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Concours scolaire

 On entend sous ce nom des épreuves solennelles et ordinairement périodiques, ayant pour objet de faire ressortir la supériorité d'une école dans tout ou partie des matières de l'instruction primaire.

L'idée de ces concours n'est pas nouvelle chez nous. Un règlement préfectoral du 25 pluviôse an XII désigne cinq membres du jury d'enseignement « pour présider au concours des vingt-quatre écoles de Paris et prononcer entre les concurrents ». En 1837, le comité d'instruction primaire de l'arrondissement de Saint-Quentin établit des concours entre les écoles de son ressort ; il fut imité par le comité de l'arrondissement de Saint-Denis, et probablement par bien d'autres. En 1865, Victor Duruy mettait à l'élude la création des concours cantonaux, d'arrondissement, et même de département, et ces concours, les concours cantonaux du moins, s'organisaient sur plusieurs points de la France.

Quelle que soit leur ancienneté, si chers qu'ils demeurent à certains maîtres, si patronnés qu'ils aient été par de hautes autorités, les concours n'ont pu conquérir, comme le certificat d'études, toutes les sympathies, et leur utilité est encore fort contestée. L ancien Conseil royal ne les approuvait pas, et, dans un avis du 19 mai 1837, il estime qu'il y a lieu d'écrire à M. le recteur de l'académie d'Amiens qu’il ne doit pas y avoir de concours entre les élèves des diverses écoles primaires. La législation actuelle, sans proscrire absolument les concours scolaires, renferme cependant quelques dispositions restrictives. C'est ainsi qu'aux termes du règlement scolaire du 18 janvier 1887, art. 16, « tout concours entre les écoles publiques auquel ne participerait pas l'ensemble des élèves de l'un au moins des trois cours est formellement interdit ».

Idéalement, les concours ont pour but d'exciter une noble émulation parmi les élèves, et de stimuler le zèle des maîtres ; pour résultat final, de soutenir et d'élever le niveau des études, d'éclairer l'opinion publique et les administrations elles-mêmes tant sur la valeur des écoles que sur celle de l'enseignement qui y est donné.

Or, en fait, les concours ne produisent tout au plus que le premier de ces deux effets, et manquent complètement le second.

Rien n'est facile comme de briller dans les concours : il suffit pour cela de choisir de longue main, sur un effectif scolaire quelquefois très considérable, les enfants heureusement doués, de concentrer de bonne heure sur eux le plus clair de ses soins et de ses forces, de ne leur laisser ni repos, ni trêve, de les chauffer à blanc jusqu'au jour où l'arène s'ouvrira.

Ainsi obtenus, les succès dans les concours ne prouvent absolument rien quant à la supériorité des écoles et des maîtres : cette supériorité est toute factice et de convention. D'ailleurs, s'ils entretiennent entre quelques maîtres une émulation que nous considérons, pour notre part, comme étant d'assez mauvais aloi, ils découragent les meilleurs. Les meilleurs maîtres, à nos veux, sont ceux qui, sans se préoccuper outre mesure du résultat définitif, parce qu'ils savent qu'il sera quand même tel que la société a droit de l'attendre, partagent scrupuleusement leurs soins et leurs forces entre tous leurs élèves ; et, s'ils font pencher quelquefois la balance, c'est en faveur des infirmes et des faibles pour leur faire emboîter le pas et les élever, s'il est possible, au niveau de leurs condisciples plus heureux.

La bonne discipline de l'école, l'ordre, l'exactitude, l'assiduité, la parfaite exécution du règlement ; la fidélité au plan d'études, l'application scrupuleuse des programmes, la préparation des leçons, le choix des méthodes et des procédés d'enseignement les plus autorisés: l'intelligence de l'éducation physique et morale, l’étude et le maniement des caractères, l'initiation à la vie réelle, à ses besoins et surtout à ses obligations : voilà, ce nous semble, ce qui constitue la bonne école et ce qui révèle un bon maître. Qu'une commission compétente s'en aille visiter les écoles d'un quartier, d'une ville, d'un canton, et signale celle qui se distingue le plus sous tous ces rapports, ce sera le véritable concours entre les écoles et les maîtres qui les dirigent ; quant au concours entre les élèves, il s'établit de lui-même : les meilleurs élèves d'une école, d'un certain nombre d'écoles, seront sûrement ceux qui, dans un examen public, par exemple à l'examen du certificat d'études, obtiendront la plus haute moyenne sur l'ensemble des épreuves. Comme on le voit, cette méthode n'exige point d'efforts excessifs de nature à compromettre le développement physique et même à étioler des intelligences en les surchargeant ; elle exclut la réclame et le charlatanisme ; elle ne met en relief que des supériorités incontestables.