1. Introduction
  Cet article est centré sur la présentation d'un dispositif de recherche-formation nommé DIAMCLE (Dispositif d'Analyse Multi-référentielle des Classes Scolaires) visant les enseignants de l'école secondaire en service. Il s'agit d'une recherche qualitative, consistant en une étude de cas et utilisant l'approche clinique.
  Dans ce dispositif, on va distinguer deux parties complémentaires mais differenciées: celle de la formation et celle de la recherche; on analysera plus largement la dernière.
  On va présenter brièvement le cadre théorique-epistémologique de la recherche, pour faire comprendre notre pensée sur les dispositifs de formation, ainsi que pour décrire le dispositif de recherche-formation créé et pour y montrer quelques caractéristiques depuis des dimensions différentes.
2. Le cadre de la recherche. Ses antécédents.
  Il s'agit d'un programme de recherche sur les classes scolaires, qu'on mène depuis 1989 grâce à un subside de l'UBACYT. On y utilise une approche clinique centrée dans le groupe. Dans le premier projet, on a mené l'étude de cinq cas dans des écoles d'enseignement secondaire. Cela a donné lieu
à des exposés épistémologiques à partir de considérer la classe comme un champ complexe aux problèmes divers, et non pas comme un objet discret; ainsi que de considérer une construction théorique dans laquelle les concepts sur le champ du groupal à l'école, sur le sens du groupe, sur les formations groupales, sur les différents types de classe, ont été le centre de la production des connaissances. A partir des résultats obtenus on a posé un deuxième projet dans lequel on a construit une typologie des classes scolaires de l'enseignement moyen d'après un échantillonnage théorique atteignant des institutions diverses. On y a trouvé sept types de classes décrits depuis trois perspectives d'analyse: instrumentale, sociale et psychique. On a aussi rédigé des questionnaires pour les enseignants et pour les élèves afin de développer les recherches dans les classes, ainsi que des guides d'observation et d'analyse. Le troisième projet, dont il est question dans cette présentation, s'est proposé de créer un dispositif de formation pouvant offrir aux enseignants une formation liée aux progrès théoriques et méthodologiques atteints dans cette ligne de recherches.
  Moyennant ce dispositif-là nous nous proposons de former les enseignants à l'analyse multi-reférentielle de leurs classes, aboutissant par là à des changements concernant leur capacité d'analyse, et leurs représentations (de l'apprentissage, de l'enseignement, de la connaissance, du groupe-classe).
3. Groupe et dispositif de formation
  Par groupe de formation nous comprenons une possibilité de développement, une virtualité qui devient existence par l'intermédiaire d'un dispositif groupal. C'est une praxis, un processus dialectique "déclenché par les croisements et les nouements voulus entre des membres singuliers réunis temporellement et spatialement pour donner de l'élan à quelques finalités communes" (De Brassi, J.C. page 89, 1990).
  C'est un parcours de formation partagé, donnant lieu à ce que dans un espace commun chacun produise des transformations dans l'exercice de ses fonctions, selon son propre projet professionnel et en réciprocité avec les autres membres d'un groupe.
  Le dispositif groupal de formation rend possible qu'un ensemble de personnes devienne un groupe; il provoque le groupal et la groupalité, fait place à la diversité, et permet l'analyse et l'interprétation de ce champ de problématiques.
  C'est un accord de personnes, de temps, d'espaces, de ressources, d'objectifs, qui crée les conditions pour la production des transformations dans les sujets et dans l'exercice de leur profession. Son intention est de rendre plus facile le développement personnel orienté vers une fonction et un rôle professionnel.
  A différence de la méthode ou de la technique le dispositif est le produit d'une pensée stratégique qui fait une analyse de situation et qui observe la complexité du champ et y pose des alternatives d'action diverses. Il est stratégique en tant qu'il "élabore un ou plusieurs scénarios possibles. Depuis le début il se prépare, s'il arrivait quelque chose de neuf ou d'inattendu, à l'intégrer pour modifier ou enrichir son action" (Morin, 1996, page 127).
  Le dispositif est un artifice complexe qui:
- dispose un ensemble d'actions, en exerçant ainsi le pouvoir, mais en créant aussi le conditions pour que ce pouvoir soit analysé;
- se dispose à provoquer dans d'autres de la disposition pour, de l'aptitude à. Il ouvre le jeu de la potentialité, de la possibilité, fuyant ainsi ce qui est déterminé;
- a un caractère producteur lié à l'intentionnalité de provoquer des changements;
- est stratégique, il pose -dans un reseau de rapports- une combinatoire de composants complexes répondant aux situations changeantes dans lesquelles il opère;
- est un espace potentiel qui fait place à ce qui est nouveau, à la transformation;
- inclut en soi la diversité de dimensions qui le traversent (sociale, historique, idéologique, institutionnelle, groupale, subjective, désirante, etc.), travaille sur la multidimensionnalité en dépassant la progression lineale. Il peut être représenté moyennant des textures, des volumes, des lignes de bifurcation, des courbes, des plis et des replis, depuis des perspectives diverses, selon où et comment soient placés l'oeil de l'observateur et le vertice de l'analyse;
- pose des champs de visibilité et d'invisibilité pendant le processus.
  Pour nous, le concept de dispositif est prometteur en ce qui concerne l'opération et l'action en formation, il pousse à être analysé et découvert au fur et à mesure qu'on le met en oeuvre.
  Finalement, nous énoncerons quelques caractéristiques qu'un dispositif de formation devrait avoir:
- Il devrait être un révélateur de signifiés, un fomentateur de sens implicites et explicites, de liens avec le savoir et avec les autres, de représentations conscientes et imaginaires.
- Il devrait être un analysateur qui mette à l'analyse ce qui
se révèle dans son intérieur. Pour cela faire il faut: depuis l'affectif, offrir une ambiance intersubjective à contenance pour permettre la croissance mutuelle; il devrait avoir le caractère de faciliter, la capacité de "rêverie" nécessaires à transformer des affections et des émotions en éléments symbolisables et pensables; depuis ce qui est technique, il devrait assurer que dans le groupe soit accomplie la tâche d'analyse, puisqu'il n'y a pas d'analysateur sans un analiste et sans une analyse.
- Il devrait être un organisateur technique, qui articule les conditions pour son dessin, pour sa mise en pratique, sa realisation et son évaluation. Ce caractère d'organisateur garantit l'intentionnalité de changement et l'efficacité du dispositif.
- Il devrait être un déclencheur de transformations en plusieurs sens: des apprentissages sociaux et des rapports inter-personnels; des connaissances et des savoirs; des pensées et des réfléxions; de la circulation fantasmatique et de l'imaginaire; de la prise de conscience de la fonction pédagogique et ses fictions, de la nécessité de formation, de ce qui est politique.
4. Le dispositif de formation-recherche
  Il s'agit d'un dispositif à caractère clinique, s'orientant vers le suivi en profondeur de chaque enseignant y participant pendant une année scolaire, et lui facilitant l'analyse de la classe qu'il aura choisie.
  C'est un dispositif complexe où l'on peut reconnaître des différences et des spécificités, en même temps que des articulations dues à sa complexité.
4.1. Le dispositif de formation DIAMCLE (Dispositif d'Analyse Multirréférenciée des Classes Scolaires)
  Le dispositif a été dessiné dans le cadre des analyses conceptuelles déjà posées. On a convoqué un petit groupe de 11 enseignants d'une école, ceux qui ont participé volontairement pour se former à l'analyse et à la réfléxion sur leurs propres classes et sur eux mêmes. On a travaillé avec une équipe de coordinateur et co-coordinateur, aux fonctions différenciées mais complémentaires, laquelle a opéré prenant comme objet les processus et les transformations dans le groupe de formation et dans les sujets qui l'ont intégré. On l'a divisé en deux parties, la première de 9 réunions, la deuxième de 4, étant chacune de 90 minutes. La première a été orientée à former à l'analyse, la deuxième à rendre favorable le passage à l'acte d'enseigner. La tâche a consisté dans l'analyse de différentes situations de classe (enregistrées sur video et/ou par écrit) ou bien apportées spontanément depuis l'expérience des enseignants; on a pris comme point de départ les connaissances et les représentations qu'ils avaient, en incorporant des approches et des analyses conceptuelles théoriques de textes courts qui avaient été selectionnés pour aborder ce qui est institutionnel, psychosocial, psychanalitique et instrumentale du groupe-classe. Dans la deuxième partie on est parti de l'analyse de cas depuis des lectures multiples, faisant une pratique d'analyse d'après ce qu'on avait vu dans la première partie, et on a posé des alternatives d'action diverses à partir de ces analyses-là.
  Le groupe de formation a été un objet d'analyse; dans chaque séance le co-coordinateur a donné au groupe des données issues de l'observation de la réunion antérieur, ce qui donnait lieu à une analyse groupale qui provoquait l'incorporation de lectures diverses au fur et à mesure qu'on avançait dans les théories et la méthodologie d'analyse.
4.2. Le dispositif de recherche
  Le dispositif méthodologique à l'intérieur de l'étude de cas à l'approche clinique, inclut tout d'abord une analyse institutionnelle avec des observations de classes, d'espaces et de temps communs; avec des interviews à des autorités, à des membres clés, enseignants et élèves; avec des analyses de documents institutionnels (projets, histoire, statistiques, etc.). A partir de cette analyse on ouvre la communication et l'invitation aux enseignants pour participer du DIAMCLE (dispositif de formation). Une fois inscrits on demande à chaque enseignant de choisir l'un de ses cours pour être suivi pendant l'investigation (on oriente la sélection vers un cours qui pose des problèmes à l'enseignant). Un membre de l'équipe prend à sa charge le suivi de chaque enseignant. Avant le DIAMCLE on fait une observation de la classe, une interview en profondeur à l'enseignant, le questionnaire "La classe scolaire" qui permet la recherche dans les classes depuis le social, le psychique et l'instrumental, et le type de classe, et l'épreuve Q de A. Abraham (adaptée) pour s'enquérir du soi même de l'enseignant. Pendant la période de réalisation du DIAMCLE on rend à chaque enseignant individuellement le registre écrit de la classe observé pour qu'il le travaille individuellement au fur et à mesure qu'il avance dans l'apprentissage de l'analyse. Entre les deux parties du DIAMCLE on fait une deuxième interview pendant laquelle on travaille sur l'analyse de la classe observé avec le chercheur qui lui correspond et on fait faire aux élèves soit une interview soit un questionnaire sur la classe scolaire (qui est une version parallèle à celle de l'enseignant, et qui est encore à l'épreuve). Au terme du DIAMCLE on fait une deuxième observation de classe et la dernière interview axée sur la réfléxion à propos du processus de formation et les changements observés.
4.3. Analyse du caractère complémentaire
  La recherche se propose le suivi de chaque enseignant depuis une perspective clinique à travers des données que les différentes sources apportent, ainsi que le suivi de l'enseignant à l'intérieur du dispositif de formation. Celui-ci devient à son tour objet de recherche grâce à l'observation et au registre de ses réunions, à l'analyse de l'implication de ses coordinateurs, à l'analyse multi-référenciée et au suivi clinique dans sa singularité et ses processus.
  Voyons les points d'articulation et de différenciation des deux composants du dispositif. Recherche et formation se sont articulés en tant que: le DIAMCLE est devenu objet de recherche; le suivi singulier de chaque enseignant a été complémenté avec son exercice dans le DIAMCLE; on utilisa dans la formation des cadres théoriques-épistémologiques, des instruments et des méthodologies d'analyse propres à la recherche (adaptés aux enseignants), c'est pourquoi des résultats de projets préalables ont été transféré aux enseignants en formation; des résultats des analyses du DIAMCLE et du suivi de chaque enseignant se sont entrecroisés; dans les deux se sont utilisés l'approche clinique et l'étude de cas; le dessin du dispositif a inclus les données de l'analyse institutionnelle préalable et le DIAMCLE un travail de description et de réflexion à propos des traits institutionnels; le DIAMCLE a offert un espace de contenance dans lequel les enseignants ont pu, s'ils le voulaient, verser et partager des anxiétés propres à la situation d'observation. Certes, la coordination maintenait l'encadrement de ne pas prendre en observation les situations des classes observées, et de les lier au processus d'entraînement en marche.
  On a maintenu différenciés: le travail dans le groupe de formation et dans le suivi de chaque enseignant, et les analyses de leurs classes et leur soi-même; les espaces groupal (DIAMCLE) et bi-personnel (interviews); les analyses propres à la recherche des nécessaires pour le processus de formation dans le DIAMCLE.
  Finalement, les changements atteints ont été le résultat de l'ensemble du dispositif en tant que chaque enseignant a pu modifier des conduites aussi bien pour le travail dans le DIAMCLE que pour les échanges plus personnelles dans le suivi. Les deux processus sont actuellement objet d'analyse.
  Le DIAMCLE et ses processus
  L'analyse des enregistrements du groupe de formation permit d'ouvrir, à posteriori de leur réalisation, l'ensemble des catégories suivantes:
- les représentations des enseignants et des coordinateurs à propos de l'enseignement, de l'apprentissage, etc. (les interventions des enseignants; leur modalité de rapport avec le savoir; la coordination et ses modalités d'intervention);
- les sujets abordés (les tâches; l'activité mentale émotionnelle-rationnelle; les caractéristiques propres à un dispositif; l'institution et ses traits).
  Ces catégories-là ont donné lieu à des sous-catégories.
  On transcrira quelques situations pour montrer le dispositif en oeuvre. Celles-là montrent le fonctionnement du dispositif concernant les représentations des enseignants à propos du savoir, du "comprendre".
  Réunion nº 6. On ouvre un espace d'analyse à propos du processus partagé dans le groupe. Cristine dit:
  Cristina - Moi, les trois niveaux d'analyse, ça me coûte un effort fou... la référence au groupe d'élèves, au groupe-classe où l'on se place dans le groupe, le fait de passer à nous mêmes... Comprendre et appliquer au groupe d'élèves et à nous les mêmes concepts coûte beaucoup parce qu'on a des paramètres différents pour eux et pour nous. On a du mal à utiliser la même théorie pour nous analyser dans les deux situations, comme enseignants et comme élèves en formation.
  Coordinatrice - la même théorie pour nous analyser, nous...
  Adelaida - et puis, il y a beaucoup de choses à apprendre par coeur.
  Cristina - Voilà ce qui m'est arrivé aujourd'hui en 5ème. 1ère.: On avait étudié un texte de O'Donnel sur la démocratie et la citoyenneté et il y a eu un colapse total.
  Je les ai interrogés et les élèves étaient indignés et ils ont dit: "Nous n'avons rien compris", "Nous n'avons compris même pas le titre"... et bien, c'est vrai, moi, en lisant Bion, c'était pareil (des rires) je n'ai compris même pas le titre...
  Coordinatrice - Je prendrais ce que Cristina a dit et ce qu'on a posé comme difficulté de l'étude. Qu'est-ce que cela signifie "je ne comprends pas"? Quelles sont les formes du comprendre?. "Je ne comprends pas", "nous ne comprenons pas" peuvent signifier beaucoup de choses.
  Elsa - Nous avons été structurés dans des situations rigides, nous, on nous a appris différemment.
  Le professeur de l'école secondaire s'intéressait bien peu à ce qui m'arrivait.
  Elena - Ce que Cristina a dit c'est bien vrai. On a dû changer, nous, on devait réciter de telle à telle page, comme des perroquets. Aujourd'hui on demande aux élèves: "D'après vous, qu'est-ce que l'eau?". Autrefois on n'y aurait même pas pensé.
  Nora - Des choses nouvelles jaillissent de nous.
  Elena - Nous nous trouvons entre deux feux, attention! deux versions. Nous nous trouvons ...
  Elsa - ... entre deux feux
  Nora - ... deux cultures
(Elena raconte une expérience scolaire ayant eu lieu le matin, grâce à laquelle elle s'est rendu compte qu'elle devait changer son discours (à propos de la drogue et d'autres vices) car elle avertit qu'il y avait là une élève anoréxique.)
  Nora - Mais toi aussi, tu as changé!
  Adelaida - Je pensais au "je ne comprends pas"...
  Florencia - J'ai tout le temps rappelé la première réunion du groupe, cet article qui disait que le savoir reste ouvert, qu'il ne doit pas fermer. J'ai tout le temps rappelé cela ... c'est tout à fait différent de ce qui se passait autrefois... le savoir multi-fonctionnel, aux différents endroits...
  Nora - ...qu'il ne reste pas limité, qu'il y a d'autres façons d'apprendre, avec d'autres approches peut-être...
  Cristina - quand on découvre le moyen... se voir soi même en train d'apprendre..., que les élèves se voient eux-mêmes en train d'apprendre... Voilà ce qu'on peut enseigner.
  Réunion 7. La coordinatrice propose d'évaluer le processus de formation
  Adelaida - J'ai tout lu une fois. Je peux suivre le discours mais je ne peux pas le reproduire.
  Delfina - Hier on a déjà fait ce commentaire-là...
  Adelaida - Les idées ne sont pas trop étranges mais je ne peux pas me les approprier, il y a une différence entre vivre et verbaliser... ce sont des textes qui demanderaient plus longtemps pour les fixer et les mémoriser.
  Coordinatrice - Vous parlez de la difficulté mais il y a des indices -tel qu'on a vu dans la dévolution de la dernière réunion- sur votre travail, ainsi que des données telles que ...(elle synthétise quelques expériences antérieures) qu'on devrait inclure pour analyser cette difficulté-là. Vous avez déjà fait des analyses de classes, vous avez utilisé des références aux théories...
  Delfina - Ce qui manque c'est l'appropriation...
  Cristina - Eh bien, ce sont les clics qui s'y produisent, les rapports entre la théorie et les exemples...
  Coordinatrice - (Elle reprend le cas de 5ème. 1ère. et montre comment celui-là a donné lieu à des significations sur le fait de comprendre.) Maintenant, vous avez la sensation de "ne pas comprendre", c'est pareil. Nous, depuis la coordination, nous vous disons que nous avertissons de la compréhension dans les travaux que vous faites, même si cela ne coïncide pas avec votre représentation de fixer et de répéter. (Elle prend l'exemple d'une classe analysée d'après les hypothèses de base de Bion) Vous rappelez-vous? L'élaboration implique un travail plus grand que la répétition qui est mécanique.
  Elena - Certes!... on est dans le vécu!
  Coordinatrice - On fait un travail du fait de penser...
  Elena - Maintenant, je le vois plus clair, c'est un processus... lent...il ne s'agit pas de pousser sur un bouton et se transformer en ce qu'on voudrait être, l'idéal; nous traînons un bagage d'années. Ceci me rend tranquille, deux minutes avant je me sentais vraiment mal...
  Cristina - Il s'agit d'un type de savoir différent, il ne s'agit pas d'incorporer une grande quantité, c'est plus lent à cause des liens qu'il faut établir.
  Adelaida - Excusez-moi, mais je parlais de l'apprentissage de l'anglais, et là, il faut mémoriser: "desk" c'est cela (elle le montre du doigt) et il faut le rappeler.
  Coordinatrice - Il y a un processus que le groupe a fait du fait d'apprendre une langue à d'autres apprentissages. Une chose est rappeler le concept d'une hypothèse de base, et une autre est entrer dans la salle de classe, y observer le manque d'intérêt, l'apathie, et alors penser à ce qui est émotionnel dans la classe, l'analyser.
  Adelaida - Moi aussi, j'ai dit cela. Ce qui m'arrive c'est que je ne rappelle pas les mots, mais le texte je le comprends.
  Elena - Il y a une première compréhension, un vécu...
  Cristina - On ne trouve pas, peut-être, le mot juste.
  Elena - Moi, ce qui me vient à la tête c'est mes propres mots, mais les gosses, ce qu'ils font c'est "s'en tirer".
  Coordinatrice - Je détecte cette attitude-là et alors je peux...
  Elena - ...essayer de comprendre le pourquoi.
  Cristina - A mon avis, c'est utile quand j'exprime quelque chose qui a des difficultés pour moi, je l'applique à moi d'abord. Dans le cas de O'Donnel, mon exemple, pour comprendre ce qui arrive aux élèves je me demande ce qui m'arrive.
  Coordinatrice - C'est en quelque sorte le chemin que le groupe doit suivre. On observe "nous ne comprenons pas" chez les élèves et on analyse ici le "je ne comprends pas".
  La séquence transcrite montre en pratique comment le dispositif permet le changement grâce à la génération d'un groupe contenant où la difficulté est partagée dans un espace qui devient révélateur des représentations à propos du connaître-comprendre, analysateur des signifiés et des sens attribués, organisateur des échanges et provocateur de changements chez les enseignants. Le dispositif agit en vue de transformer les représentations, qui passent peu à peu d'un savoir tel que "fixation, mémorisation, répétition" à un savoir "vécu" émotionnellement dans le groupe, "ouvert", analysé réfléxivement chez les élèves et chez nous mêmes.