Biennale 5
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Selon le modèle sociocognitif, les cognitions et les perceptions des élèves relativement à leur propre personne, aux tâches scolaires et au contexte d’apprentissage agissent en tant que médiateurs de leur comportement et expliquent en grande partie comment ces derniers s’ajustent à leur environnement social et scolaire. L’approche des attentes et de la valeur (expectancy-value), d’inspiration sociocognitive, comprend deux composantes principales : les attentes de succès et la valeur attribuée aux matières et aux tâches scolaires. La composante "attentes" fait référence aux croyances de l’élève quant à sa capacité de réussir ses entreprises scolaires. La composante valeur correspond à l’intérêt de l’élève pour les activités scolaires ainsi qu’aux liens qu’il établit entre ces activités et les buts personnels qu’il poursuit.

Auteur(s) : CHOUINARD Roch

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bull2.gif (117 octets)   S’inspirant du modèle sociocognitif, l’auteur a développé et expérimenté un programme d’intervention comprenant différentes stratégies pédagogiques destinées à aider les enseignants des ordres primaires et secondaires à agir positivement sur les attentes de succès de leurs élèves et sur la valeur que ces derniers accordent aux activités que leur propose l’enseignant. Ces stratégies sont les suivantes : dispenser une information pédagogique de qualité, offrir des choix et des options, faire voir le sens et l’utilité des apprentissages, encourager la fixation de buts et d’objectifs personnels, favoriser le maintien d’attributions énergisantes. L’expérience sur le terrain, menée dans une vingtaine de classes d’élèves du secondaire de la région de Montréal, a montré l’efficacité de ce programme sur la motivation et le rendement des élèves. Le texte qui suit fait état des principes et des considérations théoriques sur lesquelles s’appuie le programme.
bull2.gif (117 octets)  Dispenser une information pédagogique de qualité
bull2.gif (117 octets)  Selon Ellis et Friend (1991), une information pédagogique de qualité contient des éléments relatifs aux…
- aux objets d’apprentissage, c’est-à-dire les différents contenus notionnels à l’étude, à leur place les uns par rapport aux autres ainsi que leur importance relative;
- aux objectifs d’apprentissage, c’est-à-dire les comportements attendus et le niveau de rendement à atteindre relativement aux différents objets d’apprentissage; il ne s’agit pas nécessairement des formulations utilisées dans les programmes d’études mais plutôt d’énoncés simples, accessibles aux élèves;
- à la démarche d’enseignement / apprentissage, c’est-à-dire les différentes activités pédagogiques destinées à favoriser l’atteinte des objectifs d’apprentissage visés;
- à la durée, c’est-à-dire le temps approximatif prévu pour atteindre les objectifs d’apprentissage ou pour réaliser les activités qui leur sont associées;
- à la démarche d’évaluation, c’est-à-dire le quand, le comment et le pourquoi de l’évaluation de l’atteinte des objectifs d’apprentissage, ainsi que le niveau de d’apprentissage attendu et les enjeux en cause.
bull2.gif (117 octets)  Selon Archambault et Chouinard (1996), les interventions pédagogiques destinées à informer les élèves devraient aussi rencontrer certaines conditions afin d’être efficaces.
- Certaines informations doivent être écrites. On ne peut en effet s’attendre à ce que les élèves apprennent par cœur les informations qu’on leur dispense. Les élèves doivent avoir accès à ces informations lorsqu’ils en ont besoin pour faire le point, se situer, planifier leur travail, effectuer des rajustements et soutenir leur attention. Pour ce faire, on peut remettre des informations écrites concernant le contenu notionnel et les liens qui relient les différentes notions. On peut aussi ajouter les principaux objectifs à atteindre et annoncer les contenus notionnels, les activités d’apprentissage et les comportements spécifiques attendus (en les inscrivant au tableau, par exemple).
- L’enseignant doit médiatiser les informations. Il ne suffit pas de remettre des grilles ou des schémas aux élèves ou d’inscrire les contenus de cours au tableau. Il faut en plus que l’enseignant utilise lui-même fréquemment et de façon explicite ces supports devant sa classe, en faisant valoir leur utilité. Cette façon de faire permet aux élèves d’apprendre à se servir de ces supports et, surtout, elle augmente leur motivation à les utiliser alors qu’ils constatent que l’enseignant y recourt lui aussi.
- Les périodes d’information doivent être brèves mais fréquentes. Les élèves ont besoin d’être informés de façon systématique et régulière. Cependant, on doit être concis et s’en tenir aux éléments importants si on veut éviter de générer l’ennui. Il est difficile d’être bref lorsqu’on informe les élèves de façon irrégulière. On doit alors donner beaucoup de détails afin que le contenu soit porteur de sens.
- Les informations doivent être cohérentes. Il importe que les informations données aux élèves soient en cohérence avec les activités d’apprentissage et d’évaluation. Faire appel aux expériences de la vie quotidienne des élèves ou à des thèmes qui les préoccupent lors d’une mise en situation aura pour effet de susciter l’intérêt et de faciliter la tâche en autant que le sujet de la mise en situation soit en relation directe avec les objectifs poursuivis. Faire croire aux élèves par exemple que la tâche consiste à lire un texte sur l’ours polaire, alors qu’il s’agit en réalité d’acquérir des connaissances grammaticales, peut agir négativement non seulement sur l’acquisition des connaissances mais aussi sur la motivation à apprendre, la crédibilité des informations reçues et l’utilité des tâches scolaires. Il est préférable, selon les experts dans le domaine, de donner l’heure juste (Frase, 1975).
bull2.gif (117 octets)  Offrir des choix et des options
bull2.gif (117 octets)  Spaulding (1992) propose des pistes d’intervention favorisant le maintien de l’équilibre entre le besoin d’autonomie et le besoin de réussite des élèves. Elle distingue tout d’abord l’option, faculté de choisir entre deux ou plusieurs choses et le choix proprement dit, plus ouvert. Elle distingue ensuite les options et les choix portant sur les procédures et ceux portant sur le contenu. Les options et les choix relatifs aux procédures concernent la manière de faire les choses alors que les choix relatifs au contenu portent sur la nature des activités pédagogiques. Finalement, elle situe les options et les choix dans un contexte individuel ou dans un contexte social.
bull2.gif (117 octets)  Ce modèle a l’avantage de permettre à l’enseignant d’adapter le degré d’autonomie qu’il pourra accorder à sa classe. Ainsi, selon l’âge, la maturité, le niveau de socialisation et l’habitude des élèves à se prendre en charge, l’enseignant leur offrira des options ou des choix, portant sur les procédures ou le contenu et faisant appel ou non à la coopération. Les options sur les procédures dans un contexte individuel sont à la portée de la plupart des élèves alors que les choix relatifs au contenu dans un contexte social sont plus difficiles à assumer. En effet, ces derniers font appel à une connaissance plus grande de la matière et des activités d’apprentissage ainsi qu’à des compétences sociales plus développées. Entre ces deux extrêmes, l’enseignant peut déterminer le niveau d’autonomie qui convient le mieux à sa classe.
bull2.gif (117 octets)  Faire voir le sens et l’utilité des apprentissages
bull2.gif (117 octets)  Plus les élèves avancent en âge et plus il s’interrogent sur l’utilité et la pertinence des matières et des activités scolaires. Les enseignants du secondaire rapportent que des questions à ce sujet leur sont souvent posées. Dès le primaire en fait, ces questions deviennent préoccupantes pour les élèves. La réaction de l’enseignant et la réponse qu’il donne alors peuvent avoir des conséquences importantes ; s’il paraît ennuyé ou s’il ne parvient pas à formuler une réponse satisfaisante, les élèves en concluront peut-être que la matière ou l’activité en cause ne sert qu’à passer le temps ou qu’à satisfaire aux besoins de l’école, mais non aux leurs.
bull2.gif (117 octets)  De toute évidence, légitimer une matière ou une activité par sa présence à l’horaire ou au curriculum ne constitue pas une réponse satisfaisante, pas plus que de se contenter d’annoncer qu’elle pourrait faire l’objet d’une évaluation ou qu'elle est nécessaire à la promotion. Il n’est pas toujours pertinent non plus de s’en remettre à une possible utilité dans le futur (“ Un jour, vous verrez à quoi ça sert ” ou encore “ Plus tard, si vous faites tel ou tel métier, vous vous servirez de ce que je vous montre en ce moment ”). Le problème avec ce genre de justification est qu’à leur âge, la plupart des élèves ne se projettent pas très loin dans le futur et que leurs choix professionnels restent à faire.
bull2.gif (117 octets)  Comment alors faire valoir la pertinence des matières et des activités scolaires ? Selon Archambault et Chouinard (1996), au lieu de s'en remettre à une hypothétique utilité dans le futur, il est préférable d’indiquer simplement aux élèves la fonction générale des apprentissages qu’on leur propose, en leur précisant à quoi ils servent et à qui ils sont utiles. Ensuite, on peut expliquer aux élèves que bien que certains apprentissages scolaires ne sont que de peu d’utilité dans la vie de tous les jours, cela ne signifie pas pour autant que ces apprentissages ne servent à rien, que plusieurs apprentissages ont pour fonction principale de préparer à acquérir plus tard d’autres connaissances dont l’utilité est plus évidente. Les apprentissages de cette nature peuvent tout à fait avoir du sens pour les élèves, à la condition bien sûr de rendre explicites les liens qui les unissent avec les apprentissages auxquels ils préparent. Il importe aussi de faire réaliser aux élèves que les apprentissages effectués dans une matière sont transférables et servent à acquérir des connaissances dans d’autres matières ; que les stratégies de lecture apprises en classe de français, par exemple, sont utiles lors du traitement de l’information contenue dans les textes des autres matières ou bien que la lecture et la construction de diagrammes à bandes, abordées en mathématiques, sont indispensables dans plusieurs autres disciplines.
bull2.gif (117 octets)  De façon générale, il s’agit d’aller au devant des questions des élèves et de leur faire voir la pertinence des matières et des activités scolaires. Il faut éviter avant tout que l’école ne devienne pour eux un monde dissocié de leur réalité, qui ne nourrit que ses propres intérêts, sans se soucier des besoins de ceux pour qui elle existe.
bull2.gif (117 octets)  Encourager la fixation de buts et d’objectifs personnels
bull2.gif (117 octets)  L’établissement de buts et d’objectifs à atteindre à court, moyen et long termes est un aspect important de la motivation scolaire. Les jeunes enfants poursuivent surtout des objectifs à court terme et entretiennent souvent des buts à long terme fantaisistes, mais plus ils avancent en âge, plus ils deviennent capables d’élargir leur perspective future. Certains élèves toutefois négligent de se fixer des objectifs spécifiques à court terme et se contentent de buts généraux. De plus, plusieurs adolescents du secondaire entretiennent encore des buts à long terme irréalistes et d’autres ne semblent avoir que peu de perspective quant à leur avenir (Ames et Ames, 1991).
bull2.gif (117 octets)  Il est possible et utile d’aider les élèves à se fixer des buts et des objectifs. Les efforts en ce sens peuvent s’avérer très productifs en ce qui concerne la motivation et la persévérance scolaires. Pour ce qui est des objectifs à court terme, un premier type d’intervention consiste à encourager les élèves à se situer en utilisant, par exemple, des instruments sur les quelles ils inscrivent leurs objectifs d’apprentissage. Une deuxième façon d’intervenir consiste à remettre aux élèves une grille leur permettant de consigner leurs résultats aux différentes tâches effectuées pendant une période de temps donnée. Les études sur le sujet démontrent que la consignation par les élèves peut être particulièrement efficace dans le cas de ceux qui désirent réussir mais qui ont de la difficulté à initier ou à contrôler les comportements nécessaires (Stipek, 1993).
bull2.gif (117 octets)  Un autre type d’intervention consiste à encourager les élèves à se fixer un objectif de rendement avant les examens et de comparer par la suite cet objectif au résultat obtenu. Cette façon de faire possède l’avantage d’aider les élèves qui ont tendance à sous-estimer ou à surestimer leur compétence à se réajuster en effectuant une évaluation plus juste des efforts qu’ils devront déployer. Les objectifs de l’élève doivent cependant être réalistes pour qu’il puisse constater des progrès. Il est donc préférable, au début, d’encourager le choix d’objectifs modestes et d’augmenter graduellement les seuils de rendement (Stipek, 1993).
bull2.gif (117 octets)  Finalement, il est souhaitable aussi d’aider les élèves à se fixer des buts à long terme en relation avec leur formation scolaire. La majorité des élèves du primaire et du secondaire ont des conceptions incomplètes ou erronées de la vie d’adulte autonome et du monde du travail. Ils possèdent aussi peu d’information sur les différents programmes de formation et sur les différents types de cheminement scolaire et les services disponibles dans leur milieu. Les stratégies d’intervention susceptibles d’améliorer cette situation sont nombreuses. Il peut s’agir par exemple de donner de façon systématique de l’information scolaire aux élèves quant aux diverses options du secondaire, du collégial ou du niveau universitaire, en tenant compte bien sûr de leur âge. Il peut s’agir aussi de fournir de l’information professionnelle en organisant des visites en milieu de travail, des rencontres avec des jeunes travailleurs, etc. On devra cependant s’assurer de rendre évidents les liens entre la formation scolaire, le travail rémunéré et les différentes matières et activités scolaires.
bull2.gif (117 octets)  Favoriser le maintien d’attributions énergisantes
bull2.gif (117 octets)  L’acquisition et l’utilisation de stratégies d’apprentissage efficaces joue un rôle crucial dans la réussite à l’école. Or, l’acquisition et l’utilisation du savoir stratégique reposent sur l’adoption par l’élève de croyances positives quant au rôle de l’effort et des stratégies (Archambault et Chouinard, 1996). Il est possible pour l'enseignant d'influencer positivement la perception des élèves quant au rôle des stratégies en les aidant à modifier leurs attributions causales.
bull2.gif (117 octets)  Une première façon de faire consiste à organiser des échanges systématiques sur le sujet avec les élèves. L’enseignant peut leur demander tout d’abord de remplir individuellement un questionnaire sur lequel ils expriment leurs perceptions relativement au rôle de l’effort, des stratégies, de l’intelligence et de la chance dans le succès et l’échec à l’école. Il suscite ensuite une discussion afin de permettre aux élèves d’exprimer leurs perceptions. À cette étape, l’enseignant ne fait qu’animer le débat sans infirmer ou confirmer. Par la suite, il tient devant ses élèves des propos faisant la promotion de l’effort et du recours aux stratégies d’apprentissage. Une autre façon de faire, complémentaire à la précédente, consiste à faire systématiquement porter la rétroaction donnée aux élèves sur les stratégies utilisées plutôt que sur l’habileté ou le rendement. On peut par exemple inscrire un commentaire relatif à la pertinence des stratégies utilisées sur les copies des élèves ou bien les questionner sur les stratégies qu’ils utilisent en soulignant l’importance de ces dernières, etc.
bull2.gif (117 octets)  En conclusion, soulignons que dans les approches pédagogiques traditionnelles les agents d’éducation ont tendance à considérer uniquement la transmission des connaissances disciplinaires et à s'intéresser à la production de réponses exactes. Ce type d’approche ne contient pas d’actions préméditées et systématiques sur les variables motivationnelles. Les résultats obtenus sont souvent décevants quant au maintien à long terme et à la généralisation des connaissances et des habiletés (Wong, 1991). Plus récemment, une nouvelle façon de voir l’apprentissage a donné lieu à des modèles pédagogiques prenant en compte la motivation des élèves. Ces modèles combinent l’enseignement systématique des stratégies cognitives et métacognitives à des interventions visant spécifiquement la motivation des élèves. La combinaison de l’enseignement des stratégies d’apprentissage et des interventions sur la motivation s’avère être plus efficace que l’enseignement seul des stratégies et que les approches traditionnelles. Les élèves obtiennent généralement un meilleur rendement, retiennent et généralisent mieux. Ils développent aussi un plus grand sentiment de pouvoir contrôler leurs apprentissages par l'effort. De plus, ces changements semblent se maintenir dans le temps (Reid et Borkowski, 1987).
bull2.gif (117 octets)  Les stratégies pédagogiques et le matériel développé par l’auteur sur la base des principes et des considérations théoriques qui viennent d’être survolés seront présentés dans le cadre de la prochaine Biennale, lors de la rencontre du groupe thématique “ Analyse du fonctionnement du sujet apprenant ”.
bull2.gif (117 octets)  Références
bull2.gif (117 octets)  Ames, R. et Ames, C. (1991). Motivation and Effective Teaching. In L. Idol et B.F. Jones (dir.), Educational Values and Cognitive Instruction: Implications for Reform. Hillsdale, NJ : Erlbaum.
bull2.gif (117 octets)  Archambault, J. et Chouinard, R. (1996). Vers une gestion éducative de la classe. Boucherville, QC : Gaëtan-Morin.
bull2.gif (117 octets)  Ellis, E. S.et Friend, P. (1991). Adolescents with Learning Disabilities. In B. Y. L. Wong (dir.), Learning about Learning Disabilities Vol.2, Instructional Practices. New-York : Academic Press.
bull2.gif (117 octets)  Frase, L. T. (1975). Prose Processing. In G. H. Bower (dir.), The Psychology of Learning and Motivation, Vol. 9. New-York: Academic Press.
bull2.gif (117 octets)  Reid, M. K. et Borkowski, J. G. (1987). Causal Attributions of Hyperactive Children: Implications for Training Strategies and Self-Control. Journal of Educational Psychology, 76, 225-235.
bull2.gif (117 octets)  Spaulding, C. L. (1992). Motivation in the classroom. New-York: McGraw-Hill.
bull2.gif (117 octets)  Stipek, D. J. (1993). Motivation to Learn: From Theory to Practice. Englewood Cliffs, NJ : Prentice Hall.
bull2.gif (117 octets)  Wong, B. Y. L. (1991). The Relevance of Metacognition to Learning Disabilities. In B. Y. L. Wong (dir.), Learning about Learning Disabilities. New-York : Academic Press.