Biennale 5
logo INRP (3488 octets)

L'éducation sociale aujourd'hui : former pour une profession des professions

Auteur(s) : ÚCAR Xavier

Lobi89.gif (730 octets)

retour au résumé


bull2.gif (117 octets)   1. Actualité de la profession d'éducateur social
l'Education sociale est aujourd'hui une profession consolidée. La création en 1991 d'études universitaires spécifiques ouvrit, grâce à l'incorporation définitive de la formation au système éducatif réglé, le chemin d'une institutionnalisation et d'une légitimation sociale en progression régulière. Les résultats actuels de ce processus sont, entre autres, la présence de plus en plus importante de professionnels sur le marché du travail ayant un diplôme d'études supérieures; la récente création du Collège Professionnel d'Éducateurs Sociaux de Catalogne (CEESC) qui montre le dynamisme et la vitalité de ce groupe et, finalement, le processus d'habilitation des professionnels en actif lequel, pour l'instant, n'a eu lieu qu'en Catalogne.
bull2.gif (117 octets)  Ces données pourraient nous laisser penser que la consolidation et l'institutionnalisation de la profession d'éducateur social obéit, parmi d'autres facteurs, à une sorte d'homogénéisation corporative des profils professionnels agissant dans la réalité sociale. On pourrait aussi croire que celle-ci dispose , d'ores et déjà, des connaissances scientifiques et des instruments techniques appropriés et suffisants pour mener à bien des applications professionnelles efficaces. On pourrait, en définitive, considérer que cette consolidation constitue le dernier degré dans l'échelle du professionnalisme et que dorénavant il ne s'agirait- je veux parler bien évidemment du travail à faire à partir des universités- que de former des professionnels et de les insérer sur le marché du travail. D'après moi, rien n'est plus éloigné de la vérité.
bull2.gif (117 octets)  L'histoire même de la réalité sociale montre que l'on se trouve actuellement dans ce que nous pourrions appeler l'adolescence de la profession. Elle montre également que le processus d'auto-affirmation- défense et lutte de et pour la profession- ainsi que celui de sa reconnaissance sociale par une partie de la société- académisation et régularisation de la formation au moyen de l'incorporation de ces études à l'université- doivent suivre un long chemin où il faudra définir et redéfinir continuellement la justification; l'objet; les différents profils professionnels; les sujets de l'action; les cadres d'intervention et, finalement, les fonctions propres à la profession d'éducateur social.
bull2.gif (117 octets)  Nous essayerons à présent de connaître et de définir la position actuelle de la profession d'éducateur social tout au long de ce long chemin.
2. Caractéristiques de la profession
bull2.gif (117 octets)  Voici, d'après moi, quelques uns des traits caractéristiques qui identifient de nos jours la profession d'éducateur social.
a) L'éducation sociale est une profession jeune. Bien que l'on puisse retrouver la trace des antécédents de ces interventions socio-éducatives dans le passé, on peut dire que celles-ci ne se produisent, de manière plus ou moins organisée, en Espagne, que dans les années 60. C'est ce qui explique, entre autres raisons, le manque actuel d'un corpus scientifique de connaissances dûment consolidé. Ce corpus s'est construit le long des années mais c'est principalement cette dernière décennie qui à connu un plus grand nombre de publications.
b) C'est aussi une profession nouvelle. Les premières interventions se sont produites au sein des communautés comme réponse aux problématiques de type social et formatif que celles-ci souffraient. On peut affirmer, qu'en général, une grande partie de ces premières interventions étaient le fait d'agents sociaux volontaires qui manquaient de formation spécifique pour l'action et l'intervention sociale. On pourrait dire que c'était des interventions artisanales. Au fur et à mesure de l'institutionnalisation de la formation et de sa progressive prise en main par des professionnels ayant une formation spécifique fournie dans un premier temps par les Administrations municipales ou départementales et ensuite par les Universités- sont apparus des processus et des méthodologies d'intervention reposant sur des bases scientifiques et techniques.
c) On pourrait dire que l'éducation sociale est une profession créée conventionnellement pour faciliter sa réglementation institutionnelle. Notre profession est formée par divers profils professionnels qui recueillent, bien qu'ils travaillent dans le même cadre-le social-, des traditions d'intervention sociale différentes. En réalité il n'existe pas un éducateur social que l'on pourrait définir comme tel qui se constituerait comme éducateur moyen ou éducateur type. Vue la variabilité de profils, c'est davantage au pluriel qu'au singulier qu'il faut parler lorsqu'on se réfère à la profession d'éducateur social. Celle-ci constitue d'après moi une profession de professions.
d) Notre profession se centre sur le cadre social. Cadre par définition, vivant et dynamique, multiforme, hétérogène et complexe. Les mêmes caractéristiques qui peuvent s'appliquer à la profession de l'éducation sociale.
e) C'est une profession vivante, dynamique et multiforme. En 1988 furent définis ce que l'on appela les profils professionnels historiques : éducateur d'adultes, éducateur spécialisé et animateur socio-culturel. Huit ans plus tard, une recherche portant sur les éducateurs sociaux en Catalogne identifia huit profils professionnels en fonction des cadres d'intervention. À savoir: Premiers Soins, Enfance et Adolescence, Justice, Toxicomanie, Éducation et formation d'adultes, Troisième âge, Handicapés et santé mentale, Animation socio-culturelle et Temps libre. Cette évolution constitue une preuve tangible du dynamisme inhérent à la profession.
f) C'est une profession hétérogène et complexe. Hétérogénéité et complexité dérivées de la variété de destinataires, de situations et de problématiques avec, ou bien sur, lesquels agit le professionnel de l'éducation sociale. L'éducation sociale est constituée de nos jours par une constellation de profils professionnels différenciés et spécialisés en fonction, dans un premier temps, d'un ensemble d'espaces d'action et d'intervention sociale et ensuite d'une typologie de destinataires qui répondent à des situations vitales, problématiques ou pas, d'une extraordinaire diversité. Ce qui est encore plus étonnant c'est que les éducateurs et éducatrices sociales sont en train de créer ou de découvrir continuellement de nouveaux espaces d'intervention professionnelle dans le social pouvant ainsi affirmer que cette constellation se développe et s'étend.
g) Bien qu'elle s'actualise au moyen des différents profils professionnels, la profession d'éducateur social est issue d'une seule formation initiale.
h) Dans la réalité actuelle de la profession cohabitent deux types professionnels bien différenciés : les éducateurs et éducatrices sociales qui n'ont pas suivi les études d'éducation sociale et les diplômés universitaires qui sont incorporés au marché du travail après 1995. Ces derniers sont, en général, des personnes jeunes manquant d'expérience professionnelle, pleins d'espoir et d'envie de travailler. Les premiers sont plus âgés et ont une longue expérience professionnelle. Cette situation, bien que conjoncturelle, ne peut pas être délaissée à la base de la formation puisqu'elle peut déboucher sur des problèmes de cohabitation dans la pratique professionnelle concrète.
2. Actualité de la profession et quelques réflexions autour du practicum
bull2.gif (117 octets)  On peut, à partir des traits caractéristiques définis dans le paragraphe précédent, tirer certaines conclusions qui pourront servir de base pour établir des changements dans le practicum. Ce sont les suivantes:
bull2.gif (117 octets)  A. Il existe actuellement un déséquilibre entre la connaissance due à l'expérience des éducateurs sociaux en ce qui concerne les processus, techniques et méthodologies de l'intervention et la théorie au sujet de l'éducation sociale élaborée à ce sujet. Dans d'autres termes le déséquilibre se produit entre la connaissance tacite dont disposent les professionnels et la connaissance codifiée disponible pour la formation. La première est issue de l'expérience et elle est personnelle, ce qui fait que l'accès en est rendu difficile pour la plupart des personnes désireuses de se former professionnellement. La seconde est codifiée, c'est-à-dire, recueillie dans un quelconque support documentaire, ce qui signifie qu'il est disponible pour la formation. Que l'éducation sociale soit une profession jeune et nouvelle suppose qu'il est nécessaire de transformer des connaissances tacites en ce qui concerne l'intervention sociale, en connaissances codifiées. C'est ainsi que l'on pourra obtenir tout un corpus scientifique de connaissances apte et suffisant pour la formation de qualité des futurs professionnels.
bull2.gif (117 octets)  Voici l'une des façons d'élaborer et de construire la théorie de l'éducation sociale: transformant les connaissances tacites en connaissances codifiées. La théorie sur l'éducation sociale se construit entre autres au moyen d'un processus circulaire où les pratiques concrètes de l'intervention sociale fournissent un ensemble de connaissances qui s'organisent de manière systématique dans la théorie pour être rendus à leur tour aux propres pratiques des éducateurs grâce à la formation.

bull2.gif (117 octets)  Il convient de remarquer l'importance qu'a pour l'étudiant, en ce qui concerne le practicum, l'observation des professionnels en action. En effet, ceux-ci disposent de ressources personnelles pour la solution de problèmes qui dans de nombreux cas ne sont pas codifiés. C'est-à-dire qu'ils ne font pas encore partie de la théorie de l'éducation sociale. La formation dans le propre contexte de l'action permet ce type d'observation qui peut aider, entre autres, à recueillir des connaissances tacites pour les codifier et les rendre disponibles pour la formation.
bull2.gif (117 octets)  B. La profession d'éducateur social est en même temps réponse et reflet de la société où elle se développe. Il n'est pas étonnant qu'une société hétérogène et complexe réponde des interventions sociales aussi complexes et hétérogènes. La variété de profils professionnels de l'éducation sociale n'est pas autre chose que la réponse à ou le reflet d'une société où cohabitent des problématiques et des destinataires de l'action sociale très divers aussi.
bull2.gif (117 octets)  Définir l'éducation sociale comme une profession de professions suppose penser une formation pratique très diversifiée. Il convient de faciliter à l'étudiant la connaissance, au moyen du practicum, les diverses et, en même temps, différentes formes qu'il existe de développer la profession d'éducateur social dans nos sociétés. Face à cette façon d'envisager le problème il peut exister différentes options pour élaborer le practicum. Cependant elles obligent toutes, vu l'homogénéité de la formation initiale, à prendre position face à l'alternative spécialisation/généralisation. Le practicum doit permettre à l'étudiant de travailler. Un profil professionnel différent chaque semestre ou bien tous les deux trimestres de formation? Un seul profil tout au long de la totalité des cours de formation ? Tous les profils pendant tous les cours de formation ? Ou, au contraire, des formules d'organisation mixtes qui alternent la connaissance où le travail de plusieurs profils dans un cours académique et d'approfondissement dans l'un de ceux-ci dans le suivant:
bull2.gif (117 octets)  C. La profession d'éducateur social à des frontières et des limites précises. Elle est très perméable à l'apparition de nouveaux profils professionnels ; elle se développe parallèlement au développement des espaces pour l'action sociale et elle change à l'écoute des changements sociaux. C'est cet esprit qui doit imprégner, à mon avis, toute la formation et doit se refléter dans le practicum. Cela ne revient pas à dire toutefois que l'éducation sociale soit éthérée ou inestable ou qu'un noyau théorique identifiable lui fasse défaut, cela veut dire qu'elle ne peut être conçue comme quelque chose de fermé ou fini mais comme un domaine d'intervention vivant, dynamique, disposé à donner et à proposer de nouvelles réponses et de nouvelles solutions aux problématiques qui surgiront dans une société en mutation comme celle de la fin du millénaire.
bull2.gif (117 octets)  Il convient de concevoir et de développer le practicum à partir d'une attitude très ouverte et extrêmement flexible en ce qui concerne l'organisation. Cela se concrétise au moyen, d'au moins, trois points :
bull2.gif (117 octets)  Il est nécessaire de diversifier au maximum l'offre d'institutions où l'on puisse développer le practicum. Cette diversification peut être le germe de futurs nouveaux espaces d'intervention socio-éducative et, donc, de nouveaux gisements d'emploi.
bull2.gif (117 octets)  Il faut stimuler au maximum l'implication et la responsabilisation de l'étudiant dans les activités du practicum. Pour ce faire, l'étudiant doit jouer le rôle principal et être responsable, non seulement au sujet du développement des activités pratiques de formation dans l'institution collaborant avec l'université, mais aussi dans la gestion et la négociation de ce que doit être son rôle, sa fonction ou son travail dans cette institution. Il faut abandonner les attitudes paternalistes où l'on dirige la totalité des tâches de l'étudiant dans l'établissement ou l'institution collaboratrice. Cela peut générer, par manque d'implication personnelle de l'étudiant, le transfert de la responsabilité sur la personne qui s'occupe de la gestion, dans ce cas, le tuteur des travaux pratiques.
bull2.gif (117 octets)  Il faut être ouvert aux contre-propositions de practicum alternatifs que les étudiants pourraient demander. Ces contre-propositions peuvent affecter aussi bien l'organisation du practicum que celle des institutions concrètes où l'on peut le développer. Cela ne veut pas dire qu'il faut accepter toutes les demandes des étudiants. Les propositions doivent avoir un minimum de rigueur, au moins méthodologique. Toutes les activités ne servent pas comme practicum. Il faut pour ce faire qu'au moins le practicum :
a) obéisse à un projet, mise en œuvre ou programme préalable.
b) soit autorisé par un professionnel du cadre social qui est supposé montrer ou apprendre à l'étudiant les procédés, les techniques, les méthodologies et, en définitive, les outils propres à la profession.
c) Soit l'objet d'un suivi et d'une évaluation.
bull2.gif (117 octets)  BIBLIOGRAPHIE
bull2.gif (117 octets)  BLANKERT, H. et autres (1997) La constucción de la sociedad europea de la información para todos nosotros. Rapport final du
bull2.gif (117 octets)  GEAN (Groupe d'Experts de Haut Niveau) Avril 1997. Document obtenu sur: http://www.ispo.cec.be.
bull2.gif (117 octets)  CACHO, X. (1998) L'educador i l'éducador social a Catalunya. Ed. APESC. Barcelona.
bull2.gif (117 octets)  RIERA, J. (1988) Concepto, formación y profesionalización del educador social, el trabajador social y pedagogo social. Ed. Nau Llibres. Valencia.
bull2.gif (117 octets)  UCAR, X. (1996) "Los estudios de educación social y la animación sociocultural" pp. 18-27. Claves de educación Social. Nº2. Universidad del País Vasco.