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Une autre approche de la formation continue : la formation de proximité

Auteur(s) : Jacqueline BONNARD-RAHAMI

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bull2.gif (117 octets)   Dans une société en pleine mutation technologique, quelle formation continue pour les professeurs des enseignements technologiques et en particulier les professeurs de technologie en collège ?
bull2.gif (117 octets)  La suppression des MAFPEN et le transfert de la mise en œuvre de la formation continue vers les IUFM permet de mettre à plat les procédures possibles de la formation. Entre une structure lourde liée à l’introduction massive des Nouvelles Technologies et l’autoformation que chaque enseignant a obligation de mettre en place pour actualiser ses connaissances, la nécessité d’un espace intermédiaire apparaît. Cet espace, relais institutionnel, doit permettre une réduction des écarts entre l’exigence liée aux compétences nécessaires pour mettre en œuvre les programmes et les compétences effectives de l’enseignant qui dépendent en grande partie de sa formation initiale. C’est ici que je situerai la formation de proximité, parallèlement à la formation technique et à la formation théorique, réponse “aux besoins des enseignants, en articulant étroitement formations et pratiques professionnelles” (1).
1 - La spécificité du corps professoral en "Technologie - collège"
bull2.gif (117 octets)  On note une grande disparité dans le cursus des enseignants. Les plus anciens ont subi différentes réformes : anciens instituteurs spécialisés (classes de transition et classes pratiques) devenus Professeurs de Collège enseignant l'Education Manuelle et Technique, puis "colorés" ou "rénovés" Technologie Collège. Les professeurs de Travaux Manuels et Educatifs les ont ensuite rejoint. Depuis une dizaine d'années le corps professoral se rajeunit et intègre de jeunes certifiés titulaires au minimum d'un BTS ou d'un DUT dans les domaines électronique, mécanique ou gestion ; après l'obtention d'un CAPET externe, ils ont suivi une année de formation pratique en IUFM avant d'être validés.
bull2.gif (117 octets)  La Technologie est une discipline récente (une dizaine d'années), enseignée au collège de la sixième à la troisième. De nouveaux programmes viennent d'être publiés et leur mise en place nécessite une réflexion sur les méthodes pédagogiques qu'ils induisent : implication de l'élève, autonomie, intégration des nouvelles technologies...
2 - Collèges d'appui (CDA), travail d'équipe et professeur ressource
2.1 Le dispositif : Depuis une dizaine d’années, l’Académie d’Orléans -Tours s’est dotée d’un réseau de collèges d’appui où les professeurs de Technologie peuvent tester du matériel pédagogique, échanger leurs pratiques, remettre à niveau leurs connaissances techniques. Les collèges d’appui sont à la fois des centres de ressources, des lieux d’accueil et de formation. Dès la rentrée, les professeurs ont la possibilité de s'inscrire auprès du collège d'appui le plus proche de leur domicile. L'Inspection Pédagogique Régionale incite les Principaux de collège à libérer ces enseignants le mardi après-midi. Selon l'étendue du département, un ou deux CDA sont ouverts permettant aux collèges ruraux et excentrés de bénéficier des mêmes services que les collèges urbains
2.2 La mutualisation des moyens : Le principal objectif du dispositif est la mutualisation des moyens. Périodiquement, chaque CDA reçoit une subvention d'équipement permettant l'achat de matériel de production récent et conforme aux programmes : Machines à commande numérique, maquettes d'automatismes, logiciels et documentation. Ce matériel est disponible et empruntable, ce qui permet aux enseignants de le tester, se former aux technologies nouvelles, comparer les matériels avant d'en proposer l'achat dans leur collège. Ce système de prêt a de plus l'avantage de regrouper les professeurs d'un site pour un échange de pratiques autour d'un même type de machine. Ceci permet aux petits collèges dont les moyens budgétaires sont limités de bénéficier des mêmes moyens que les autres.
2.3 Professeurs Ressource et travail d'équipe :
bull2.gif (117 octets)  Dans chaque CDA, un ou plusieurs Professeurs Ressources en Technologie (PRT) animent les mardis après-midi. Il est évident que de la formation et de la personnalité de ces PRT, dépend le dynamisme de la structure. Enseignant de collège, le PRT possède une solide connaissance du terrain et est confronté aux mêmes difficultés que ses collègues : matériels souvent inadaptés, groupes classes trop chargés, horaires pas toujours respectés... Il va donc pouvoir adopter une attitude d’écoute et être réceptif aux besoins des enseignants qu’il reçoit.
bull2.gif (117 octets)  Cette qualité d’accueil permet de mieux cerner les demandes et de proposer des demi-journées de formation adaptées aux besoins. La difficulté du rôle du PRT est la suivante : pouvoir s’adapter à la demande, donc proposer de façon rapide et efficace une offre de formation correspondante, car le collègue qui s’adresse à lui est forcément en difficulté (ou interrogation) sur la mise en œuvre des programmes. Parfois il s’agira de difficultés liées à la technicité, d’autres fois d’organisation pédagogique.
bull2.gif (117 octets)  En début d'année au cours d'une assemblée générale, les enseignants inscrits expriment des vœux sur les thèmes à aborder le mardi après-midi. Ils établissent des priorités ce qui permet de construire un planning prévisionnel. Des groupes de travail se constituent. De l'implication de chacun dépend l'efficacité de l'action. Le professeur ressource s'adapte à la demande. S'il s'agit de formation technique, il met en relation le groupe demandeur avec un collègue compétent. S'il s'agit d'échanges de pratiques, il anime le groupe de travail, coordonne les activités et rédige une synthèse afin que l'ensemble des inscrits puisse bénéficier de la réflexion collective
3 - La spécificité de la formation de proximité
3.1 : une structure souple :
bull2.gif (117 octets)  La structure présentée ici est beaucoup plus souple que les actions habituelles de formation. Il est impossible de prévoir une année à l’avance les besoins spécifiques et les interpellations des enseignants. Bien sûr au troisième trimestre, les grandes lignes se dégagent qui peuvent permettre la mise en place de formations de type traditionnel (plusieurs jours consécutifs sur un même thème). Il appartient donc aux PRT de faire remonter les besoins exprimés par les collègues auprès de l’Inspection Pédagogique Régionale. S’il s’agit de formation technique ou théorique pointue, le PRT va devoir faire remonter la demande à l’IPR chargé de la discipline qui la transmettra à l’IUFM organisateur de la formation continue des personnels. Lorsqu’il s’agit d’une demande liée à l’utilisation d’un type de matériel spécifique, à la prise en main d’un logiciel ou tout simplement à une réflexion didactique sur un point du programme, le PRT doit pouvoir répondre rapidement à la demande. Dans le cas contraire, lassé d’attendre, l’enseignant demandeur s’installera dans la routine ; la machine concernée ne sortira pas du placard ou s’intègrera au décor comme un élément insolite et inutile. Inversement, lors de ses visites, l’IPR peut repérer des difficultés chez un collègue et le diriger vers le Collège d'appui pour permettre un accompagnement pédagogique dont tout le monde tirera profit, enseignant et élèves.
bull2.gif (117 octets)  La périodicité des animations (un après-midi par semaine) permet une intégration progressive des connaissances à acquérir. L’assiduité dont font preuve les collègues permet des échanges très riches sur les difficultés ou les réussites rencontrées dans le transfert en classe.
3.2 Un exemple de fonctionnement : le collège d'appui de Tours
bull2.gif (117 octets)  La zone du CDA de Tours concerne le nord du département de l'Indre et Loire, soit 44 collèges dont la taille varie entre 300 et 600 élèves. 70 enseignants y sont inscrits ce qui représente 72% de l'effectif potentiel du secteur. Deux PRT animent ce site. Ils enseignent sur le secteur. On constate depuis trois ans une progression du nombre de demi-journées de présence (1er trimestre 96-97 : 130 présences, 1er trimestre 98-99 : 227 présences ). Sachant que cette formation est basée sur le volontariat et que les collègues se forment sur leur temps libre, on ne peut que constater l'intérêt qu'ils portent à la structure. Cette fréquentation peut être épisodique (60% des inscrits) ou très régulière. C'est autour des participants réguliers que se construit le travail d'équipe.
bull2.gif (117 octets)  Selon les demandes et les thèmes abordés, le nombre de participants réguliers varie entre 10 et 20. La nécessité d'une mémoire d'activité a poussé les groupes à rédiger des dossiers comportant des séquences pédagogiques, des ressources-élèves, des supports techniques divers. Un de ces dossiers a été publié par le CRDP d'Orléans dans la collection "parcours pédagogiques", sous le titre technologie 6°.
bull2.gif (117 octets)  La mise en relation des collègues de différents établissements permet aussi à la structure d'éclater et de se transporter dans d'autres collèges. Cette situation a été baptisée par les acteurs eux-mêmes :“projets sur site”. Il s'agit pour eux de prendre appui sur des situations concrètes et d'étudier les transferts possibles d'activités pédagogiques construites en commun. Ces échanges apportent à chacun un autre regard sur sa pratique professionnelle. Ces apports transforment les habitudes et l’aménagement des ateliers technologiques évolue. Pour la seule année 1998-99, sept établissements se sont engagés dans une refonte complète de cet espace. Ces transformations sont parfois spectaculaires (avec l'aide du Conseil Général) ou progressives (avec les seuls moyens financiers et humains de l'établissement). Cela dépend beaucoup de la personnalité du chef d’établissement et de l'image de marque de la discipline dans le collège. La tendance se poursuit pour la présente année scolaire avec des demandes de plus en plus précises sur les problèmes de sécurité et de conformité des machines.
bull2.gif (117 octets)  En conclusion, en quoi peut-on parler d'innovation ?
bull2.gif (117 octets)  Dans notre Institution, la tentation est grande de vouloir tout contrôler : le travail de l'élève, le travail de l'enseignant, la formation professionnelle initiale ou continue, les activités périscolaires. Pour éviter de se faire remarquer, chacun, dans son statut tente de coller au modèle dominant basé sur une forme de transmission de savoir qui privilégie le rôle de l'expert, celui qui, par définition, “sait ” au détriment de l'apprenant qui, de par son statut, “ignore ”.
bull2.gif (117 octets)  Dans la formation professionnelle des enseignants ce modèle perdure. Les attentes des enseignants en formation sont grandes car ils sont confrontés actuellement à des difficultés liées aux mutations sociologiques et économiques qui traversent notre société. Ils ont souvent la sensation désagréable d'être en décalage avec le discours des formateurs auxquels ils reprochent -à tort ou à raison- de n'avoir aucune pratique de terrain. Cette situation mène à des blocages se traduisant par de petites phrases assassines : "Ils n'ont qu'à venir me montrer...", "Il y a combien de temps que vous n'avez pas eu d'élèves ?", " La différence entre vous et moi, c'est que j'ai une classe de 28 élèves... "Paradoxalement, l'enseignant en formation attend de l'expert des recettes qui lui permettrait de sortir de l'impasse.
bull2.gif (117 octets)  Dans le dispositif présenté, l'enseignant prend en main sa formation. Avant de proposer un thème de travail, il effectue ce repérage indispensable à tout apprentissage : "ce que je sais, ce que je ne sais pas". Cette liberté offerte permet à l'Institution de répondre au plus près des besoins en utilisant ce relais qu'est devenu le professeur-ressource. Celui-ci offre l'avantage (aux yeux de l'enseignant demandeur) d'être un pair même s'il a développé des compétences particulières en matière d'animation et de formation. Cette position particulière suscite débat au sein du groupe des PRT : sommes-nous animateurs ou formateurs ? Certains se revendiquent animateurs, laissant aux experts le statut de formateur. Ils pensent ne rien apporter aux collègues en dehors de la mise à disposition d'un lieu d'accueil et de matériel. Pourtant leur rôle est essentiel puisqu'il permet de mettre en relation les professeurs de Technologie d'un même secteur et d'organiser la synergie. La prise de pouvoir de l'apprenant sur le contenu de la formation permet une appropriation plus efficace qui s'inscrit dans la durée. Il a la possibilité de revenir sur les zones d'ombre, de se perfectionner, de lever les inhibitions liées à la formation initiale, à la peur du regard de l'autre et des jugements hâtifs. Selon les ignorances décelées ou les compétences acquises, on assiste à des regroupements de collègues unis par une même nécessité : se donner les moyens techniques et humains de faire la classe en appliquant les programmes officiels.
1 Contrat d’objectifs relatif à l’organisation de la formation continue des personnels enseignants et d’éducation des premier et second degrés dans l’Académie d’Orléans-Tours (septembre 1998)