Nommé par l'archevêque de Lyon à la direction de toutes les écoles du diocèse, il se fit aider dans son administration par un conseil de « seize recteurs, tant ecclésiastiques que laïques », qui prit le nom de Bureau des écoles et se recrutait lui-même. 11 fonda le petit séminaire de Saint-Charles, sorte d'école normale où il recueillait des jeunes gens sans fortune se destinant à l'état ecclésiastique : ceux-ci, en retour de l'éducation gratuite qu'ils y recevaient, devaient se rendre deux lois par jour dans les différentes écoles des pauvres pour y faire la classe. Démia sollicita et obtint du Conseil d'Etat un arrêt en date du 7 mai 1674, qui défendait expressément « de tenir des petites écoles pour l'instruction de la jeunesse » sans la permission de l'archevêque ou de son substitué.

En 1675, il établit les deux premières écoles gratuites de filles, et en 1680 fonda la communauté des soeurs de Saint-Charles, pour le recrutement des institutrices. Dans les écoles de filles, dont le nombre fut bientôt de six, les maîtresses, outre la lecture et l'écriture, enseignaient à faire de petits ouvrages manuels, comme des boutons, de la dentelle, etc.

Après la révocation de l'Edit de Nantes, Louis XIV, voulant s'assurer de l'orthodoxie des maîtres et forcer les enfants des protestants à fréquenter les écoles catholiques, écrivit (1686) à l'archevêque de Lyon pour l'inviter à préposer des ecclésiastiques à la visite des écoles du diocèse. Ce fut Démia qui organisa ces visites, dont les procès-verbaux ont été conservés.

En 1688, Démia fit paraître des Réglemens pour les écoles de la ville et diocèse de Lyon (chez André Olyer. 1 vol. petit in-4°)., qui contiennent l'exposé de ses doctrines pédagogiques. En dehors des catéchismes, le programme des écoles des pauvres comprenait la lecture, l'écriture, quelques notions d'orthographe et de grammaire, et les principes de l'arithmétique. Il introduisit dans les classes ce qu'on appela plus tard l'enseignement mutuel : il recommande de choisir, parmi les écoliers les plus capables et les plus studieux, un certain nombre d'officiers, dont les uns, sous le nom d'intendants et de décurions, seront chargés de la surveillance, tandis que les autres devront faire répéter les leçons du maître, reprendre les écoliers quand ils se trompent, guider la main hésitante des « jeunes écrivains », etc. Pour rendre possible la simultanéité de l'enseignement, l'auteur des règlements divise l'école en huit classes, dont le maître devra s'occuper tour à tour ; chacune de ces classes peut se subdiviser en bandes. La seule méthode de lecture qu'il connaisse, c'est la méthode alphabétique, et, par une étrange anomalie, on doit commencer à lire le latin avant le français (Voir Lecture). L'écriture s'enseigne à l'aide d'exemples manuscrites ou gravées. Une fois que l'enfant sait lire et convenablement écrire, on le met à l'orthographe. L'enseignement de l'arithmétique pouvait se donner soit didactiquement au tableau noir, d'après les auteurs qui avaient écrit sur la matière, soit par la méthode intuitive du jet à la main. Enfin les enfants étaient préparés aux cérémonies religieuses par des leçons de plain-chant. La classe durait le matin de sept heures à dix heures, et le soir d'une heure et demie à quatre heures et demie.