Biennale 5
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Développement de compétences collectives dans des dispositifs emploi-formation en milieu rural

Auteur(s) : DIEUMEGARD Gilles

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bull2.gif (117 octets)   1°/ Un développement du salariat agricole et rural
bull2.gif (117 octets)  Dans le monde agricole et rural, la situation de l'emploi connaît actuellement des changements notables.
bull2.gif (117 octets)  Tout d'abord, dans les exploitations agricoles, la part du travail salarié tend À s'accroître. Même les exploitations de polyculture - élevage, qui depuis la disparition des " commis de ferme " employaient très peu de salariés, y ont à nouveau recours. Mais les besoins évoluent vers une demande d'ouvriers agricoles très qualifiés, capables de seconder efficacement l'exploitant ou de gérer seuls un atelier de production. Par ailleurs, les agriculteurs s'organisent souvent à plusieurs pour employer un salarié à temps partagé. Ainsi, on voit se constituer un grand nombre de groupements d'employeurs agricoles.
bull2.gif (117 octets)  Ce développement du salariat peut être vu comme une menace pour l'installation de jeunes agriculteurs s'il traduit la concentration des exploitations. Mais il devient aussi une voie d'intégration dans l'agriculture de jeunes non issus du milieu agricole. Dans les trajectoires sociales, la dichotomie entre installation en tant qu'agriculteur et salariat agricole tend à s'estomper. Il n'est pas rare que les jeunes souhaitant s'installer en agriculture, et particulièrement ceux qui ne reprennent pas l'exploitation de leurs parents, demeurent un temps salariés agricoles. Ainsi, ils se constituent un capital pour s'installer dans de bonnes conditions : des finances, de l'expérience et une bonne insertion dans le milieu professionnel.
2°/ Des apprentissages pour les salariés et pour les employeurs
bull2.gif (117 octets)  Pour faire face à ces évolutions, de multiples apprentissages sont nécessaires.
bull2.gif (117 octets)  Les nouveaux salariés agricoles doivent renforcer leurs compétences : les employeurs leur demandent d'être autonomes non seulement dans l'accomplissement des t‚ches, mais aussi dans leur préparation, leur organisation, voire même leur planification (" il doit voir le travail à faire "). Les salariés doivent pouvoir s'adapter à la variabilité des conditions et aux multiples aléas qui caractérisent l'activité agricole. Agissant sur des processus biologiques, il leur faut répondre à des exigences de qualitÈ accrues, et face à des évolutions néfastes, les détecter et réagir suffisamment tôt. Enfin, dans les situations d'emploi partagé, il leur faut développer une forte capacité d'adaptation.

bull2.gif (117 octets)  Mais les employeurs, eux aussi, doivent apprendre. En effet, dans une exploitation agricole, l'arrivée d'un salarié (ou, à un autre niveau, d'un stagiaire ou d'un apprenti) va modifier profondément l'organisation, au niveau du fonctionnement interne, des relations avec l'extérieur, mais aussi des orientations stratégiques de l'exploitation. L'agriculteur devenant employeur va devoir apprendre à travailler avec une personne extérieure, ayant une autre logique que la sienne, bien différente aussi de la traditionnelle " main-d'œuvre familiale ". Par ailleurs, les emplois partagés nécessitent que différents exploitants agricoles se coordonnent et apprennent à assumer collectivement leur fonction d'employeur.
3° / Un développement de "compétences collectives"
bull2.gif (117 octets)  L'arrivée d'une personne extérieure dans une exploitation ou le partage d'un salarié avec d'autres nécessite la mise en place d'une nouvelle organisation. Or, les exploitations agricoles restent de très petites entreprises dans lesquelles les relations interindividuelles prennent une importance particulière. C'est donc souvent après l'embauche, à travers la confrontation des choix et des attentes, des règles explicites ou tacites, et des pratiques quotidiennes de chacun qu'une nouvelle organisation se construit dans une sorte de " transaction " entre le ou les employeur(s) et le salarié.
bull2.gif (117 octets)  Nous avons donc fait l'hypothèse que la mise en place de cette nouvelle organisation procédait de l'apprentissage mutuel d'une capacité à agir ensemble. C'est ce que nous avons désigné par le vocable " compétence collective ".
4°/ La construction de dispositifs adaptés
bull2.gif (117 octets)  Jusqu'à la fin de l'an 2000, le Centre d'Etudes et de Développement de l'Agriculture et des Groupes (CEDAG) conduit une expérimentation sur le développement de ces " compétences collectives " en agriculture. Un réseau de 4 " sites " a été constitué. Chacun de ces sites tente de construire des actions dédiées au développement de " compétences collectives " au sein de dispositifs emploi - formation :
* Chambre d'Agriculture des Côtes d'Armor et centre de formation de Quintenic :
bull2.gif (117 octets)  Une formation en alternance de salariés d'élevage porcin se déroule depuis plusieurs années. Dans ce cadre, un dispositif d'évaluation croisée des compétences au fil de l'apprentissage est expérimenté. Basé sur l'analyse du travail accompli par l'apprenti, il devrait permettre de susciter des interactions fortes entre apprentis, tuteurs et formateurs.
* Association DESFI, Chambre d'Agriculture du Jura, CFPPA de Montmorot :
bull2.gif (117 octets)  DESFI est une association d'insertion professionnelle dans le secteur agricole qui s'adresse à des demandeurs d'emploi peu qualifiés. Elle leur propose de véritables " parcours d'insertion " construits sur mesure : tutorat, formation, mises à disposition chez des agriculteurs. Ce dispositif permet également de travailler avec les agriculteurs la question des " ressources humaines " dans leur exploitation.
* Chambre d'Agriculture du Maine et Loire et Lycée Agricole de Montreuil Bellay :
bull2.gif (117 octets)  Une formation " polycompétence " a été mise en place pour permettre d'offrir à des travailleurs saisonniers des emplois stables, partagés entre des viticulteurs et des Coopératives d'Utilisation du Matériel Agricole (CUMA). Dans ce cadre, les tuteurs préfigurent avec leurs stagiaires l'organisation du travail à temps partagé qui doit être ensuite mise en place de manière pérenne.
* Union Lorraine des Producteurs de Lait :
bull2.gif (117 octets)  L'ULPL est une coopérative de collecte de lait. Elle a organisé un service de remplacement qui permet à des agriculteurs d'être secondé par un salarié temporaire en cas d'absences prévues (congés, mandats électoraux,...) ou impromptues (maladie, accident,...). Pour améliorer la qualité du travail du remplaçant, elle réalise des outils permettant la transmission d'instructions entre remplacé et remplaçant.
5° / L'insertion professionnelle comme production collective
bull2.gif (117 octets)  Au terme d'un an et demi d'échanges et d'élaboration de dispositifs d'action avec les sites engagés dans l'expérimentation, il nous semble que leur approche de l'insertion professionnelle présente des caractéristiques originales, du moins dans le secteur agricole. En effet, dans chaque cas, l'insertion professionnelle est conçue comme la production collective d'un système d'acteurs en interaction (collectif employeurs-salarié, collectif apprenant-tuteur-formateur, collectif remplacé-remplaçant, etc.). De ce fait, les actions ne se limitent pas à la formation d'un " public " particulier, mais tentent plutôt d'appréhender la globalité des interactions en recherchant la construction de jeux " à bénéfice mutuel " entre les acteurs.
bull2.gif (117 octets)  Il nous semble que l'optique du développement de " compétences collectives " aura permis de faire évoluer les compétences des formateurs promoteurs de ces dispositifs. En effet, ils ont dû se constituer une vision stratégique de leur action, identifier les différents acteurs et groupes d'acteurs concernés. Il leur a aussi fallu comprendre que ce qu'ils identifiaient au départ comme " un problème " ne se traduisait pas de la même manière pour chacun de ces acteurs. Il leur a enfin fallu construire des " champs d'action ", des " objets de travail " qui fédèrent les acteurs concernés et permettent de prendre en compte les objectifs de chacun.