La République de Bolivie (Amérique du Sud), formée de la partie méridionale du Haut-Pérou, est comprise entre la république du Pérou à l'ouest, le Brésil au nord et à l'est, le Paraguay et la République Argentine au sud, et le Chili au sud-ouest. Sa superficie est de plus de 1 300 000 kilomètres carrés. Elle est divisée en huit départements : Beni, Chuquisaca, Cochabamba, la Paz, Oruro, Potosi, Santa Cruz, Tarija. Elle tire son nom de Bolivar, le libérateur du Pérou.
Résumé historique. ? Les populations primitives du pays ne connaissaient pas l'écriture : le système de représentation figurée qu'on appelait les quippous, cordelettes de couleurs variées, nouées de diverses manières et réunies en faisceaux, était plus propre à tenir une comptabilité rudimentaire ou à conserver des données statistiques qu'à exprimer les manifestations de la pensée. Les amaoutas, ou savants, de l'empire des Incas étaient chargés de l'éducation des enfants de la famille impériale et de celle des jeunes nobles ; mais ils ne possédaient eux-mêmes que des notions très insuffisantes des sciences et des arts. Les vestiges remarquables d'architecture trouvés à Tiaguanaco et autres lieux sont attribués à une race antérieure, plus civilisée, qui a disparu.
La conquête du Haut-Pérou par les Espagnols (1532) introduisit dans cette région la civilisation ; mais la préoccupation unique des conquistadores était d'assurer leur pouvoir et d'accumuler des richesses, en sorte que l'instruction ne se répandit que fort peu. Dans les écoles élémentaires, établies seulement pour les blancs et les métis, on enseignait à prier, à lire, à écrire, et les quatre règles de l'arithmétique. Plus tard furent établis dans les villes principales des collèges d'enseignement secondaire, où l'on apprenait la grammaire latine, la rhétorique, la poétique, l'histoire et la philosophie. Les sciences physiques et naturelles étaient considérées comme de peu d'importance. L'université de Saint-François-Xavier, fondée à Chuquisaca (auj. Sucre), acquit de la renommée entre celles de l'Amérique du Sud, et les jeunes gens des classes riches y venaient de Quito et de Buenos Aires faire leurs études : elle comprenait une faculté de théologie et une faculté de droit ; on ne commença à y enseigner la médecine que dans les dernières années de la domination espagnole. A Chuquisaca, La Paz, Cochabamba et Santa Cruz, il y avait en outre des séminaires entretenus par les évêques et des collèges primaires pour les jeunes filles.
La guerre de l'indépendance (1808-1825) ne laissa pas aux patriotes le temps de s'occuper de l'instruction ; et les premiers gouvernements de la république ne purent réaliser que peu de progrès en ce domaine, les revenus nationaux, fort minimes, étant employés principalement à maintenir l'ordre public, constamment menacé. Néanmoins Sucre, Santa Cruz et Ballivian créèrent des écoles, destinèrent des fonds à leur entretien, et règlementèrent les collèges, en agrandissant le cercle des études ; et les autres gouvernements, après eux, promulguèrent un grand nombre de règlements, constamment revisés.
C'est le Statut général d'instruction publique (Estatuto general de instruccion pùblica) de 1874 qui est aujourd'hui encore en vigueur, sauf les modifications introduites par divers décrets postérieurs. Ce statut déclare l'enseignement libre à tous les degrés, et donne à l'Etat l'obligation de protéger l'enseignement primaire, qui est gratuit et obligatoire, et d'entretenir des collèges d'enseignement secondaire, mais seulement dans les centres où il n'existe pas de collèges dus à l'initiative privée.
La constitution politique déclare que tout homme a le droit d'enseigner, sans autres conditions que celles de capacité et de moralité. La capacité se prouve par la possession de titres soit nationaux, soit étrangers, ou par l'exercice de la profession avec succès pendant cinq ans ; la moralité se présume, jusqu"à preuve contraire. Les établissements d'instruction doivent se soumettre aux lois et règlements édictés par les pouvoirs législatif et exécutif.
Depuis 1903, date de l'entrée en fonctions du ministre actuel (1908) de la justice et de l'instruction publique, le Dr Juan M. Saracho, il a été donné une impulsion décisive à l'enseignement officiel. Nous ne pouvons mentionner ici que les principaux progrès réalisés, savoir : l'adoption de la méthode graduée, parallèle et positive (método graduai, paralelo y positivo) ; l'adoption d'un plan d'études et de programmes pour tous les degrés de l'instruction ; l'organisation de jurys d'examen et d'un professorat payé en raison des heures de travail effectif ; la centralisation des rentes de l'instruction publique dans le trésor national, ce qui a permis d'obtenir l'exactitude dans la rentrée des revenus ; la création de bourses concédées jusqu'à l'achèvement des études dans l'internat des établissements subventionnés par l'Etat ; la gratuité de l'enseignement officiel à tous ses degrés ; l'envoi à l'étranger de cent pensionnaires du gouvernement ; l'envoi en Europe d'une commission d'études pédagogiques ; la création de collèges primaires complets (colegios primarios completos) pour les garçons et pour les filles dans tous les chefs-lieux de département, et leur organisation, en particulier à La Paz (la capitale), avec un personnel enseignant préparé par des études normales, personnel dont le pays avait manqué jusque-là ; la distribution de matériel scientifique à tous les collèges ; l'instruction de la race indigène au moyen d'un personnel enseignant ambulant (profesorado ambulante), entreprise qui s'exécute sérieusement pour la première fois.
Etat actuel. ? Organisation. ? L'instruction se divise en primaire, secondaire, et supérieure ou facultative. Elle relève, pour l'administration centrale, du ministère de la justice et de l'instruction publique, à La Paz.
Le plan d'études adopté en 1905 pour tous les établissements primaires de la république divise l'enseignement primaire en trois cycles : enfantin, élémentaire et supérieur. Le premier cycle, qui a deux degrés, comprend les branches d'enseignement suivantes : langue maternelle, lecture, écriture, dessin, religion, morale, civilité (urbanidad), leçons de choses, notions d'arithmétique, notions de musique, gymnastique. Le second et le troisième cycle ont trois degrés chacun, avec les mêmes branches d'enseignement, plus développées, auxquelles s'ajoutent : l'histoire sainte, des notions de géométrie, de géographie, de comptabilité, de constitution politique, histoire de Bolivie, l'histoire générale, et les travaux manuels.
L'enseignement secondaire comprend six cours, dans lesquels il est donné graduellement plus de développement aux branches d'enseignement déjà énumérées, auxquelles s'ajoutent les suivantes : langue française et langue anglaise, littérature castillane, algèbre, trigonométrie, topographie, comptabilité, sciences physiques et naturelles, philosophie, anthropologie, et fondements de la religion. Les six cours achevés, les élèves peuvent obtenir le baccalauréat ès sciences et ès lettres.
L'enseignement facultatif comprend le droit, dont l'étude dure cinq ans, la médecine (sept ans), la pharmacie (quatre ans) et la théologie (quatre ans) : ce dernier enseignement est à la charge des évêques. Dans chaque département, considéré comme district universitaire, il y a un recteur, chef de l'instruction publique, qui dépend directement du ministre, et préside le Conseil de l'instruction publique, formé par les doyens et des professeurs nommés parmi les membres du corps enseignant. Dans le département du Beni, il n'y a qu'un inspecteur de l'instruction.
Les examens sont, les uns, semestriels (ceux-là sont privés et écrits, et ont lieu pendant la seconde quinzaine de mai, c'est-à-dire en automne), les autres de fin d'année (ceux-là sont publics et oraux, et ont lieu pendant la seconde quinzaine d'octobre, c'est-à-dire au printemps). Les inscriptions doivent se faire dans la seconde quinzaine de décembre, et l'ouverture solennelle des cours scolaires a lieu le 3 janvier (en été). Tous les instituts de la république doivent se soumettre à ces prescriptions et aux programmes du gouvernement, pour que leurs examens puissent avoir une valeur universitaire.
La constitution accorde aux municipalités le droit de créer des établissements d'enseignement primaire, de les diriger, d'en administrer les revenus, d'en édicter les règlements, d'en nommer les maîtres et de fixer les traitements du personnel enseignant. Comme elles sont autonomes sur ce terrain, l'impulsion qu'elles impriment à l'instruction manque de fixité, et dépend du personnel municipal, qui est renouvelé par moitié chaque année.
Statistique. ? La population de la Bolivie était estimée en 1 906 à 1 954 000 habitants, dont seulement 280000 environ ont reçu ou reçoivent de l'instruction ; une moitié de la population étant de race indigène, les écoles ambulantes récemment établies n'ont pas encore donné de résultats appréciables. En 1850, il y avait dans la république 396 écoles tant publiques que particulières, avec 21000 élèves. Actuellement (1908), il y a 770 écoles primaires avec 45580 élèves. L'instruction secondaire est donnée dans 8 collèges officiels (dont chacun compte douze professeurs), deux séminaires, un collège des pères jésuites, et un lycée qui est une entreprise particulière : ces établissements réunissent un total de 2900 élèves. Il y a à Sucre et à La Paz des facultés officielles de droit et de médecine et pharmacie, à Cochabamba une faculté de droit ; dans les autres districts universitaires, il y a des chaires particulières de droit, autorisées par le gouvernement. Le nombre des élèves de l'enseignement supérieur est de 680.
Il y a en outre 2 écoles des mines, 6 écoles de commerce, 2 instituts salésiens d'arts et métiers, un institut commercial, 10 collèges de jeunes filles appartenant à des congrégations et qui reçoivent des subventions à la condition d'admettre un certain nombre d'élèves gratuites, 2 académies de peinture, un conservatoire de musique, un collège militaire, une école de sous-officiers (escuela de clases), une académie de guerre, un certain nombre d'écoles dû soir, et diverses écoles primaires particulières.
Depuis 1904, le gouvernement a fait l'acquisition d'édifices spacieux destinés à servir de collèges primaires dans tous les chefs-lieux de département.
Le gouvernement dépense annuellement pour l'entretien et l'encouragement de l'instruction 1 250 000 bolivars (la valeur nominale du bolivar est de 5 fr. ; sa valeur réelle oscille autour de 2 fr.), et les municipalités 800 000 bolivars.
Il a été ouvert au ministère de l'instruction publique un livre matricule dans lequel sont inscrits les titres et les services des membres du corps enseignant, tant nationaux que naturalisés (un étranger ne peut être admis à exercer la profession enseignante s'il n'est pas naturalisé). Ceux qui comptent, dans un établissement d'instruction soit public, soit particulier, vingt-cinq années de services non interrompus, ou trente-cinq années de services coupés par des interruptions, ou qui, après dix ans de services, sont dans l'impossibilité physique de continuer, ont droit à une pension de retraite égale à l'intégralité de leur dernier traitement dans les deux premiers cas, ou aux deux tiers de ce traitement dans le troisième cas.
Le ministère publie chaque année un mémoire ou rapport dans lequel sont insérés les lois, les décrets, et les décisions de quelque importance ; il publie aussi une revue de l'instruction. Les conseils municipaux de Sucre, de Cochabamba, de Santa Cruz et de Potosi publient des revues pédagogiques mensuelles.