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Aporti (Ferrante)

Fondateur des salles d'asile en Italie, surnommé par ses compatriotes le Père de l'Enfance (il Padre dell' Infanzia).

Ne le 20 novembre 1791 à San Martino dall' Argine, petite ville de la province de Mantoue, et dès son enfance destiné au sacerdoce, il devint prêtre, et fut appelé à des fonctions d'enseignement.

Ayant été chargé de surveiller les écoles de Crémone, alors qu'il occupait la chaire d'histoire ecclésiastique au séminaire de cette ville, il se livra à l'étude approfondie des besoins physiques, moraux et intellectuels de l'enfance, et dès lors le pédagogue se révéla en lui. L'Italie possédait alors un nombre infini de petites écoles (scuole di piccoli fanciulli) ; mais ces écoles, confiées à des femmes ignorantes, n'étaient que de simples garderies, dans lesquelles les enfants n'étaient préservés des dangers de la rue que pour être exposés aux dangers presque aussi grands d'un régime malsain pour leur corps, de notions fausses pour leur esprit, et souvent de principes funestes pour leur coeur.

Aporti, convaincu, comme tous les vrais pédagogues, que l'éducation doit commencer dès le berceau, ne tarda pas à arrêter dans son esprit le plan de cette éducation préparatoire dont il voulait faire précéder celle de l'école proprement dite, et il se décida à en faire l'essai dans une petite école pour les enfants riches qu'il ouvrit à Crémone le 15 novembre 1827.

La méthode était déjà celle qu'une longue expérience a fait adopter partout aujourd'hui : développement du corps, grâce à un régime sain et réglé, à des récréations plus longues que les heures de travail, à des exercices gymnastiques appropriés à l'âge des enfants ; formation du coeur par de bons exemples et de sages préceptes, d'autant plus efficaces qu'ils étaient donnés aux enfants en toute occasion et presque à leur insu ; culture de l'esprit par un enseignement maternel, raisonné, en rapport avec les capacités intellectuelles des élèves, et qui souvent revêtait la forme d'un jeu plutôt que celle d'une leçon.

En un mot, sauf que la leçon de choses, moins développée que de nos jours, se réduisait à de simples nomenclatures et à des classifications d'objets, c'était la méthode des écoles maternelles qu'Aporti inaugurait dès 1827, alors que les Infants' schools n'avaient encore que quelques années d'existence en Angleterre, et que les salles d'asile proprement dites étaient à peine connues en France.

Le succès couronna pleinement cette première tentative. Loués par les meilleurs journaux d'éducation de l'époque, la méthode nouvelle et les plans d'Aporti furent approuvés du gouvernement de Milan par décret du 3 août 1829, et bientôt les enfants du peuple furent à leur tour recueillis, nourris et judicieusement préparés pour les écoles primaires, à Crémone d'abord, puis à San Martino, patrie d'Aporti. Pise, Lucques, Livourne, Prato, Florence, Naples, les Etats de l'Eglise, Milan, Venise, etc., suivirent cet exemple et ne tardèrent pas à avoir leurs écoles enfantines.

Non content d'avoir publié, en 1833, un Manuel destine à servir de guide aux instituteurs de la première enfance, Aporti, toujours actif et toujours plus ardent pour une oeuvre dont les résultats se faisaient déjà apprécier, employait les loisirs que lui laissaient ses autres travaux à visiter les divers asiles, à y répandre les lumières de son expérience, et à en assurer la prospérité par ses conseils et ses encouragements.

En 1844, sur l'appel du gouvernement piémontais, Aporti fit à Turin, dans le palais de l'université, un cours destiné à répandre les bonnes méthodes pédagogiques ; et, après les évènements de 1848, il se fixa définitivement dans cette ville.

A la fin de 1849, le roi Victor-Emmanuel, voulant assurer encore davantage à son pays le secours des lumières d'Aporti, l'appela à la dignité de sénateur. Aporti ne parut au sénat que lorsque les circonstances lui en firent un devoir ; toutefois il sut profiter de sa haute position pour intéresser à la cause des écoles enfantines les personnages les plus influents, notamment le comte de Cavour, qui, après avoir favorisé ces établissements durant sa vie, leur légua à sa mort une somme de 50 000 francs.

Nul en Italie ne s'était autant qu'Aporti occupé de l'instruction publique à tous les degrés, nul n'avait mieux compris les vices à y corriger, les réformes à y introduire ; aussi, lorsque la présidence de l'université de Turin devint vacante en 1855, Aporti se trouva-t-il tout naturellement désigné au choix du gouvernement.

Cette nomination fut saluée par les acclamations de tous ceux qui, à juste titre, nommaient déjà Aporti non seulement le Père de l'enfance, mais encore celui de la jeunesse studieuse. Malheureusement, cette joie ne devait pas être de longue durée ; le 14 novembre 1858, Aporti fut frappé d'apoplexie, et le 29 du même mois cet homme de bien avait cessé de vivre.

Le principal ouvrage d'Aporti (à part ses écrits théologiques ou religieux) est le Manuale per le scuole infantili, publié à Crémone en 1833, plusieurs fois réédité depuis. Aporti a publié aussi un Sillabario per l'Infanzia (Crémone, 1837).

Marie Dosquet