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Calque

 Calquer, comme l'indique l'étymologie, par une métaphore pittoresque, c'est mettre le pied dans la trace du pas d'autrui (calcare, fouler du pied), c'est repasser des lignes déjà tracées sans autre souci que celui de l'exactitude dans cette reproduction toute machinale.

Il était donc bien naturel qu'on songeât à ce procédé pour faire reproduire sans effort et sans tâtonnement par l'enfant les traits marqués d'avance par le maître, et l'on n'a pas manqué d'y recourir pour les différents exercices qui comportent ce secours ; il y en a trois principaux : écriture, dessin, cartographie. Dans les trois cas, l'illusion que produit le calque est toujours la même : l'enfant semble produire quelque chose de correct et même d'élégant, et il n'a que la peine de promener son crayon ou sa plume sur des contours qu'on lui donne tout faits.

Ce résultat est-il enviable? Ceux qui l'ont soutenu se sont fondés sur un argument spécieux : « L'enfant s'instruit par l'imitation ; de même que c'est en forgeant qu'on devient forgeron, de même c'est en imitant de belles choses qu'on apprend à les faire soi-même ». Il y a une seule objection à ce raisonnement : c'est que calquer n'est pas imiter. L'imitation libre, avec tous ses périls, toutes ses mésaventures, tous ses tâtonnements, est un travail profitable à l'oeil, à la main, disons mieux, à l'esprit. L'imitation est un effort, elle implique une part de jugement, d'attention, de réflexion propre. Imiter, c'est agir. Calquer, c'est subir. Le calque est infaillible, et c'est là son irréparable inconvénient ; il n'exige aucune participation de la pensée, aucune étude, aucune initiative intellectuelle ; on peut dire en général que plus le calque est parfait, moins l'élève y a mis du sien. C'est une sorte de dextérité, d'habileté manuelle qui s'acquiert sans entraîner avec elle un développement correspondant de l'intelligence. Par conséquent le calque n'est jamais un procédé pédagogique ; à supposer qu'il apprenne quelque chose, il n'apprendra qu'à se dispenser de comprendre et presque à se dispenser de bien voir et de bien observer.

Telle est la raison générale et toute théorique pour laquelle nous croyons devoir condamner, quelque mérite de détail qu'ils puissent avoir, les procédés de calque calligraphique, géographique et autres.