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Analyse critique des écrits portant sur l’apprentissage par la lecture

Auteur(s) : CARTIER Sylvie, GAGNÉ Andréanne

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bull2.gif (117 octets)   d’élèves en difficultés d’apprentissage
bull2.gif (117 octets)  La présente étude s’inscrit dans la poursuite de nos travaux sur l’apprentissage par la lecture d’élèves en difficultés d’apprentissage et elle répond à notre premier objectif de recherche : identifier les problèmes rencontrés par les élèves en difficultés dans cette situation d’apprentissage. Plus spécifiquement, cette étude vise à analyser de façon critique les écrits portant sur l’apprentissage par la lecture d’élèves du secondaire (niveau lycée) en difficultés d’apprentissage.
bull2.gif (117 octets)  La définition et les exigences de l’apprentissage par la lecture au secondaire
bull2.gif (117 octets)  Nous définissons l’apprentissage par la lecture comme une situation d’apprentissage dans laquelle le lecteur/apprenant doit non seulement lire et acquérir des connaissances afin de maîtriser un sujet à l’étude, mais aussi choisir les textes à lire et gérer son environnement de travail et la réalisation de la tâche (Cartier, 1999). Notre définition prend en compte différents domaines d’étude tels que l’apprentissage de contenu, l’apprentissage de texte, la compréhension en lecture et l’autorégulation. Notons que l’apprentissage par la lecture se distingue du champs d’étude de l’apprentissage de la lecture qui décrit les mécanismes d’apprentissage de l’acte de lire.
bull2.gif (117 octets)  En se fondant sur cette définition de l’apprentissage par la lecture, il est maintenant possible de décrire les exigences que cette situation pose aux élèves. À leur arrivée au secondaire, un de leurs défis consiste à adapter leurs capacités de lecture qu’ils utilisaient au primaire - majoritairement de compréhension de textes narratifs - aux nouvelles exigences du secondaire - axées sur l’apprentissage de contenus présentés dans des textes informatifs (Schmidt, Barry, Maxworthy et Huebsch, 1989). Bien que cette situation d’apprentissage soit vécue par les élèves au primaire, c’est véritablement au secondaire qu’elle est utilisée et le sera de plus en plus aux niveaux de formation supérieure.
bull2.gif (117 octets)  Les problèmes rencontrés par les élèves en difficultés d’apprentissage lorsqu’ils lisent pour apprendre
bull2.gif (117 octets)  Pour les élèves en difficultés d’apprentissage, Horton et Lovitt (1994) rapportent que le taux de décrochage scolaire varie entre 35% et 47%. Pour expliquer ce phénomène, ces auteurs citent l’expérience difficile et fréquente d’échecs scolaires vécus par les élèves en difficultés d’apprentissage qui serait justement étroitement liée à la façon dont leur est présentée l’information contenue dans les manuels et leur difficulté à lire pour apprendre. Dans la classe, les manifestations de ces difficultés sont nombreuses et diversifiées. Par exemple, certains élèves ont de la difficulté à comprendre ce qu’ils lisent, à se rappeler les concepts et les faits lus ainsi qu’à les appliquer et à les maîtriser (Ellis et Lenz, 1990). D’autres élèves ne sont pas intéressés à le faire, ou encore ils le font seulement pour répondre aux demandes des parents ou par crainte de représailles, bref, s’ils lisent, ils ne le font pas pour apprendre (Bintz, 1997).
bull2.gif (117 octets)  Comme tous les élèves du secondaire, ceux en difficultés d’apprentissage doivent lire pour apprendre afin d’acquérir des connaissances de façon signifiante et d’obtenir leur diplôme. Pour les aider, les praticiens en milieu scolaire doivent contribuer à l’acquisition de cette compétence. Pour y arriver, ils doivent se référer aux recherches dans ce domaine par la consultation d’études critiques des écrits disponibles. Les principales questions qu’ils sont en droit de se poser sont les suivantes : Quels types de revues publient des écrits sur l’apprentissage par la lecture d’élèves du secondaire en difficultés d’apprentissage ? Quels objets d’étude y sont traités ? Quels types de recherches ont été effectuées à ce jour dans ce domaine ? Pour quels élèves les résultats s’appliquent-ils (niveau scolaire, type de difficultés) ? Peut-on généraliser les résultats ?
bull2.gif (117 octets)  Or, la réalisation d’une recension des écrits (Cartier et Viau, en préparation) dont le but est de répertorier les modèles de référence de l’apprentissage par la lecture d’élèves en difficultés d’apprentissage a permis d’arrêter les deux constats suivants : 1) aucune étude critique ne permet en soit de répondre aux questions posées précédemment et 2) l’hétérogénéité qui caractérise les écrits recensés confirme la pertinence de proposer aux intervenants scolaires une telle étude critique.
bull2.gif (117 octets)  Objectif de l’étude
bull2.gif (117 octets)  Ces deux constats sont à l’origine de la présente étude qui vise à aider les chercheurs et les intervenants scolaires à avoir une vision plus claire de l’état des connaissances dans ce domaine. La présente étude a donc pour objectif d’analyser les caractéristiques des écrits publiés dans des revues scientifiques et professionnelles ainsi que dans des rapports de recherches sur l’apprentissage par la lecture d’élèves du secondaire en difficultés d’apprentissage.
bull2.gif (117 octets)  Méthodologie
bull2.gif (117 octets)  Afin d’atteindre cet objectif, une recherche documentaire a été effectuée. Elle est fondée sur une procédure de recension systématique des écrits, de compilation des informations effectuée dans des grilles élaborées selon un inventaire de catégories et d’une analyse critique appuyée sur l’analyse de fréquence.
bull2.gif (117 octets)  Collecte des données
bull2.gif (117 octets)  Trois banques de références bibliographiques informatisées ont été consultées : ERIC, PSYCINFO et REPÈRE ainsi que des références tirées d’autres contextes - bibliographies de revues ou d’articles. Les descripteurs anglais étaient : (high school ou secondary school ou secondary education ou middle school), (content area reading), (supplementary reading material ou textbook) et (learning problems, learning difficulties ou learning disabilities). Les descripteurs français étaient (apprentissage de contenu) et (difficultés d’apprentissage). Sur un total de 144 écrits répertoriés, 46 ont été retenus.
bull2.gif (117 octets)  Le choix de ces 46 écrits a été effectué en trois étapes. D’abord, un premier choix a été effectué à partir de la lecture des résumés des textes. À cette étape, 92 écrits ont été retenus. Une deuxième sélection, effectuée à partir de la lecture des résumés des écrits retenus ou de leur première page (incluant un survol du texte au besoin) a permis de conserver 82 écrits. Enfin, à la troisième étape de sélection, étape où les critères de sélection ont été appliqués de façon stricte, 46 écrits ont été choisis. Les références non retenues l’ont été sur la base des critères suivants : les élèves visés n’étaient pas en difficultés, l’accent était mis sur la lecture plutôt que sur l’apprentissage par la lecture, les enseignants ne travaillaient pas avec des élèves en difficultés, ou encore il était question d’apprentissage de contenu, mais non en situation de lecture. Enfin, à chaque étape, le choix des écrits a été fait en utilisant une procédure de fidélité interjuge : dans un premier temps, deux chercheurs lisaient individuellement les informations disponibles, dans un deuxième temps, ils comparaient leurs choix et rejets. S’il y avait divergences, ils faisaient consensus. L’accord final interjuge est de 100 % aux trois étapes.
bull2.gif (117 octets)  Instruments de compilation des données
bull2.gif (117 octets)  Deux grilles de lecture ont été utilisées. La première grille de lecture a été élaborée et mise à l’essai par deux chercheurs avec quinze articles. Cette grille a servi à indiquer le type d’écrits (revues scientifiques et professionnelles, rapport et chapitre de livre), le type de recherche (recension, recherche de types prescriptif et descriptif, texte didactique) et l’objet d’étude de l’article (texte, contexte et élève). Ces informations ont contribué à réaliser une première catégorisation des écrits.
bull2.gif (117 octets)  La deuxième grille de lecture, mise à l’essai avec trois articles, a permis de consigner les informations suivantes : la problématique, les questions et les hypothèses, les cadres de référence, les objectifs, l’échantillonnage des sujets, la méthodologie (types de données, compilation et analyse des résultats, interprétation et conclusion). De plus, cette grille a permis de consigner de façon plus précise l’objet d’étude. Cette spécification est apparue nécessaire lors de l’utilisation de la première grille. Les objets d’étude précisés sont donc : élèves, contexte (enseignement - modèle, programme et stratégie - évaluation et enseignants) et texte (intervention et évaluation).
bull2.gif (117 octets)  Les notes prises à partir de cette grille lors de la lecture des textes ont été consignées sur traitement de texte et tous les écrits recensés ont été enregistrés dans le logiciel Pro-Cite.
bull2.gif (117 octets)  Modalités d’analyse des données
bull2.gif (117 octets)  Une analyse de type inventaire de catégories a permis de mettre en évidence les particularités des écrits publiés sur le sujet. Pour chacune des catégories compilées dans les grilles de lecture, une analyse de fréquence a permis de mettre en lumière les tendances actuelles des écrits.

bull2.gif (117 octets)  Résultats
bull2.gif (117 octets)  Voici un aperçu des principaux résultats obtenus lors de l’analyse des 46 écrits répertoriés. De façon générale, on retrouve :
· un chapitre de livre, 14 articles publiés dans des revues professionnelles, 27 dans des revues scientifiques et quatre rapports trouvés dans ERIC;
· trois recensions des écrits, 10 recherches de type prescriptif et deux de type descriptif et 31 textes didactiques;
· plus de 10 dénominations pour désigner un élève en difficultés dont ceux de faible, handicapé au plan académique, à risque, en trouble d’apprentissage, etc.
bull2.gif (117 octets)  De façon plus spécifique,
· pour les types d’écrits, des trois qui ont pour objet d’étude de caractériser l’élève, on retrouve une recension et deux recherches de type descriptif; des 37 écrits qui ont pour objet d’étude le contexte, il y a deux recensions, 10 recherches de type prescriptif et 25 textes didactiques; enfin, pour les six écrits qui ont pour objet d’étude le texte, ils sont de type didactique;
· pour l’objet d’étude, parmi les trois écrits qui ont pour objet d’étude de caractériser l’élève, deux portent sur leurs difficultés et un sur leurs perceptions de l’aide reçue par les enseignants; des 37 écrits qui ont pour objet d’étude le contexte, 34 portent sur l’intervention (six présentent un modèle, quatre un programme et 24 une stratégie), deux sur l’évaluation et un sur l’enseignant; et des six qui ont pour objet d’étude le texte, on retrouve six écrits dont cinq traitent de l’intervention et un de l’évaluation.
bull2.gif (117 octets)  Constats et conclusion
bull2.gif (117 octets)  Trois constats importants sont à tirer de ces résultats. Au plan de l’objet d’étude, on retrouve peu d’écrits qui portent directement sur les élèves. La plupart d’entre eux portent sur le contexte et, plus spécifiquement, sur l’intervention. Il est étonnant de constater le grand nombre d’écrits sur les interventions comparativement au peu de textes qui portent spécifiquement sur la description ou la modélisation des difficultés rencontrées par les élèves dans la situation d’apprentissage par la lecture. Lorsque les auteurs le font, ils portent très peu d’attention aux variables affectives (par exemple, la motivation) et métacognitives. Le peu d’importance que l’on accorde à ces variables peut surprendre, car celles-ci sont des conditions d’apprentissage de plus en plus reconnues dans les théories cognitives et sociocognitives de l’apprentissage.
bull2.gif (117 octets)  Au plan des types d’écrits, on observe que plusieurs d’entre eux sont issus de revues professionnelles ou encore sont des textes didactiques qui présentent des modèles d’intervention, des programmes et des stratégies spécifiques. Très peu des documents recensés sont des compte rendus d’expérimentations scientifiques. Ce constat nous amène à penser que l’apprentissage par la lecture a une importance certaine dans le milieu de la pratique, mais que dans le milieu de la recherche scientifique, il n’a pas encore acquis ses lettres de noblesse.

bull2.gif (117 octets)  Au plan méthodologique, on constate qu’il est difficile de caractériser les sujets visés dans les écrits. Par exemple, les auteurs utilisent de multiple dénominations pour désigner cette clientèle, telles que les élèves à risque, handicapés académiquement, faibles, en difficultés d’apprentissage, en trouble d’apprentissage, etc. Ne retrouvant pas dans les écrits des caractéristiques communes pour désigner les élèves en difficultés d’apprentissage en situation d’apprentissage par la lecture, il est difficile de généraliser les résultats obtenus.
bull2.gif (117 octets)  La place attribuée à l’apprentissage par la lecture dans les écrits à visée professionnelle, comparativement au nombre restreint de textes scientifiques sur le sujet et la multiplicité de noms utilisés pour qualifier les élèves en difficultés dans cette situation d’apprentissage démontre l’importance et l’urgence de développer davantage ce champ d’étude. Ce développement devrait être assumé par une communauté de chercheurs internationaux, car cette problématique se retrouve à tous les niveaux scolaires et pour toutes les matières. Enfin, cette communauté de chercheurs devrait comprendre à la fois des didacticiens intéressés par l’apprentissage de la lecture, des psychopédagogues préoccupés par l’apprentissage de toutes les matières et des orthopédagogues concernés par les difficultés d’apprentissage vécues par les élèves.
bull2.gif (117 octets)  Références
bull2.gif (117 octets)  Bintz, W. P. (1997). Exploring reading nightmares of middle and secondary school teachers. Journal of Adolescent and Adult Literacy, 4(1), 12-24.
bull2.gif (117 octets)  Cartier, S. en collaboration avec Tardif, J. (accepté pour publication). De la lecture pour comprendre à la lecture pour apprendre : aider les élèves qui ont des difficultés à apprendre par la lecture. Vie pédagogique.
bull2.gif (117 octets)  Cartier, S, et Viau, R. (en préparation). L’apprentissage par la lecture d’élèves du secondaire en difficultés d’apprentissage.
bull2.gif (117 octets)  Ellis, E. S. et Lenz, B. K. (1990). Techniques for mediating content-area learning : issues and research, Focus on Exceptional Children, 22(9), 1-16.
bull2.gif (117 octets)  Schmidt, C. M., Barry, A., Maxworthy, A. G. et Huebsch, W. R. (1989). But I read the chapter twice. Journal of Reading, february, 428-433.
bull2.gif (117 octets)  Horton, S. V., et Lovitt, T. C. (1994). A Comparison of Two Methods of Administering Group Reading Inventories to Diverse Learners. Remedial and Special Education, 15(6), 378-390.
bull2.gif (117 octets)  Legendre, R. (1993). Dictionnaire actuel de l’éducation, 2e édition. Montréal : Guérin.
ref : Dans le texte, les termes “apprentissage par la lecture”, “lire pour apprendre”, “apprendre par la lecture” et “apprendre en lisant” sont utilisés sans distinction.
Dans cette recherche, les difficultés d’apprentissage sont définies de la façon suivante : “Retard d’acquisition dans l’une ou l’autre des matières scolaires ou dans leur ensemble. ” (Legendre, 1993, p. 371)
Recherche subventionnée par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH).