Biennale 5
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Dispositif de formation continue des enseignants du cycle secondaire au nouveau curriculum d'éducation civique et conjoncture politico-éducative au Liban

Auteur(s) : ABDUL-REDA Suzanne

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bull2.gif (117 octets)   Une volonté de changement politico-éducatif s'est manifestée dans l'Accord d'Entente Nationale libanais de Taoef (1989), dans le sens de "renforcer l'appartenance et l'intégration nationales ... et d'unifier le livre scolaire dans les matières d'histoire et d'éducation civique". L'opérationalisation de ces orientations s'est progressivement réalisée et a dernièrement donné lieu à l'application des nouveaux curricula scolaires (1998-2001), préparée par la formation continue des enseignants. Vu mon implication dans le dispositif de formation au curriculum de l'éducation civique (première année du cycle secondaire) au cours de l'année scolaire 1998-1999, j'ai synthétisé les objectifs de cette formation et, à partir de l'analyse de mon expérience sur le terrain avec les enseignants, j'ai porté une réflexion critique sur le dispositif de formation, réflexion débouchant sur divers constats.
bull2.gif (117 octets)  Quand bien même le pays baignait dans une ambiance de "quête de consensus national et paix civile", les notions contenues dans le curriculum de l'éducation civique ( l'Etat, la culture, la citoyenneté, l'identité nationale, la souveraineté...) ne se sont pas construites à la base d'études sociales et anthropologiques préalables ou d'une concertation sociale élargie.
bull2.gif (117 octets)  Les concepteurs du dispositif ont occulté les réalités concrètes des enseignants et des établissements concernés par la formation (niveau de qualification, potentiel pédagogique, besoins régionaux, ressources financières et techniques de l'école...), et ont mis en place un plan de formation à la lumière des seuls effectifs des enseignants et des délais à respecter.
bull2.gif (117 octets)  Les objectifs de la formation ont plutôt été élaborés en termes de contenus et de connaissances à transmettre aux formés (orientations générales de la philosophie éducative, étapes de la leçon, inventaire des méthodes et des techniques modernes d'enseignement, fondements des nouvelles modalités d'évaluation...). Même lorsqu'il a été question de pratiques pédagogiques, celles-ci se sont limitées à des "leçons-modèles simulées" présentées par le formateur.
bull2.gif (117 octets)  Les enseignants convoqués à la formation n'avaient reçu aucune information préalable sur les objectifs et la nature de celle-ci, étaient choisis selon des critères demeurés absurdes, n'avaient pas le droit de révoquer leur sélection par aucun argument -et ils en avaient beaucoup-, d'adhérer à des partis politiques, et ont reçu une formation magistro-centrée. Paradoxalement, il leur était demandé de communiquer les objectifs de chaque leçon à leurs élèves, de sensibiliser ces derniers à leurs droits et à leurs devoirs civiques, de développer chez eux le sens d'engagement social et l'esprit critique, et d'adopter des démarches pédagogiques actives.
bull2.gif (117 octets)  Les nouvelles charges éducatives que l'Etat d'après-guerre s'est accordées (expliciter les finalités et veiller concrètement à leur application à travers la formation et l'élaboration d'outils d'enseignement unifiés, diffuser de nouvelles conceptions politiques et sociales à partir de l'école...) semblent être surtout léguées à l'enseignant et non pas à l'ensemble du système administratif , social et scolaire. De ce fait, tout échec éventuel de la réforme serait ramené à l'enseignant "nonchalant, peu motivé, non-collaborateur".
bull2.gif (117 octets)  Tout indispensable qu'il apparaît dans une période de restructuration de la conjoncture socio-politique nationale, le manuel scolaire de l'éducation civique risque de se transformer en un outil d'assujetissement de l'enseignant d'une part, et d'homogénisation des individus d'autre part.
bull2.gif (117 octets)  Au cours de l'année 1999-2000, certaines lacunes ont été comblées lors de la formation des enseignants (deuxième année du cycle secondaire) à la lumière des remarques émises par les enseignants de la première année:
bull2.gif (117 octets)  Le plan de formation a été réajusté (plus de travail méthodologique, formation à l'évaluation), mais l'effectif de chaque groupe ne se prêtait pas à une application effective des méthodes actives.
bull2.gif (117 octets)  Les contenus des manuels ont été allégés et les guides pédagogiques ont proposé à l'enseignant plusieurs alternatives au niveau des méthodes et des techniques de travail, alors qu'ils se contentaient auparavant de décrire scrupuleusement la démarche d'une leçon.
bull2.gif (117 octets)  Les critères de sélection des enseignants ont été plus rationnels (niveau de formation universitaire, expérience pédagogique adéquate, âge...).
bull2.gif (117 octets)  Cependant, les coupures budgétaires ont sévèrement touché le secteur éducatif en cette année, et se sont traduites en une diminution des effectifs d'enseignants à former et de la durée de la formation.
bull2.gif (117 octets)  Ces observations mènent indubitablement à des interrogations de fond :
bull2.gif (117 octets)  L'absence de concertation entre les partenaires sociaux et éducatifs dans l'élaboration de ce curriculum ne risquerait-elle pas de transformer l'éducation civique en un nouveau terrain de discorde sociale mal gérée ?
bull2.gif (117 octets)  La désintégration du plan de formation au niveau de la formulation et de l'application des objectifs mènerait-elle éventuellement à un relâchement du souci initial de rapprocher les démarches pédagogiques et les concepts socioculturels des divers enseignants et dans les différents établissements du pays ?
bull2.gif (117 octets)  Les restrictions des droits à l'expression, à la revendication et à l'engagement politique de l'enseignant, et les perceptions des responsables administratifs quant au manque d'engagement professionnel de celui-ci n'iraient-elles pas à l'encontre de l'éducation à la démocratie, à l'autonomie et à l'esprit critique qu'il lui est demandé de développer en priorité chez le jeune ?
bull2.gif (117 octets)  Le décalage entre les grandes ambitions du curriculum d'une part, et leur opérationalisation modeste d'autre part ne pourrait-il pas prendre la réforme au piège du seul changement des contenus et d'une nouvelle sujétion pédagogique au manuel scolaire "idéologisant" ?
bull2.gif (117 octets)  Les contrastes entre les réticences des enseignants et des directeurs d'écoles à l'égard de ce curriculum d'une part, et les attentes élevées de l'Etat qui les appelle à modifier le comportement des jeunes, à assumer les nouvelles charges éducatives de l'Etat-éducateur, et à mener à bien la réforme pédagogique d'autre part, ne nécessiteraient-ils pas de redéfinir ensemble les profils de l'enseignant et de l'école ainsi que leurs nouveaux pouvoirs ?
bull2.gif (117 octets)  L'éducation civique et patriotique pourrait-elle se réduire à une simple discipline d'enseignement n'impliquant que le dispositif scolaire ? Ne serait-elle pas une pensée renouvelée au quotidien et le fruit d'une lutte intellectuelle permanente ? Ne se forge-t-elle pas à l'image de chacun dans son unicité se refusant à tout cadrage rigide? Ne concerne-t-elle pas autant l'enseignant que le responsable politique, les familles, les organismes locaux, l'école parallèle...?
bull2.gif (117 octets)  Croit-on vraiment à l'opportunité d'un changement socio-éducatif qui se fait ans l'implication active et l'approbation de celui "qu'on veut émanciper" ?
bull2.gif (117 octets)  Mots-clés : Formation des enseignants; Education civique; Droits de l'enseignant; Etat-éducateur; Concertation socio-éducative.