INSTITUT FRANÇAIS DE L'ÉDUCATION

   Vous êtes ici : Résultat de la recherche » Revue

Presse de l'éducation

Recherche


Titre : Université (L') libre

Sous-titre : Organe de la section universitaire du Front national pour l’indépendance de la France puis Organe des comités universitaires du Front national puis Comités universitaires du Front

Date(s) :

1940 - 1947

Organe :

Commentaire organe : Le Front national est un mouvement de résistance fondé en mai 1941 par le Parti communiste français. Il est dirigé en zone nord par Pierre Villon (qui représenta son mouvement au Conseil national de la Résistance le 7 mai 1943) et par George Marane en zone sud. Pendant la période clandestine l’influence non clairement affichée du Front national communiste a été prépondérante, mais, en 1945 celle-ci a été remise en cause. Le Front national universitaire (FNU) et les comités universitaires se transforment en Union française universitaire qui n’adhère plus au Front national mais est rattachée au Conseil national de la Résistance (CNR) dont elle adopte la Charte du 15 mars 1944.
En 1941, L’Université libre devient l’organe des comités universitaires des zones sud et nord du Front national.

Responsable(s) : La revue impulsée par des intellectuels communistes est fondée en octobre 1940 par les professeurs d’université, Jacques Salomon, Georges Politzer et Daniel Decoudemanche dit Jacques Decour, tous les trois fusillés au Mont Valérien en 1942. À la fin de 1940 Jacques Salomon est remplacé par Pierre Maucherat qui assure l’édition du journal, diffusé clandestinement jusqu’en octobre 1944. C’est à cette époque, que dans la revue, apparaissent les noms de ses fondateurs.
Il semble que Jacques Salomon puis Pierre Maucherat furent « les chevilles ouvrières » de la revue pendant sa période clandestine. À partir de 1944, directeur de la revue : C. Delangre puis M. Thiédot ; rédacteur en chef : A. Adler.

Description matérielle : Parution irrégulière puis bimensuelle. 32 cm, 50/120 p., gratuit puis 70/130 F ; tiré à 500 exemplaires en 1941 ; ronéotypé puis imprimé.

Lieu(x) d'édition :

Editeur(s) :

Commentaire édition : Siège social : 47 bd Saint-Michel.

Objectif : Objectif du Front national universitaire.

« Tous unis dans le Front national de l’indépendance de la France.
Un événement politique d’une importance capitale pour l’avenir de la France s’est produit au début de juillet : des dirigeants qualifiés des organisations ouvrières et des groupements politiques français, des mandataires autorisés des milieux paysans des diverses régions, des délégués des classes moyennes, des personnalités éminentes de l’Université, de la science et de l’art français, - libre-penseurs, personnalités catholiques bien connues, membres du clergé, fidèles de l’église réformée, communistes - se sont réunis quelque part en zone occupée pour fonder le Front national de lutte pour l’indépendance de la France. Ils ont nommé un comité d’organisation qui a adressé un appel au pays. L’Université libre, certaine d’interpréter les sentiments de tous les universitaires et intellectuels français, salue avec une joie immense la naissance du Front national » (n° 27, 25 juillet 1941).

« Il y a surtout deux caractères distinctifs du Front national qui doivent attirer l’attention de tous les universitaires, au moment où leurs groupes de résistance s’organisent et se fédèrent à travers tout le pays. D’abord le Front national est le seul mouvement de résistance qui ait constitué à côté de groupements sur la base géographique, des groupements sur la base professionnelle, groupes de paysans, de commerçants, d’industriels, d’ouvriers, d’intellectuels aussi. Front national de juristes, front national de médecins, front national d’écrivains, peintres sculpteurs » (n° 94, 1er mai 1944).

« Trois ans de Front national. Le jour J... c’est aujourd’hui. Réunis dans une ville de la zone sud le 25 avril 1944, les comités de résistance des professeurs (secondaire et supérieur) décident de se constituer en Comité national universitaire et d’adhérer au Front national » (n° 96, 1er juin 1944).

À partir de 1944 l’objectif du Front national indique notamment qu’ « il faut donner aux enfants français la possibilité effective de bénéficier de l’instruction et d’accéder à la culture la plus développée, quelle que soit la situation de fortune de leurs parents, afin que les fonctions les plus hautes soient réellement accessibles à tous ceux qui en auront les capacités requises pour les exercer, et que soit ainsi promue une élite véritable, non de naissance, mais de mérite, et constamment renouvelée par les apports populaires […].
Nous assurons au nom du Front national universitaire, le gouvernement provisoire de la République et son nouveau ministre de l’Éducation nationale de notre dévouement total » (octobre 1944).

« Le Front national universitaire et les comités nationaux des professeurs et instituteurs disparaissent pour se fondre dans l’Union française universitaire ! […] Même but, mêmes principes de part et d’autre. Les différences étaient des différences de structures […] la seule difficulté était la question de l’adhésion au Front national. Le FNU était partisan de cette adhésion. La plupart des Comités nationaux s’y opposaient. La solution a pu être trouvée parce que les adhérents du FNU ont préféré rester fidèles à l’esprit plus qu’à la lettre du Front national et parce que les adhérents des Comités nationaux ont proclamé que la Charte de la Résistance était à la base de leur action. L’Union française universitaire ne sera donc plus rattachée directement au Front national. Elle proclame son rattachement à la Charte de la Résistance qui sera la base de ses futurs statuts. Elle fait plus encore : elle se rattachera directement au Conseil national de la Résistance par un moyen ou par un autre, qu’elle soit « considérée » comme « conseiller universitaire » du CNR, par les grands mouvements de résistance ( FN, MLN, OCM) soit enfin, si ces solutions ne sont pas possibles, qu’elle délègue au CNR - chaque fois que se posera une question importante - un membre du Comité directeur pour représenter son point de vue » (E. Lablénie, 5 avril 1945).

Et de la revue.

« L’Université reprend conscience d’elle-même, de sa force, de son rôle historique dans la nation. Dans les heures tragiques que nous vivons, l’Université a retrouvé son unité, la claire compréhension de sa mission de progrès dans la liberté. C’est un sursaut d’indignation qui a secoué maîtres et étudiants quand ils ont appris l’arrestation de Paul Langevin par les autorités d’occupation. Ils ont tout de suite saisi que c’était là le premier signe de l’offensive brutale qui allait être déchaînée par le « gouvernement » de Vichy, contre tous les maîtres suspects d’être de bons serviteurs de la science et de leur pays […].
[L’Université] est unanime dans sa volonté de continuer envers et contre tous la grande tradition de la culture dans la liberté qui fut et qui reste celle de l’université française.
Mais cette unanimité manque de possibilités d’expression : autour de nous rien que des journaux vendus, fabriqués à Berlin, traduits à Paris. C’est pourquoi nous nous efforcerons de publier, en dépit des difficultés de toute sorte, L’Université libre, qui, nous le désirons fermement, sera l’interprète de cette volonté unanime de l’Université. Notre journal resserrera nos liens, il fera des étudiants et des professeurs de toute l’université un bloc contre lequel tous les efforts des ennemis de l’université échoueront. Il dénoncera leurs manœuvres, il stigmatisera impitoyablement les trahisons.
Au pays de Descartes la raison restera victorieuse. Vive l’université française libre » (n° 1, novembre 1940).

« Notre mission
La jeunesse dont la France opprimée a besoin est une jeunesse capable de tenir tête à l’ennemi et de poursuivre la lutte jusqu’à la victoire totale. Former cette jeunesse à la lutte implacable contre l’ennemi, former la jeunesse de la victoire, telle est aujourd’hui notre mission. Nous avons toujours donné un enseignement français. C’est pourquoi l’ennemi nous hait particulièrement. Il a déjà élaboré un plan de germanisation des écoles et les nouveaux décrets de Carcopino ne sont qu’un premier pas. On veut nous charger de l’horrible besogne qui consisterait à extirper de la jeunesse française la fierté nationale, l’esprit des libertés et la volonté d’indépendance […]. Sous le régime de terreur allemande notre chaire devient un poste de combat » (5 octobre 1941).

« L’Université libre qui a été l’âme de la résistance universitaire, veut être l’âme de ce relèvement. Elle a, quand il y avait danger à le faire, parlé avec une rude franchise. Elle conservera dans son action cette passion de vérité qui a fait sa force et continuera à dire (et à crier si il le faut) qu’un chat est un chat et un collaborateur un traître qui doit être châtié. Quand tout marchera bien, elle s’en réjouira. Quand les choses n’iront pas, elle criera “casse-cou !” et indiquera la route qu’il faut suivre dans l’intérêt national » (5 octobre 1944).

Contenu.

Compte tenu des circonstances particulières qui ont présidé à la naissance et à la vie de la revue, deux périodes peuvent être distinguées dans son contenu : celle, assez confuse, de la parution clandestine et de l’occupation allemande et la période de l’après-guerre. Au cours de son existence le journal reste fidèle à ses idées démocratiques et aux principes de laïcité et de liberté concernant la politique de l’éducation et la reconstruction de l’État français.

Pour les deux périodes :
– Idéaux défendus par les Comités universitaires puis le Front national universitaire pendant l’Occupation et dans le cadre de l’après-guerre.
– Vie et évolution du mouvement de résistance universitaire dont les étapes peuvent se résumer de la manière suivante : création spontanée en octobre 1940, organisation en Comités universitaires rattachés au Front national (FNU) à partir de sa création en 1941 puis transformation en Union française universitaire (UFU), non rattachée au FNU, à partir d’avril 1945. Mots d’ordre aux militants, comptes rendus des réunions clandestines et des congrès.

Période clandestine :
– Articles concernant la lutte dans le domaine de l’Instruction publique :
1) Informations sur les atteintes portées au monde enseignant (professeurs, élèves, instituteurs) conséquemment à la victoire allemande, à l’occupation de la zone nord puis de la zone sud et à la mise en place de la politique du gouvernement de Vichy. Citons principalement, les premières attaques des Allemands et du gouvernement de Vichy en octobre et novembre 1940 comme l’arrestation du physicien Paul Langevin, qui a déclenché le regroupement des universitaires et la création de la revue (celle-ci n’a pas cessé de se battre pour la libération de Paul Langevin et son départ en Union soviétique qui l’a invité), les événements du 11 novembre 1940 et la mise à pied du recteur de Paris Gustave Roussy puis celle des enseignants juifs, l’attitude de Frédéric Joliot-Curie qui abandonne son laboratoire plutôt que de travailler sous surveillance allemande, les dénonciations et arrestations d’universitaires, d’élèves et d’otages fusillés.
2) Renseignements sur la vie de l’université en temps de guerre. Dénonciations des brimades infligées à l’université (fermeture de l’Université de Paris réouverte le 19 décembre 1940 seulement, fermeture de la bibliothèque Sainte-Geneviève pendant les vacances de Noël), sur la « mise au pas » et la « germanisation » de la politique de l’enseignement du gouvernement de Vichy aux ordres de l’Allemagne.
3) Critiques véhémentes des nouvelles nominations au ministère de l’Instruction publique et dans les rectorats (« Quatre ministres en six mois après Rivaud, Mireaux, Ripert c’est Jacques Chevalier », « Carcopino le jésuite », le Rektor), lutte contre l’instauration d’un quota d’élèves juifs, contre les atteintes à la laïcité et la promulgation de lois favorables à l’enseignement libre, contre la réorganisation de l’enseignement et la modification des programmes, « le bachot français au rabais », lutte pour des augmentations de salaire, etc. Dénonciation de listes d’ouvrages et d’auteurs (Baudelaire) mis à l’index.
4) Mots d’ordre comme « Appel à la grève nationale contre la barbarie nazie » : Georges Lalet, 20 ans, étudiant à la Sorbonne et Guy Môquet, 18 ans, élève au lycée Carnot, ont été fusillés.
5) Dénonciation d’enseignants collaborateurs et de scientifiques défendant des thèses douteuses (Alexis Carrel : « détrousseur de la science » ou « gangster de la science »).
– Articles concernant l’état de guerre et la lutte contre l’occupation nazie :
1) Commentaires et dénonciation des mensonges de la « presse traduite » (écrite à Berlin et traduite en français). Mise en évidence des tromperies vichyssoises qui visent à faire croire que les décisions prises par le gouvernement servent la France et non l’Allemagne.
2) Attaques contre les mesures du gouvernement de Vichy et leurs conséquences pour la population. Dénonciation des mouvements d’enrôlement des jeunes (camps de jeunesse, la légion de Déat et Deloncle) et de leurs responsables, dénonciations des hommes de Vichy comme Déat, Doriot, Darlan.
3) Informations sur les dangers du nazisme avec un article intitulé « Succursales » montrant que dans tous les territoires occupés par les soldats allemands, le national socialisme introduit méthodiquement ses organisations, et la barbarie allemande.

Période à partir de la Libération :
– Réflexions sur la fin de la guerre : « comment finir la guerre ? », « préparons-nous pour la paix » ; informations sur le positionnement du mouvement dans le paysage politique de la dernière année de la guerre et de l’après-guerre. Le mouvement et la revue qui militent pour l’unité de la résistance se détachent du Front national et défendent les idées de la « charte » adoptée par le CNR en 1944.
– Articles appartenant au domaine politique sur la réorganisation du monde.
– Grandes enquêtes sur l’état du pays et certains de ses secteurs dont celui de l’enseignement « l’état de l’enseignement en Indochine », « l’enseignement du français à l’étranger », etc.
– Renseignements et prises de position sur le ministère de l’Éducation, sur l’épuration et la réintégration des personnels mis à pied pendant la période précédente, sur la lutte pour un retour à la démocratisation, pour la laïcisation et l’éducation populaire.
– Réflexions, suggestions et commentaires sur tous les aspects de la reconstruction scolaire : la réforme de l’enseignement, la vie scolaire et universitaire (les financements, l’architecture, les différents enseignements, les disciplines, les manuels, la pédagogie, la formation des enseignants, leurs traitements, les problèmes de rentrée, etc.), l’éducation populaire et la culture. Indications sur les réformes de l’enseignement dans les autres pays.
– Nombreux articles d’ordre culturel concernant les sciences, la médecine, la littérature et les arts, la philosophie.
– Articles sur les intellectuels, universitaires, « héros » résistants, arrêtés, déportés, exécutés, sur leurs actes de bravoure (commémoration des fusillés), le retour des camps mais aussi sur la vie des universités pendant la guerre (l’université de Strasbourg, la résistance des enseignants et des étudiants aux Pays-Bas, ...).
– Révélations, anecdotes, mises au point sur la période clandestine de la revue : les conditions matérielles de l’édition et de la distribution (il fallait deux jours pour publier les 500 exemplaires par numéro de 1941, compte tenu de la vétusté de la ronéo).
– Revue de presse, rubrique « Quand on riait sous l’occupation », photographies.

Mot cle(s) :

Cote : Cote BnF : Res G. 1470 (393) (octobre 1940 - août 1944), microfilm Fol. R. 727 (mai 1944 - 1947).