Biennale 5
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Pratiquer la philosophie avec des élèves en échec scolaire

Auteur(s) : PETTIER Jean-Charles

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bull2.gif (117 octets)   Cette question trouve tout son sens lorsqu'on l'envisage comme l'intersection moderne d'un questionnement sur le droit (peut-on, dans la perspective des Droits de l'Homme, envisager un "droit à la philosophie pour tous" ?), d'un questionnement sur le fait démocratique (qu'est ce qu'être citoyen dans une démocratie moderne ?, quel enseignement pour cette citoyenneté ?), d'un questionnement sur la nature d'un enseignement philosophique (selon quelles références penser cet enseignementé, enseigner la philosophie, est-ce philosopher devant des élèves ?, existe t-il une didactique du philosopher ?), d'un questionnement pratique enfin (y a t-il des modalités possibles d'enseignement philosophique avec des élèves en grande difficulté scolaire ?).
bull2.gif (117 octets)  I/La question du droit à la philosophie pour tous
bull2.gif (117 octets)  Elle s'articule selon nous directement à la problématique des Droits de l'homme. Ceux-ci, en effet, s'appuient (dès leur émergence en 1789, puis dans les différentes versions qu'ils vont connaître) sur une conception de l'homme :
- comme être libre, notamment intellectuellement, puisque doué d'une conscience éclairée résultant de sa raison,
- comme un être social, la société constituant alors le lieu de possibilité même d'expression de sa liberté.
bull2.gif (117 octets)  Mais c'est un homme achevé qui est par là décrit. Si les droits de l'homme déterminent un droit à l'éducation, celui-ci semble se penser sur les perspectives ouvertes par Descartes dans le Discours de la méthode : il s'agit plus de permettre à la raison de se conduire(puisque chacun possède le "bon sens"), que de la faire advenir.
bull2.gif (117 octets)  Or, si l'on considère :
- d'une part la raison comme la faculté de juger, le plus objectivement possible (donc en se donnant les références les plus universelles pour ce faire),
- d'autre part, la philosophie comme l'activité même qui vise cette élaboration universelle d'une vérité, par le développement d'une réflexion conceptualisante, problématisée et argumentée concernant le sens même de l'existence,
- l'importance du rôle joué par la société dans le développement, notamment intellectuel de l'enfant (on peut penser au travaux de Vygotski sur la psychologie génétique, mais aussi aux constatations opérées à partir des cas d'enfants sauvages),
bull2.gif (117 octets)  Comment ne pas revendiquer un droit à la philosophie pour tous, synthétisant les perspectives déjà ouvertes par les Droits de l'homme, les conditions réelles du progrès individuel, et le rôle que doit jouer la société comme lieu nécessaire de réalisation de l'essence humaine à son plus haut degré : la liberté ?
bull2.gif (117 octets)  II/Traduction politique du "Droit à la philosophie"
bull2.gif (117 octets)  II.1/Démocratie et république
bull2.gif (117 octets)  Notre perspective démocratique se veut la traduction pratique dans le droit positif de la conception d'un homme par essence libre. Cette liberté s'articule à la réciprocité dans le droit, dans lequel elle trouve pour chacun les mêmes garanties.
bull2.gif (117 octets)  S'il est reconnu en droits, par la possibilité qui lui est ouverte d'exprimer (dans tous les sens du terme) sa volonté, dans les limites fixées par la réciprocité, chacun est reconnu aussi dans son être propre, son individualité, son originalité, qui le rendent fondamentalement différent des autres.
bull2.gif (117 octets)  Là se joue l'idée républicaine : la considération de ces différences si importantes qu'elles empêchent les réductions de l'Un à l'Autre fait de la possibilité d'expression individuelle une source de richesse sociale par sa diversité, qui pourtant semblerait au premier abord s'opposer à la possibilité même de la vie sociale. Cette possibilité d'expression ne peut alors se penser qu'à travers les critères d'une raison à l'œuvre, dans un double sens : comme ordonnatrice des rapports interindividuels, et comme un aspect de ces rapports.
bull2.gif (117 octets)  L'intérêt bien mesuré de chacun (au sens où c'est sa seule possibilité d'exister en tant qu'être original) se réalise dans sa capacité de pouvoir s'exprimer, et de pouvoir s'enrichir par la confrontation avec l'autre, irréductible à soi. Cette identité des perspectives individuelles créée un intérêt commun qui les transcende, un système de valeurs communes supérieures par leur universalité.
bull2.gif (117 octets)  Sa reprise au niveau général, politique, traduisant dans les faits la supériorité de l'universel dans l'intérêt même de l'individuel s'appelant alors le principe républicain.
bull2.gif (117 octets)  Il y a dans ce principe une visée supérieure, puisqu'elle représente l'abstraction universalisante des particularités humaines (dont une traduction serait les droits universels de l'homme). Elle conduit à placer d'emblée la réflexion sur le mode de l'universel (abstraction à l'essence des variétés individuelles), traduction politique adéquate des caractéristiques raisonnables (par la nature de l'organisation mise en œuvre) et sensibles (qui vont être rendues possibles par cette organisation) de l'être humain.
bull2.gif (117 octets)  La démocratie républicaine semble alors rendre compte adéquatement du "fait" humain : - des raisons à l'œuvre et des sensibilités individuelles,
- des volontés individuelles, mais la nécessité pour elles de se penser sur le mode de l'universel qui leur permettra de se réaliser.
bull2.gif (117 octets)  Pour autant, ce fait humain est aussi, le fruit d'un processus d'éducation. Par cette éducation, la démocratie non seulement se donne les moyens de son fonctionnement (elle permet la mise en œuvre des choix au plus haut niveau possible), mais assure la réalisation de son essence : elle "permet l'humanité", qui en retour la jugera à l'aune de ses ambitions.
bull2.gif (117 octets)  La citoyenneté démocratique, plus que la simple manifestation positive des droits de l'homme, consistera en cette capacité voulue en chacun par l'éducation d'une remise en cause des principes mêmes du système suivant leur évaluation.
bull2.gif (117 octets)  La démocratie appelle l'éducation : quel sens faut-il donner à ce terme ?
bull2.gif (117 octets)  II.2/Le fait éducatif en démocratie républicaine
bull2.gif (117 octets)  Avant toute chose, ce fait éducatif concerne chacun, en tant qu'homme en formation et futur citoyen. Si la citoyenneté trouve ses limites dans les capacités individuelles d'exercice de la raison pour autant, rien ne permet a priori de refuser l'accès à l'éducation la plus complète possible (donc à terme à une citoyenneté épanouie) à ceux dont les résultats scolaires pourraient faire penser que l'éducation doit s'arrêter tôt.
bull2.gif (117 octets)  Par ailleurs, en tentant de caractériser la démocratie, et l'essence de la citoyenneté qui en découle, on vient en même temps de caractériser les principes d'une éducation démocratique :
- cette éducation doit permettre à chacun de se réaliser dans son originalité, c'est-à-dire en développant ses caractéristiques sensibles, un des aspects de cette sensibilité étant une éducation artistique,
- plus essentiel sans doute : elle doit d'abord lui permettre de développer ses caractéristiques de raison, aspect prééminent :
- en ce qu'il permettra d'organiser ensemble les sensibilités (par là de "penser" les autres sensibilités),
- en ce qu'il permettra à chacun d'exister comme être de raison, et par là être libre capable d'exercer un jugement éclairé qui se traduira par la manifestation d' une volonté autonome,
- en ce qu'il permettra aussi au corps social d'exister en chacun ( donc dans les faits), comme "individu social particulier" ou nation, si l'on pense ce corps social dans le cadre historique national, ou comme universel, si l'on pense le problème politique humain dans son essence.
bull2.gif (117 octets)  On pourrait alors voir cette éducation essentiellement comme la transmission à une raison en formation des connaissances objectives (donc détachées de tout conditionnement) élaborées par la raison dans la science.
bull2.gif (117 octets)  L'instruction suffirait donc, si l'ensemble des problèmes humains pouvait se résumer en une connaissance à élaborer, puis à transmettre. Mais la condition humaine trouve son originalité dans sa possibilité de conscience, qui en lui permettant l'exercice d'une volonté éclairée, lui ouvre en même temps l'espace de la liberté intellectuelle et des problèmes de choix, de sens. Ne pas faire apparaître cet aspect problématique du choix dans l'éducation, serait ramener celle-ci au dressage, au conditionnement. L'éducation doit donc permettre à ce cadre problématique d'émerger en chacun, pour qu'il puisse à terme effectuer dans ce cadre les choix en toute liberté, donc le plus objectivement, rationnellement possible.
bull2.gif (117 octets)  En bref, l'éducation du citoyen (mais surtout à travers lui de l'homme) semble passer nécessairement par une éducation de la raison, donc par l'accès à la philosophie pour tous, sans restriction a priori (au nom du principe d'éducabilité) pour cause de difficulté scolaire par exemple.
bull2.gif (117 octets)  Se pose alors la question des formes de cette éducation, question d'autant plus prégnante que la philosophie est une activité fortement marquée culturellement.
bull2.gif (117 octets)  III/Quel enseignement philosophique faut-il penser "pour tous" ?
bull2.gif (117 octets)  III.1/Les a priori du paradigme de l'enseignement philosophique classique
bull2.gif (117 octets)  La conception classique de l'enseignement, appliquée traditionnellement dans un cours de philosophie, est l'expression d'une idée de l'enseignement qui voudrait que le contact d'une raison avec le travail de la Raison suffise à la mettre "en branle", lui permette alors de partager les questionnements universels mis en œuvre et la fasse progresser : la philosophie serait alors à elle même sa propre pédagogie. Au regard d'un enseignement "de masse", ce type d'enseignement pose problème en ce qu'il nécessite :
- un intérêt spontané pour les questions posées, la capacité d'en saisir les enjeux universels, et les formes sous lesquelles on les pose,
- des compétences de lecture élevées, au regard de la difficulté propre des textes philosophique consacrés par la tradition,
- une maîtrise conceptuelle élevée dès le début de l'enseignement,
- un acquis culturel (au sens large du terme) établi, en conformité avec le bain culturel scolaire, capable d'être mobilisé pour la compréhension du cours,
- des qualités "scolaires" bien ancrées.
bull2.gif (117 octets)  III.2/Les élèves en échec peuvent-ils "faire de la philosophie" ?
bull2.gif (117 octets)  Enoncées telles quelles, les exigences d'un enseignement classique suffiraient à en disqualifier les élèves en échec scolaire :
- pour ces raisons proprement scolaires : faible niveau général, en particulier maîtrise incertaine de l'écrit , difficultés à l'abstraction, difficultés de concentration,
- pour des raisons sociales aussi : rejet de l'école, inadéquation des référents culturels au modèle scolaire.
bull2.gif (117 octets)  S'il n'y a d'enseignement philosophique que celui qui correspond au paradigme classique, alors, il faut en nier la possibilité d'une généralisation. Mais les éléments d'appréciation internes au modèle pédagogique véhiculé par cet enseignement nous le font questionner :
- sa réussite : dans un pays comme la France, où il est pratiqué de façon assez massive pour des élèves à compétences scolaires pourtant élevées les résultats (pour autant qu'ils se traduisent dans les notes!) lors des examens sont décevants, la majorité des élèves n'ayant pas la moyenne dans les conditions imposées
- son enfermement : centré sur la matière, par le postulat de l'universalité de la raison, il néglige ou refuse de tenir compte des éléments mis en évidence par les Sciences de l'éducation :
- la diversité des parcours d'appropriation de la connaissance, amenant l'idée de "stratégie individuelle d'apprentissage"
- la nature même du mécanisme d'appropriation de la connaissance (par remise en cause des représentations initiales au regard de problèmes qu'elles n'intègrent pas, traitement de ces problèmes et élaboration de nouveaux schèmes de pensée)et leur traduction pédagogique (les notions d'objectif-obstacle et de "situation problème" par exemple).
bull2.gif (117 octets)  Enfin, c'est proprement la nature de ce que devrait être un enseignement philosophique qui nous fera questionner ce modèle : ce qui est visé à l'école plus que la connaissance exhaustive (qui pourrait y prétendre d'ailleurs ?) des textes philosophiques, c'est la réflexion qu'ils véhiculent. Non pas pour elle-même , d'ailleurs, mais par sa supposée capacité d'entraîner une réflexion philosophique autonome chez l'élève.
bull2.gif (117 octets)  Au regard de ce critère, le problème posé par l'enseignement philosophique se déplace. il n'est plus de savoir si l'enseignement philosophique classique peut être généralisable, mais, sans le rejeter absolument, s'il n'existe pas d'autre moyens pour l'apprentissage du "philosopher", dont certains seraient plus adéquats aux perspectives d'un enseignement généralisé.
bull2.gif (117 octets)  III.3/D'autres modèles d'enseignement
bull2.gif (117 octets)  Qu'est ce que philosopher ? La réponse à cette question, à l'origine d'une "didactique" du philosopher permet de décrire cette activité comme l'articulation de trois processus : conceptualiser, problématiser, argumenter, mis à l'œuvre lors d'un raisonnement concernant les questions universelles posées à l'homme par sa présence dans le monde, sur le sens de son existence.
bull2.gif (117 octets)  D'autre part, considérer les acquis des Sciences de l'éducation, oblige à tenir compte des représentations de base des élèves pour leur articuler les problèmes développés par la philosophie ; quitte même à partir directement des problèmes des élèves pour les amener à un questionnement à visée universelle. Dans ce type de pratique, l'oral a une place prépondérante : il permettra l'émergence des représentations individuelles, le développement d'une réflexion autonome, notamment aussi par la confrontation aux autres élèves et la nécessité de l'argumentation rationnelle.
bull2.gif (117 octets)  C'est à un renversement des perspectives de l'enseignement philosophique que l'on parvient alors, en visant sa généralisation et sa réussite : on passe d'une pédagogie basée sur la transmission de questionnements pérennisés dans un "savoir" institutionnalisé, à une pédagogie centrée sur l'élève, visant une élaboration interne progressive d'un questionnement et des moyens d'y répondre librement.
bull2.gif (117 octets)  IV/Travailler avec des élèves en difficulté scolaire
bull2.gif (117 octets)  Quelles adaptations faut-il penser ?
bull2.gif (117 octets)  Ces adaptations prendront deux directions :
- elles peuvent être liées aux problèmes généraux de l'âge des élèves,
- elles peuvent être liées aux difficultés qu'ont ces élèves (psychologiques, relationnelles, sociales, scolaires, etc).
bull2.gif (117 octets)  Concernant l'âge des élèves, le problème de l'enseignement philosophique a trouvé une première réponse dans le programme de philosophie pour enfants de M. Lipman. Suffirait-il de l'adapter tel quel ?
bull2.gif (117 octets)  IV.1/Le programme de M. Lipman
Cette méthode présente, dans les perspectives variées qui intéressent une éducation démocratique, de nombreux intérêts :
- éthiquement : elle permet par ses modalités de reconnaître à chacun ( chaque élève donc) son statut de sujet,
- politiquement : à travers la mise en œuvre de la communauté de recherche, elle semble rendre compte adéquatement de l'idée démocratique, comme mode de coopération, mais aussi lieu de débat,
- philosophiquement : c'est proprement l'activité philosophique qui est visée, la capacité de se forger une pensée autonome, plutôt que la connaissance d'une culture spécifiquement philosophique,
- épistémologiquement : elle cherche à favoriser l'attitude intellectuelle de détermination de la vérité, en particulier par la réflexion sur les formes du discours (avec l'idée de "bien-penser"),
- didactiquement : elle pose la possibilité d'un travail philosophique gradué suivant les âges, à base d'un matériel spécifiquement pensé pour l'enseignement , elle s'articule dans une praxis qui donne son sens à la recherche, plus que dans un problème censé, par sa seule présentation raisonnée faire sens à toute raison, pragmatiquement :
1/elle fonde la pratique philosophique sur son utilité,
2/Elle permet de caractériser cette utilité : il s'agit d'améliorer par la pratique philosophique la qualité de vie.
bull2.gif (117 octets)  Ces intérêts majeurs sont cependant à relativiser par des problèmes liés :
- au statut de la vérité, comme le fruit de l'intersubjectivité, à la source de l'objectivité. En postulant ceci, n'est-on pas de fait dans le cadre d'une position philosophique particulière , que l'on favorisera alors de fait dans la classe, au détriment des autres ?,
- à l'idée d'un "bien penser" : comme respect des formes logiques du discours : respecter les formes logiques suffit-il à un discours pour être respectable?
- au statut de la communauté de recherche en classe : elle se veut un modèle réduit de la démocratie : n'est-elle pas plutôt "un" modèle de la démocratie?
- aux modalités mêmes du travail en communauté de recherche :
- le rejet de la possibilité d'une vérité unique : si toutes les opinions peuvent être (et doivent être) examinées par la communauté de recherche, ont-elles pour autant ( à qualité de forme égale ) toutes même valeur, sur le fond ?
- l'idée d'adapter l'expérience scolaire à l'expérience sociale présente toujours le risque de n'en rester que là, d'empêcher l'élève de progresser en ne considérant que ce qu'il est ?
- la référence privilégiée à la discussion ne présente t-elle pas le risque de favoriser plutôt les élèves qui ont la capacité de synthétiser leurs idées à partir de positions entendues, au détriment d'autres types d'élèvesé
- l'enseignant peut-il réellement être un "pair" dans la communauté ?
- à la nature des outils employés :
- pourquoi rejeter nécessairement les références philosophiques en tant que telles ?
- ne proposer comme modèle de fonctionnement à la classe qu'une communauté de héros romanesques, n'est-ce pas risquer de véhiculer des formes privilégiées de pensées ?
bull2.gif (117 octets)  L'ensemble de ces considérations critiques nous permet de fixer maintenant les directions générales d'un travail avec des élèves en difficulté scolaire.
bull2.gif (117 octets)  IV.2/Directions de travail, pour un enseignement "philosophique" avec des élèves en difficulté scolaire
bull2.gif (117 octets)  Ces directions, que l'on a traduites dans des séquences à destination des élèves de l'enseignement spécialisé, consistent :
- à privilégier l'idée de communauté de recherche (comme moyen et comme but d'une réflexion en classe), car elle nécessite par sa constitution même, une réflexion sur les conditions d'un "agir communicationnel", à la base de la vie démocratique même,
- mais à sauvegarder les aspects individuels du travail de classe, pour personnaliser davantage les travaux, les différencier parfois en fonction de difficultés propres,
- à penser le travail sur l'écrit à partir de textes brefs, permettant d'entrer rapidement dans des situations susceptibles de discussions argumentées(un support intéressant se trouve dans les dilemmes moraux, tels qu'ils sont pratiqués en Belgique, d'autres supports problématisants sont possibles faisant par exemple apparaître les choix multiples correspondant aux grandes options philosophiques)
- mais à varier les supports de travail pour permettre à chacun, à travers son mode de structuration cognitive, de s'y retrouver (passer par le dessin, la schématisation, l'écriture de textes brefs, voire la simple liste de mots à expliquer ensuite) et
- à prévoir des répertoires d'activités dans lesquelles puiser quand le cas se présente, plutôt qu'un programme, pour se centrer sur l'élève plutôt que le conformer à un déroulement dans lequel il ne se reconnaîtrait pas,
- à articuler les problématiques philosophiques à des problèmes concrets que les élèves rencontrent quotidiennement, qui leur donneront un sens immédiat, tout en visant à s'en extraire mais
- à ne pas pour autant renoncer à des éclaircissements purement philosophiques, en les situant précisément par rapport à leurs auteurs (permettant ainsi de tisser des liens avec une "culture" générale, de créer des liens généraux de sens), allant jusqu'à envisager la confrontation avec des textes philosophiques d'un accès plus immédiat,
- à travailler dans l'inter-relation entre activité philosophique et autres disciplines d'enseignement, pour amoindrir les difficultés de ces élèves à donner un sens global aux activités scolaires,
- à utiliser des exercices spécifiques, au besoin, pour aider la mise en place de concepts, problèmes, arguments au regard d'une problématique travaillée par ailleurs
- à utiliser le tableau mural comme support privilégié de la constitution de la classe en communauté, comme support d'examen de la parole de l'autre (et donc possibilité d'examen de cette parole dégagée de son contexte relationnel parfois difficile), comme support d'une progression philosophique possible, en en faisant le lieu de la parole commune du groupe, avec ses incohérences qu'il permettra de rendre visible, de retravailler
- à utiliser les tableaux, comme support des représentations individuelles, origine d'un "conflit socio-cognitif", source d'un élaboration plus développée, d'un passage par le biais du "général" à "l'universel",
- mais à ne pas chercher nécessairement à déstabiliser les élèves trop brusquement dans leurs croyances (au regard des difficultés psychologiques que cela peut entraîner chez eux, quitte parfois à renforcer ces croyances pour, en en cherchant les fondements, mieux les examiner ensuite.
bull2.gif (117 octets)  On peut constater que ces directions très générales (que l'on pourrait préciser par des mises en oeuvre concrètes), élaborées à partir d'un travail théorisé avec des élèves en difficulté scolaire, semblent en fait constituer le cadre même d'un enseignement philosophique. Il semble en effet que l'intérêt d'une réflexion vers les élèves les plus en difficulté est qu'elle oblige à considérer les problèmes essentiels de la didactique philosophique même, et faire de cette recherche la source d'une théorisation de l'enseignement (on sait que, de la même façon, les courants pédagogiques se sont souvent constitués à partir de travaux avec les élèves les plus en difficulté).
bull2.gif (117 octets)  Il ne s'agit là que d'un point de départ. On peut espérer qu'il va susciter, par la nature des enjeux qu'il véhicule, une dynamique forte de recherche, de débats, qui ne pourront qu'enrichir le rapport de la discipline philosophique aux élèves.