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Préambule
La communication que nous présentons traite du système d’évaluation en vigueur dans l’Université algérienne.
Il s’agit d’un compte rendu d’une enquête que nous avons menée au courant de l'année universitaire 98-99. L’enquête a touché les étudiants qui sont inscrits en dernière année dans trois facultés de l’Université de Constantine. Le questionnaire que nous avons confectionné a pour objectif de recueillir les points de vue des étudiants sur étudiants sur le système d’évaluation qu’ils ont subi durant leurs études.
L'examen et l'analyse des procès verbaux de délibération dans trois facultés de l'Université de Constantine (Faculté des sciences sociales, Faculté des sciences et Faculté de Technologie) laisse apparaître que les taux de progression des étudiants d'une année à l'autre sont à la hausse. Les taux de réussite atteignent les 100% dans certaines formations. C’est le cas de la filière Psychologie Industrielle où en troisième et quatrième année de l’année universitaire 97/98 tous les étudiants sont admis dès la session de juin. Ce même taux est observé dans différentes filières de sociologie notamment Sociologie de l’Education et Sociologie de la culture. Dans les formations de l’ingénieur, la réussite est de 100% en chimie industrielle après les examens de synthèse et de rattrapage de septembre. Dans les sciences exactes la réussite avoisine les 90%.
Cette réussite pédagogique des étudiants sanctionnée par des attestations et des diplômes, contraste avec l'aveu d'échec de la politique de la formation universitaire.
Depuis plusieurs année, l'Université algérienne est fustigée de toute part en raison de la baisse de la qualité de la formation qu'elle dispense. Le mécontentement quant à son efficacité est déclaré par les pouvoirs publics, les employeurs et les diplômés en exercice. Actuellement cette insatisfaction gagne largement l'opinion publique. La réforme de l’Université algérienne est de nouveau à l’ordre du jour.
Notre recherche vise à expliquer ce paradoxe. Nous posons l'hypothèse que la réussite constatée est en grande partie liée au laxisme du système d'admission et d'évaluation en vigueur. Les conditions d'admission ainsi que la nature, le mode, l'organisation et le déroulement de l'évaluation favorisent la réussite et donc le passage des étudiants d'une année sans l’acquisition de compétences.
Le système d’évaluation.
Le système d'évaluation dans les Universités algérienne a connu des changements. Avant 1984, les études étaient modulaires et l'admission reposait sur l'acquisition de la moyenne dans chaque module. Un examen de rattrapage est prévu pour donner une deuxième chance aux étudiants.
Depuis 1985, le système de compensation des moyennes fait que pour réussir il suffit d'avoir la moyenne générale de l'année. Ainsi, des étudiants ayant échoué dans un module peuvent être déclarés admis à la fin de l'année grâce à la compensation avec les autres modules. Le système d'évaluation et d'admission actuel permet aux étudiants qui n'ont pas obtenu la moyenne durant la session de juin de se présenter à l’examen dit de synthèse pour tous les modules dont ils n'ont pas obtenu la moyenne. Et, l'étudiant garde la meilleure note entre celle de l'examen de synthèse et la note antérieure. Un calcul de nouvelle moyenne générale est établi. Si l'étudiant n'obtient pas toujours un la moyenne dix, il se présente en septembre pour un examen de rattrapage. Cette troisième chance avec compensation des notes permet finalement aux étudiants d’obtenir l’année.
Quels sont les lacunes du système d'évaluation? Comme nous venons de le décrire il multiplie les chances de réussite des étudiants. Grâce à la compensation, il permet aux étudiants de réussir dans des matières sans avoir acquis les connaissances et les savoirs faire prévus. Il consacre un temps important aux examens au détriment des enseignements.
C'est un système qui fait qu'actuellement dans les instituts des sciences sociales de l'Université de Constantine les taux de réussite avoisinent les 100%. C'est en fait un système qui entretien l'illusion de la réussite. Il peut décourager les étudiants qui font l'effort de se former. Son effet pervers est donc la démobilisation des enseignants et des étudiants.
Enquête
Nous avons mené une enquête par questionnaire auprès des étudiants en fin de cycles. Un échantillon aléatoire a été tiré à partir des listes des étudiants inscrits en dernière année dans trois facultés. L’échantillon se compose de :
139 étudiants de la Faculté des Sciences Sociales (département de Psychologie, de Sociologie et Philosophie)
157 étudiants de la Faculté de l’Ingéniorat (Département de Génie Civil, Chimie Industrielle, Génie Mécanique)
124 étudiants de la Faculté des Sciences (Département de Chimie, de Mathématique, de Physique).
Pour dégager et analyser les attribution de leurs réussites, nous leur avons adressé un questionnaire qui s’articule autour de quatre facteurs de réussite : La pédagogie universitaire, le système d’évaluation, le facteur enseignant et le facteur étudiant même.
Notre objectif est de dégager selon le point de vue des étudiants le facteur qui explique leurs réussites. Et, de situer, le rôle de l’évaluation.
Résultats
Nous avons soumis l’ensemble des réponses à l’analyse factorielle des correspondances qui nous a permis de confronter les opinions des étudiants en fonction du sexe et de la spécialité. Nous présentons les principaux résultats globaux.
D’une manière générale, les étudiants des différentes départements et filières et, des deux sexes se scindent en deux groupes. Les étudiants de la Faculté de l’Ingéniorat attribuent essentiellement leurs réussites au facteur “ enseignants ” et à “ eux-même ” et, en troisième lieu au système d’évaluation. En revanche dans les deux autres Facultés les étudiants attribuent majoritairement leurs réussites jusqu’en fin d’année au système d’évaluation..
Ces derniers, mettent l’accent sur les pratiques d’évaluation des enseignants tels que les questions de mémorisation qui font appel au bachotage, la répétition des mêmes questions d’une année à l’autre, les questions faciles, la subjectivité de la notation, l’indulgence des enseignants dans la notation..
Ils signalent le système en vigueur tels que la compensation des moyennes de différentes matières, la baisse de la note éliminatoire à 5 sur 20, la conservation de la meilleure note entre les sessions, le contrôle de synthèse, l’accès au rattrapage après plusieurs échec. Ils citent également la fraude des étudiants lors des examens.
Les autres facteurs qui se rapportent l’enseignant et à l’étudiant même comme responsables de la réussite sont évoqués mais moins fréquemment que l’évaluation.
La pédagogie universitaire est le facteur le moins évoqués par les étudiants des trois facultés pour expliquer leurs réussites.
Conclusion
A travers cette étude, nous avons en fait situer non pas les causes de la réussite interne des étudiants, mais les causes de l’inefficacité externe de la formation dispensée.
Le laxisme du système d’évaluation en est un facteur évident. En le situant comme facteur d’admission, les étudiants interrogés des trois facultés reconnaissent le caractère illusoire de leurs réussites. Ils sont déclarés admis d’une année à l’autre avec de faibles acquisitions sur le plan des savoirs et des compétences.
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