La 6ème Biennale

Contribution recherchée

Atelier : L'insertion objet de demande ou d'assignation ? Décrochage : comment raccrocher ?


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Titre : Du sujet épistémique au sujet de l'histoire dans l'école française : quel cadre conceptuel ?
Auteurs : BELHANDOUZ Halima / CARPENTIER Claude

Texte :
L'émergence du sujet, trait majeur des sociétés modernes, est soulignée à divers titres par de nombreux auteurs (Mauss, Elias, Taylor...). C'est dans ce contexte que la loi d'orientation de 1989 (parallèlement aux dispositifs analogues dans d'autres pays) place l'élève au centre du système éducatif français. Mais il ne s'agit encore que d'un sujet épistémique sans véritable assise historique et sociale, dans une tradition républicaine peu portée à valoriser l'hétérogénéité culturelle.
Récemment, et alors que les statistiques officielles émanant du ministère de l'Éducation nationale ne font état de cette hétérogénéité qu'à travers la catégorie juridique de l'étranger, certains travaux, en France, ont introduit la dimension de l'histoire du sujet social et culturel dans le rapport au savoir (Charlot, Bautier, Rochex). Cette dimension s'exprime dans le registre sémantique de l'"immigration" ou de populations "issues de l'immigration" (Payet, Tribalat, Vallet) ou de ses variantes euphémisées (banlieue, quartiers...). Se manifeste ainsi la difficulté épistémologique à maîtriser l'hétérogénéité des paradigmes qui organisent le discours relatif à l'objet "immigration" (entrées ethnique, juridique, linguistique, religieuse...).
Il nous semble que la notion d'"immigration", polysémique selon qu'elle s'exprime ou non dans le registre de l'héritage colonial, reste marquée par les intérêts sociaux de la société française (De Rudder, Léger). En accordant une place nouvelle à la notion d'"émigration" dans le processus migratoire, nous souhaitons mettre l'accent sur une double exigence :
- celle de prendre en compte le moi historicisé construit dans un rapport à un "Nous localisé" souvent mythifié et différent de l'histoire sociale française métropolitaine ;
- celle d'articuler cette réalité sur le vécu en France, qui n'est déjà plus, pour beaucoup des sujets concernés, "un pays d'accueil".
C'est donc dans ce contexte de transculturation marqué des ruptures que l'on sait : passage du "communautaire" au "sociétaire", crise d'identité dans les générations, brouillage des repères, disqualification du passé et de l'autorité... qu'il nous semble important de mettre en place un questionnement portant sur la nature des outils conceptuels et des paradigmes à la disposition de l'institution scolaire pour appréhender les trajectoires, notamment scolaires de ces sujets porteurs d'histoires complexes et croisées avec l'histoire officielle française.
C'est cette démarche que nous avons cherché à mettre en oeuvre dans l'étude par questionnaires et entretiens de deux populations dites de l'immigration dont il a fallu construire de toute pièce la configuration empirique pour les raisons qui viennent d'être énoncées (celle constituée par la filiation "harkie" et celle des raccrocheurs scolaires). Il nous appartiendra d'étendre à d'autres contextes et d'approfondir ce type d'investigation, notamment dans une perspective comparative (Etats-Unis, Canada, Afrique du Sud).

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