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Charbonneau (Michel)

Directeur d'école normale, mort à Melun le 5 août 1870 ; il était né le 12 novembre 1817, au Bugue (Dordogne). Il y fit ses premières études sous la direction de M. Mouton, vrai pédagogue, plus tard inspecteur et directeur d'école normale, qui excellait à cultiver l'intelligence de ses élèves, à former en eux le sens moral, ainsi qu'à leur inspirer le goût de l'instruction. Sous ce maître habile, les facultés du jeune Charbonneau se développèrent rapidement. Doué d'une imagination vive et d'une mémoire sûre, il fit des progrès marqués dans toutes les branches d'enseignement. Dès son entrée à l'école normale de Périgueux, en 1835, il montra ce qu'il devait être un jour. Aussi, ses études achevées, fut-il attaché immédiatement à l'école en qualité de maître-adjoint ; il ne la quitta que pour remplir, en 1847, les fonctions d'inspecteur et, quelques années plus tard, celles de directeur d'école normale. Il dirigea les écoles normales de Châteauroux, de Parthenay, et enfin celle de Melun, où la mort le surprit, dans la force de l'âge, au moment où l'administration, juste appréciatrice de son mérite, allait l'appeler à Paris pour y uliliser ses services.

Passionné pour l'instruction, M. Charbonneau compléta plus tard celle qu'il avait reçue dans sa jeunesse. Il fit ainsi des études classiques et apprit les langues vivantes. Egalement porté aux lettres et aux sciences, il acquit un savoir à la fois étendu et solide qui l'aurait rendu apte à toutes sortes de professions ; mais c'était surtout la science de l'éducation qui l'attirait. Elle était l'objet de ses pensées de tous les jours, et il y ramenait toutes ses lectures. Il arriva ainsi à cette justesse de vues qui fit de lui un théoricien aussi savant qu'il était un praticien expérimenté ; il le prouva par l'impulsion qu'il sut imprimer aux écoles normales dirigées par lui, d'où sont sortis un bon nombre de maîtres-adjoints et d'inspecteurs. Il le montra encore par les travaux dont il enrichit successivement plusieurs journaux d'éducation. Parmi ceux-ci on remarque ses articles sur l'Organisation des écoles, qu'il fit paraître en 1853 : il y exposa le premier le plan qui a fait depuis tant de bruit entre les mains d'autres personnes, sous le nom d'Organisation pédagogique. En 1855, il publia, sous le litre bien choisi d'Introduction à renseignement de la géographie, une autre série d'articles où il ne se bornait pas à indiquer vaguement, comme on l'a fait si souvent dans ces dernières années, le plan d'un premier enseignement de la géographie ; il le traçait au contraire d'une main ferme dans ses plus grands détails, guidant ainsi pas à pas les maîtres dans cette voie nouvelle pour eux.

L'ouvrage qui lui a surtout assuré des droits à la reconnaissance des instituteurs par les services qu'il leur a rendus et qu'il leur rend encore tous les jours, est son Cours théorique et pratique de pédagogie, publié en 1862 (6e édit. 1877). Ce traité remarquable mérite plus qu'aucun autre sa double qualification : théorique, en ce que M. Charbonneau y expose les principes d'éducation d'une manière savante, élevant l'esprit des maîtres et les faisant penser ; pratique, parce qu'il met ces principes à la portée de tous avec une habileté qui était le fruit de l'expérience. Admirateur du P. Girard, dont il s'était singulièrement approprié les idées, il en applique la méthode dans son Cours avec une grande sagacité, faisant toujours servir l'enseignement au développement de l'intelligence et à la culture morale. Dès l'apparition de son livre, des juges compétents on France et à l'étranger le proclamèrent comme le meilleur traité de pédagogie qui eût été publié chez nous. C'est encore le guide le plus sûr que les instituteurs et les institutrices puissent suivre dans la direction de leur école. Il assure pour toujours à M. Charbonneau une place distinguée dans la galerie des pédagogues français.

Jean-Jacques Rapet