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Anormaux (Enfants)

La loi du 28 mars 1882 dit dans son article 4 que « l'instruction primaire est obligatoire pour les enfants des deux sexes âgés de six ans révolus à treize ans révolus ». Mais il est une catégorie d'enfants à qui, jusqu'ici, la loi n'a pas été appliquée : ce sont les sujets qui, soit au point de vue physique, soit au point de vue intellectuel ou moral, ne se trouvent pas dans des conditions normales pour recevoir l'enseignement commun.

Ces enfants, qui ne peuvent être suffisamment instruits à l'école publique par les procédés pédagogiques ordinairement employés pour les élèves pourvus de tous leurs sens et doués d'une intelligence moyenne, sont désignés sous le nom générique d'enfants anormaux. Ce sont :

1° Les aveugles : sujets privés de la vue, soit totalement, soit dans des proportions qui leur rendent impossible la lecture et l'écriture des clairvoyants normaux ;

2° Les sourds-muets : sujets privés de l'ouïe, soit totalement, soit dans des proportions qui ne leur permettent pas d'acquérir, par l'audition, le langage spontané des entendants-parlants normaux ;

3° Les idiots, crétins, imbéciles, épileptiques, hystériques, choréiques, paralytiques, hémiplégiques, etc., ainsi que les imbéciles moraux, sujets atteints de perversion des instincts ; ces enfants, qui ne peuvent être soignés et éduqués collectivement que sous la responsabilité du médecin, sont désignés pour cette raison sous le nom d'anormaux médicaux ;

4° Les arriérés : sujets qui, sans pouvoir être classés dans la catégorie des anormaux médicaux, sont en état de débilité mentale, ne possèdent qu'une intelligence ou qu'une responsabilité atténuées, ne leur permettant pas d'acquérir, à l'école commune et parles méthodes ordinaires d'enseignement, la moyenne d'instruction primaire que reçoivent les autres élèves ;

5° Les instables : enfants affectés d'une incohérence de caractère, d'un manque d'équilibre mental qui leur rendent insupportable la discipline générale et nécessitent absolument leur éloignement de l'école publique.

Ne doivent pas être considérés comme anormaux les enfants qui sont restés plus ignorants que les autres parce qu'ils ont été retardés dans leurs études pour des causes indépendantes de leur état mental, comme par exemple la non-fréquentation scolaire, les absences réitérées, etc.

La classification qui précède a été établie par une commission spéciale nommée en 1904 par le ministre de l'instruction publique, sur la demande de M. Léon Bourgeois, « à l'effet d'étudier les conditions dans lesquelles les prescriptions de la loi du 28 mars 1882 sur l'obligation dé l'enseignement primaire pourraient être appliquées aux enfants anormaux des deux sexes ».

Sur la proposition de MM. Ferdinand Buisson et Tournade, députés, la loi de finances de 1906 décida que « les traitements et suppléments de traitement légaux dus aux instituteurs et institutrices publics attachés aux classes publiques destinées aux enfants sourds-muets ou aveugles seraient désormais à la charge de l'Etat dans les conditions déterminées par les lois des 19 juillet 1889 et 24 juillet 1893 ».

Le 29 juin 1908, la Chambre a adopté un projet de loi ayant pour objet la création de classes et d'écoles de perfectionnement pour les enfants arriérés.

Les enfants anormaux cessent donc d'être tenus en dehors des lois scolaires. C'est une ère nouvelle qui s'ouvre pour la réforme ou plutôt pour la création méthodique d'un enseignement national en faveur des enfants qui ont le plus de titres à la sollicitude de la nation. On trouvera aux articles Arriérés (Enfants), Aveugles, Sourds-muets, Idiots et crétins, les renseignements concernant chacune des catégories d'enfants anormaux. Voir aussi Assistés (Enfants).

Gustave Baguer