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Décorations universitaires

En soumettant à Napoléon III, au mois de décembre 1866, un projet de décret relatif aux décorations universitaires, le ministre Victor Duruy résumait de la façon suivante l'historique de ces distinctions : « Les titres honorifiques, dans l'Université impériale, remontent à sa fondation. Ils furent créés par le décret du 17 mars 1808, et destinés « à distinguer les fonctions éminentes et à récompenser les services rendus à l'enseignement » (Décret du 17 mars 1808, art. 32). A ces titres étaient attachés, aux termes du décret impérial, une pension et une décoration. La première disposition du décret n'a pas reçu d'exécution ; quant à la décoration, on adopta les insignes trois ou quatre fois séculaires de l'Université, et elle consista en une double palme brodée sur la partie gauche de la poitrine.

« Le décret de 1808 avait créé trois sortes de titres honorifiques : les titulaires, les officiers de l'Université [ou de l'instruction publique], et les officiers d'académie. Ces titres étaient attachés de droit à certaines fonctions. Ils pouvaient en outre être conférés, par nomination du grand-maître, aux membres de l'Université « les plus recommandables par leurs talents et par leurs services » (art. 35). Tous les ans, le grand-maître devait soumettre à l'empereur et publier au Moniteur, à l'ouverture de l'année scolaire, le tableau des officiers d'académie et des officiers de l'Université (art. 55).

« Les titres honorifiques, par le fait même que telle ou telle fonction y donnait droit, faisaient pour ainsi dire partie du costume, et n'ajoutaient que peu de chose a la considération qui s'attache à la possession d'une charge publique. Ils perdirent, en conséquence, dès l'origine, une grande partie de leur valeur.

« D'un autre côté, le décret de 1808 avait renfermé dans des limites très étroites l'admissibilité des fonctionnaires du corps enseignant aux distinctions honorifiques, puisque ces distinctions étaient le résultat d'une nomination faite par le ministre. Les proviseurs, les censeurs, les professeurs des deux premières classes des lycées « les plus recommandables par leurs talents et par leurs services », pouvaient seuls obtenir le titre d'officier de l'instruction publique [titre substitué à celui d'officier de l'Université]. Les autres professeurs des lycées, les régents, et les chefs d'institution qui se seraient distingués par des « services éminents », étaient admissibles au titre d'officier d'académie.

« M. de Salvandy s'attacha à relever l'importance des titres honorifiques et à les étendre à un plus grand nombre de fonctionnaires. Tel fut l'objet de l'ordonnance du 9 septembre 1845, qui remit en vigueur l'obligation, imposée par le décret organique de 1808, de l'approbation du souverain et de l'insertion au Moniteur.

« En 1850, on reconnut que les distinctions honorifiques, pour produire tout leur effet, ne devaient être accordées qu'à des services exceptionnels ou anciens, rendus dans l'exercice d'une fonction. Le décret du 9 décembre 1850 exigea pour le titre d'officier d'académie un certain temps de services effectifs, et pour celui d'officier de l'Université la possession, durant cinq années au moins, du grade d'officier d'académie.

« Les insignes de ces deux grades étaient des palmes d'or et d'argent brodées sur le costume officiel. Mais ce costume n'existe ni pour les fonctionnaires les plus nombreux de l'Université, nos 49000 instituteurs, ni pour une grande partie des 95 000 personnes qui, de par la loi ou les règlements, nous donnent gratuitement leur concours, ni enfin pour beaucoup de savants et d'écrivains dont les travaux sont utiles à la cause de l'instruction publique. Pour toutes ces personnes, les palmes universitaires n'étaient donc qu'un titre, et non pas, comme le veut le décret de 1808, une décoration. L'empereur, par le décret du 7 avril 1866, a effacé cette inégalité, en autorisant le port des palmes d'or et d'argent sur l'habit de ville comme sur le costume officiel.

« Au moment où Votre Majesté rend toute leur valeur à nos vieux insignes, il importe qu'ils ne soient conférés qu'avec les plus sérieuses garanties d'une justice sévère.

« A cet effet j'ai rédigé un règlement général qui contient à la fois les conditions d'admissibilité et le mode de présentation, soit pour les fonctionnaires du corps enseignant, soit pour les personnes de tout rang qui prêtent à l'Université un concours actif, intelligent et dévoué. »

Ce règlement, publié le 27 décembre 1866, est resté en vigueur jusqu'à la promulgation du décret du 24 décembre 1885, qui en reproduit d'ailleurs les principales dispositions.

Règlementation actuelle. — Le mode et les conditions d'attribution des décorations d'officier d'académie et d'officier de l'instruction publique se trouvent actuellement règlementés par le décret du 24 décembre 1885, modifié dans quelques-unes de ses parties par le décret du 4 août 1898.

Ce règlement est ainsi conçu :

« DÉCRET DU 24 DÉCEMBRE 1885

Modifié par le décret du 4 août 1898.

« ARTICLE PREMIER. — Les décorations d'officier d'académie et d'officier de l'instruction publique, créées par l'article 32 du décret organique du 17 mars 1808, sont conférées par le ministre de l'instruction publique, des beaux-arts et des cultes, sous les conditions ci-après déterminées.

« ART. 2. — Le chiffre maximum des décorations à accorder annuellement est fixé ainsi qu'il suit :

1° Aux fonctionnaires de l'instruction publique, 800 officiers d'académie et 300 officiers de l'instruction publique ;

2° Aux fonctionnaires des établissements d'enseignement public ressortissant à d'autres ministères, 75 officiers d'académie et 25 officiers de l'instruction publique ;

3° Aux personnes étrangères à l'Université, 1200 officiers d'académie et 300 officiers de l'instruction publique.

« En aucun cas, ces chiffres ne pourront être dé passés.« ART. 3. — Ces distinctions honorifiques sont conférées, sur la proposition des recteurs et après avis des inspecteurs généraux, aux membres de l'enseignement supérieur et de l'enseignement secondaire, public ou libre, aux fonctionnaires de l'administration de l'instruction publique, ainsi qu'aux fonctionnaires des écoles normales primaires. Elles sont conférées aux fonctionnaires des établissements littéraires et scientifiques et des écoles spéciales ressortissant au ministère de l'instruction publique, sur la proposition des directeurs de ces établissements et de ces écoles.

« Les distinctions honorifiques pour services rendus aux beaux-arts seront conférées sur la proposition du recteur, lorsqu'il s'agira de personnes appartenant à l'enseignement, et sur la proposition du directeur des beaux-arts, après avis des inspecteurs spéciaux, pour les candidats étrangers au corps enseignant.

« Les fonctionnaires de l'administration centrale du

ministère de l'instruction publique, des beaux-arts et des cultes seront nommés sur la proposition du chef du cabinet, après avis de leurs chefs hiérarchiques.

« ART. 4. — Les distinctions honorifiques attribuées aux instituteurs ou institutrices publics, titulaires ou adjoints, sont conférées, après avis du recteur, sur la proposition du préfet et conformément aux dispositions de l'article 7 du décret du 27 décembre 1866. [Aux termes de cet article, « nul instituteur public ou libre ne peut être présenté pour les palmes d'officier d'académie s'il n'a obtenu, depuis deux ans au moins, la médaille d'argent instituée par l'arrêté du 15 juin 1818 ».]

« Les instituteurs ou institutrices libres pourvus du brevet supérieur pourront obtenir les palmes académiques au bout de vingt-cinq ans de services, sur la proposition du recteur, après avis du préfet.

« ART. 5. — Les distinctions honorifiques attribuées aux membres des Sociétés savantes des départements et aux correspondants du ministère pour les travaux historiques sont conférées, après avis du recteur et du préfet, sur la proposition du Comité des travaux historiques et des sociétés savantes. « ART. 6. — Les distinctions honorifiques attribuées aux littérateurs et aux savants recommandés par leurs ouvrages ou par des services rendus à l'enseignement sont accordées sur la proposition des recteurs.

« ART. 7. — Les distinctions honorifiques accordées aux personnes qui auraient bien mérité de l'instruction publique, soit par leur participation aux travaux des délégations cantonales et des conseils ou commissions établis près des lycées, des collèges, des écoles normales (conseils de perfectionnement, bureaux d'administration, commissions administratives, etc.), soit par le concours efficace qu'elles auraient prêté au développement de l'enseignement, à tous ses degrés et sous toutes ses formes, sont conférées sur la proposition du recteur, après avis du préfet.

« ART. 8. — Les candidats visés par l'article 7 ne peuvent être nommés officiers d'académie qu'après dix ans de services ou d'exercice.

« ART. 9. — Les fonctionnaires de l'Etat relevant de départements ministériels autres que celui de l'instruction publique, des beaux-arts et des cultes, ne pourront être nommés que sur la proposition ou après avis du ministre dont ils dépendent.

« ART. 10. — Nul ne peut être nommé officier de instruction publique s'il n'est, depuis cinq ans au moins, officier d'académie.

« Il ne pourra être dérogé à cette règle qu'en faveur des personnes déjà titulaires du grade d'officier de la Légion d'honneur.

« ART. 11. — Les nominations d'officiers d'académie et d'officiers de l'instruction publique auront lieu :

« Au 1er janvier, pour les personnes étrangères à l'enseignement public ;

« Au 14 juillet, pour les fonctionnaires de l'enseignement public, et, pour les membres des Sociétés savantes et des Sociétés des beaux-arts des départements, à l'époque de la réunion de ces sociétés.

« En dehors des dates ci-dessus indiquées, aucune distinction ne pourra être conférée, sauf dans les cérémonies officielles présidées par le président de la République, l'un des présidents des deux Chambres, un ministre ou un sous-secrétaire d'Etat en personne.

« ART. 12. — Le tableau des nominations est publié au Journal officiel, conformément aux dispositions du décret du 17 mars 1808.

« ART. 13. — Sont abrogés les décrets et ordonnances relatifs aux décorations universitaires en ce qu'ils ont de contraire aux dispositions du présent décret.

« ART. 14. — Le ministre de l'instruction publique, des beaux-arts et des cultes est chargé de l'exécution du présent décret. »

D'autre part, un arrêté en date du 16 janvier 1892 a institué au ministère de l'instruction publique un Comité consultatif des distinctions universitaires. Aux termes de l'article 4 de cet arrêté, aucune nomination ne devrait être faite sans que ce Comité ait déclaré que le candidat réunit les conditions exigées par les décrets et règlements. Mais, en fait, le Comité n'est jamais convoqué, et il nous paraît inutile d'en indiquer ici la composition.

Comme on l'a vu plus haut (décret du 24 décembre 1885, art. 4), les instituteurs publics ne peuvent obtenir les palmes d'officier d'académie que s'ils sont • depuis deux ans au moins en possession de la médaille d'argent. Toutefois il s'agit là d'une règle générale à laquelle certaines exceptions ont été apportées par les décrets du 27 décembre 1900, 6 février 1903 et 8 octobre 1906.

Le premier de ces décrets, modifié par le décret du 26 janvier 1909, réserve un contingent spécial de distinctions honorifiques aux instituteurs et institutrices publics qui ont participé avec le plus de zèle et de succès aux cours d'adultes et aux oeuvres complémentaires de l'école. Ces distinctions, qui consistent en 120 palmes d'officier d'académie et 40 palmes d'officier de l'instruction publique, sont conférées chaque année, le 14 juillet, par le ministre, sur la proposition du recteur et du préfet et après rapport spécial de l'inspecteur d'académie (articles 1er et 2). Ne peuvent obtenir ces distinctions que les instituteurs et institutrices qui justifient au moins de la possession : 1° soit de la médaille de bronze décernée pour collaboration aux oeuvres complémentaires de l'école ; 2° soit de la mention honorable des instituteurs et de la médaille de vermeil des cours d'adultes (art. 3).

Aux termes du décret du 6 février 1903 (art. 1er), « en sus du contingent annuel déterminé par le décret du 4 août 1898, il peut être accordé, annuellement, à l'occasion du Congrès des Sociétés savantes, aux instituteurs publics qui ont participé avec le plus de zèle et de succès à l'oeuvre du Comité des travaux historiques et scientifiques, 10 palmes d'officier d'académie ». Ces distinctions sont conférées par le ministre sur la proposition d'une des sections du Comité des travaux historiques et scientifiques, et sur l'avis conforme de la Commission centrale, après rapports spéciaux de l'inspecteur d'académie et du préfet (art. 2). Ne peuvent obtenir les palmes d'officier d'académie que les instituteurs qui justifient au moins de la possession de la médaille de bronze des instituteurs (art. 3). Les palmes d'officier de l'instruction publique peuvent être décernées, dans les conditions de l'article 2, aux instituteurs qui sont depuis cinq ans au moins officiers d'académie (art. 4).

Enfin le décret du 8 octobre 1906 porte qu' « il peut être accordé, à l'occasion de cérémonies publiques, aux instituteurs et institutrices qui se sont fait remarquer par des publications pédagogiques ou par une participation active et continue, en dehors de leurs fonctions, à une oeuvre scolaire ou de bienfaisance, des palmes d'officier d'académie, sous la condition d'être au moins en possession de la mention honorable des instituteurs ou de la médaille de bronze des cours d'adultes ». Quant aux candidats appartenant aux Sociétés d'enseignement populaire, de tir, de gymnastique, de bienfaisance, de musique, de topographie, etc., ils doivent justifier d'au moins dix années de services effectifs comme membres des comités de ces associations, professeurs ou moniteurs (circulaire du 21 avril 1886). — Voir Récompenses honorifiques.