Le comportement scolaire des jeunes a changé : leur capacité d'écoute étant fortement sollicitée, il est nécessaire de trouver des moyens nouveaux pour retenir leur attention. J'ai cherché à savoir si une approche de l'enseignement fondée sur la théâtralité, pouvait jouer un rôle important dans l'apprentissage des élèves et dans l'amélioration de la situation pédagogique.
  Pour travailler cette hypothèse, je me suis tout d'abord attachée à comparer le métier de comédien et celui d'enseignant. J'en ai retenu l'élément commun le plus large, le plus englobant et le plus essentiel à mes yeux : la présence. J'ai été tentée de définir ce concept de quatre façons (par ses composantes, ses caractéristiques, ses effets et les concepts voisins) pour en comprendre les mécanismes, afin de proposer des pistes de réinvestissement dans le processus de formation des maîtres. Les définitions ainsi élaborées sont inspirées des discours des professionnels et de ceux des théoriciens de la langue.
  Ma recherche empirique s'est élaborée à partir de données qualitatives, collectées par le biais d'interviews d'une population mixte de professionnels du théâtre et de l'enseignement, et selon le modèle proposé par Huberman et Miles (1985). Elle tient compte de ce qui est dit et non pas de la manière dont la chose est dite, cela afin de pouvoir additionner les aspects représentatifs. Ainsi, le particulier peut-il prétendre décrire le général. Mes observations se portent donc sur cette représentativité du discours.
  Dans un troisième temps, j'ai rapproché les résultats de l'analyse empirique avec ceux de l'analyse théorique afin de traiter de l'ambiguïté, de la relativité et de l'intensité de la présence. De ces croisements est ressortie l'idée que le professionnalisme serait en liaison directe avec la théâtralité et ainsi fondé sur une dialectique entre l'être et le paraître, sur une dynamisation entre absence et présence, privilégiant la notion de "distance", vecteur commun à la théâtralité et à la présence.
  Je pense que le cursus de formation des maîtres peut prendre appui sur la formation de l'acteur pour prévoir un travail sur trois écarts - écarts correspondant au triangle pédagogique -, à savoir : la distance avec la matière enseignée, la distance avec la fonction et la distance avec les élèves. Ainsi elle tiendrait compte non seulement du développement du savoir et du savoir-faire, mais également du savoir-être pour former un professeur nouveau qui s'inscrirait dans un courant pédagogique non encore défini qui pourrait se nommer "la présence pédagogique".