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Bosnie et Hertségovine

 La Bosnie et son prolongement méridional la Hertségovine sont un pays peuplé par des Serbes, et qui, depuis le quatorzième siècle, fait partie de l'empire ottoman. Mais le traité de Berlin, en 1878, tout en le maintenant nominalement au nombre des possessions du sultan de Constantinople, a décidé qu'il serait administré par l'Autriche-Hongrie. C'est le Ministère des finances communes d'Autriche-Hongrie qui, par une section spéciale (K. und k. gemeinsame Finanzministerium, in Angelegenheiten Bosniens und der Hercegovina), dirige l'ensemble de l'administration. Le pouvoir législatif appartient à la couronne ; le budget doit être approuvé par les deux gouvernements, autrichien et hongrois. Le gouvernement local (Landes-regierung) de la Bosnie-Hertségovine se compose du commandant du quinzième corps d'armée, à Saraïévo, qui en est le chef ; d'un adjoint civil (Ziviladlatus) ; et de quatre sections administratives, à la tête de chacune desquelles est placé un chef de section.

Le pays a une superficie de 51 027 kilomètres carrés, dont 41 908 pour la Bosnie et 9 119 pour la Hertségovine. La population était, au dernier recensement (1895), de 1 568 092 habitants (dont 66376 Austro-Hongrois et 4472 étrangers) ; au point de vue religieux, il y avait 673 246 catholiques orthodoxes, 548 632 musulmans, 334 142 catholiques romains, 8213 israélites, 3 596 protestants, et 263 personnes appartenant à d'autres dénominations. La différence de religion ne correspond nullement à une différence de nationalité, car catholiques orthodoxes, musulmans, et catholiques romains appartiennent également à la race slave et parlent également la langue serbe, mais les orthodoxes écrivent cette langue en caractères cyrilliques, les catholiques romains et les musulmans en caractères latins. Le pays est divisé en six arrondissements (Kreise), Banialouka, Bihatch, Mostar, Saraïévo, Travnik et Dolnia-Touzla, et en 54 districts (Bezirke).

Avant l'occupation, il n'y avait en Bosnie et en Hertségovine que des écoles confessionnelles : pour les musulmans, des écoles coraniques, les mekteb (535 en 1879), avec 23 603 élèves ; pour les chrétiens des écoles orthodoxes (56 en 1879) et catholiques romaines (54 en 1879), ayant ensemble 5913 élèves. Aujourd'hui on distingue, pour l'enseignement élémentaire, trois sortes d'écoles : les écoles générales ou communes (allgemein), les écoles confessionnelles, et les écoles privées ; les premières sont entretenues par le gouvernement local et les communes, les secondes par les églises, les troisièmes par les particuliers. Les écoles élémentaires dites générales ont quatre classes, dont chacune correspond à une année d'études ; tantôt les classes sont séparées et reçoivent l'enseignement chacune dans une salle distincte ; tantôt elles sont réunies à deux, à trois, dans une même salle, ou même toutes les quatre dans une salle unique. Tantôt les enfants des deux sexes sont réunis dans la même école, tantôt il y a des écoles distinctes pour les garçons et pour les filles (il n'existe d'écoles de filles que dans les localités importantes).

Les matières d'enseignement à l'école élémentaire sont la religion, la langue maternelle, le calcul, la géographie et l'histoire, des notions de sciences physiques et naturelles, la calligraphie, la géométrie et le dessin, l'agriculture, l'allemand (facultatif), le chant, la gymnastique. Dans les écoles de filles et certaines écoles mixtes, on y ajoute les travaux à l'aiguille et l'économie domestique. L'enseignement est donné dans la langue du pays, excepté dans six ou sept écoles spécialement destinées aux enfants d'immigrants de nationalité allemande, dans lesquelles l'enseignement se fait en allemand.

Les enfants sont admis à l'école à l'âge de sept ans. La fréquentation n'est pas obligatoire, le nombre des écoles n'étant pas encore assez considérable pour satisfaire à tous les besoins de la population. En 1906, il existait 366 écoles élémentaires, réparties dans 281 localités, et comprenant 253 écoles générales, 103 écoles confessionnelles, et 10 écoles privées ; les 103 écoles confessionnelles se subdivisaient ainsi : orthodoxes 70, catholiques romaines 31, évangélique 1, israélite 1. A l'école générale, l'enseignement religieux est donné, aux élèves de chaque confession, par un maître de religion appartenant à cette confession: ces maîtres étaient en 1906 au nombre de 452, dont 157 orthodoxes, 154 catholiques romains, 121 musulmans, 17 israélites, et 3 d'autres confessions. Quoique les écoles générales soient ouvertes aux enfants musulmans, on a, pour tenir compte de l'exclusivisme propre à l'Islam, créé, dans les sept principales villes du pays, une seconde école élémentaire réservée aux seuls mahométans et où l'enseignement n'est donné que par des maîtres mahométans ; ces écoles, appelées roujdié, sont comprises dans le chiffre des 253 écoles générales donné ci-dessus. Le gouvernement entretient en outre à Saraïévo une école élémentaire de filles réservée aux musulmanes seules, et à Bosnisch-Brod une mekteb pour les filles. Il y avait dans les 253 écoles générales, en 1906, un nombre total de 24 786 élèves ; mais la statistique scolaire n'est pas dressée de façon à permettre de savoir combien, sur ces 24786 élèves, il y avait de garçons et de filles, ni combien il y avait de musulmans et de chrétiens. La statistique, sur ce point, a confondu a dessein les chiffres de toutes les catégories d'écoles ; et voici les seuls renseignements qu'elle fournit : en 1906, il y avait, dans les écoles élémentaires des trois catégories (générales, confessionnelles et privées), 33698 élèves en tout, dont 24 786 dans les écoles générales, 8316 dans les écoles confessionnelles, 596 dans les écoles privées ; de ces 33 698 élèves, 26 155 étaient des garçons et 7543 des filles ; enfin, de ces mêmes 33 698 enfants, 13 597 étaient orthodoxes, 13341 catholiques romains, 4902 musulmans, 1340 israélites, et 518 appartenaient à d'autres confessions.

Il existe, outre les écoles élémentaires proprement dites, de petites écoles musulmanes, les mekteb, où les enfants apprennent par coeur des versets du Coran et des passages de divers livres liturgiques en langue arabe et turque ; il n'y est donné aucun enseignement relatif à la langue maternelle, au calcul et aux autres branches d'études d'une école ordinaire. Le maître (hodja) reçoit des parents une rétribution en nature, et touche aussi une allocation provenant des revenus des biens « vakouf ». Il y a environ 800 de ces mekteb. Un mouvement avait commencé il y a quelques années en vue de la réforme des mekteb, mais jusqu'à présent il ne s'est étendu qu'à moins d'une centaine de ces établissements.

Le personnel enseignant des écoles élémentaires générales est nommé par le gouvernement local ; il comprend des directeurs d'école, des instituteurs et des auxiliaires. Le traitement d'un directeur varie de 1200 à 1900 couronnes, celui d'un instituteur de 1000 à 1700 ; celui d'un auxiliaire est de 720 couronnes. Il y a en outre des indemnités de résidence, allant de 100 à 360 couronnes pour les directeurs et instituteurs, de 80 à 160 couronnes pour les auxiliaires. Les membres du personnel enseignant ont droit à une pension de retraite ; des pensions sont également accordées aux veuves et aux orphelins d'instituteurs.

Quant au personnel enseignant des écoles confessionnelles et des écoles privées, il est rétribué en vertu de conventions particulières.

Les 366 écoles élémentaires (1906) étaient logées dans 373 maisons d'école, dont 324 leur appartenaient en propre et 49 étaient louées.

Les autorités chargées de la surveillance des écoles sont, en première instance, le chef de district (Bezirksamt) ; en seconde instance, l'autorité d'arrondissement, qui dispose à cet effet d'un inspecteur d'arrondissement ; ces inspecteurs, sortis des rangs du personnel enseignant, ont un traitement de 2000 couronnes pouvant s'élever, par deux augmentations successives, à 3200, plus 1000 couronnes d'indemnité de logement et de supplément d'activité, auxquelles s'ajoutent deux augmentations successives de 500 couronnes ; le chiffre maximum qui puisse être atteint est donc de 5200 couronnes. La surveillance supérieure de toutes les écoles est exercée par la section de l'instruction publique du gouvernement local à Saraïévo.

En plus des écoles élémentaires à l'européenne et des écoles coraniques, il faut encore énumérer un certain nombre d'établissements où l'on donne un enseignement d'un degré plus élevé (les chiffres indiqués ci-après sont relatifs à l'année 1906) :

1° Les écoles de commerce, au nombre de 9, avec 750 élèves ;

2° Deux écoles d'artisans (Handwerkerschulen), ainsi que quelques écoles complémentaires ou cours d'adultes destinés aux ouvriers ;

3° Le pensionnat militaire, à Saraïévo, avec 134 élèves ;

4° Les écoles supérieures publiques de filles, au nombre de 3, avec 443 élèves, auxquelles s'ajoutent 7 écoles privées avec 514 élèves ;

5° L'école normale d'instituteurs, à Saraïévo, avec 94 élèves, dont 19 musulmans ; l'institut Saint-Joseph pour les institutrices, à Saraïévo, avec 66 élèves, dont 50 catholiques romaines, 13 orthodoxes et 3 israélites ; et un établissement musulman fondé en 1893, à Saraïévo, le Dar-oul-mouallimin (la « Maison des instituteurs »), destiné à préparer des maîtres pour les mekteb, avec 66 élèves ;

6° Les trois Obergymnasien du gouvernement, à Saraïévo, Mostar et Dolnia-Touzla, avec 948 élèves ; l'Obergymnasium archiépiscopal catholique romain (auquel est annexé un séminaire), à Travnik, avec 213 élèves ; le gymnase des franciscains à Visoko, avec 73 élèves, et le Probandai (noviciat) des franciscains à Jiroki, avec 37 élèves (internes) ;

L'Oberrealschule, à Banialouka, avec 234 élèves, et l'Unterrealschule, à Saraïévo, arec 86 élèves ; l'école moyenne technique (technische Mittelschule), à Saraïévo, avec 22 élèves ;

8° Le séminaire catholique romain, à Saraïévo, avec 17 élèves ; l'école de théologie orthodoxe, à Réliévo, avec 46 élèves ; et l'école musulmane de droit à Saraïévo, avec 79 élèves. Il existe en outre 39 medersa ou écoles secondaires musulmanes, dont les élèves (softa) se destinent les uns au clergé, les autres à l'entrée à l'école de droit ou au Dar-oul-mouallimin ; les medersa avaient 1719 élèves et 45 maîtres.

Les renseignements contenus dans cet article sont empruntés aux deux derniers volumes parus (1906 et 1907) du Bericht über die Verwaltung von Bosnien und der Hercegovina, herausgegeben vom k. und k. gemeinsamen Finanzministerium (Wien, k. k. Hofund Staatsdruckerei), qui ont été obligeamment mis à notre disposition par la section du Ministère des finances communes d'Autriche-Hongrie chargée de la gestion des affaires de la Bosnie et de la Hertségovine.

En octobre 1908, l'empereur François-Joseph a déclaré que, pour assurer aux habitants de la Bosnie-Hertségovine les bienfaits du régime constitutionnel, il annexerait cette province à ses Etats.