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Crousaz

Jean-Pierre de Crousaz, pédagogue suisse de la première moitié du dix-huitième siècle, est né à Lausanne en 1663, et mort dans la même ville en 1750. Après avoir voyagé à l'étranger pour compléter ses études, il se fit consacrer ministre, puis fut nommé professeur à l'Académie de Lausanne, dont il devint bientôt recteur. En 1718, il fit imprimer à Amsterdam un volume intitulé Nouvelles maximes sur l'éducation des enfants. Il y combattait, sous la forme de l'ironie, les idées alors régnantes sur l'éducation. Mais cet écrit semble avoir eu peu de succès, à cause du ton satirique employé par l'auteur ; aussi de Crousaz crut-il devoir le faire suivre d'un ouvrage dogmatique, où il exposa cette fois ses vues d'une façon méthodique et sérieuse. Le Traité de l'éducation des enfants, par J.-P. de Crousaz, professeur en philosophie et en mathématique à Lausanne, dédié à la princesse de Galles, parut à La Haye en 1722, en 2 vol. in-12. Cet ouvrage comprend neuf sections, dont voici les titres :

Section I. Importance du sujet. — Section II. Devoir des pères. — Section III. Des qualités d'un bon précepteur. — Section IV. Des instructions (cette section est subdivisée en cinq chapitres : chap. 1, Qui contient quelques avis généraux et la manière de donner les premières leçons ; chap. 2, Où l'on explique la méthode de pousser les connaissances des jeunes gens ; chap. 3, Où l'on traite plus particulièrement de l'utilité du savoir ; chap. 4, Des instructions publiques : l'auteur se prononce pour le système des écoles publiques de préférence à l'éducation domestique ; chap. 5, De la manière d'étudier la géographie et l'histoire : l'auteur recommande de mettre sous les yeux de l'élève des sphères, des cartes, et, pour l'étude de l'histoire, des tailles-douces représentant des villes, des places, des campements, des machines, des édifices, « et autres choses de cette nature qu'on peint toujours mieux aux yeux qu'aux oreilles »). — Section V. Des moeurs. — Section VI. Conseils sur la manière dont on doit instruire les enfants dans la religion et les former à la piété. — Section VIL Des motifs. — Section VIII. Des récréations. — Section IX. Des voyages.

En 1724, de Crousaz alla remplir à La Haye les fonctions de gouverneur du jeune prince d'Orange ; puis il devint professeur à l'université de Groningue, et ensuite gouverneur du prince de Hesse. Rentré à Lausanne en 1735, il y reprit sa chaire, qu'il occupa jusqu'à sa mort.

En 1737, il publia à Amsterdam deux volumes de mélanges, qui renferment entre autres trois écrits relatifs à l'éducation ; ce sont : 1° Les Pensées libres sur les instructions publiques du bas collège ; de Crousaz y insiste sur l'importance de la première éducation, sur la nécessité d'avoir pour les jeunes élèves de bons maîtres, mieux payés, sur la reforme des méthodes élémentaires : « les classes, dit-il, doivent être propres et riantes, et pour le moins n'avoir rien de sombre et de rebutant » ; 2° Des instructions publiques dans les auditoires, ouvrage faisant suite au précédent ; 3° Discours de la pédanterie, prononcé dans une distribution de prix à Lausanne en 1715. Malgré les sarcasmes qu'il lance, dans ce discours, à l'adresse des pédants de collège, l'auteur n'a pu échapper lui-même aux reproches qu'il adressait justement à beaucoup de maîtres de son temps, et Rousseau l'a cavalièrement appelé « le pédant de Crousaz ». Il faut reconnaître, comme le ait un compatriote de Crousaz, M. L. Burnier, dans son Histoire littéraire de l'éducation, que son style est lourd et diffus, et que chez lui aucune idée neuve et féconde ne saisit le lecteur. « Nulle part on n'y aperçoit un plan d'ensemble, un système. L'auteur utilise Charron, Fleury, Fénelon, surtout Locke. » Ajoutons toutefois que de Crousaz, s'il n'est guère original, a rendu quelques services en vulgarisant un certain nombre d'idées justes et pratiques, à une époque où la pédagogie cherchait encore sa voie.