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Autriche

I. Résumé historique. — Le développement du système scolaire autrichien offre, sous beaucoup de rapports, une fidèle image du développement politique de l'Autriche. Il lui manque cette allure uniforme qui va tranquillement au but. Il est caractérisé par de brusques variations, passant souvent d'un extrême à l'autre. Ce développement a subi tout spécialement l'influence de deux facteurs, qui sont la lutte entre le pouvoir ecclésiastique et le pouvoir civil, et le conflit des nationalités.

La première période de l'histoire du système scolaire autrichien s'étend depuis les premiers commencements historiques jusqu'au règne de Marie-Thérèse ; elle offre à peu près la même évolution que celle que présentent les autres Etats de l'Europe centrale. Dès le huitième siècle, on voit des écoles canoniales et monastiques se former à Salzbourg, à Prague, à Olmütz, etc. ; à côté, existent aussi quelques écoles paroissiales. Au treizième siècle déjà, ces écoles ont cessé de posséder la direction intellectuelle des diverses régions, et au seizième siècle on constate un arrêt dans leur développement. Les universités, fondées au quatorzième siècle, ont enlevé aux monastères leurs meilleurs professeurs. Après la réaction contre la Réforme religieuse, l'enseignement élémentaire se trouve en pleine décadence. C'est seulement après la création des collèges de l'ordre des Piaristes que l'on voit se former de véritables écoles élémentaires, où les enfants des familles pauvres apprennent gratuitement à lire, écrire et compter, et reçoivent en même temps l'enseignement du catéchisme. Outre ces écoles, et les établissements très méritants de quelques ordres religieux féminins institués pour l'instruction des jeunes filles, il y avait dans les paroisses quelques écoles fondées par les propriétaires de domaines et par les communes, écoles complètement indépendantes des curés. Mais, en dehors des villes, les écoles se trouvaient souvent à plusieurs lieues de distance les unes des autres, et, dans les villes mêmes, elles étaient fréquentées presque uniquement par les enfants de la classe la plus pauvre ; les livres d'enseignement étaient remplis de fautes grossières ; les maîtres ne connaissaient ni méthode ni discipline et, vu l'extrême modicité de leurs salaires, étaient généralement forcés d'avoir recours à des occupations accessoires. L'Etat, à cette époque, ne se préoccupait nullement de la fondation, de la direction et de la surveillance des établissements scolaires ; il lui suffisait que l'esprit rigoureusement catholique de l'enseignement fût assuré ; dans les petites villes, il ne se mêlait pas des écoles ; dans les grandes villes, il se bornait à veiller à ce que le nombre des élèves admis dans les écoles latines restât limité, et à ce que, à côté des maîtres nommés par les communes, il ne s'en installât pas d'autres non autorisés. Le niveau intellectuel, en Autriche, était fort bas ; les jours de fête étaient démesurément nombreux, les pèlerinages avaient une grande vogue, et la superstition régnait en souveraine. C'est seulement sous le règne de Marie-Thérèse que l'on commença à vouloir que l'Etat montrât plus de sollicitude pour l'instruction du peuple. Mais les tentatives de réforme, au début, sont encore bien rudimentaires et à peine dignes de mention. Les écoles restaient encore la chose de l'Eglise et de la commune. L'Etat se contentait tout au plus d'appuyer les ordonnances de l'autorité ecclésiastique par des dispositions pénales, et d'apaiser les difficultés qui s'élevaient entre l'Eglise, les propriétaires et les communes. Au moment où déjà s'exerçait en Allemagne l'action de Basedow et où allait bientôt s'exercer en Suisse celle de Pestalozzi, l'enseignement élémentaire était, en Autriche, dans la situation la plus triste. En 1770, à Vienne, sur 100 enfants de l'âge de cinq à treize ans, 24 seulement fréquentaient les écoles publiques ; dans le reste de la Basse-Autriche, 16 seulement, et en Silésie 4. Ce n'est qu'en 1769 que s'opère dans l'esprit de l'administration autrichienne un changement radical, dont le résultat fut la création des écoles primaires. Les hommes qui se sont signalés dans ce mouvement en faveur de l'éducation populaire sont Van Swieten l'aîné, médecin de l'impératrice, le conseiller d'Etat Gebler, Martini, Van Swieten le jeune, le prince-évêque de Passau Firmian, le recteur de la Bürgerschule de Vienne Joseph Messmer, et le chancelier de l'Empire, le prince de Kaunitz ; celui-ci exprima en ces termes son opinion sur la question : « Vouloir établir les lois civiles et les règlements de police d'après les principes ultramontains, et fonder là-dessus sa politique, serait selon moi très dangereux. L'Etat aurait très peu fait pour le maintien de la paix publique s'il s'en remettait complètement et avec une aveugle confiance à la tutelle du clergé. » A la suite de la présentation d'un mémoire rédigé par l'évêque Firmian, il fut fait une sorte d'enquête sur l'état des écoles autrichiennes. Le Conseil d'Etat, dans lequel siégeaient des hommes éclairés, adopta les réformes proposées par Joseph Messmer et le baron Gebler, qui consistaient principalement dans les mesures suivantes : introduction d'une méthode rationnelle, division des élèves en classes, amélioration des livres d'école, diminution des jours de fête et de pénitence, des processions, fixation exacte des limites des circonscriptions scolaires, enregistrement des parents et des enfants appartenant à chaque circonscription. Pour se procurer les ressources nécessaires, un fonds scolaire devait être institué. La proposition fut faite, également, de créer, dans chacune des deux provinces autrichiennes, un établissement modèle appelé Normalschule. Le Conseil d'Etat proposa, enfin, la création d'une Commission scolaire permanente (Landes fürstliche Schulcommission) dans chacun des duchés de Basse-Autriche et de Haute-Autriche, dont ferait partie, avec voix délibérative, le directeur de la Normalschule ; ces Commissions seraient chargées d'introduire une amélioration des méthodes d'enseignement et une organisation du régime extérieur de l'école. L'établissement de ces deux Commissions marqua le commencement de la réforme scolaire. Mais l'Etat ne donna pas d'argent pour couvrir les dépenses que cette réforme nécessitait. Les ressources financières furent obtenues par divers expédients ; on s'empara de tous les anciens revenus des écoles élémentaires, et le « fonds de l'école normale » fut constitué au moyen d'un impôt sur les successions et de contributions volontaires. Sur le modèle de cette organisation, on procéda ensuite à une réforme analogue dans les autres provinces des Etats de Marie-Thérèse. En Bohême, le curé de Kaplitz, F. Kindermann, exerça une influence des plus heureuses au point de vue pédagogique, en transformant son école paroissiale en école modèle. Le comte Antoine de Perge, ministre d'Etat, présenta à l'impératrice un plan général de réorganisation, qui aurait placé tout renseignement sous la direction de l'Etat, aurait rendu la fréquentation de l'école obligatoire, et aurait enlevé l'enseignement des mains des congréganistes : mais Marie-Thérèse était trop bonne catholique pour adopter un plan aussi radical. Elle appela en 1774, avec le consentement du roi de Prusse Frédéric II, Ignace Felbiger, abbé de Sagan, signalé à l'attention de l'impératrice par la réforme scolaire qu'il avait accomplie dans la Silésie prussienne ; dés la même année, elle sanctionna le « Règlement scolaire général pour les écoles allemandes normales, principales et triviales », du 6 décembre 1774, élaboré par lui, qui fixa dans tous ses détails le plan d'études des trois catégories d'écoles qu'il instituait, les Trivialschulen ou écoles primaires élémentaires, les Hauptschulen ou écoles primaires principales, et les Normalschulen ou écoles normales. Les dispositions essentielles de ce règlement sont les suivantes : Dans toutes les petites villes et marchés, et, à la campagne, au moins dans tous les endroits où se trouve une église paroissiale ou une église succursale, il doit y avoir une Trivialschule, où l'on enseignera la religion, l'histoire biblique, la lecture, l'écriture cursive, 1 arithmétique jusqu'à la règle de trois, et enfin les éléments de la morale et de l'économie domestique. Il doit y avoir pour ces écoles une ou deux salles de classe, qui ne seront employées à aucun autre usage, ainsi qu'un logement pour le maître (Schulmeister). Le devoir d'ériger ces écoles incombe à la commune, avec le concours des propriétaires de domaines. Dans chaque arrondissement (Kreis), il doit y avoir au moins une Hauptschule (école principale) avec trois ou quatre instituteurs (Lehrer) et un catéchiste (Katechet), et le programme d'enseignement doit y comprendre les éléments de la langue latine, de la géographie et de l'histoire, des leçons de rédaction, de dessin et de géométrie, les principes de l'économie domestique et agricole. Il est désirable qu'il y ait des écoles distinctes pour les filles. Au siège de la Commission scolaire doit être installée une Normalschule, qui, tout en donnant un enseignement plus étendu que celui de la Hauptschule, doit permettre la préparation aux fonctions de l'enseignement. Pour que des maîtres nouveaux puissent être admis à enseigner, un examen de capacité est indispensable. Les maîtres d'école, à la campagne, sont autorisés à se livrer à quelque occupation accessoire convenable. L'obligation scolaire commence à l'âge de sept ans, la fréquentation doit durer six ou sept années. Les parents ou tuteurs négligents, qui soustrairaient les enfants à l'enseignement, seront sévèrement punis. La surveillance des Normalschulen et des Hauptschulen est exercée par le directeur, celle des Trivialschulen par le curé. La surveillance supérieure sera exercée par l'inspecteur de district (Dis-triktsaufseher), qui sera généralement le doyen. Dans chaque province, il y aura une Commission scolaire (Schulcommission) et à Vienne une Direction générale des écoles normales. On le voit, Marie-Thérèse peut être appelée à juste titre la fondatrice de l'école primaire autrichienne. En 1780, il y avait dans les Etats autrichiens (sans la Hongrie) 6197 écoles allemandes avec 200000 élèves.

Sous Joseph II, les réformes dans le domaine scolaire furent continuées avec zèle. La noblesse et le clergé durent consentir à s'imposer des sacrifices considérables pour la fondation de nouvelles écoles. Les couvents furent contraints d'ouvrir des écoles dans leurs paroisses, de les entretenir et d'en payer les maîtres. On ne nomma aux cures et aux bénéfices que des ecclésiastiques qui eussent rendu des services en matière scolaire. L'administration des écoles était pénétrée d'un esprit résolument anticlérical. L'obligation scolaire devint une réalité. Mais les revenus des fonds d'écoles restèrent minimes, et les maîtres furent, comme auparavant, réduits presque toujours, par l'exiguïté de leur traitement, à recourir à des occupations accessoires. Dans les territoires slovènes, en Galicie, en Bukovine et sur le Littoral, l'oeuvre de réforme échoua complètement ; les causes principales de cet échec furent la résistance du clergé et les tentatives de germanisation de l'empereur ; on ne voulait admettre aux fonctions d'enseignement, dans ces provinces comme dans les autres, que des personnes parlant l'allemand. Les réformes scolaires de Joseph II provoquèrent aussi de plus d'une façon le mécontentement de la population ; les punitions pour les absences de l'école étaient devenues plus rigoureuses, et la construction de nouvelles maisons d'école occasionnait aux communes de grosses dépenses. Il faut noter ce fait que l'empereur interdit aux maîtres d'école les fonctions d'organiste, comme incompatibles avec celles d'instituteur. Joseph II institua le « patronat scolaire », par lequel l'obligation était imposée aux propriétaires fonciers de créer des écoles et de les entretenir ; en échange, certains droits leur étaient reconnus, en particulier celui de la nomination des maîtres. La fortune des églises et des couvents dut être appliquée à couvrir les dépenses des écoles. Une école devait être ouverte partout où il se trouvait, dans un rayon d'une demi-lieue, un nombre de 90 à 100 enfants d'âge scolaire.

Une réaction très prononcée se produisit sous le règne de François Ier (1792-1835). Le comte Rottenhann réduisit les écoles à n'être que de misérables établissements de dressage pour les enfants pauvres ; pour ceux des familles aisées, il devait y avoir, dans les grandes villes, des Hauptschulen : la rétribution à payer par les élèves de ces écoles devait empêcher les enfants de la classe pauvre de les fréquenter. Les traits caractéristiques du projet Rottenhann étaient les suivants : pour les Trivialschulen, le programme se réduit à la lecture et à. l'explication de livres de lecture rédigés en style populaire ; à l'écriture, avec recours à ces mêmes livres ; à des notions de grammaire données à l'occasion de la lecture et de l'écriture ; à la connaissance des quatre règles, et à quelques leçons simples sur les devoirs de la classe laborieuse. Le traitement (Congrua) de l'instituteur de campagne est de 80 florins, plus le produit de la rétribution scolaire ; celui de son aide (Gehilfe), de 30 florins. Comme occupation accessoire, l'instituteur est autorisé à exercer un métier « non bruyant ». La direction et la surveillance de l'enseignement appartiennent au clergé. Le projet Rottenhann donna naissance à la Politische Schulverfassung (« Constitution scolaire politique ») de 1805, dont le but avoué était de préparer un immobilisme absolu dans le domaine de l'école. La Trivialschule devait avoir pour but « de faire de la classe des travailleurs des hommes de bon vouloir, dociles et laborieux ». Les instituteurs, à la campagne, pouvaient être de simples ouvriers. La Politische Schulverfassung distingue les écoles primaires simples (Trivialschulen), destinées à la population pauvre des villes et des campagnes, et les Hauptschulen, pour les enfants des bourgeois et des fonctionnaires. Les Hauptschulen avaient particulièrement la tâche de préparer des élèves pour les gymnases et les écoles techniques. Les élèves étaient strictement séparés par confessions. Les instituteurs non-catholiques ne pouvaient donner l'enseignement à aucun élève catholique. La plupart des écoles élémentaires étaient des écoles de demi-temps, et en été souvent l'enseignement y cessait tout à fait. L'âge scolaire ne s'étendait que de six à douze ans. Le nombre des élèves par classe était très élevé : on comptait 80 élèves pour un instituteur ; ce n'était qu'au-dessus de 100 élèves qu'une nouvelle classe devait être formée, ce qui, à cause de la dépense, n'avait lieu en réalité que très rarement. Les maisons d'école étaient sous tous les rapports misérables. Après la sortie de l'école, tous les élèves devaient, jusqu'à l'âge de quinze ans, fréquenter l'école de répétition (Wiederholungsschule), et le dimanche après-midi la doctrine chrétienne (Christenlehre), sorte de cours de répétition du catéchisme, qui avait lieu dans l'église. Le total des leçons du cours de répétition devait être de 40 à 70 heures par an. L'enseignement religieux était la branche essentielle du programme scolaire. L'instituteur devait moins s'attacher à développer l'intelligence qu'à cultiver la mémoire. L'enseignement devait s'en tenir strictement au contenu des livres d'école publiés par le Kaiserlich-KÖniglichcr Schulbücherverlag ou « Dépôt impérial-royal des livres d'école », fondé par Marie-Thérèse. La méthode était mécanique, fatigante, et faisait perdre du temps. Les châtiments corporels étaient permis, et on les pratiquait en général sans ménagement. La fréquentation scolaire était nécessairement très défectueuse, puisqu'il n'était pas fait usage de mesures répressives à l'égard des parents négligents. A la fin de l'année scolaire avaient lieu des examens publics, avec distribution de prix aux élèves appliqués. La préparation des maîtres était tout à fait insuffisante. Le brevet de capacité donnant le droit d'enseigner pouvait être obtenu, après fréquentation d'un cours de trois mois — plus lard de six mois — dans une Hauptschule, à la suite d'un examen subi devant le consistoire. La connaissance la plus appréciée était celle de l'orgue. Les cours d'enseignement complémentaire, les bibliothèques, les journaux scolaires étaient chose inconnue. La situation matérielle du personnel enseignant était fort triste. Il n'existait pas de pensions de retraite ; les veuves et les orphelins n'avaient d'autre ressource que l'hospice de la commune.

L'année 1848 amena un grand changement. La création d'un ministère de l'instruction publique, pendant le moment le plus critique de la révolution viennoise, montre quel prix on attachait aux choses de l'enseignement. En juillet de la même année parurent les Grundzüge des Öffentlichen Unterrichtswesens in Oesterreich (« Bases fondamentales de l'instruction publique en Autriche »), qui se distinguaient avantageusement, par les concessions faites à l'esprit moderne, de la Politische Schulverfassung. D'éminents pédagogues de l'Allemagne ou de la Suisse — entre autres Théodore Vernaleken — furent appelés en Autriche pour y préparer une réorganisation du système scolaire. Malheureusement, on n'exécuta qu'un petit nombre des réformes contenues dans le projet que nous venons de mentionner. La sollicitude du gouvernement, dès cette époque, se préoccupait des populations non allemandes de l'Autriche plus que de celles des provinces allemandes. C'est alors que pour la première fois, notons-le, des livres d'école furent composés, sur l'ordre des autorités, pour les populations non-allemandes. A partir de 1849, après le triomphe de la réaction, l'absolutisme fut en Autriche le véritable système de gouvernement. Il ne fut pas question de réclamer le concours du Parlement, des Landtage (assemblées provinciales) ni des communes pour l'oeuvre de réforme. Les évêques, instruments complaisants de l'absolutisme, revendiquaient la direction de l'éducation populaire ; ils disaient : « C'est à l'Eglise catholique que les écoles du peuple doivent leur origine, et, si on veut les séparer d'elles, on les livrera à la propagande des idées révolutionnaires », et ils insistaient pour le maintien de la Politische Schulverfassung de 1804. Après 1850, le ministère de l'instruction publique ne songea plus à une réforme sérieuse de l'école. Au contraire, l'école fut imprégnée de plus en plus d'esprit clérical, comme en témoignent les articles VII et VIII du Concordat du 8 août 1855. L'école devient un établissement confessionnel. La séparation des enfants d'après les confessions est strictement exécutée. Lés enfants israélites, s'ils étaient admis dans les écoles catholiques, devaient y être placés sur des bancs à part. Les élèves devaient être conduits chaque jour à l'église ; aux processions, le personnel enseignant devait veiller à la tenue des enfants et s'associer aux prières et aux cantiques. Les conférences pédagogiques de district devaient être ouvertes par la prière, le chant des cantiques, ou par un service solennel. Un instituteur non-catholique ne pouvait recevoir l'autorisation d'ouvrir une école pour des enfants catholiques. La nomination des instituteurs, pour les écoles catholiques, appartenait à l'autorité ecclésiastique. La séparation des fonctions de sacristain et d'instituteur ne pouvait avoir lieu qu'avec l'autorisation de l'évêque. La situation matérielle du personnel enseignant était des plus précaires. L'opinion des cléricaux sur ce point, ainsi que sur la préparation des instituteurs, a été exprimée par le chanoine et conseiller scolaire Comberg : « Un instituteur rural, dit-il, qui emploie son temps libre à des travaux domestiques ou agricoles, ou à quelque autre travail utile, se sentira satisfait et heureux avec un traitement de 50 à 80 florins. En ce qui concerne la préparation de l'instituteur, la fréquentation d'une école normale ne paraît pas indispensable pour l'instituteur rural. » Nulle part l'enseignement n'était gratuit dans l'école du régime concordataire ; même dans les provinces où l'école était notoirement mauvaise et où la rétribution scolaire n'avait jamais existé, comme en Bukovine, le gouvernement voulut l'introduire. Le taux de la rétribution fut même généralement accru. La charge de l'entretien de l'école incombait entièrement aux communes, les grands propriétaires ayant obtenu, grâce à la faveur de l'administration, d'être dispensés d'y contribuer. Les maisons d'école se trouvaient dans un état lamentable, les communes pauvres n'ayant pas le moyen de pourvoir à leur entretien. Adalbert Stifter, un des poètes les plus distingués de l'Autriche allemande, alors inspecteur des écoles de la Haute-Autriche, décrit ainsi une de ces maisons : « A Niederlhalheim, près de Schwanenstadt, dans une contrée fertile, j'ai trouvé une maison d'école en bois. Les parois en étaient toutes percées de trous, de la dimension d'une tête d'enfant ; la femme de l'instituteur les avait bouchés avec de la glaise. On pouvait faire tomber des poutres le bois pourri, en les touchant du doigt. Le toit était en ruines ; toutes les fois qu'il pleuvait, les enfants devaient placer leurs livres et leurs cahiers sous le banc, pour éviter qu'ils fussent mouillés. » La fréquentation scolaire était tout à fait irrégulière. En 1860 encore, le premier district de Vienne ne possédait en propre aucune maison d'école, et les classes étaient toutes installées dans des locaux loués. En 1859, l'armée autrichienne, à Solferino, se composait en majeure partie d'hommes ne sachant ni lire ni écrire ; les suites de ce déplorable système se firent sentir à Sadowa.

Les lois de décembre 1867 donnèrent à l'Autriche un régime constitutionnel. Le ministère de l'instruction publique, qui avait été supprimé en 1860, fut rétabli, et, le 30 décembre 1867, Léopold Hasner, professeur à l'université de Vienne, fut nommé ministre. Tendant les années qui suivirent, on témoigna aux écoles un intérêt plus marqué. Le patronat scolaire, là où il appartenait au curé et ne faisait que donner à celui-ci des droits sans lui imposer aucune obligation matérielle, fut aboli en principe. Les communes obtinrent le droit de présentation pour les nominations, ce qui éveilla leur intérêt pour l'école. Dans la constitution de 1867, on lit, dans la partie relative à la liberté de l'enseignement : « La science et son enseignement est libre ; c'est à l'Etat qu'appartient la surveillance supérieure de tout ce qui concerne l'instruction et l'éducation ». Tous les peuples de l'empire ont les mêmes droits, et chacun d'eux a un droit inaliénable à la conservation et la culture de sa nationalité et de sa langue. L'égalité de droit de toutes les langues de l'empire dans l'école, dans l'administration et dans la vie publique est reconnue par l'Etat ; dans les provinces qui sont habitées par plusieurs peuples différents, les établissements d'instruction publique doivent être organisés de telle façon que, sans l'emploi d'aucune contrainte pour l'acquisition d'une seconde langue, chacun de ces peuples y trouve le moyen d'obtenir, dans sa propre langue, l'instruction nécessaire. La loi d'Empire du 25 mai 1868 brisa les liens du Concordat et proclama en principe l'émancipation de l'école de l'autorité de l'Eglise.

Sur la base des lois d'Empire des 21 décembre 1867 et 25 mai 1868 a été promulguée la loi sur l'instruction primaire (Reichsvolksschulgesetz) du 14 mai 1869, sur laquelle repose l'organisation actuelle de l'école primaire, qui a dans toute l'Autriche un caractère uniforme. Les systèmes scolaires des différentes provinces (Länder) sont réglés par des lois provinciales particulières, qui adaptent à chaque province les dispositions fondamentales de la loi d'Empire. La loi sur l'instruction primaire proclame l'interconfessionnalité de l'école ; néanmoins le caractère en est resté très nettement catholique. Les autres confessions sont tenues de contribuer à l'entretien de l'école soi-disant interconfessionnelle, mais en réalité catholique, de façon qu'elles ne se trouvent pas en état d'avoir des écoles à elles. Dans le duché de Salzbourg, jusqu'après 1880, l'exercice, par l'instituteur, des fonctions de sacristain était autorisé par la loi. L'entretien de l'école fut mis à la charge des communes ; l'Etat ne supporta d'autres frais que ceux de la préparation du personnel enseignant. La loi décharge la commune de l'obligation d'établir une école, lorsqu'il s'y trouve une école privée qui répond aux besoins ; cette disposition a permis à beaucoup de congrégations de fonder de nombreuses écoles. Le traitement du personnel enseignant fut fixé à un taux insuffisant dans plusieurs provinces, en particulier dans celles où la population est d'opinion cléricale. L'obligation scolaire fut étendue à une durée de huit ans ; mais les lois provinciales la réduisirent à six années en Galicie, en Bukovine, en Carniole, en Istrie et en Dalmatie. La fréquentation présentait et présente encore des résultats très différents selon les divers pays de l'Empire. Tandis que, dans les provinces allemandes et dans les pays des Sudètes (Silésie, Bohême et Moravie), elle est assez satisfaisante, en Carniole la moitié, en Galicie le plus grand nombre des enfants se soustraient au devoir scolaire ; d'où cette constatation qui s'impose, que l'Autriche contemporaine est une réunion de pays ayant des degrés de culture très différents l'un de l'autre. Néanmoins, même dans la mesure limitée où la loi sur l'instruction primaire fut exécutée, elle eut son efficacité. La proportion des enfants fréquentant l'école s'éleva de 58 % à 87 % ; en 1870, la proportion des conscrits illettrés avait été de 55 %, en 1882 elle n'était plus que de 33 %.

Vers 1880, l'influence du parti clérical chercha de nouveau à s'étendre sur l'école. En 1888, le prince Aloïs de Liechtenstein présenta une proposition ainsi conçue : Chaque enfant doit être élevé d'après la doctrine de sa religion ; l'enseignement de la gymnastique doit être supprimé ; les maîtres doivent appartenir à la même confession que leurs élèves ; l'Église doit avoir le droit de participer à l'inspection ; la durée de l'obligation scolaire doit être réduite à six années. En 1889, le gouvernement présenta à la Chambre des seigneurs un projet de loi qui favorisait les écoles privées, et qui accordait des dispenses de fréquentation non seulement dans les campagnes, mais même dans les bourgs (Märkte). Une autre tentative de la propagande cléricale fut, en 1897, la proposition Ebenhoch, qui accordait à la législation provinciale le droit de séparer les élèves d'après la nationalité et la confession. Enhardis par leurs succès électoraux, les agitateurs cléricaux sont devenus de plus en plus entreprenants dans les dix dernières années. Leurs représentants ont la majorité dans les Landtage (assemblées provinciales) de Basse-Autriche, de Haute-Autriche, du duché de Salzbourg, du Tirol et du Vorarlberg, ce qui leur assure une influence décisive dans les affaires scolaires ; les gouvernements provinciaux se montrent empressés d'accéder à leurs désirs. Dans la Basse-Autriche, le parti « chrétien-social » a réussi, par un scandaleux favoritisme d'une part, et par des mesures disciplinaires à l'égard des instituteurs à tendances libérales et le refus de tout avancement, d'autre part, à comprimer toute velléité d'opposition dans le personnel enseignant, qui se voit même contraint, par le terrorisme qu'exerce ce parti, à rendre au cléricalisme des services politiques. On a fondé partout des sociétés d'instituteurs « chrétiennes-sociales » et cléricales, et les instituteurs qui ne font pas adhésion ouverte au parti dominant se voient susciter toute espèce de difficultés. Le Katholischer Schulverein (« Société scolaire catholique »), à la tête duquel se trouve l'héritier présomptif du trône, embrasse dans les liens de son organisation l'Autriche tout entière ; il entretient de nombreuses écoles primaires confessionnelles, ainsi que des écoles normales également confessionnelles ; il en est de même de la part de différentes congrégations, dont un certain nombre sont des congrégations expulsées de France. On peut dire que la seule chose qui, jusqu'à présent, ait empêché l'anéantissement complet de la législation scolaire de 1869, ce sont les désordres au sein du Parlement autrichien, désordres qui ont paralysé presque complètement le travail législatif.

En même temps que le cléricalisme gagnait du terrain, on a pu constater un recul toujours plus marqué de l'influence de l'élément allemand dans les pays des Sudètes et des Alpes : en Bohême, en Moravie, en Silésie, ainsi que dans le sud de la monarchie, des territoires entiers qui, précédemment, étaient allemands ou possédaient de fortes minorités allemandes, sont devenus tchèques, polonais, Slovènes ou italiens. Les Schulvereine (« Sociétés scolaires ») des nationalités non-allemandes, qui rencontrent un appui bien plus puissant que le Deutscher Schulverein (« Société scolaire allemande »), déploient une activité considérable. L'opposition à la mainmise cléricale sur l'école se compose de deux éléments, la bourgeoisie libérale des grandes villes et la classe ouvrière organisée dans ses syndicats. La propagande anti-cléricale est menée plus particulièrement par l'association Freie Schule (« L'Ecole libre »), qui se place sur le terrain de la loi sur l'instruction primaire, et qui a pour programme le développement ultérieur de cet important acte législatif dans le sens de la liberté, du progrès, et de l'émancipation de l'école de toute ingérence cléricale.

II. Etat actuel. — 1. LE MINISTERE DES CULTES ET DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE. — A la tête de toute l'administration scolaire est placé le ministère des cultes et de l'instruction publique (Ministerium für Kultus und Unterricht). Le traitement du ministre est de 20 000 couronnes (la couronne, ou Krone, monnaie d'argent, correspond exactement comme poids et comme titre à notre franc ; la pièce d'or de vingt couronnes, par contre, vaut vingt et un francs), auquel s'ajoute un supplément d'activité (Aktivitätszulage) de 20 000 couronnes. Les objets qui ressortissent à ce ministère sont les cultes, l'enseignement supérieur, l'enseignement moyen (secondaire), l'enseignement primaire, l'enseignement professionnel, les beaux-arts. De ce ministère dépendent encore : l'Académie impériale des sciences, placée sous l'autorité immédiate de l'empereur ; le Musée impérial-royal autrichien des beaux-arts et de l'industrie ; la Commission centrale impériale-royale pour la conservation et la recherche des monuments artistiques et historiques, la Commission centrale impériale-royale de statistique, et l'Institut impérial-royal de géologie. L'instruction publique comprend :

A. Les établissements d'enseignement supérieur, qui sont : les universités, les écoles techniques supérieures, l'Ecole supérieure d'agriculture, les académies des mines, les académies des beaux-arts, l'académie d'exportation du Musée autrichien impérial-royal de commerce, et différents établissements technologiques ;

B. Les établissements d'enseignement moyen (secondaire), savoir : les gymnases, les gymnases réaux (Realgymnasien), et les écoles réales (Realschulen), auxquels s'ajoutent les écoles normales d'instituteurs, les écoles normales d'institutrices ;

C. Les établissements d'enseignement spécial et professionnel, savoir : les écoles de commerce, les écoles d'arts et métiers (Gewerbeschulen), les écoles agricoles et forestières, les écoles inférieures des mines, les écoles nautiques, les écoles d'art vétérinaire et de maréchalerie ; les écoles de sages-femmes ; les écoles d'art musical et dramatique ; les écoles de travaux féminins, de coupe et d'assemblage ; divers établissements spéciaux d'instruction et d'éducation ;

D. Les écoles primaires ordinaires et supérieures (allgemeine Volks und Bürgerschulen), les jardins d'enfants et asiles, les instituts pour les aveugles et les sourds-muets.

2. ORGANISATION PROVINCIALE. — Comme type de cette organisation, nous prendrons celle du duché de Basse-Autriche (capitale : Vienne).

Les autorités scolaires de chaque province (Kronland ou Provint) sont : 1° le Conseil scolaire provincial (Landesschulrat) ; 2° le Conseil scolaire de district (Bezirksschulrat) ; 3° le Conseil scolaire local (Ortsschulrat).

Au Conseil scolaire provincial appartient la direction de l'enseignement primaire et de l'enseignement moyen de toute la province. Il a donc sous son autorité : 1° les établissements scolaires et d'éducation qui dépendent des Conseils scolaires de district ; 2° les écoles normales d'instituteurs et d'institutrices, avec leurs écoles annexes ; 3° les' écoles moyennes (gymnases, gymnases réaux, écoles réales), de même que tous les établissements privés et tous les établissements spéciaux appartenant à cette catégorie. Le Conseil scolaire provincial se compose : a) du gouverneur de la province (Landeschef) ou de son représentant, président ; b) de quatre membres délégués par le Comité provincial (Landesausschuss) ; c) d'un référendaire pour les affaires scolaires administratives et économiques ; d) des inspecteurs scolaires provinciaux ; e) d'un ecclésiastique catholique, d'un ecclésiastique protestant, et d'un représentant du culte israélite ; f) dans la Basse-Autriche, de quatre membres élus par le Conseil municipal de la ville de Vienne ; g) de trois spécialistes (Fachmänner) en matière d'enseignement. Les membres énumérés sous les lettres c, d et e sont nommés par l'empereur, sur la proposition du ministre. Le Conseil scolaire provincial exerce, au nom de l'Etat, la surveillance sur l'enseignement religieux.

Le Conseil scolaire de district a sous son autorité toutes les écoles primaires publiques, de même que tous les établissements privés et toutes les écoles spéciales appartenant à cette catégorie, à l'exception des écoles complémentaires professionnelles ; et en outre les jardins d'enfants les asiles et les refuges pour l'enfance du district. Les limites du district scolaire sont les mêmes que celles du district politique. Le Conseil scolaire de district se compose : a) du chef en exercice des capitaineries du district (Bezirkshaupt-mannschaften), président ; b) d'un représentant, nommé par le gouverneur, de l'enseignement religieux de chacune des confessions dont le nombre d'adhérents dans le district, d'après le dernier recensement, est supérieur à 500 ; c) de spécialistes en matière d'enseignement.

Le Conseil scolaire local est l'autorité qui surveille en première instance les écoles d'une commune scolaire ou d'un arrondissement municipal ; il y a un Conseil local dans chaque commune scolaire, et à Vienne dans chaque arrondissement municipal. Le Conseil scolaire local veille à l'exécution des lois scolaires et des ordonnances des autorités scolaires supérieures, et, dans les limites de sa compétence, à l'organisation convenable de l'école ou des écoles dans la commune scolaire. Le Conseil local est composé de représentants des municipalités, de représentants des confessions religieuses, de représentants de l'école, et d'un surveillant local. Le surveillant est tenu de visiter fréquemment les écoles qui lui sont assignées ; il doit se tenir en rapports constants avec les directeurs de ces écoles, aviser le Conseil local des manquements qu'il constate, et lui faire des propositions y relatives ; il a le droit d'assister aux conférences des instituteurs. Les autres membres du Conseil ont également le droit de visiter les écoles et d'assister aux leçons : mais ni eux, ni le surveillant, ne sont autorisés à faire, durant la leçon ou en présence des élèves, des observations sur la manière dont l'enseignement est donné.

3. INSPECTION SCOLAIRE. — Le droit d'inspection est une attribution de l'Etat. C'est aux inspecteurs scolaires provinciaux, auxquels le ministre donne les instructions nécessaires par l'intermédiaire du Conseil scolaire provincial, qu'appartient l'influence immédiate dans les affaires didactico-pédagogiques des écoles ; leurs fonctions comprennent des inspections périodiques, la direction des examens, la surveillance de l'activité des directeurs d'école, des Conseils scolaires locaux et de district, et des inspecteurs des districts de la province. Traitement : de 6400 à 8800 couronnes, plus un supplément d'activité de 1840 couronnes, et divers émoluments. Le Conseil scolaire provincial peut aussi ordonner des inspections extraordinaires des écoles placées sous son autorité, par tels ou tels de ses membres désignés par lui. Les inspecteurs font rapport au Conseil provincial sur leur activité ; le Conseil transmet ces rapports au ministre, en indiquant les décisions prises et les ordres donnés en conséquence. Les inspecteurs provinciaux sont aussi tenus, lorsqu'ils ont reçu une mission spéciale, de faire rapport directement au ministre.

Le droit d'inspection de l'Etat sur les écoles primaires d'un district est exercé par un inspecteur scolaire de district dont le traitement est de 3000 à 3400 couronnes, auxquelles s'ajoutent l'augmentation quinquennale et un logement ou une indemnité de logement de 1300 couronnes. L'inspecteur de district est nommé par le ministre ; il est choisi, sur une liste de candidats professionnels (instituteurs d'écoles primaires et de Bürgerschulen, professeurs de Mittelschulen) sur la présentation du Conseil scolaire provincial, le Conseil de district entendu. Cette nomination n'est faite qu'à titre temporaire, pour une durée de six ans ; en Galicie, seulement, elle est faite à titre définitif. Un district d'inspection peut réunir plusieurs districts scolaires. Le district scolaire de Vienne est divisé, selon les besoins, en plusieurs districts d'inspection. La surveillance immédiate de l'enseignement religieux appartient à l'autorité confessionnelle ; le droit de surveillance qui appartient à l'Etat est exercé par l'inspecteur de district : il consiste uniquement à assurer le maintien des prescriptions légales. L'inspecteur de district inspecte aussi les établissements privés qui ont rang d'écoles primaires.

4. CRECHES, ASILES ET JARDINS D'ENFANTS. — La première crèche (Krippe) fut fondée à Vienne eu 1849 par le Dr Karl Halm, conseiller municipal. En 1847 fut fondée à Vienne la Société centrale des crèches, placée plus tard sous le patronage de l'impératrice Elisabeth ; cette société possède à Vienne encore six autres crèches. Ce sont des établissements destinés aux nourrissons et aux enfants jusqu'à l'âge de trois ans. En 1873 il y avait dans tout l'empire 14 crèches ; leur nombre, en 1907, est d'environ une trentaine ; elles reçoivent de 2000 à 3000 enfants. — Les asiles (Kinderbewahranstalten) sont destinés à recevoir les enfants de la classe ouvrière, pour les surveiller et les occuper, en leur donnant des habitudes de propreté, d'ordre et de bonne conduite, et en leur inspirant l'amour du travail. Les enfants n'y sont pas admis avant l'âge de trois ans révolus. La méthode froebelienne est introduite dans presque tous les asiles ; tout enseignement proprement scolaire en est exclu. L'asile garde les élèves du matin jusqu'au soir, il les nourrit, et n'exige en retour qu'une très minime rétribution ; ou même il n'en perçoit aucune. Outre la salle de jeux et d'occupations, qu'on trouve dans tous les jardins d'enfants, l'asile possède encore une cuisine, une buanderie pour le blanchissage du linge de l'établissement, et un logement pour les gardiennes. En 1873 il y avait en Autriche 224 asiles, fréquentés par 28 828 enfants ; en 1894, 468, avec 59 091 enfants ; en 1904, il y en avait 722.

Les jardins d'enfants ont pour mission d'aider et de compléter l'éducation domestique des enfants qui n'ont pas encore atteint l'âge scolaire, et, par là, de préparer ceux-ci, par des exercices réglés du corps et des sens, ainsi que par une éducation de l'esprit conforme à la nature, à recevoir l'enseignement de l'école primaire. Les procédés employés par le jardin d'enfants sont les suivants : occupations appropriées au besoin d'activité des enfants ; jeux de mouvement avec ou sans accompagnement de chants ; objets et images montrés et commentés, récits et poésies, et enfin travaux faciles de jardinage. Les enfants ne peuvent pas être admis avant l'âge de trois ans révolus, et doivent quitter l'établissement lorsqu'ils ont atteint l'âge de six ans. Les jardins d'enfants peuvent être fondés par les provinces, les districts scolaires, les communes, les associations, ou les particuliers ; il y a en conséquence des jardins d'enfants publics et des jardins d'enfants privés. Ils peuvent soit être indépendants, soit dépendre d'une école primaire. Les enfants y sont reçus, à l'exception des dimanches et fêtes, pendant deux à trois heures le matin et deux heures l'après-midi. Le nombre des enfants confiés à la surveillance d'une même personne ne peut pas dépasser 40. Le jardin d'enfants doit posséder, outre des chambres et des salles convenables, un emplacement en plein air pour les jeux : les exceptions ne sont admises que dans les grandes villes et pour les établissements privés. L'éducation des enfants est confiée à des « jardinières d'enfants » (Kindergärtnerinnen), qui ont à fournir les preuves de capacité exigées par la loi. La surveillance didactico-pédagogique est exercée par l'inspecteur du district.

En 1880, il y avait en Autriche 195 jardins d'enfants avec 17 764 enfants ; en 1894, il y en avait 624 avec 62 912 enfants ; en 1904, il y en avait 969.

La proportion du nombre des enfants fréquentant un des établissements destinés aux enfants qui n'ont pas encore atteint l'âge scolaire, par rapport au nombre total des enfants de trois à six ans, était la suivante dans les trois années 1873, 1880 et 1894 (on n'a pas encore les chiffres de 1904) :

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5. ECOLES PRIMAIRES. — La mission de l'école primaire consiste, aux termes de la loi du 14 mai 1869, « à élever les enfants dans les principes de la morale et de la religion, à développer leur activité intellectuelle, à leur faire acquérir les connaissances et les aptitudes dont ils auront besoin dans la vie, et à les préparer à devenir des hommes et des membres utiles de la société ».Les écoles sont publiques ou privées ; elles sont ouvertes à tous les enfants sans distinction de confession. Elles sont divisées en écoles primaires ordinaires ou élémentaires (allgemeine Volksschulen) et écoles primaires supérieures (Bürgerschulen).

L'école primaire ordinaire (allgemeine Volksschule). — Le programme de l'école primaire ordinaire comprend : la religion ; la lecture et l'écriture ; la langue d'enseignement (qui varie suivant les provinces) ; le calcul, auquel s'ajoute la géométrie élémentaire ; des notions simples de sciences physiques et naturelles, de géographie et d'histoire, en prenant particulièrement en considération l'Autriche et sa constitution ; le dessin, le chant ; les travaux à l'aiguille (pour les filles) ; la gymnastique (obligatoire pour les garçons, facultative pour les filles). Un instituteur ne doit pas avoir plus de 80 élèves à instruire, sauf dans les écoles de demi-temps, où il peut y avoir jusqu'à 100 élèves pour un instituteur. Une école peut être dirigée par une institutrice. Les institutrices peuvent enseigner dans les écoles de garçons, jusqu'à la quatrième année inclusivement en Basse-Autriche, jusqu'à la seconde année en Bohême, jusqu'à la troisième en Galicie. L'obligation scolaire commence en général à l'âge de six ans, et dure jusqu'à l'âge de quatorze ans accomplis. Néanmoins, des enfants qui n'ont pas encore atteint l'âge scolaire peuvent aussi être admis, avec l'autorisation de l'autorité scolaire locale, lorsque leur maturité physique et intellectuelle a été jugée suffisante, et s'ils doivent atteindre l'âge scolaire au plus tard six mois après le moment de leur admission. Les dispenses de fréquentation, qualifiées de « facilités » (Schulbesuchserleichterungen), permettent malheureusement aux enfants des paysans et des prolétaires de la campagne de se soustraire dès l'âge de douze ans à la fréquentation régulière de l'école. Les deux dernières années d'école sont alors remplacées par un genre d'enseignement réduit, dont la valeur semble être des plus discutables. Il en résulte que, dans les populations rurales des provinces occidentales de l'empire, la fréquentation scolaire de huit années n'existe plus ; elle n'y dure en réalité que six ou sept années, auxquelles s'ajoute, pendant les six mois d'hiver, un cours de répétition consistant le plus souvent en trois heures de leçons un jour par semaine. La fréquentation est donc presque partout en recul. On ne construit non plus presque jamais, dans les campagnes, de nouvelles maisons d'école, ce qui est d'autant plus à regretter qu'un très grand nombre de bâtiments scolaires n'offrent en aucune façon les conditions pédagogiques et hygiéniques qu'on serait en droit d'exiger.

L'enseignement à l'école primaire doit, d'après la loi, durer toute la journée. L'école de demi-temps ne peut être introduite que dans des cas spéciaux, sur une demande bien motivée des représentants des municipalités comprises dans la commune scolaire ou de l'autorité scolaire locale, lorsque les besoins scolaires et les conditions économiques de la population, l'état des chemins, les intempéries, et l'étendue du rayon de l'école, font paraître nécessaire une semblable mesure. Mais, comme on doit s'y attendre, il en est fait un fréquent usage à cause de la pauvreté de beaucoup de communes, ainsi que du manque d'instituteurs, dû à l'insuffisance des traitements. Au commencement de l'année scolaire, le directeur de l'école dresse le tableau d'emploi du temps ; pour les écoles à plusieurs classes, ce tableau doit être discuté dans la conférence des instituteurs ; il n'entre en vigueur qu'après avoir reçu la sanction du Conseil scolaire du district. Les élèves sont tenus de participer aux exercices religieux (fréquentation de l'église pendant les mois d'été, confession, communion, procession du Saint-Sacrement) ; les absences non dûment motivées de ces exercices sont punies. Le personnel enseignant, de son côté, est tenu de surveiller les exercices religieux des enfants, de réciter la prière par laquelle la classe doit être ouverte et fermée, de conduire les enfants à la messe aux jours prescrits, de les accompagner à confesse et à la communion, et de participer à la procession de la Fête-Dieu. — Chaque école primaire doit posséder, pour le moins, le matériel d'enseignement suivant : tableaux pour l'enseignement de la lecture ; matériel pour l'enseignement concret du calcul élémentaire ; images pour l'enseignement intuitif ; un globe ; des cartes murales représentant la mappemonde, la province, l'Autriche-Hongrie, l'Europe, la Palestine ; le matériel le plus indispensable pour l'enseignement du dessin ; une collection d'objets d'histoire naturelle du pays, et d'instruments de physique simples ; enfin une bibliothèque. Dans les salles de classe doivent se trouver l'image du Rédempteur et le portrait de l'empereur. — L'année scolaire, à l'école primaire, dure dix mois, lorsque la loi provinciale ne contient pas à cet égard d'autres dispositions ; les grandes vacances durent par conséquent deux mois, en général ceux de juillet et août ; à. ces vacances s'ajoutent des jours de congé, qui sont les jours de fêtes religieuses ou patriotiques. Lorsque l'enseignement dure toute la journée, il y a, chaque semaine, dans la règle, deux après-midis ou un jour entier de rongé : ce sont en général les après-midis du mercredi et du samedi, ou la journée du jeudi. Les heures d'enseignement doivent être distribuées de telle façon que le plus grand nombre des heures se trouve le matin, le plus petit l'après-midi. — Les châtiments corporels sont interdits dans les écoles tant privées que publiques. — Il doit être créé une école publique toutes les fois que, dans une localité, ou dans plusieurs localités comprises dans un rayon d'une lieue, d'après la moyenne de cinq années, il se trouve un minimum de 40 enfants d'âge scolaire, qui habitent à une distance de plus de quatre kilomètres de l'école la plus voisine. Lorsque les voies de communications sont difficiles, on doit établir, dans l'intervalle de cette distance, une « station supplémentaire » (Ecccurrendo-Station) à titre soit temporaire, soit permanent. Toutefois, dans les provinces où existe une grande pénurie d'instituteurs, ou bien où les conditions topographiques sont défavorables, comme en Galicie, en Bukovine, en Tirol, ces dispositions légales ne sont pas encore complètement exécutées. — Près de la moitié des écoles primaires sont à une seule classe. — L'instruction primaire est obligatoire, mais non la fréquentation de l'école, c'est-à-dire que les parents ne peuvent pas être contraints à envoyer leurs enfants à l'école publique, mais qu'ils sont tenus, s'ils ne les y envoient pas, à leur donner ou à leur faire donner un enseignement équivalent à celui de l'école publique. Les absences non excusées des élèves peuvent être punies par l'amende et l'emprisonnement ; mais, dans la pratique, les dispositions légales relatives à ces sanctions sont appliquées avec beaucoup de ménagements.

L'école primaire supérieure (Bürgerschule). Les instituts d'aveugles et de sourds-muets. — La loi sur l'instruction primaire dit, à l'article 14 : « La Bürgerschule donne un enseignement plus étendu que celui de la Volksschule, en prenant surtout en considération les besoins des artisans et des agriculteurs. Elle assure aussi la préparation à la fréquentation des écoles normales et de celles des écoles spéciales qui n'exigent pas le genre de culture donné par l'enseignement moyen. » L'école primaire supérieure se compose de trois classes, auxquelles peut en être ajoutée facultativement une quatrième. Elle fait suite à la cinquième année (en Galicie, à la quatrième année) de l'école primaire élémentaire ; mais elle peut être jointe à une école primaire élémentaire sous une direction unique. Le programme de la Bürgerschule comprend : la religion, la langue d'enseignement, avec des rédactions d'affaires, la géographie et l'histoire, en prenant particulièrement en considération l'Autriche et sa constitution, l'histoire naturelle, la physique, le calcul, en y joignant la tenue des livres en partie simple, la géométrie et le dessin géométrique, le dessin artistique, la calligraphie, le chant, les travaux à l'aiguille pour les filles (en Galicie aussi l'enseignement manuel pour les garçons), la gymnastique (obligatoire pour les garçons, facultative pour les filles). On peut y ajouter, comme branches facultatives : la langue française, l'enseignement manuel, la sténographie, le violon ou le piano. Il existe aussi, pour les Bürgerschulen destinées aux jeunes filles, des programmes spéciaux. Le chef responsable de la Bürgerschule a le titre de directeur (Direktor) ; outre lui et le maître de religion, il doit y avoir au moins encore trois autres maîtres, qui ont à subir un examen plus élevé que celui des instituteurs ordinaires. Au sujet de la création des Bürgerschulen, les diverses législations provinciales contiennent des dispositions différentes : dans la plupart des provinces, la règle est qu'il doit y avoir une Bürgerschule dans chaque district scolaire : mais en Galicie, en Carinthie, en Styrie, dans la Haute-Autriche et le Tirol, la loi laisse au Conseil scolaire provincial la décision à cet égard. Dans certaines provinces, il n'existe, aujourd'hui encore, aucune Bürgerschule.

Une cause d'insuccès pour cette école, c'est la préparation insuffisante des élèves qu'on lui envoie ; les élèves sortant de la Bürgerschule ne jouissent pas des mêmes droits que ceux qui ont passé par le gymnase inférieur ou par l'Unterrealschule ; il en résulte que les familles aisées n'y envoient pas leurs enfants, et que, dans les grandes villes surtout, elle est devenue une institution fréquentée par les enfants de la classe ouvrière. Ceci s'applique principalement aux écoles de garçons ; car, comme il n'existe en Autriche que fort peu de ressources pour la première éducation des jeunes filles, celles-ci se voient généralement obligées de fréquenter la Bürgerschule : en sorte que l'école primaire supérieure des filles jouit d'un meilleur recrutement que l'école primaire supérieure des garçons et obtient de meilleurs résultats que celle-ci. Pour cette raison, les populations ne se montrent pas très sympathiques à l'égard des écoles supérieures de garçons ; à Vienne, la majorité « chrétienne sociale » du Conseil municipal se refuse systématiquement à la création de la quatrième année, facultative, de la Bürgerschule. Les parents sont, en conséquence, obligés d'envoyer leurs enfants dans des écoles privées possédant cette quatrième classe, qui, à Vienne, n'existe que dans un petit nombre de ces établissements. L'administration de l'instruction publique s'occupe en ce moment (1908) à donner à cette importante institution une base plus moderne. On a élaboré pour les Bürgerschulen, tant de filles que de garçons, de nouveaux plans d'études, qui sont entrés en vigueur au commencement de l'année scolaire 1908-1909. Les traits essentiels de ces nouveaux programmes sont l'importance plus grande accordée à l'étude de la langue d'enseignement (c'est-à-dire de la langue en laquelle, dans une province donnée, sont faites les leçons), et le caractère plus pratique donné à l'enseignement des branches réales. Le dessin doit être enseigné d'après la « méthode libre », c'est-à-dire que les élèves ne doivent plus dessiner l'ornement, mais des objets empruntés au milieu qui leur est familier, ustensiles, fruits, feuilles, etc. La gymnastique doit être pratiquée d'une façon plus intensive (deux heures par semaine). Dans l'enseignement du chant, une place prépondérante doit être accordée à la chanson populaire. On a prévu des excursions collectives et un enseignement pratique relatif à la protection des animaux et des plantes. Une place particulière est réservée à l'hygiène. Il a été tenu compte particulièrement des besoins de la vocation féminine, surtout pour les sciences physiques et naturelles et les travaux à l'aiguille. Les écoles de garçons ont en première année vingt-neuf heures de leçons par semaine, trente dans la seconde et la troisième années, savoir : religion deux heures, langue d'enseignement et rédaction commerciale cinq, géographie et histoire trois, histoire naturelle deux, physique deux, calcul et comptabilité quatre, géométrie et dessin géométrique trois, dessin à main libre quatre (cinq en troisième année), calligraphie une heure (pas de calligraphie en troisième année), chant une, gymnastique deux (trois en troisième année). Dans les écoles de filles, le nombre des heures de leçons est de vingt-neuf et trente par semaine : il y a seulement trois heures pour le calcul, une pour la géométrie, et trois pour le dessin à main libre, mais il y a quatre heures pour les travaux à l'aiguille (en troisième année cinq). En promulguant ces plans d'études, le ministère de l'instruction publique a simplement créé un cadre dans lequel devra s'exécuter une réforme de la Bürgerschule, destinée à la moderniser et à l'adapter aux besoins pratiques des populations. Il dépendra des autorités compétentes que l'intention de l'administration, de faire des Biirgerschulen des établissements destinés à une bonne préparation à la carrière commerciale et industrielle chez les classes moyennes, soit plus ou moins complètement réalisée. On ne peut toutefois pas attribuer à cette mesure la portée d'une véritable réorganisation : la question de la quatrième classe, et celle d'un relèvement du niveau des études afin d'ouvrir aux élèves de la Bürgerschule l'accès aux établissements supérieurs et à certains emplois publics, accès actuellement réservé exclusivement aux élèves du gymnase inférieur et de l'Unterrealschule, n'ont pas été abordées.

Au domaine de l'instruction primaire appartient encore l'enseignement des aveugles et des sourds-muets. On comptait, en 1903, 15 instituts d'aveugles, dont 4 publics et 11 privés, avec 1137 élèves (617 élèves masculins, 520 élèves féminins), et 21 instituts de sourds-muets, dont 10 publics et 11 privés, avec 1870 élèves (1040 élèves masculins, 830 élèves féminins). Le nombre des aveugles en dehors des établissements était de 13445, celui des sourds-muets de 27 828.

6. PERSONNEL ENSEIGNANT PRIMAIRE. — Les fonctions de l'enseignement dans les écoles publiques sont un emploi public auquel peuvent être admis tous les citoyens du pays possédant les capacités légales. La nomination est provisoire ou définitive. La nomination provisoire est faite par le Conseil scolaire de district la nomination définitive, sur la proposition du Conseil scolaire local et la présentation par les personnes ou les communautés qui subviennent en tout ou en partie à l'entretien de l'école, appartient à l'autorité scolaire provinciale. Tout supplément de service en plus des heures règlementaires de leçons doit être rétribué à part. A Vienne, le total hebdomadaire des heures de leçons est de vingt-cinq pour les instituteurs de l'école primaire ordinaire ; pour la Bürgerschule il est de vingt et une pour les maîtres du premier groupe (langue allemande, géographie et histoire), de vingt-quatre pour les maîtres des branches réales: à Trieste, il est de vingt-six pour les instituteurs, de vingt-neuf pour les institutrices, de vingt-quatre pour les maîtres et les maîtresses des Bürgerschulen. Les maîtres ne peuvent se livrer à des occupations accessoires qu'à la condition qu'elles ne puissent pas porter atteinte à leur considération, qu'elles n'empiètent pas sur le temps dû à leurs fonctions, et qu'elles ne soient pas de nature à en contrecarrer l'exercice. Les maîtres ne peuvent pas donner de leçons particulières à des élèves de la classe où ils enseignent. A la campagne, l'instituteur est presque partout organiste. L'insuffisance de son traitement l'oblige, surtout dans les grandes villes, à employer une grande partie de son temps à de fatigantes besognes accessoires (leçons dans des classes complémentaires professionnelles, enseignement de langues étrangères, leçons particulières), en sorte que, dans la plupart des cas, il ne peut pas consacrer la totalité de ses forces à l'école. Tous les instituteurs nommés à titre définitif, ainsi que leurs veuves et leurs orphelins, ont droit à des pensions. La renonciation volontaire à l'enseignement, ou la révocation, font perdre le droit à la pension.

Dans le district scolaire de Vienne, les maîtres et maîtresses nommés à titre définitif sont divisés, au point de vue des traitements, en dix catégories, chaque catégorie comprenant plusieurs degrés (Stufen), comme suit :

1re catégorie : directeurs de Bürgerschule: trois degrés, à 3400, 3200 et 3000 couronnes ;

2e catégorie : directrices de Bürgerschule ; trois degrés, à 3200, 3000 et 2800 couronnes :

3e catégorie ; instituteurs en chef (Oberlehrer) d'école primaire ; trois degrés, à 3000, 2800 et 2600 couronnes ;

4e catégorie : institutrices en chef ; trois degrés, a 2800, 2600 et 2400 couronnes ;

5° catégorie : instituteurs de Bürgerschule de 1re classe ; trois degrés, à 2600, 2400 et 2200 couronnes ;

6° catégorie : institutrices de Bürgerschule de 1re classe ; trois degrés, à 2400, 2200 et 2000 couronnes ;

7e catégorie : instituteurs d'école primaire de 1re classe ; trois degrés, à 2200, 2000 et 1800 couronnes ;

8e catégorie : institutrices d'école primaire de 1re classe ; deux degrés, à 2000 et 1800 couronnes ;

9e catégorie : instituteurs et institutrices de Bürgerschule nommés à titre définitif ; deux degrés, à 1800 et 1600 couronnes ;

10e catégorie : instituteurs et institutrices d'école primaire nommés à titre définitif ; deux degrés, à 1600 et 1400 couronnes.

Dans chaque catégorie, ne peut faire partie de la première classe de traitements que le tiers, au maximum, du personnel de cette catégorie. Dans toutes les catégories, il y a des augmentations quinquennales (Dienstallerszulagen) de 200 couronnes ; on ne peut obtenir que six de ces augmentations au maximum. Les quatre premières catégories ont droit au logement ou à une indemnité représentative, qui est de 1200 à 1000 ou de 1100 à 900 couronnes. Les autres catégories reçoivent une indemnité de logement de 1000 à 240 couronnes. Les instituteurs et institutrices nommés à titre provisoire ont un traitement de 800 couronnes s'ils ont le certificat de maturité de l'école normale, de 1200 couronnes s'ils ont le brevet de capacité.

Le taux des traitements varie d'une province à l'autre ; les divisions en catégories et en degrés sont analogues, mais, sauf quelques exceptions, les chiffres sont inférieurs à ceux de Vienne ; en Tirol, ils descendent jusqu'à 600 couronnes. Les chiffres des pensions de retraite varient également. Dans la Basse-Autriche, les membres du personnel enseignant mis à la retraite avant d'avoir accompli dix années de service n'ont pas droit à une pension, mais simplement à un secours ; ceux qui sont mis à la retraite après dix ans de services touchent comme pension 40 % du traitement, et cette pension s'augmente de 2 % pour chaque nouvelle année de service, en sorte qu'après quarante ans de services la pension est égale à la totalité du traitement. La pension de retraite ne peut pas être inférieure à 800 couronnes. Les veuves et les orphelins d'instituteurs ont également droit à une pension, lorsque le mari ou le père défunt y aurait eu droit lui-même. La pension de la veuve est de 40 % du dernier traitement, et ne peut pas être inférieure à 600 couronnes. Pour chaque enfant du défunt, la veuve reçoit un « secours d'éducation » (Erziehungsbeitrag) égal à un cinquième de sa propre pension, jusqu'à ce que l'enfant ait atteint l'âge de vingt-quatre ans accomplis, à moins qu'il ne soit en état de gagner sa vie avant cet âge ; pour les filles, si elles se marient avant vingt-quatre ans, elles n'ont plus droit à la pension. Le chiffre annuel du secours pour un enfant ne peut pas dépasser 300 couronnes ; la somme de tous les secours d'éducation ne peut pas dépasser le chiffre de la pension de la veuve. Il faut ajouter que la législation relative aux pensions de retraite varie beaucoup selon les provinces, et que la loi de la Basse-Autriche est l'une des plus favorables aux instituteurs.

7. DÉPENSES ET STATISTIQUE DES ÉCOLES PRIMAIRES. — La nature des ressources affectées à l'entretien des écoles primaires varie selon les provinces. Cet entretien est entièrement à la charge de la province en Dalmatie et dans le duché de Salzbourg, à la charge des districts scolaires dans le comté de Goritz, à la charge de la commune en Carniole, en Moravie, en Silésie, dans le Tirol et dans le Vorarlberg ; dans les autres provinces, la commune pourvoit aux dépenses matérielles, les autres dépenses sont à la charge du district scolaire ou de la province. Dans la Basse-Autriche, par exemple, la commune doit construire, installer et entretenir ou louer la maison d'école, le jardin de l'école, la place de gymnastique, le champ d'expériences agricoles', elle doit également meubler, chauffer, éclairer et nettoyer le local de l'école. Les autres dépenses (traitements du personnel enseignant, frais pour l'acquisition du matériel d'enseignement, dotation des bibliothèques de district, etc.) sont (excepté à Vienne) à la charge du fonds scolaire provincial. La rétribution scolaire n'existe qu'en Bohême, en Istrie, en Moravie, en Silésie et dans le Tirol.

En 1896, les dépenses pour les écoles primaires et les Bürgerschulen ont été, en nombre rond, de 90 millions de couronnes, dont 519 684 couronnes ont été fournies par l'Etat, ce qui fait une dépense de 3 couronnes 80 hellers par tète d'habitant.

Les progrès de la race slave en Autriche ressortent des chiffres suivants : en 1860, les élèves se répartissaient ainsi d'après la langue : étrangers, 1 % ; Romans, 3 % ; Slaves, 48 % ; Allemands, 48 % (nombre total des élèves : 1 600 000) ; en 1896, la proportion était la suivante : étrangers, 2 % ; Italiens, 4 % ; Slaves, 54 % ; Allemands, 40 % (nombre total des élèves: 3 400 000), ce qui indique, non que le nombre absolu des élèves allemands ait diminué, mais que l'augmentation a porté surtout sur les élèves slaves.

Dans l'année scolaire 1903-1904, il y avait en Autriche 968 Bürgerschulen publiques, 19 271 écoles primaires élémentaires publiques, et 1035 écoles privées, soit en tout 21 292 écoles. Plus d'un tiers (7590) étaient des écoles à une seule classe ; 5237 avaient deux classes, 2228 en avaient trois, 1499 quatre, 2256 cinq, et 461 avaient plus de cinq classes. Classées d'après la langue d'enseignement, les écoles se répartissaient ainsi : 7944 écoles allemandes, 5320 tchéco-slaves, 2356 polonaises, 2239 ruthènes, 779 Slovènes, 683 italiennes, 504 serbo-croates, 128 roumaines, 3 magyares, et 301 à plusieurs langues. La même année, le personnel enseignant comprenait 57 928 instituteurs, 27 166 institutrices ; ensemble: 85 094. Le nombre des enfants d'âge scolaire était de 4 275 605 ; 3 779 525 fréquentaient une école publique, 128 130 une école privée, 376950 ne fréquentaient aucune école. Il y avait en moyenne 7, 6 écoles par 100 kilomètres carrés, 7, 9 écoles par 10000 habitants, 183, 5 élèves par école, 44, 4 élèves par instituteur ou institutrice ; sur 100 enfants d'âge scolaire, 91, 4 % fréquentaient une école.

C'est dans la Basse-Autriche et dans les provinces des Sudètes que la situation scolaire est la meilleure ; dans la Bukovine, le Littoral, l'Istrie et la Dalmatie, qu'elle est le plus mauvaise. Les renseignements fournis par l'autorité militaire font voir que dans les territoires où l'on parle allemand et tchèque presque toutes les recrues savent lire ; en ce qui concerne les autres provinces, la proportion des illettrés, en 1900, sur 100 personnes âgées de plus de six ans, était la suivante :

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8. LES LEHRERBILDUNGSANSTALTEN. — La préparation professionnelle du personnel enseignant des écoles primaires était, jusqu'à la loi du 14 mai 1869, très insuffisante. Il n'existait, jusqu'alors, que des « cours pour les candidats à l'enseignement » (Präparandenkurse), annexés à ces écoles primaires plus complètes qu'on appelait Normalschulen et Hauptschulen. Ces cours avaient, pour les futurs maîtres des Hauptschulen, une durée de six mois ; pour ceux des Trivialschulen, une durée de trois mois seulement. L'examen de ces derniers était fait par l'ecclésiastique qui avait la surveillance des écoles du district ; c'était lui qui délivrait le certificat de capacité. Au bout d'un an d'exercice pratique dans une école, le candidat subissait un nouvel examen, après lequel il pouvait être proposé pour être nommé instituteur. En 1848, la durée du Präparandenkurs fut portée à un an ; en 1851, à deux ans.

L'acte officiel qui régit les écoles actuelles pour la préparation du personnel primaire, les Lehrerbildungsanstalten, est le statut organique de 1874.

Les Lehrerbildungsanstalten (c'est-à-dire « établissements pour la formation des instituteurs et des institutrices») — qu'on désigne généralement, en français, sous le nom d' « écoles normales », bien que le terme d'école normale (Normalschule), créé, comme on l'a vu, à l'époque de Marie-Thérèse, ait en Autriche une signification historiquement différente de celle qu'il a reçue en France — sont divisés en établissements pour les instituteurs et en établissements poulies institutrices. Chaque établissement comprend dans la règle quatre années d'études ; une école d'application (Uebungsschule) y est annexée, et quelquefois, en outre, une classe préparatoire ; dans les établissements pour les institutrices, on trouve souvent, aussi, un jardin d'enfants et des cours supérieurs pour la préparation de maîtresses d'ouvrages et de « jardinières d'enfants ». Les conditions d'admission aux Lehrerbildungsanstalten sont d'avoir atteint l'âge de quatorze ans pour les filles, de quinze ans pour les garçons ; d'avoir les aptitudes physiques requises pour l'enseignement, et de justifier, par un examen, qu'on possède un certain degré de connaissances, qui correspond aux matières d'enseignement de la Bürgerschule. Le nombre des élèves ne peut pas dépasser cinquante dans la classe préparatoire, et quarante dans les autres classes. L'enseignement est gratuit. Son objet principal est l'étude de la science de l'éducation et de l'enseignement, dont le programme est ainsi défini : faire connaître aux élèves l'homme, ses forces, et les moyens à employer pour leur développement et leur éducation ; les familiariser avec les principes généraux de l'enseignement éducatif en général et, en particulier, de la « méthodique » (Methodik) des différentes matières d'enseignement de l'école primaire élémentaire et de la Bürgerschule ; leur faire étudier les livres de classe en usage dans les écoles primaires, ainsi que divers ouvrages sur la méthode ; leur enseigner les faits essentiels de l'histoire de la pédagogie, avec application spéciale au développement historique de l'école primaire ; leur enseigner la législation scolaire de l'Autriche ; enfin leur faire acquérir la capacité nécessaire pour donner l'enseignement avec l'indépendance convenable (zu einer entsprechenden Selbstständigkeit im Unterrichten) et pour exercer les fonctions scolaires. Les autres matières de l'enseignement sont, dans les établissements pour les instituteurs : la religion, la langue d'enseignement, la géographie, l'histoire, le droit constitutionnel autrichien ; les mathématiques et le dessin géométrique ; l'histoire naturelle, les sciences physiques, l'agriculture avec application aux conditions spéciales du sol du pays ; la calligraphie, le dessin à main libre ; la musique, avec étude spéciale de la musique d'église ; la gymnastique. Dans les établissements pour les institutrices, le droit constitutionnel est supprimé ; les mathématiques et le dessin géométrique sont remplacés par l'arithmétique et l'élude des formes géométriques ; la musique d'église est supprimée également les travaux à l'aiguille sont ajoutés. Là où les circonstances le permettent, les élèves hommes doivent apprendre à connaître les méthodes d'enseignement pour les sourds-muets et les aveugles, l'organisation des jardins d'enfants et celle de l'éducation des enfants abandonnés ; les élèves femmes, l'organisation des jardins d'enfants.

Il existe 68 Lehrerbildungsanstalten appartenant à l'Etat, 17 appartenant à des congrégations et associations catholiques, et 14 appartenant à des communes, à des provinces, ou à des associations laïques. Beaucoup, parmi les établissements qui n'appartiennent pas à l'Etat, ne possèdent pas un personnel enseignant qui leur soit propre, et l'empruntent à d'autres établissements. Au point de vue des nationalités, sur ces 99 établissements, il y en a 55 allemands, 18 tchéco-slaves, 8 polonais, 2 italiens, 2 serbo-croates, et 14 à plusieurs langues. Les dépenses inscrites au budget de 1907 pour les Lehrerbildungsanstalten sont de 5 876 700 couronnes.

Le traitement d'un directeur ou d'une directrice est de 4800 à 5400 couronnes ; celui d'un maître principal (Hauptlehrer) ou d'une maîtresse principale, de 2800 à 4200 couronnes ; celui d'un maître ou d'une maîtresse, de 2200 à 3500 couronnes. A ces traitements s'ajoutent en outre des « suppléments d'activité ».

A la fin de la quatrième année d'études, les élèves des Lehrerbildungsanstalten ont à subir un examen très sérieux conduisant au certificat de maturité, qui leur permet d'obtenir une nomination provisoire. Pour la nomination définitive au poste d'instituteur ou d'institutrice dans une école primaire ordinaire, on exige le brevet de capacité (Lehrbefähigungszeugniss), qui ne peut s'obtenir qu'après deux ans au moins 'exercice satisfaisant dans une école primaire publique, et à la suite de l'examen de capacité (Lehrbefähigungsprüfung). Pour la nomination définitive dans une Bürgerschule, le candidat doit obtenir un diplôme de capacité pour l'enseignement dans les Burgerschulen des matières formant l'un des trois groupes en lesquels les matières du programme sont réparties (1er groupe, langue d'enseignement, géographie et histoire ; 2e groupe, mathématiques, sciences physiques, sciences naturelles ; 3e groupe, mathématiques, dessin à main libre, calligraphie, branches auxquelles s'ajoutent soit le dessin géométrique, soit les sciences physiques). Mais le candidat n'est admis à subir l'examen qu'après un stage pratique tout à fait satisfaisant, d'au moins trois années, dans l'enseignement public. Après trois ans de services, les maîtres nommés à titre définitif obtiennent le titre de professeur. Les instituteurs pourvus du certificat de maturité, et employés dans l'enseignement public, sont dispensés du service militaire actif ; les instituteurs reconnus propres au service militaire reçoivent une instruction militaire d'une durée de huit semaines (pendant les vacances), et ensuite sont appelés à participer seulement à ce qu'on appelle les « exercices d'armes » (Waffenübungen).

Les moyens destinés à permettre aux instituteurs de continuer à s'instruire sont les journaux scolaires, les conférences périodiques et les cours de perfectionnement. Les bibliothèques d'instituteurs sont entretenues en partie par les cotisations des instituteurs

eux-mêmes, la loi prescrivant un prélèvement d'un demi pour cent sur les traitements de tous les membres du personnel enseignant primaire au profit de ces bibliothèques ; elles contiennent, parmi leurs livres, beaucoup d'ouvrages sans valeur et vieillis. Il existe très peu de cours pour la préparation à l'enseignement dans les Bürgerschulen, en sorte que les instituteurs qui veulent se présenter à l'examen du diplôme de capacité sont réduits, pour se préparer, à l'étude personnelle. Les conférences se divisent en conférences locales, conférences de district et conférences provinciales. Les conférences locales, pour les écoles à plusieurs classes, ont lieu tous les mois ; les conférences de district ont lieu une fois par an dans chaque district scolaire ; il y a en outre une conférence annuelle spéciale pour les instituteurs de Bürgerschulen dans chaque district ; les conférences provinciales ont lieu tous les six ans ; peuvent y siéger : les délégués des conférences de district, les inspecteurs scolaires de district, les directeurs des Bürgerschulen. On a remarqué, dans ces dernières années, que l'intérêt pris aux conférences de district est très minime dans beaucoup de provinces, par exemple dans la Basse-Autriche : le motif principal de cette indifférence est que les instituteurs ne se sentent pas suffisamment libres de manifester leurs idées, et que, dans leur opinion, les autorités ne tiennent pas suffisamment compte des voeux qu'ils expriment.

Le personnel masculin des instituteurs se recrute principalement dans les classes pauvres ; les classes aisées envoient leurs fils au gymnase, à la Realschule ou à une école supérieure de commerce. On se plaint de l'insuffisante valeur intellectuelle des élèves des Lehrerbildungsanstalten. Le manque d'instituteurs, résultat du taux trop bas des traitements, se fait sentir encore aujourd'hui. Depuis des années, les instituteurs réclament vainement la promulgation d'un règlement de service (Dienstpragmatik) qui régularise les conditions de l'avancement ; comme le Conseil scolaire local possède le droit de proposition pour la repourvue des places vacantes d'instituteurs, et le Conseil scolaire de district le droit de présentation au Conseil scolaire provincial, les instituteurs sont nécessairement des instruments entre les mains du parti politique dominant, circonstance qui ouvre toute grande la porte au favoritisme, ainsi qu'à l' « arrivisme » servile. Les instituteurs des écoles primaires publiques ne sont pas des fonctionnaires de l'Etat, mais des fonctionnaires communaux : ils sont en conséquence dépendants du parti, dans la commune où ils exercent, qui se trouve en possession du pouvoir.

9. LES ETABLISSEMENTS D'ENSEIGNEMENT MOYEN (MIT-TELSCHULEN). — L'enseignement dit moyen, c'est-à-dire secondaire, se donne en Autriche dans les gymnases et les Realschulen. Les gymnases furent d'abord des écoles latines, au programme desquelles s'ajoutèrent plus tard les éléments de la langue grecque. La propagande du « philanthropinisme » fit ensuite admettre dans ce programme la géographie, l'histoire naturelle, la cosmographie, et même des matières comme le blason et la numismatique. Le plan d'études et la méthode d'enseignement étaient sous tous les rapports insuffisants. Plus tard, il se produisit un partage de ces établissements en deux catégories : dans les uns on conservait, comme base de la culture générale, l'étude des langues anciennes ; dans les autres, on prenait pour bases l'acquisition des connaissances appelées Realien et l'élude des langues littéraires modernes, particulièrement du français et de l'anglais. De là vient que l'enseignement moyen, en Autriche, offre deux sortes d'établissements scolaires, les gymnases et les Realschulen. On a cherché en dernier lieu — avec un succès négatif, il est vrai — à réunir les deux tendances en créant ce qu'on appelle le Realgymnasium ; mais ces nouveaux établissements ont été, pour la plus grande partie, transformés en gymnases en 1878.

Le gymnase et la Realschule doivent, d'une part, donner une éducation complète en son genre, et, d'autre part, préparer à la fréquentation des établissements d'enseignement supérieur, c'est-à-dire soit des universités, soit des écoles techniques supérieures. Les gymnases enseignent, à côté du latin, le grec, la langue maternelle, et, à titre facultatif, encore une langue vivante. Les autres matières sont : les mathématiques, la géographie, l'histoire, l'histoire naturelle, les sciences physiques, la calligraphie, le dessin, le chant, la gymnastique, la religion. Le gymnase a huit classes ; les quatre premières forment le gymnase inférieur (Untergymnasium), les quatre autres le gymnase supérieur (Obergymnasium). Pour être admis, les élèves doivent être âgés de dix ans au moins, et subir un examen d'entrée où ils ont à faire la preuve qu'ils possèdent les connaissances correspondant au programme de la quatrième année de l'école primaire. Les élèves de la huitième classe ont à subir l'examen de sortie (Abiturientenexamen) ou examen de maturité (Maturitätsprüfung), au moyen duquel on doit s'assurer si l'élève s'est assimilé par un travail intellectuel les matières enseignées : cet examen porte donc essentiellement sur les langues et les mathématiques.

Les conditions pour l'admission à la Realschule sont les mêmes que pour l'admission au gymnase. Elle se divise, elle aussi, en deux sections, Unterrealschule (avec quatre classes) et Oberrealschule (trois classes) ; elle a, comme on le voit, une classe de moins que le gymnase. Les langues étrangères enseignées par la Realschule autrichienne sont le français (à partir de la première classe) et l'anglais (à partir de la cinquième). La place accordée par la Realschule aux connaissances dites Realien et à l'enseignement des langues vivantes fait qu'elle est plus fréquentée que le gymnase par les enfants des classes industrielles : de 1881 à 1904, le nombre des élèves des gymnases s'est accru d'environ 11 000, tandis que celui des élèves des Realschulen s'est accru de près de 24000. En 1904, le droit a été accordé aux élèves de la Realschule d'entrer à l'université, pourvu que par l'étude privée ils acquièrent la connaissance des matières enseignées au gymnase, et qu'ils en fassent la preuve par un examen. Les élèves paient une rétribution de 50 couronnes par semestre, mais les élèves distingués peuvent obtenir d'être dispensés de ce paiement.

Les gymnases et les Realschulen, en Autriche, souffrent de plusieurs maladies. On se plaint du manque d'indépendance tant des maîtres que des élèves. Les livres classiques sont d'un niveau trop élevé et le cadre en est trop vaste ; dans le gymnase inférieur, en particulier, on signale du surmenage, qui a pour cause, entre autres, le système des maîtres spéciaux, et le fait que dans cette section du gymnase le caractère scientifique des leçons dépasse très souvent le niveau de l'intelligence des élèves. Dans les grandes villes, surtout à Vienne, les écoles moyennes, spécialement dans leurs classes inférieures, ont un trop grand nombre d'élèves ; et pour parer, dans une certaine mesure, aux inconvénients de cette situation, on se montre envers les élèves d'une sévérité exagérée. Beaucoup de gymnases, en d'autres provinces, par contre, souffrent du manque d'élèves : aussi faut-il, pour apprécier équitablement les résultats de ces écoles de province, les juger avec beaucoup plus d'indulgence que ceux des écoles des grandes villes.

Dans les dix dernières années, il s'est manifesté, en ce qui concerne les écoles moyennes, un mouvement de réforme dont l'intensité est devenue assez grande pour avoir abouti, au printemps de 1908, à une enquête faite par le ministère de l'instruction publique. En même temps ont eu lieu, sous les auspices de la Société impériale-royale de botanique de Vienne, des soirées de discussion consacrées à l'examen de l'enseignement des sciences naturelles dans les écoles moyennes de l'Autriche, soirées où des voeux précis ont été formulés. Ces divers efforts ont conduit à une réforme et à un allégement notable de l’examen de maturité ; il est certain qu'un avenir prochain verra se réaliser une amélioration des plans d'études et la création d'un troisième type d'école moyenne, un Realgymnasium avec latin et français, où une place convenable sera faite à l'étude des sciences naturelles.

Les gymnases et les Realschulen constituent proprement les établissements d'enseignement moyen. Toutefois, le rang d'école moyenne, c'est-à-dire d'établissement dont le certificat d'études assure à leurs élèves le privilège du volontariat d'un an, appartient aussi aux écoles normales, ainsi qu'aux écoles supérieures de commerce et aux écoles officielles d'arts et métiers (voir plus loin). Les directeurs des écoles moyennes de l'Etat reçoivent un traitement de 4200 à 5400 couronnes, ainsi qu'un supplément d'activité de 640 à 2000 couronnes, et un supplément pour fonctions (Funktionszulage) de 1000 couronnes. Les maîtres définitivement nommés (die wirklichen Lehrer) ont le titre de professeurs ; leur traitement à Vienne est de 4000 à 8400 couronnes, dans les provinces de 3200 à 7560 couronnes. Les maîtres n'enseignant que des matières techniques sont appelés maîtres adjoints (Nebenlehrer) ; les candidats qui donnent l'enseignement pendant leur année d'épreuve s'appellent maîtres auxiliaires (Hilfslehrer).

Aux examens pour l'exercice des fonctions d'enseignement dans les écoles moyennes ne sont admis que des candidats munis du certificat de maturité d'un gymnase, et d'un certificat attestant qu'ils ont suivi pendant trois ans au moins, comme auditeurs réguliers, les cours d'une université.

Le nombre des gymnases était, en 1903-1904, de 231 : sur ce nombre, 178 étaient entretenus par l'Etat, 11 par des provinces, 12 par des communes, 19 par des évêques et des congrégations, 10 par des fondations ou des particuliers. Le nombre des Realschulen était de 123 : sur ce nombre, 78 étaient entretenues par l'Etat, 29 par des provinces, 8 par des communes, 1 par un évêque et une congrégation, 7 par des fondations ou des particuliers. Le nombre total des élèves des gymnases était de 78 093, dont 30 111 Allemands, 15 161 Tchéco-Slaves, 10 544 Polonais, 5272 Ruthènes, 3980 Slaves du Sud, 2437 Italiens, 722 Roumains, 143 Magyars, et 123 d'autres nationalités ; au point de vue de la religion, il y avait 63 840 catholiques romains, 1240 catholiques grecs, 1877 protestants, 11946 israélites, et 87 élèves appartenant à d'autres confessions. Le nombre total des élèves des Realschulen était de 41 877, dont 20 350 Allemands, 14 872 Tchéco-Slaves, 3584 Polonais, 253 Ruthènes, 1017 Slaves du Sud, 1597 Italiens, 75 Roumains, 54 Magyars, et 85 d'autres nationalités ; au point de vue de la religion, il y avait 34 375 catholiques romains, 89 catholiques grecs, 1689 protestants, 5661 israélites, et 63 élèves appartenant à d'autres confessions. Dans l'année scolaire 1880-1881, la proportion des élèves allemands dans les gymnases était de 43, 3 % ; en 1903-1904, elle n'était plus que de 38, 9 %: dans les Realschulen, elle a été respectivement de 55, 9 % et de 48, 6 % ; le déplacement dans le pourcentage s'est opéré en faveur des Slaves principalement. Les crédits ouverts au budget de 1907 ont été, pour les gymnases, de 15 605 500 couronnes, et pour les Realschulen de 7 672 126 couronnes.

10. LES ETABLISSEMENTS D'ENSEIGNEMENT SPECIAL ET PROFESSIONNEL. — Ecoles professionnelles. — Pour les apprentis qui n'ont pu suivre le cours d'études de l'école primaire jusqu'au bout, il existe des cours préparatoires professionnels (gewerbliche Vorbereitungskurse) : ce sont des écoles obligatoires, ouvertes le soir et le dimanche matin, dans lesquelles est donné une espèce de cours de répétition des principales matières du programme de l'école primaire ordinaire. Les apprentis qui ont achevé le cours ; d'études de l'école primaire ordinaire sont tenus de fréquenter les écoles complémentaires professionnelles (gewerbliche Fortbildungsschulen), ou les écoles spéciales entretenues par les diverses corporations ouvrières. Il y a, en outre, des écoles professionnelles d'un degré plus élevé, appelées Staatsgewerbeschulen, et d'autres établissements du même genre : on peut les considérer comme des écoles moyennes techniques ; leur tâche est de fournir aux élèves qui se destinent à la construction des bâtiments ou à celle des machines les connaissances spéciales nécessaires, ainsi qu'un degré de culture générale qui permette à l'élève, à sa sortie de l'établissement, d'exercer dans ces professions techniques une activité plus étendue ou d'y occuper un emploi plus élevé, ou même de devenir chefs d'entreprise. Ces écoles se divisent généralement en une section de la technique de la construction, et une section de la technique des machines, comprenant chacune quatre cours d'une année. Les conditions d'admission sont : l'âge de quatorze ans et un certificat constatant que l'élève a fréquenté avec succès la quatrième classe d'un gymnase ou d'une Realschule, ou la troisième classe d'une Bürgerschule. La rétribution scolaire est de 40 couronnes par an ; des élèves pauvres et honnêtes peuvent en être dispensés.

Le nombre des écoles professionnelles du degré inférieur était en 1903-1904 :

a) Ecoles spéciales pour tel ou tel métier, 170, avec 10 519 élèves ;

b) Ecoles professionnelles pour ouvriers, d'un caractère général (allgemeine Handwerkerschulen), 12, avec 1547 élèves ;

c) Cours complémentaires professionnels (gewerbliche Fortbildungsschulen), 1028, avec 106 505 élèves.

Le nombre des écoles professionnelles d'un degré plus élevé était de 25, avec 8603 élèves.

La dépense inscrite au budget de 1907 pour les établissements d'enseignement professionnel a été de 9 935 658 couronnes ; cela fait voir que cet enseignement a été l'objet, dans ces derniers temps, d'une notable sollicitude de la part du gouvernement.

Ecoles commerciales. — Elles sont pour la plus grande partie entretenues par leurs ressources propres, et sont administrées soit par des particuliers, soit par des chambres de commerce ; l'Etat exerce le droit d'inspection. Elles se divisent (1903-1904) en :

A. Ecoles spéciales de commerce du degré inférieur :

a) Entretenues par des organisations publiques, 26, avec 1767 élèves ;

b) Entretenues par des particuliers, 63, avec 8408 élèves.

A ce degré appartiennent encore les écoles complémentaires commerciales (kaufmännische Fortbildungsschulen), au nombre de 160, avec 13 707 élèves.

B. Ecoles de commerce d'un degré plus élevé, ayant rang d'écoles moyennes :

Ecoles d'agriculture et écoles forestières. — Elles se divisent en :

A. Ecoles inférieures :

a) Ecoles d'agriculture, 111, avec 3635 élèves ;

b) Ecoles forestières, 9, avec 330 élèves ;

c) Ecoles d'horticulture, de pomologie, de viticulture, de culture du houblon, et d'apiculture, 23, avec 491 élèves ;

d) Autres écoles, 19, avec 649 élèves.

B. Ecoles moyennes :

a) Ecoles d'agriculture, 15, avec 1174 élèves ;

b) Ecoles forestières, 5, avec 286 élèves. Au total, 182 écoles avec 6565 élèves. Etablissements spéciaux. — On en peut énumérer sept catégories, savoir (1903-1904) :

A. Les écoles inférieures des mines, au nombre de 7, avec 337 élèves ;

B. Les écoles nautiques, 3, avec 149 élèves ;

C. Les écoles d'art vétérinaire et de maréchalerie, 8, avec 664 élèves ;

D. Les écoles de sages-femmes, 15, avec 1054 élèves ;

E. Les écoles d'art musical et dramatique, 780, avec 27 234 élèves:

F. Les écoles de travaux à l'aiguille, 864, avec 25032 élèves ;

G. Autres établissements de diverses natures, 1395, avec 74 228 élèves.

11. ETABLISSEMENTS D'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR (HOCHSCHULEN). — Les premières universités allemandes ont été fondées en 1348, par l'empereur Charles IV, à Prague, et en 1365, par son gendre le duc Rodolphe IV, à Vienne. Elles furent créées sur le modèle de l'université de Paris. Elles comprenaient deux sections, formées, la première, par la faculté des arts, l'autre par les trois facultés supérieures de théologie, de droit canon, et de médecine. A l'origine, c'était la faculté des arts, ou faculté de philosophie, qui représentait l'université au dehors : cette faculté était divisée en quatre « nations », dont les représentants élisaient le recteur. Les auditeurs et les gradués des diverses écoles spéciales dont la réunion s'appelait l'université formaient des corporations, et c'étaient ces corporations qui portaient le nom de facultés ; ce nom, plus lard, fut réservé à l'ensemble des seuls gradués : ce sont ceux-ci qui, jusqu'en 1848, constituèrent la faculté ; quant aux corporations, elles conservèrent jusqu'en 1873 certaines relations avec l'université. A l'époque de la lutte contre la Réforme, ce fut la Compagnie de Jésus, appelée dans le pays par Ferdinand II pour la défense de la doctrine catholique, qui reçut la direction presque exclusive de l'enseignement dans les universités. Celles-ci étaient peu fréquentées, l'enseignement y était déplorable (à la faculté de médecine la clinique était remplacée par des dictées), en sorte que les familles aisées préféraient envoyer leurs fils étudier à l'étranger. Sous le règne de Marie-Thérèse et de Joseph II, la domination des Jésuites fut écartée ; l'enseignement du droit fut réorganisé, mais ce fut surtout dans celui de la médecine que la réforme fut considérable (Van Swieten) ; on cessa de faire les leçons en latin. Sous François II, la réaction cléricale reprit le dessus ; les évêques, dans leurs doléances, déclarèrent « qu'aussi longtemps qu'on laisserait aux maîtres la liberté de penser, et celle d'enseigner les élèves librement, il ne serait pas possible de remédier au mal ». Les Jésuites furent rappelés, et la liberté de l'enseignement disparut ; les progrès de la science du droit s'arrêtèrent, la médecine retomba dans la routine. L'année 1848 inaugura une réforme des universités, en réclamant pour elles la liberté de la pensée et de l'enseignement. Néanmoins, même après cette époque, on ne vit pas de bon oeil, dans les facultés autrichiennes, des professeurs qui ne fussent pas étroitement attachés à l'orthodoxie catholique. Entre 1860 et 1870, il y eut un mouvement tendant à la création, pour l'Autriche, d'une université spécialement catholique. Depuis 1870, la situation s'est améliorée: la position des universités a été relevée, le nombre des chaires a été accru, les études médicales ont été organisées, et le rehaussement de leur valeur scientifique valut aux universités autrichiennes une considération qu'elles n'avaient pas connue autrefois. En 1897, les traitements des professeurs furent augmentés, en sorte que ces traitements sont aujourd'hui supérieurs à ceux des professeurs de la plupart des petites universités allemandes. Toutefois, le parti conservateur n'a pas abandonné ses visées : son but est la fondation d'une université catholique à Salzbourg.

A la tête de l'université est placé le rector magnificus, élu chaque année par le collège des professeurs. Les universités complètes ont quatre facultés, présidées chacune par un doyen : la faculté de théologie, la faculté de droit et de sciences politiques, la faculté de médecine, la faculté de philosophie. Le traitement d'un professeur ordinaire (ordinarius) est de 6400 à 9600 couronnes, plus un supplément d'activité de 1600 couronnes ; celui d'un professeur extraordinaire, de 3600 à 4400 couronnes, avec un supplément d'activité de 1400 couronnes. Pour devenir étudiant régulier, il faut posséder le certificat de maturité du gymnase ; les simples auditeurs doivent être âgés de seize ans au moins, et justifier d'un degré de culture intellectuelle qui leur permette de suivre les leçons avec fruit. Pour être admis aux rigoureux examens du doctorat ou à un examen d'Etat qui suppose des études faites dans une faculté, il faut avoir fréquenté les cours d'une université pendant un nombre déterminé d'années, à savoir : quatre ans pour le doctorat en philosophie, cinq ans pour le doctorat en médecine, quatre ans pour le doctorat en droit. Les cours sont les uns gratuits (publica), les autres payants ; la rétribution à verser par les étudiants pour les cours non gratuits appartient au professeur ou au Privat-Docent (professeur libre). Le minimum de la rétribution, par semestre, est d'autant de fois 2 couronnes 10 hellera que le cours compte d'heures de leçon par semaine ; exceptionnellement, la rétribution peut être réduite de moitié, ou même totalement supprimée, en faveur d'étudiants pauvres, d'une conduite irréprochable et d'une capacité scientifique exceptionnelle.

Les femmes sont admises, tant comme étudiantes régulières que comme auditrices, à la faculté de philosophie, à la faculté de médecine, et aux études de pharmacie.

L'Autriche comptait en 1904 huit universités, placées dans les villes suivantes : Vienne (1365), avec une faculté de théologie évangélique et un institut agronomique (Hochschule fur Bodenkultur) ; Prague (1348), où en 1882 l'établissement a été sectionné en université allemande et université tchèque ; Gratz (1586) ; Cracovie (1364) ; Lemberg (1784) ; Innsbruck (1673) ; Czernowitz (1875). Salzbourg et Olmütz ont l'une et l'autre une faculté de théologie catholique. Le nombre des professeurs, y compris les Privat-Docenten, était de 1690, celui des étudiants et auditeurs de 18 805 ; le nombre des diplômes de doctorat accordés avait été : en théologie, 32 ; en droit et sciences politiques, 774 ; en médecine, 450 (dont 8 à des femmes) ; en philosophie, 218 (dont 10 à des femmes). Aux examens d'Etat pour le droit s'étaient présentés 5327 candidats, dont 4611 avaient été reçus ; aux examens pour le professorat des écoles moyennes, 491 candidats, dont 385 avaient été reçus. Au budget de 1907, le crédit pour les universités a été de 12 559 778 couronnes, plus 465 000 couronnes pour l'Institut agronomique.

Les autres établissements d'enseignement supérieur sont (1903-1904) : I. Les écoles techniques supérieures (technische Hochschulen), au nombre de 7, avec 584 professeurs et 6966 élèves ; ces écoles sont divisées en quatre sections : écoles de génie, d'architecture, de mécanique, et de chimie ; dépenses, 3 973 940 couronnes ; II. Les académies des mines, au nombre de 2, avec 52 professeurs et 346 élèves ; dépenses, 320688 couronnes ; III. Les académies des beaux-arts, au nombre de 3, avec 49 professeurs et 521 élèves ; dépenses, 545 000 couronnes ; IV. L'Académie d'exportation du Musée impérial-royal de commerce, avec 121 professeurs et 134 élèves ; V. Divers établissements technologiques, au nombre de 49, avec 249 professeurs et 1972 élèves.

Dans les universités aussi, les progrès de l'élément slave sont sensibles : car, tandis que la proportion des étudiants de nationalité allemande était, dans le semestre d'été 1881, de 47, 2 %> elle n'était plus que de 42, 3 % en 1904 ; celle des étudiants tchéco-slaves a passé de 16, 7 % en 1881 à 20, 7 % en 1904 ; celle des étudiants polonais, de 16, 2 % à 19, 8 % ; celle des étudiants slaves du Sud de 4, 7 % à 5, 1 % ; celle des étudiants ruthènes, toutefois, s'est abaissée de 5, 3 % a 5, 1 %.

L'ensemble du budget de l'instruction publique s'est élevé, en 1906, à 57 122 392 couronnes.

12. LES NATIONALITES, LEURS REVENDICATIONS ET LEURS CONFLITS. — En terminant, nous dirons quelques mots de la façon dont les diverses nationalités de l'empire ont cherché et cherchent encore à faire prévaloir leurs droits en matière d'instruction publique.

Dans les trente dernières années, de toutes les nationalités de l'Autriche ce sont les Slaves qui, au point de vue politique comme à celui de la culture générale, ont réalisé le plus de progrès. Et parmi les Slaves, ce sont les Tchèques qui tiennent le premier rang.

En 1879, les Tchèques présentèrent à l'empereur un mémoire dans lequel ils réclamaient l'augmentation du nombre des Mittelschulen tchèques, la création d'écoles professionnelles ayant la langue tchèque comme langue d'enseignement, et l'augmentation du nombre des chaires de langue tchèque à l'université de Prague. Le gouvernement se prononça (1881) pour la création d'une université spécialement tchèque, à côté de l'université existante ; cette université tchèque n'eut au début que deux facultés (droit et philosophie), mais elle s'accrut successivement d'une faculté de médecine (1884) et d'une faculté de théologie (1891). La création de l'université tchèque de Prague ne s'effectua pas, d'ailleurs, sans une vive opposition 'de la part des divers partis tchèques, qui voyaient de mauvais oeil l'existence d'une université allemande dans la capitale de la Bohème ; les Tchèques eussent voulu la transformation pure et simple en université slave de la vieille université allemande de Prague. Il existe donc désormais à Prague deux universités, chacune avec un caractère national prononcé. Mais les revendications des Tchèques s'étendent bien au delà de ce qu'ils ont obtenu jusqu'à présent. Depuis 1890 ils réclament la création d'une seconde université tchèque, pour la Moravie. Le gouvernement n'a pas accédé à ce désir, mais a créé, en compensation, une technische Hochschule tchèque à Brünn ; ce qui n'empêche pas les Tchèques de poursuivre leur propagande en vue de l'établissement d'une université slave en Moravie. — C'est surtout dans le domaine de l'enseignement moyen que les succès des Tchèques sont considérables. Dans les trente dernières années, plus de trente Mittelschulen tchèques sont devenues des établissements de l'Etat ; et, d'autre part, lé nombre des Mittelschulen allemandes en territoire de langue tchèque va constamment en diminuant. A la tête de ce mouvement se trouve l'Association scolaire tchèque, qui établit de préférence les écoles qu'elle fonde dans les villes où elle peut espérer voir, dans un prochain avenir, la majorité allemande supplantée par une majorité tchèque. Les gouvernements provinciaux favorisent ce mouvement de toutes leurs forces. En 1895, la langue tchèque a été inscrite comme branche obligatoire d'enseignement dans les Realschulen allemandes de la Moravie, en remplacement de l'anglais. — Sur le terrain de l'enseignement primaire, le mouvement d'expansion des Tchèques tend, dans les territoires où les deux langues se trouvent en présence, à limiter le nombre des écoles allemandes sans égard à l'importance proportionnelle de la population germanique, et à augmenter celui des écoles tchèques ; à Vienne, il réclame pour l'école tchèque privée qui y a été fondée (l'école Komensky, dans le Xe arrondissement) le droit d'être reconnue comme école publique. Les instituteurs et employés municipaux de la ville de Prague sont tenus d'envoyer leurs enfants dans les écoles tchèques. Sous cette pression, le nombre des élèves des écoles allemandes diminue : celles de Prague, qui avaient en 1891-1892 3791 élèves, n'en avaient plus que 3270 en 1895-1896. — La propagande tchèque s'étend jusqu'aux asiles : les établissements tchèques de cette catégorie sont soutenus de toute façon, pendant qu'on oppose aux établissements allemands des obstacles de tout genre. — En 1904, il a été créé dans les Lehrerbildungsanstalten de Troppau et de Teschen, en Silésie, où l'enseignement se donne en langue allemande, des classes parallèles tchèques. — Les succès des Tchèques dans le domaine de l'enseignement professionnel ne sont pas moins grands. .

Les Polonais, qui ont obtenu, depuis une quarantaine d'années déjà, l'hégémonie politique en Galicie, l'ont exercée au profit de leur nationalité : néanmoins leurs progrès, sur le terrain scolaire, ont été plus lents que ceux des Tchèques. La politique d'expansion nationale des Polonais se fait, dans la Silésie orientale, aux dépens des Allemands, et dans la Galicie orientale aux dépens des Ruthènes. Les gouvernements provinciaux obéissent aux volontés du Club polonais du Reichsrath, et de la majorité du Landtag de Galicie. C'est ainsi qu'à Teschen (Silésie) il a été fondé un gymnase polonais, et qu'à la Lehrerbildungsanslalt de cette ville il a été créé (1904), outre les classes parallèles tchèques, des classes parallèles polonaises. A l'égard des Ruthènes, les Polonais ont procédé avec une méconnaissance complète des droits d'une population qui ne parle pas leur langue : dès 1880, un député ruthène se plaignait qu'aucune des nationalités de l'empire ne fût traitée avec autant d'injustice, dans le domaine de l'instruction publique, et ne fût aussi arbitrairement privée de ses droits, que la nationalité ruthène ; et aujourd'hui encore la situation n'a pas beaucoup changé à cet égard.

Les Slovènes et les Croates ont cherché, en se mettant toujours au service du parti qui occupait le pouvoir, à s'assurer quelques avantages dans le domaine scolaire. Mais les conditions géographiques des Slovènes sont si défavorables (ils sont dispersés sur le territoire de quatre provinces différentes : la Carinthie méridionale, la Styrie méridionale, la Carniole et le Littoral), et ils sont, au point de vue économique, tellement sous la dépendance des Allemands, qu'ils n'ont pu conquérir jusqu'à présent aucun avantage appréciable ; et même, dans les provinces, la Carinthie et la Styrie, où les deux langues sont en présence, et où les Slovènes se trouvent en minorité, on peut plutôt constater un recul de l'élément slovène. En outre, la propagande nationale est rendue plus difficile à ce rameau, d'ailleurs très intelligent et bien doué, du tronc slave, par cette circonstance que sa littérature est encore très peu développée. Il n'y a pas bien longtemps qu'il n'existait guère, en langue slovène, d'autres livres d'école que le catéchisme, et les prêtres Slovènes, dont l'esprit national est très prononcé, se plaignaient que les enfants n'arrivassent pas même à lire convenablement ce livre unique. Aussi les divers gouvernements qui se sont succédé dans ces dernières années n'ont-ils guère pu donner satisfaction aux voeux de cette intéressante nationalité, en particulier en ce qui concerne les Mittelschulen, et créer en ce domaine des établissements spécialement Slovènes. L'administration scolaire s'est contentée d'introduire des classes parallèles avec double classe d'enseignement, où une partie des branches sont enseignées en allemand et les autres en slovène. — Des circonstances analogues ont également empêché, chez les Croates, le développement de l'enseignement. En Dalmatie, en 1900, sur une population d'environ 600000 habitants, il n'y avait que 42808 enfants qui fréquentaient une école publique. En Istrie et dans les îles du Quarnero, la population croate est également très arriérée au point de vue de l'instruction. Toutefois les Croates peuvent enregistrer quelques succès dans le domaine de l'enseignement moyen, car ils sont parvenus, en Dalmatie, où les gymnases étaient autrefois exclusivement italiens, à les « croatiser » tous, à l'exception d'un seul.

Les procédés dont l'administration de l'instruction publique a usé à l'égard des Italiens ont certainement contribué beaucoup à accroître le mécontentement parmi les populations appartenant à cette nationalité. Tandis que le gouvernement, dans les territoires tchèques, laissait péricliter les écoles allemandes, il créait aux frais de l'Etat des écoles primaires allemandes à Trente (Tirol méridional) et à Trieste ; par contre, il refusait à la ville de Trieste, qui voulait créer à ses propres frais une école normale italienne, l'autorisation nécessaire. L'autorité a pris également une attitude hostile à l'égard de la propagande faite dans les populations italiennes en faveur de la fondation d'une université italienne à Trieste. Le gouvernement n'a voulu consentir qu'à la création de quelques chaires de langue italienne à la faculté de droit de l'université d'Innsbruck, ce qui devint l'occasion de conflits permanents entre les étudiants allemands et les étudiants italiens. Le gouvernement projeta ensuite la création d'une faculté italienne de droit à Rovereto (Tirol méridional) ; mais ce plan échoua. Enfin il se décida à ouvrir une faculté italienne de droit à Innsbruck même (septembre 1904) ; mais le jour de l'ouverture il se produisit, entre étudiants allemands et étudiants italiens, de telles scènes de violence, que la nouvelle faculté dut être fermée. Dans le Littoral, où la moitié de la population est italienne, sur les sept gymnases cinq sont allemands, un croate, et un seul est italien. Les Italiens se plaignent tout particulièrement que le gouvernement favorise à leurs dépens l'élément slave.

Enfin, les Roumains de la Bukovine croient aussi avoir à se plaindre du gouvernement, qui ne leur accorde pas la situation à laquelle ils estiment avoir droit.

Bibliographie. Jahrbücher der k. k. statistischen Zen-tralkommission in Wien. Akademische Gesetze und Verordnungen, zusammengestellt vom akademischen Senate der k. k. Universität in Wien. — Normaliensammlung für Gymnasien und Realschulen, von Dr Edmund Ritter von MARENZELLER. — LANDSTEINER'S Sammlung von Gesetzen'und Erlässen, betreffend das Volksschulwesen. — Josef Alexander Freiherr von HELFART, Die Österreichische Volksschule, Geschichte, System, Stalistik. Stalistischer Atlas von Professor A.L. HICKMANN. — Geschichte des Österreichischen Unterrichtswesens von Gustav STRAKOSOH-GRASSMANN. — Enzyklopädisches Handbuch der Erziehungskunde, von Schulrath Dr Gustav Adolf LINDNER.

Franz Roider